Citations de Joséphine Bacon (95)
A la vieillesse
Mes jambes fatiguées
Continuent
J'avance
Un pas
Un autre
Je suis l'enfant
Des premiers pas
Le matin se lève
Je marche
Je suis aveugle
Pourtant, j'ai vu
Un dessin
Une terre nue
J'avance
Dans l'obscurité des couleurs
Il n'y a pas d'obstacle
La musique de la rivière guide mes pas
Moi seule l'entends
Je t'amène jusqu'à l'aurore
Je te regarde danser là
Où tu me rejoins
Nous partageons
Un thé
Dans la Toundra
Un réconfort
Face à l'infini
Enfant de la Toundra
Résonne mon coeur
Ta musique, la rivière
Ta lumière , les étoiles
Ton tapis, le vert tendre du lichen
Je ne sais pas voler mais tu me portes
Ta vision dépasse le temps
Ce soir je n'ai plus mal
La ville ne m'enivre plus
La vie m'amène
À la vieillesse
Mes jambes fatiguées
Continuent
J'avance
Un pas
Un autre
Je suis l'enfant
Des premiers pas
Le matin se lève
Je marche
Je n'en veux pas à la vie
De vieillir
Je ne connais pas
L'heure de mon départ
Il y a des matins
J'ai la nostalgie des rêves
Que je n'ai pas rêvés
Revoir la lumière
De l’automne
Je n’ai aucun secret
À garder
Au crépuscule de ma vie
Accorde-moi une autre saison
(p. 116)
AVANT PROPOS
Mon peuple est rare, mon peuple est précieux comme un poème sans écriture.
. . . . .
Rêve, tu m'emportes dans le monde des visions qui chantent ma vieillesse. Je suis là parce que tu es là . Et je sais que le temps est au récit.
. . . .
En écrivant ce livre, j'ai retrouvé les aînés porteurs de rêves, les femmes guides, les hommes chasseurs, les enfants garant de la continuité du voyage.
Au bout du jour
La neige tombe
Sa pureté
Réclame une nuit d'étoiles
Tu lèves les yeux
Là-haut humblement
Elles s'éclairent
Tu baisses les yeux
Elles sont tombées
Sur les épinettes
Pour t'émerveiller
De leurs éclats
Musique de mon coeur
Laisse le vent caresser la vie
Une tendresse pour un pas de danse
Une salle de bal tapissée de lichens
Et de constellations
Dessine mon infini
Où sont passés les arbres
qui poussaient quand
je grandissais ?
L'intérieur des terres
a été vidé
je pleure, je vide
mon âme
de souffle court,
assez pour respirer
La vrai terre
la forêt
qui m'appelle
je m'assois
pour trouver
la paix.
Tue-moi
si je manque de respect à ma terre
Tue-moi
si je manque de respect à mes animaux
Tue-moi
si je reste silencieuse
quand on manque de respect
à mon peuple
Je ne suis pas l'errante de la ville
Je suis la nomade de la Toundra
Mon âme a mille ans
Je n'ai pas d'âge
Je meurs d'avoir vécu. (p. 60)
Toi qui m'a
appris à être
toi qui m'a donné
le savoir,
toi qui m'a appris
à rester sur mon chemin,
dis-moi aujourd'hui
où je dois aller
afin de trouver
le sentier
des anciens
Toi qui m'as faite
gardienne de la langue,
toi qui m'as chargée
de poursuivre la parole,
je sais que tu me vois .
J'implore ton aide.
J’ai usé ma vie sur l’asphalte
Des mots me viennent
Dans une langue qui n’est pas la mienne
La nuit, l’innu-aimun
M’ouvre à l’espace
Je suis libre
Sur la terre de Papakassik
Je suis libre
Dans les eaux de Missinak
Je suis libre
Dans les airs où Uhuapeu trace une vision
Je suis libre là où Uapishtanapeu
Conserve le feu de mon peuple
Je suis libre
Là où je te ressemble
Ma douleur,
devenue remord,
est le long châtiment
qui courbe mon dos.
Mon dos ressemble
à une montagne sacrée,
courbée d'avoir aimé
tant de fois.
(MOELLE - UINN)
Mon âme a tant d'âges
Je me baigne dans une eau où je ne suis pas
Un plafond éclaire ma vie
« Parle-moi sans mot
J’aurai un silence
A t’offrir »
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« Je ne sais pas
Si j’ai plus de passé
Que de présent
Pourtant je sais
Que c’est le présent
Qui me regardera partir »
Le sommeil me rejoint
Dehors c’est l’été
Pour pas longtemps
La pluie se fait rare
Les yeux fermés
J’écoute les pas
Autour
Voix faibles
Mes soeurs
Les quatre vents
Caressent une terre
de lichens et de mousses
de rivières et de lacs,
là où les épinettes blanches
ont parlé à mon père.