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Critiques de Jules Barbey d`Aurevilly (289)
Oeuvres romanesques complètes, tome 1

N°331– Mars 2009

QUELQUES MOTS sur Jules BARBEY d'AUREVILLY [1808-1889].



La récente diffusion par France 2 de la série « Contes et nouvelles du XIX° siècle » nous replonge dans cette époque flamboyante à travers les œuvres d'Eugène LABICHE, de Guy de MAUPASSANT, Honoré de BALZAC ... Cela nous prouve que le Service Public peut aussi avoir une action culturelle, ce dont personnellement je n'ai jamais douté.



Je veux saluer cette initiative mais aussi la mise en lumière d'un écrivain un peu oublié qu'est Jules Barbey d'Aurevilly, auteur notamment des «Les Diabolique s» dont est extrait la nouvelle « Le bonheur dans le crime » diffusée sur France 2.



C'est que le personnage est original et paradoxale à plus d'un titre.

De racines normandes, la famille Barbey accède à la noblesse vers le milieu de XVIII° par l'acquisition d'une charge. La Révolution l'éprouvera durement et elle vivra dans l'espoir du retour de la monarchie. Ainsi, l'enfance de Jules se déroulera dans une ambiance conservatrice, entre une mère attentive et un père un peu austère. Quand il poursuit ses études au collège de Valogne, Jules loge chez un oncle à l'esprit libéral, docteur en médecine mais aussi franc-maçon, ce qui contribue à l'émancipation de son neveu. Ce personnage se retrouvera dans son œuvre. De même, d'autres membres de sa parentèle contribueront à son éveil intellectuel et à sa future vocation d'écrivain. Il commence à publier des vers, mais le succès n'est guère au rendez-vous. Son admission dans un collège parisien contribue largement à lui inculquer des idées opposées à celles de sa famille, il devient républicain et entame des études de droit.



En littérature, c'est l'époque du romantisme, il rencontre Hugo, mais ses tentatives littéraires sont vouées à l'échec tout comme ses amours. Pourtant, c'est de ce mouvement littéraire dont il s'inspirera dans ses premières œuvres. Lord Byron aura notamment une influence marquante sur ses premières années. La vie parisienne l'enivre, il rompt avec sa famille et mène dans la capitale la vie insouciante d'un dandy, ce qui lui vaut le surnom de « Sardanapale d'Aurevilly ». A cette époque il commence une étude sur Brummel qui parait en 1845 mais qui ne reçoit qu'un succès d'estime. Son dandysme est original en ce qu'il ne se cantonne pas à l'habit mais, au contraire, se décline dans des nuances intellectuelles toutes personnelles et originales. Brillant causeur, il multiplie les conquêtes féminines, ce qui ne sera pas sans influence sur son œuvre littéraire future [« la vieille maîtresse » qui fera scandale lors de sa parution]. Pour le moment, elle n'est guère couronnée de succès même s'il est également un intellectuel, collaborateur de divers journaux. Cela lui ouvre les portes des salons et des cercles littéraires et il revient quelque peu dans le cercle royaliste et catholique.



Il se met à voyager dans le centre de la France, se rapproche de son frère qui est devenu prêtre, ce qui l'amène sur les chemins de la conversion. Il devient rédacteur en chef de «  la revue du monde catholique », mais la révolution de 1848 le perturbe quelque peu et il semble, passagèrement, épouser la cause des mouvements ouvriers, puis abandonne les salons parisiens pour sa Normandie natale où il peaufine son œuvre littéraire. Il s'y mêle catholicisme, monachisme et pages sensuelles et passionnées. Dans le même temps, il travaille à la rédaction de « un prêtre marié », ce qui ne l'empêche pas de renouer avec la pratique religieuse.



