Citations de Jean-Charles Pichon (201)
Le manquement au père et à la mère, l’emploi de balances fausses dans le commerce, la division des « familles unies » y sont prohibés, tout comme le vol et même l’incitation au vol, le meurtre et le culte des enchantements (gémiques). On peut dire que les Tables de la Loi sont nées à Babylone vers -1730.
Une période matérialiste […] peut être placée sous le signe d’une tendance majeure, à chaque fois différente ; mais elle se reconnaît à ces trois caractères : la notion rationalisée d’une forme de salut personnel, un accroissement soudain de la population, un orgueil d’abord modéré, puis anormal, puis démentiel, vite retombé en désespoir.
Comment le dieu-cercle a-t-il contenu le monde, sans que le monde lui préexistât ; ou n’était-il primitivement qu’un « contenant vide » ? Mais qu’est-ce qu’un contenant qui ne contient rien ? Et, si le monde lui préexista, qu’était cette espèce d’existence qui, par définition, n’aurait pas eu de forme ?
[Concernant la 1e décade de Juin (1800/1860)]
Les opposants aux nouveaux mythes, bourgeois, ne sont pas des occultistes, désormais ridicules, mais des républicains, des « socialistes » fidèles à leurs trois flèches d’Air : la Liberté, l’Egalité et la Fraternité.
Comme les patriarches, Abraham et Jacob, durent combattre la tentation de la Barque –ou celle du Bien- pour arracher le Cercle (devenu le Foyer) à son élément d’Eau et l’intégrer au vrai, non seulement Paul mais le Christ devront combattre la tentation de la Liberté pour arracher le mythe de fraternité à son élément d’Air et l’intégrer au Bien. C’est le sens ésotérique des Trois Tentations où l’on voit le Démon défier le Sauveur de se délivrer de la faim, de la peur et de la servilité ; car le Libérateur changera les pierres en pain, il se jettera du haut du temple et les anges le porteront, tous les royaumes terrestres seront les siens.
Dans la mesure, ainsi, où le Coran saisit toutes les structures panthéistiques, il sera le fondement du Chî’isme et de ses divisions ; dans la mesure où il proclame le Dieu unique, il sera le fondement de l’orthodoxie sunnite. Voilà qui est simple et clair. Mais peut-être trop clair et trop simple.
Le Chî’isme s’appuiera-t-il sur les 12 signes ou sur les 7 cieux du Voyage ? S’il s’appuie sur les 7, sera-ce sur les 7 qui fondent le dieu ancien ou sur les 7, tout autres, qui annoncent le Futur ? A l’inverse, si le Sunnite n’adore que Dieu en soi, comment le nommera-t-il ? Le Créateur ou le Souverain ? Le Juge ou le Miséricordieux ?
Aux trois schismes, duodécimain, septicimain traditionnel et septicimain messianique s’opposeront ou s’allieront tour à tour autant d’orthodoxies qu’il y a de dieux possibles : omeyyade, abbaside, persan, turc.
L’athée rationaliste dira que l’être vivant demeure soumis à l’entropie, puisque toute vie n’est qu’une approche de la mort. Mais, sous la forme de l’embryon, du germe ou du fœtus, l’être vivant est également « quelque chose » qui s’organise et tend à une néguentropie.
Or, précisément –cela est remarquable- la flèche du temps « passé-avenir » paraît alors s’inverser : le fœtus n’évolue pas d’un passé inexistant vers un avenir inconnu. Il subit un appel, l’attraction d’une « surcause », l’être qu’il doit devenir –et ce devenir commande tous ses actes présents, car il leur préexiste.
Sur tous les plans, l’information fait l’entropie, et il n’est personne qui ne le sache.
Les nombres « nuptiaux », des générations divines : 2154, et des générations humaines : 1254 et 900, ont hanté Platon toute sa vie. Après avoir tenté de leur donner une base mathématique, dans la République, il tentera de leur donner une base cosmologique dans le Politique, puis d’en créer une figure géométrique dans le Timée.
[…] le rationalisme se présente toujours comme un progrès définitif sur l’obscurantisme médiéval : il n’est donc pas question qu’il s’étudie lui-même, dans ses prolégomènes ou dans ses origines.
Une petite pièce monsieur ? Je lui donnai la pièce et caressai sa joue (il m’était apparu qu’elle quêtait autre chose qu’un peu de monnaie).
-Pourquoi faites-vous ça, Monsieur ?
-Parce que vous êtes belle.
Je montai dans la rame que je voulais prendre et qui partit. Mais, sur le quai, la femme frappait contre la vitre, des larmes coulaient sur ses joues. Elle tapait et criait : Belle !... Puis, elle s’est accrochée à la poignée de la porte, essayant de l’ouvrir. Elle est tombée, la rame la traînant. […]
Il y a des mots qu’il ne convient pas de prononcer. Il y a des rencontres, elles sont nombreuses, qu’il conviendrait de ne pas faire, de la nuit plutôt que du jour. Il y a des circonstances de la vie qui ont toute l’apparence du rêve. Il y a des portes à ne pas ouvrir, dont on ne sait pas très bien de quel côté elles béent.
Comme si le moindre objet, tout message obéissait d’abord à quelque cycle : lorsque Mercure revient plusieurs fois dans l’année, le parcours de Saturne exige trente ans.
72 10 Nous ne savions même plus si le destin des mortels est de se perdre ou de se sauver.
Dès que l’Observateur ou la Personne auront opté pour l’un ou l’autre choix [la raison ou l’inconnu], ils seront en présence de trois réalités : celle qu’ils auront choisie, celle qu’ils auront rejetée –et l’univers qui leur demeurera extérieur et qu’ils saisiront globalement.
L’homme libre peut […] se retenir de respirer pendant quelques secondes ; il peut dormir le jour, veiller la nuit ; même, il peut aujourd’hui, par une technique appropriée, obtenir plusieurs récoltes dans l’année, avoir chaud l’hiver, frais l’été. Mais, en aucun cas, il n’a infirmé les cycles en question.
L’Observateur [l’homme rationnel] est en révolte contre la Durée permanente : Dieu. Il est également l’artisan de son malheur –et l’on a vu que l’histoire fournit de forts arguments à l’appui de cette thèse. Il est enfin aux antipodes de la réalité, puisqu’il ne cesse de s’éloigner de son but –la néguentropie dont il ressent le besoin.
Le dieu ne disparaît pas d’un ciel, mais du cœur de l’homme et de ses mœurs. Il n’y a plus de juge, de patriarche, de justicier, quand il n’y a plus de responsabilité possible. Or, le fonctionnariat interdit le Responsable ; le socialisme le craint ; l’Egalité le condamne. Ne faut-il pas se croire différent des autres pour oser assumer leurs droits et leurs devoirs ?
Les temps matérialistes ou entropiques ne se préoccupent point de l’algèbre mythique, que précisément ils nient. Mais, d’une autre façon, en achevant de détruire ou de rationaliser les mythes antérieurs, ils libèrent l’esprit de toutes les vieilles croyances devenues superstitieuses
Ce demi-siècle est d’une exceptionnelle richesse (1510-1566). Rabelais n’a pas à chercher bien loin Pantagruel et Gargantua : les empereurs et les rois ont cette taille surhumaine. Gros buveurs, grands mangeurs, trousseurs et conquérants, ils ont une ambition à la mesure de leurs désirs, et des désirs à la mesure de leur appétit.
Une expression a pu souvent choquer le lecteur : « en cette époque, tel mythe apparut ou disparut, tel dieu entra dans son « aurore » ou dans son « crépuscule »… » Mais il n’est pas d’autre expression possible du phénomène mythique.