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Citations de Jean-Yves Jouannais (34)


La Bibliothèque Brautigan, aux Etats-Unis, à Burlington dans le Vermont, est constituée de livres refusés par les éditeurs
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le silence se dote d'une qualité éminemment musculaire, incisive et dynamique
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3. Le silence est un muscle
4. L'ascétisme olympique
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Devant le pont, le sol était littéralement jonché de chevaux et d’uniformes verts et rouges. Partout, des corps d’hommes et de chevaux jonchaient le sol, faisant parfois déborder l’eau des fossés devenue rougeâtre. Les jeunes hussards bleus sont couchés dans la neige. Maintenant ils mouraient dans la neige, sans souffrance, et faisaient du blanc manteau un sorbet à la framboise. C’est un soldat, ce tas bleu ? Enfant aux mains coupées parmi les roses oriflammes. Horrible ! Son corps étendu, tête fracassée, à moitié vide, de la cervelle comme une mousse rose. Il roule de gros yeux abasourdis et il souffle de l’écume. Sa bouche et le bas de sa figure sont entourés bientôt d’un nuage de bulles roses. La douleur et le choc se mêlaient dans ses larmes, qui traçaient deux lignes roses sur ses joues tachées de graisse. A la hauteur du cœur une large tache rose. Vers mon cœur se précipite un flot aux teintes jaunâtres, pareil à celui qui, chez les guerriers abattus, accompagne les dernières clartés de la vie, à l’heure où la mort vient à pas rapides. Il a deux trous rouges au côté droit.
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En ce temps-là, la guerre couvrait Ecbatane. Et il suffisait peut-être de l’ordre d’un seul homme pour allumer sur le sol de presque toute la Gaule, les mêmes foyers d’incendie qu’au printemps, aux abords d’Avaricum. Alors l’incendie gagna en vitesse. La marche à la guerre s’était faite plus rapide. Les esprits ont changé : chacun presse ses armes. On est prêt pour la guerre et toutes ses fureurs. La guerre parut alors à tous inévitable. Le mot fut prononcé, gros de morts éventrés, de dames dépouillées, de pauvres belles filles sans robe ni manteau sur leurs épaules froides. Et là, la guerre a éclaté.
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– C’est incroyable ce genre d’obsession, la tienne je veux dire, cette folie de la collection.
Il parlait de ce qu’il croyait connaître de ma dépendance aux livres. Je lui répondis qu’il se trompait. Lui, il était passionné par l’art contemporain. C’était non seulement son métier, mais aussi sa passion. Il y croyait, ne s’était jamais forcé pour y croire. Et ce qui le bouleversait dans l’art, c’était la vie des artistes, d’imaginer et de s’approprier ce qu’ils voyaient du monde. Moi, au contraire de lui, je n’étais fasciné par rien. C’était un regret. C’était à pleurer tant je le regrettais. Que ce soit la guerre, l’amour, la politique, ou tout autre chose – dont les livres -, je n’étais envoûté par rien. J’avais justement souffert de n’avoir jamais vécu sous le joug d’une addiction.
– Je ne collectionne rien à titre personnel. Je ne réunis aucun type d’objets, d’émotions, d’expériences, de rêves qui me seraient propres. C’est pour cela que j’acquiers les collections des autres. C’est le cas avec les livres de ce Hans Reiter. Je ne sais pas quel ensemble ils forment, ce qu’ils signifient ensemble. Mais c’est justement parce que je ne crois pas être cela, un collectionneur, que j’essaie d’éprouver un peu cette réalité de la dépendance, en tout cas de l’approcher, en accaparant les collections des autres. Je ne suis fétichiste que par procuration. Alors, ces ensembles, je les regarde, je tente d’éprouver la passion qui a concouru à leur constitution, l’obsession qui, chez un autre, les a fait naître.
– Mais pour ta nouvelle collection, qui n’est pas à toi, enfin qui n’est pas de toi, tous ces livres qui parlent de guerre, tu as bien des hypothèses sur ce qui les réunit.
– Non, franchement, je n’y comprends rien. En tout cas, ce qui m’arrête, moi, dans ces livres de guerre, ce n’est jamais la guerre. C’est un paquet d’anecdotes sans pedigree qui papillonnent apparemment au hasard, dont on ne sait pas si elles ont éclos sur un champ de bataille ou dans une fête foraine. Je lui racontai l’une d’entre elles, piochée dans une sorte d’encyclopédie populaire des animaux de guerre – un livre moche et mal imprimé -, un inventaire d’expériences plus ou moins loufoques tentées sur nos amies les bêtes. J’y avais découvert l’existence d’un certain Louis Ferrier, professeur de chimie à l’université de Harvard qui, dans l’entre-deux-guerres, avait oeuvré pour mettre au point l’arme miracle. Son programme consistait à équiper des chauves souris de bombes incendiaires très puissantes pour l’époque, ne pesant que cinq grammes et équipées d’un système de retardement.