Pourtant, ses démons journalistiques ne sont pas morts et il est engagé dans un journal, bonapartiste, celui-là, mais en qualité de critique littéraire. Il y restera 10 ans et s'attaquera aux « Contemplations » de Victor Hugo, réhabilitera Balzac, révélera Stendhal, défendra Baudelaire, combattra Leconte de Lisle et Zola, Sainte-Beuve, Gautier...

Il se révélera un polémiste attentif et de qualité, témoin et parfois contempteur de la vie littéraire de son temps, talentueux et courageux en tout cas, attaquant même l'Académie Française et gardant une fibre anti-républicaine.



Son œuvre (Les Diaboliques) scandalise, il poursuit sa démarche créatrice, ce qui lui vaut le surnom de « connétable des Lettres », et se consacre aux femmes de Lettres. Jusqu'à sa mort il continuera de publier des nouvelles, parfois remaniées. En tant qu'écrivain, il reste marqué par le goût de la provocation mais reste profondément marqué par le catholicisme (principe de l'opposition du bien et du mal, présence du personnage du prêtre...), le classicisme, mais aussi par la peinture de la vie provinciale normande et l'évocation des paysages, notamment dans ses nouvelles.

Polémiste ou écrivain, il a lui-même inspiré des personnages de romans et s'est attiré par ses critiques, sympathie ou inimitiés.

Je ne partage pas, assurément, toutes ses idées, mais j'apprécie qu'il n'ait pas suscité de l'indifférence.



L'adaptation télévisuelle d'une de ses nouvelles sera peut-être l'occasion de redécouvrir cet homme de Lettres qui fit partie intégrante des écrivains de son temps et qui l'illumina.





 Hervé GAUTIER – Mars 2009.http://hervegautier.e-monsite.com 

















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Romans

Emphatique, grandiloquent, radical et abrupt, le verbe de Jules Barbey d'Aurevilly (1808-1889) dit l'outrance avec un panache et une bravoure quasi guerrière.
Lien : http://www.lemonde.fr/style/..
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Romans

Marre de vous ennuyer, de trouver tout blême et décoloré à force de patauger dans la crise ? Marre de la mollesse, de la tiédeur, du manque général d'enthousiasme [...] Voici [...] 2 500 pages emportées de désirs, de passions, de rêves, de sensations. Hérissées de liberté et de panache. Un grand bol d'air.
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Romans

Thank you for sharing this book with us. I read from it. I appreciate the detail you covered. I am grateful for the amount of time and effort you put.
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Romans

La lecture de ses romans permet de se débarrasser de bien des a priori sur l'écrivain du trouble. Son oeuvre est noire, inquiétante, outrancière et passionnante. Elle parle d'histoire et d'enfance, de sexe et d'esthéticisme. [...] sa violence est roborative et son écriture frénétique.
Lien : http://www.telerama.fr/criti..
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Romans

Soufflée par la beauté de la langue et de l'écriture. Même les romans dont l'histoire m'a moins plu, voire ennuyée (comme Un prêtre marié) ont été lus avec un plaisir immense, pour le texte ciselé et le rythme envoûtant des phrases. La sauvagerie des sentiments, leur immoralité sont incroyablement bien rendus.

Les sujets sont divers, du jeune couple abîmé par la présence d'une ancienne maîtresse à des épisodes de la guerre de Chouans qui feraient presque penser à Dumas. L'écriture sublime, elle, reste.



J'avais prévu d'alterner les différents romans et nouvelles avec d'autres lectures pour ne pas faire une indigestion de Barbey, mais j'ai dévoré tout le volume sans pause, et en en redemandant à la fin!
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Un prêtre marié

Ayant adoré "une vieille maîtresse", livre fétiche, j'ai trouvé "Un prêtre marié" d'une écriture brillante mais au sujet vieillot et intransportable à notre époque. Pour nos esprits athées ou prudemment religieux, l'extrême piété hystérique de Calixte semble invraisemblable, grotesque et exagérée. L'auteur tourne même un peu en rond.

