John Katzenbach

Jennifer fut prise de sanglots incontrôlables. Elle caressa la surface rêche du seul objet de son enfance qu'elle aimait assez pour l'avoir emporté en s'enfuyant de chez elle.

Au bout du compte, ils doivent dire la vérité en espérant que tout le monde comprendra qu'ils etaient obligés de mentir. Comme s'il était normal de mentir jusqu'à ce que l'évidence vous empêche de continuer...

- Et puis l'imprévisibilité. L'instabilité. Une tendance à la folie, aussi. Voilà une combinaison dangereuse, non? Un cocktail potentiellement explosif.

Nous vivons dans une société qui a totalement perverti l'idée de dénégation. Aujourd'hui, elle évoque d'emblée un mensonge de convenance qu'on se rappellera plus tard et qu'on façonnera, après avoir négocié une vérité acceptable.

Ils venaient me chercher. Je le savais, aussi sûrement que je savais que le jour succède à la nuit et que la nuit succède au jour. Je fouillai l'appartement du regard, en quête d'un cachette. Je retenais mon souffle. J'avais l'impression que chacun des battements de mon cœur faisait autant de bruit qu'une corne de brume. J'essayai de me coller le plus possible contre le mur, comme s'il pouvait me camoufler. Je sentais la présence des flics devant la porte.
Puis plus rien.
Il n'y eut pas de coups insistants à la porte.
Pas de voix criant ce simple mot, "Police!", qui se suffisait à lui-même. Le silence m'enveloppait. Une seconde plus tard, je me penchai légèrement, tendis le cou devant la fenêtre. Je ne voyais que la rue déserte.
Pas de voiture. Pas de policiers. Rien que des ombres.
Je m'immobilisai. Est-ce qu'elle avait jamais été là ?

Il avait vaguement conscience que sa maison montrait le même spectacle désolé que lui-même. La vaisselle s'entassait dans l'évier. Vêtements et linge sales s'empilaient dans la buanderie. Il savait qu'aspirateur et serpillières l'appelaient - même s'il ignorait quelle langue parlaient ces ustensiles.

- La "psychodynamique" des couples meurtriers est insaisissable. Il existe de toute évidence un élément sexuel irrésistible. Mais le lien semble plus profond. C'est ce que j'essaie de comprendre.

C'était terrible, mais en fait ce n'était que de la routine. Et c'était peut-être cela le plus terrible. Il avait assisté à la mise à mort mécanisée, systématisée.

Chacun veut que la presse se passionne pour son cas. Tous les détenus pensent qu'ils ont été mal jugés. En faisant du ramdam, ils repasseront peut-être en jugement. Ça marche parfois. C'est pour ça que la plupart des gardiens ne peuvent pas saquer les journalistes.

Un procès est censé faire la lumière, mais il peut aussi tout embrouiller.

Dans chaque crime et chaque procès qu'il avait couvert, il avait vainement cherché un accusé qui fût véritablement innocent. Il avait entendu beaucoup de verdicts de non-culpabilité, des accusations écartées par manque de preuve, des causes gagnées grâce à l'éloquence de la défense ou la faiblesse du parquet. Mais il ne se rappelait pas un seul cas d'innocence.

Je préférerais lui faire la peau tout de suite que de l'entendre raconter ces trucs ignobles qui ne lui font ni chaud ni froid. C'est des vies qu'il a prises, bon Dieu, c'est pas des bonbons qu'il a volés au supermarché.

Les gens assassinés sont toujours présentés comme discrets, que cela soit vrai ou pas. Un peu comme si les voisins éprouvaient le besoin de se dissocier de l'ignominie qui venait d'être commise.

Il s'était toujours demandé pourquoi la majorité des hommes, même confrontés à leur propre fin, persistait à se dire innocente. C'était vrai même pour les pires psychopathes, les tueurs en série qui avaient un tel mépris de la vie humaine qu'ils préféraient abattre quelqu'un que discuter avec lui; ils préservaient cette aura maléfique, à moins qu'on ne les persuadât que la confession leur viendrait en aide. L'étalage des horreurs qu'ils avaient commises prenait alors un sens nouveau, il les blanchissait, remettait les pendules à zéro.

On caille, et ça rend tout le monde complètement dingue. Tu sais ce que c'est, personne n'a de manteau d'hiver ni de chauffage à la maison. Tout le monde grelotte et devient à moitié fou, mais ça va passer.

Comme c'était dur de ne pas participer à la vie quotidienne de sa fille. Il s'imagina en train de lui verser son lait au petit déjeuner, de lui lire une histoire, le soir, avant qu'elle s'endorme, de lui tenir la main quand elle était malade, d'admirer les dessins qu'elle rapportait de l'école. Il chassa son amertume.

Celui qui combat des monstres doit prendre garde de ne pas devenir monstre lui-même. Et si tu regardes longtemps un abîme, l'abîme regarde aussi en toi.
Friedrich Wilhelm Nietzsche.

Des maisons pour cadres supérieurs. Des endroits sans âme, pour des hommes et des femmes qui gagnent de l'argent et le dépensent le plus vite possible en s'imaginant que cela signifie quelque chose.

Nous créons, se dit-il, et quand notre création tourne mal, nous en blâmons quelqu'un d'autre, alors que très souvent nous en sommes seuls responsables.

Elle était consternée par le fait que la nature criminelle de leurs activités leur interdise d’être célèbre.