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Revenu d’Allemagne, je voulus prendre le temps d’expertiser cet échantillon de bibliothèque martiale, en saisir l’esprit et la logique. J’annulai tous mes rendez-vous, fermai les volets. Dehors, le froid était intense. Mais surtout, la couleur de tourbe de la pollution infusait dans un brouillard constant. Aucune clarté n’entamait ce cloaque. Le silence plombait. Seuls des coups de feu parvenaient à faire relief par instants, à s’incruster dans ce mou du temps. Je commençai à lire un ouvrage consacré à Fort Alamo, d’un certain Walter Lord. Lecture distrayante, sans attente, confortable et irritante de ces livres où la littérature n’est ni attendue ni invitée, où les phrases n’excèdent leur fonction que rarement, par accident (…).
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À 4 heures du matin, un taxi vint me prendre en bas de chez moi. Les rues étaient désertes. On n’entendait que les arbres violentés par des bourrasques discontinues. Un chien aboyait aussi. Sûrement celui d’un SDF abrité sous un pont aux alentours. Ou peut-être très loin, le silence étant si étonnamment parfait, comme dans ces villes russes où, dans la nuit, sous la neige, on est estomaqué d’entendre, au fond d’un faubourg, chanter un coq comme si l »on se fût trouvé aux abords d’un village. Une brume flottait à la surface du canal. Au milieu de l’eau, un objet tressaillait au gré des clapotis. C’était dressé vers le ciel. Du bois, semblait-il. Pinocchio recraché par la baleine, mais mort. M’en approchant, je reconnus la quille d’une maquette de voilier. J’avais vu ces derniers jours un homme très âgé, à cet endroit, jouer avec un magnifique galion télécommandé. Le bateau avait peut-être chaviré. Aussi était-il resté en rade au milieu de l’eau. L’homme avait dû, la mort dans l’âme, abandonner là son cinq-mâts à la poupe carrée qu’il avait mis des mois à assembler. Ses canons en laiton avaient dû tomber lentement au fond du canal, et le navire hoqueter à la surface de l’eau tandis qu’il se délestait de la masse de son artillerie. J’avais lu quelque chose là-dessus. Une maladie, du type « chute d’organes » – techniquement, on dit « ptôse » -propre aux canons des bateaux de guerre. Ainsi était mort le cuirassé Bouvet, aux Dardanelles, touché, couché, la houle s’engouffrant dans ses cheminées et puis, électrisé par une convulsion, il avait bondi, ses douze tourelles, sorties de leurs assises, l’avaient abandonné pour le précéder dans sa noyade.
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Sans plus d'ambiguïté, nous nous liguons contre l'océan, nous faisons la guerre. Elle ajoute "Il faut consolider les murs sur le côté !". La guerre est l'unique motif de notre activité. Je l'embrasse, ma fille, qui ne m'a jamais paru plus belle.
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Nina me demande quand la marée sera haute, combien de temps il nous reste. Je lui explique que "marée" désigne un phénomène dynamique, que c'est un peu abusif de dire "marée haute" ou "marée basse", qu'il vaudrait mieux dire "pleine mer" ou "basse mer", que nous avons entrepris une lutte non pas contre l'océan, mais contre son mouvement.
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« Défilé laborieux et appauvrissant que de composer de vastes livres, de développer en cinq cents pages une idée que l’on peut très bien exposer oralement en quelques minutes. Mieux vaut feindre que ces livres existent déjà, et en offrir un résumé, un commentaire. » C’est de là qu’il faut partir pour saisir le projet borgésien, lequel ne recoupe qu’en un nombre infime de points l’univers blanchotien. Pour Borges, le livre ne peut se concevoir à venir. Aussi l’ensemble des textes existant matériellement, signés Jorge Luis Borges, a moins pour fonction d’introduire un nouveau nom dans les histoires de la littérature que d’économiser mille ouvrages aux rayons de la Bibliothèque. Les Chroniques de Bustos Domecq consistent ainsi en une galerie d’artistes a priori fictifs dont l’œuvre, gigantesque pour la plupart, nous est livrée en quelques pages précises et économes. Plus Borges écrit plus il économise, non pas en réduisant le champ des possibles littéraires, mais en démontrant que ces possibles, parce que possibles, se doivent d’être considérés comme épuisés.
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Rien n'est confus, sauf l'esprit.
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