Les personnages cependant restent fidèles à la patte Barbey : on adhère immédiatement à leur caractère. Cela reste un livre puissant que Je n'ai pu abandonner en route.
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Un prêtre marié

Préface, Chronologie, Notes & Variantes, Bibliographie : Jacques Petit



ISBN : Non Indiqué



Dès les premières pages, on se dit : "C'est du mélo classique et architypé ..." et celui qui ne connaît pas Barbey risque de refermer le tout sans autre forme de procès. Ce serait une erreur car, nous l'avons déjà mentionné ici et là, l'écrivain normand possède, tout comme Balzac mais en plus lyrique, l'art de se saisir d'une situation fondamentalement, intimement mélodramatique pour en faire, malgré les clichés imposés par l'usage, un vrai - et un bon - roman (ou en quelque chose qui y ressemble bougrement). study



Question clichés, on peut dire qu'"Un Prêtre Marié" démarre sur des chapeaux de roues : un prêtre, Sombreval, qui, au coeur de la Révolution française, perd une foi à vrai dire pas très vive et qui se marie ; l'enfant (une fille, pauvre petite créature) qui naît très légitimement aux yeux des hommes mais sur laquelle pèse la malédiction divine - la preuve : elle perd sa mère ; le prêtre défroqué qui, sa fille adulte et pour on ne sait trop quelle raison hormis, peut-être, le désir d'en imposer à ceux qui l'ont connu jadis, vient s'isoler dans un antique château, sur les lieux mêmes de sa jeunesse et le fils (très fier) d'un châtelain (un peu moins fier parce que plus âgé) qui, badaboum ! au premier regard, tombe amoureux éperdu de "la fille du prêtre" puisque tel est le surnom que les villageois donneront très vite à la malheureuse Calixte.



Et ça, ce n'est que pour le début. Barbey continue : il roule, il déroule, il empile, il entasse, il accumule ! Pour un peu, on croirait qu'il le fait exprès.



Bien que sachant impossible sa passion pour Calixte, le jeune aristocrate - Néel de Néhou, encore un nom qui fleure bon son mélo - ne cesse de leur rendre visite, à elle et à son père. Au passage et comme de bien entendu, il délaisse la jeune fille (de très bonne famille) que lui destinaient et son père, et les convenances, à savoir Melle Bernardine de Lieusaint - ça aussi, c'est un beau nom, ça ... Ce en quoi il a bien tort car, de toutes façons, comme il l'apprend par la suite, Calixte, pour expier les fautes de son père s'est faite carmélite sans rien lui en dire et, partant, toute vie "dans le siècle" lui est interdite. Il ne faudrait pas oublier les fréquentes crises de somnambulisme qui, depuis sa plus tendre enfance, accablent la malheureuse jeune fille et contre lesquelles son père, passionné de chimie et de logique, a essayé, mais en vain, tous les remèdes possibles et imaginables. Elles font beaucoup, soulignons-le, pour l'ambiance du récit. (Plus tard, Barbey ira jusqu'au bout du sujet avec son "Histoire Sans Nom.")



Mais attention ! Si Sombreval ne croit qu'en la Déesse Raison, Barbey, lui, n'oublie pas qu'il y a plaisir à manier le mystère et à suggérer l'incompréhensible et l'inexplicable. Outre ses descriptions, sublimes et hantées, de la campagne normande, il fournit au lecteur le personnage de la Malgaigne, mi-fileuse, mi-devineresse, qui a connu Sombreval au temps où il avait pris les ordres et qui, elle le proclame elle-même maintes fois avec une tranquille résignation, sait que "le prêtre marié" ne peut échapper à son destin. Grande et sèche, bienveillante et même miséricordieuse quoique sans illusions sur ce qui est écrit, la Malgaigne, qui court la campagne avec son bâton, à la recherche des plantes nécessaires à la confection de certains "charmes", fait irrésistiblement penser à une incarnation de la Fatalité - les Anciens n'appelaient-ils pas le Destin "Fatum" ? Une incarnation magistrale, il faut bien le reconnaître, une sorte de Clotte à la puissance mille - ceux qui ont lu "L'Ensorcelée" comprendront tout de suite.



C'est ainsi, par de petites touches qui font insensiblement monter la tension ou, au contraire, par l'apparition d'un seul bloc d'un personnage aussi réussi, aussi "vrai" que la Malgaigne - laquelle aurait pu rester ce qu'elle était au départ : la sorcière plus ou moins repentie qui rôde dans l'ombre du roman pseudo-gothique et romantique afin d'y ménager des zones d'ombre bienvenues - que Barbey prend son mélo initial à bras-le-corps pour le transformer, sans difficultés majeures apparentes, en ...



... en quoi, exactement ?



C'est là que l'on s'arrête et que l'on s'interroge. Chez Barbey, outre le mélo et le lyrisme, vous devez le plus souvent compter avec une base historique (le prototype de Sombreval a bel et bien existé mais eut, semble-t-il, une vie post-révolutionnaire beaucoup moins tourmentée), un réalisme détaillé (qui atteint à son sommet dans "Le Chevalier des Touches") et puis, et surtout, avec ce quelque chose d'absolument indéfinissable, qui n'appartient qu'à son génie mélancolique et sombre, écartelé à jamais entre la flamboyance, pleine de panache, de la Damnation et la gloire, radieuse mais fadement sereine, de la Sainteté. Le faible prononcé de l'écrivain pour la première - qu'il en ait eu conscience ou non - est justement ce qui, à quelques notables exceptions près - "L'Amour Impossible" et "Ce Qui Ne Meurt Pas" - contribue à métamorphoser son oeuvre en quelque chose d'unique, sur quoi on a le plus grand mal à apposer une étiquette. Du mélo pur, Barbey rabote avec détermination les arêtes exaspérées. Les conventions gnangnan propres au genre, il les tord dans tous les sens jusqu'à ne garder d'elles que leur inexorabilité. Les types outrés, trop beaux ou trop méchants pour être vrais, femmes ou hommes, qui s'y promènent, il les retourne comme il le ferait de vieux manteaux et les retaille, les recoupe, les façonne sur un patron nouveau, fait d'orgueil luciférien pour certains, de mysticisme éclatant pour d'autres et, dans quelques cas, disons pour les personnages ayant la charge de permettre au Destin de s'exprimer, d'énigme pure, de ténèbres aussi épaisses qu'indéfinissables où se mêlent, en une étreinte inextricable, le Bien et le Mal.



En un mot comme en cent, l'univers de Barbey d'Aurevilly est glauque, glauque, glauque. Il peut passer en un seul instant du chatoiement le plus moiré à l'obscurité la plus freudienne. Le définir à la fois comme terriblement vieillot, à l'image d'une France et d'une société depuis longtemps disparues, et tout aussi résolument moderne, d'une modernité agressive et sanglante, qui en redemande dans le fantasme et l'interdit, paraît chose impossible et même des plus stupides : c'est pourtant ce qu'il est. Et c'est peut-être ce qui explique pourquoi la critique de son temps l'a si mal compris et si peu considéré. Barbey dérangeait à plus d'un titre mais sa plus grande réussite, c'est de continuer, en plein XXIème siècle, à déranger le lecteur, à titiller ses plus mauvais instincts et sa soif de mystère, à le contraindre à se poser et à se reposer tant de questions et par dessus tout celles-ci : "Qu'est-ce que le Bien ? Qu'est-ce que le Mal ? Et pourquoi ?"



"Un Prêtre Marié" ne vous apportera pas la réponse, bien sûr. Mais si vous voulez tenter sa lecture, ne vous gênez surtout pas. ;o)





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Un prêtre marié

Sombreval, prêtre défroqué revient dans le pays qui l’a vu accomplir son ministère avec sa fille à la santé maladive. La femme de ce dernier, qui ignorait sa condition d’homme de Dieu, complice involontaire de ses turpitudes mourut sous le choc de la découverte en lui laissant le fruit de son péché, cette Calixte qu’il aime plus que tout au monde, comme aime une mère. Scandale vivant, renégat, athée, objet de l’exécration du voisinage, il est, tel le Diable, remplit de l’orgueil du révolté et de sa science de la chimie. N’ayant plus la foi, il cherche par la science, à sauver sa fille angélique, qui se meurt paradoxalement, la fervente croyante, de l’atroce poids de culpabilité que représente la vie de son père. Elle, qui dans le secret de son cœur, s’est fiancée au Christ en prononçant ses vœux de carmélite, dans l’espoir de racheter l’âme de son père, voit celui-ci feindre un retour à dieu et le repentir sincère, encourant la damnation éternelle pour sauver la vie terrestre de cette fille, son seul objet d’adoration, à lui, l’apostat.

Un roman qui manque de vraisemblance, alourdit par le style – tout en point d’exclamation - un brin hystérique et grandiloquent de son auteur.
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Un prêtre marié

Dans les années troublées qui ont suivi la Révolution française, Jean Sombreval, ordonné prêtre, quitte son village normand pour aller perdre son âme à Paris. Et il la perd doublement. Non seulement il renonce à sa foi pour se consacrer à la Science, mais il commet le péché suprême en se mariant. Au-delà même du péché de chair, c'est Dieu lui-même qu'il assassine.

Sur le point d'accoucher, sa malheureuse épouse apprend l'horrible vérité et meurt en mettant au monde une enfant marquée par cette effroyable naissance. Calixte, une jeune fille sainte mais perpétuellement souffrante, atteinte d'une maladie des nerfs que Sombreval met toute son énergie et sa science à vouloir guérir. Mais seule la grâce divine le pourrait…



De retour dans son pays natal, il va s'installer en solitaire avec sa fille dans une propriété abandonnée car maudite depuis des années. Malgré le charme angélique de la jeune fille, les pires médisances vont vite courir sur le prêtre marié et sa fille…considérés par les villageois comme des créatures diaboliques.

Seul un jeune homme, Néel, fils du vicomte de Néhou, va braver l'opprobre général et se languir d'amour pour la belle Calixte qui s'est donnée à Dieu pour racheter la conduite de son père. Situation sans issue d'autant que la santé fragile de la jeune fille épuise son système nerveux dans des crises de plus en plus violentes.



La Malgaigne, vieille femme un peu sorcière des temps jadis leur a prédit à tous une destinée tragique. Et Barbey nous emmène jusqu'au bout de sa malédiction, l'enfant sacrifiée au péché du père qui s'abimera à son tour dans une mort violente et l'amant désespéré partira offrir sa jeune vie sur les champs de bataille napoléoniens.

Ce très beau roman est assez central dans l'oeuvre de Barbey d'Aurevilly car il éclaire sa vision du monde et de la vie humaine. Si sa description de la passion paternelle est très moderne, il reste attaché à une conception traditionnelle et religieuse de la place de l'homme dans l'univers, menacé par le châtiment divin s'il prétend s'en éloigner. Mais par la magie de sa puissance d'écriture et sa description des caractères humains, on reste sous le charme.

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Un prêtre marié

Un prêtre marié /Jules Barbey d'Aurevilly (1808-1889)

Ce roman paru en 1865 commence par une assez longue introduction qui répond à la technique habituelle de construction de l'auteur, à savoir celle du récit enchâssé où le narrateur initial cède la parole à une personnage qui devient à son tour le narrateur.

L'histoire débute dans les années troublées qui ont suivi la Révolution. Jean Gourgue dit Sombreval, d'origine paysanne normande , après des études sérieuses au séminaire de Coutances est ordonné prêtre au grand désespoir, dans un premier temps, de son père qui voyait de fait sa race abolie.

Sombreval est un travailleur acharné et n'inspire aucune sympathie. Il vit dans une petite maison avec son père. Il quitte un jour du début de l'année 1789 son village normand pour une mission secrète à Paris ordonnée par l'évêque. Il ne reviendra jamais de la capitale, « ce gouffre de corruption, ce cratère qui allait vomir la Révolution française ».

C'est là qu'il va perdre son âme, sa foi et ses buts suite à la rencontre d'un chimiste qui lui communique sa passion. Il va ainsi consacrer sa vie à la science, séduire la fille de son collègue et commettre le péché suprême en se mariant avec elle et consommer ainsi son apostasie dans le « bourbier des bras d'une femme ». Au-delà du péché de chair, c'est Dieu lui-même qu'il assassine. Son père qui avait accepté sa prêtrise mourut de cette déchéance et de la mise au ban de l'opinion du pays de ce fils apostat.

La jeune fille, belle et orpheline de mère ignorait qu'il fût prêtre. Pieuse et tendre, elle aimait Sombreval. C'est enceinte qu'elle apprend que Jean est prêtre. le choc est tel qu'elle ne se relève pas de ses couches. L'enfant née, une fille très fragile, est prénommée Calixte. Signe particulier, elle a une petite tache sur le front en forme de croix. Jean aime sa fille, il est attentionné et veille à son bonheur, mais n'a jamais évoqué avec elle l'idée de Dieu. C'est l'abbé Hugon, son parrain, qui va plonger l'adolescente, pure et poétique mais souffreteuse dans la divine ébriété. Lui qui a assisté sa mère dans ses derniers instants est son confesseur, mais plus encore, le souvenir de sa mère.

Revenu dans sa campagne natale au fin fond de la Normandie, Jean s'installe avec Calixte dans le vieux château de Quesnay qu'il a acquis récemment, une demeure abandonnée et maudite depuis des années. Jean a pour Calixte des attentions, des surveillances et des adorations sans bornes. Mais peu à peu une ambiance lourde s'installe dans le pays : malgré le charme angélique de la jeune fille, les pires médisances courent dans le village sur le prêtre marié et sa fille, considérés par les villageois comme des créatures diaboliques. Les mauvaises langues vont jusqu'à suspecter le château d'abriter le sacrilège et l'inceste. Sombreval met toute son énergie et sa science pour soigner la maladie nerveuse de Calixte « d'une beauté nitescente mais toujours d'une pâleur albâtréenne et sépulcrale, réfugiée dans sa chambre, une vraie cellule de religieuse dans sa virginale austérité. »

« On aurait dit l'Ange de la souffrance marchant sur la terre du Seigneur, mais y marchant dans sa fulgurante et virginale beauté d'ange, que les plus cruelles douleurs ressenties ne pouvaient profaner…Calixte souffrait dans son corps par la maladie et dans son esprit par son père, mais elle n'en était que plus belle. »

Dans le voisinage, seul un flave et mince jeune homme aristocrate, Néel, fils du vicomte de Néhou va braver l'opprobre général se languissant d'amour pour la belle Calixte qui depuis sa rencontre avec l'abbé Hugon s'est donnée à Dieu pour racheter la conduite de son père. La vénération de Néel pour Calixte ne trouve qu'une réponse d'amie ou de soeur : elle a choisi d'être carmélite et entend le rester. Elle ne devrait pénétrer dans le cloître qu'après la mort de Sombreval. Alors Néel va se jeter dans une passion impossible, tout risquer et même sa vie. Et Sombreval tout faire pour que sa fille n'ait pas à subir l'infamie populaire et les noires prophéties de la Malgaigne, l'omniprésente sibylle de malheur. Même l'impensable : offrir son âme à l'enfer.

Barbey d'Aurevilly dans ce grand roman fait montre d'une force et d'une puissance d'évocation remarquable. Un souffle envoûtant traverse toute l'histoire qui tient le lecteur en haleine grâce à une langue d'une grande justesse, d'une grande richesse, sombre, éloquente et imagée. Parfois précieuse. Imprégné de foi catholique et marqué par la question du mal et du péché, d'Aurevilly mélange des éléments du romantisme tardif et du fantastique surnaturaliste notamment quand il évoque les superstitions normandes. Malgré un certain nombre de clichés mélodramatiques architypés, cette oeuvre reste pleinement évocatrice d'un univers glauque qui a longtemps dérangé la critique à défaut du lecteur, l'histoire de trois amours fous, celui de Sombreval pour sa fille, de Calixte pour son père et son Dieu, et de Néel pour Calixte. Un drame où se mêlent le rêve, la folie, la prière, le repentir, la pénitence, l'impiété, l'absolution et le mensonge, et le tout dans une violence latente.



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Un prêtre marié

Excellent ouvrage sur un prêtre défroqué et sa fille, tous deux reclus en Normandie. Le péché se transmet-il? L'amour de sa fille permettra-t-il au prêtre de trouver sa rédemption? Le style de Barbey est incroyable et, surtout, l'analyse morale qui est contenue dans ce livre est la fois subtile et implacable.
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Un prêtre marié

J'ai lu ce livre pour mes cours et honnêtement je n'ai pas beaucoup aimé. C'est bien écrit, j'ai apprécié l'intrigue dans sa globalité, j'ai même rigolé à certains moments mais c'est très long. Il y a beaucoup trop de descriptions, de passages inutiles, on se perd souvent dans l'histoire, on ne sait même plus ce qui se passe. De plus, ça tournait en rond, il n'y avait pas vraiment d'actions. J'ai eu plutôt du mal à le lire et j'étais contente que ça se termine. Dès le début, Jean m'a énervé et Calixte, même si elle est très gentille, était également agaçante. J'ai un peu mieux aimé Néel mais tout sa personnalité n'était pas incroyable. La romance et la fin étaient très prévisibles, il n'y avait pas vraiment de suspens, exceptés quelques moments qui m'ont surpris, mais globalement on se doutait de ce qui allait se produire.
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Un prêtre marié

Un grand écrivain catholique-n’ayons pas honte d’utiliser ce grand mot devenu gros dans ce siècle vulgairement indifférent- et un roman de légende chrétienne, où la lucidité sur la tragédie de la vie et l’horrible folie humaine se mèle à une charité magnifique, à une extase mystique,et à une violente espérance! Le diabolique ici se fond littéralement dans le divin, et tout est transfiguré par la grâce de l’élegante et véhémente prose d’Aurevilly. Ah, je vous plains, âmes asséchées par le lâche athéisme et le vil scientisme, incapables de vibrer à la harpe bouleversante des récits christiques! Mais peut-être que le génie de Barbey allumera la partie éteinte en vous par la modernité, et qui n’attend pour renaître que les miracles de la Parole, que la véritable littérature offre comme une manne infinie!
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Un prêtre marié

Qui d'autre que M Barbey d'Aurevilly pour nous conter cette histoire de manière aussi forte, aussi puissante, avec ces facilité et beauté d'éloquence qui lui sont propres ?



Un auteur unique, à mon humble avis, un don d'expression inimitable, BRAVO, Monsieur !





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Un prêtre marié

On dit toujours" Jamais deux sans trois" ..j'ai donc enquillé avec une délectation anticipée, mon 3ème Barbey des vacances... mauvaise pioche! c'était pas le bon numéro!



Je me suis rasée comme jamais, je me suis noyée dans les bondieuseries, je me suis égarée dans les (saints) lieux communs ..



Un vrai chemin de croix pour athée relativement tolérante... prête à toutes les pénitences, les excommunications et les génuflexions pour communier un tant soit peu avec un de ses auteurs favoris!



J'ai pourtant été jusqu'au bout de ce pensum, avec une ténacité dont je ne me croyais pas capable...mais beaucoup de soupirs exaspérés et de diversions...



Voyons l'histoire: Sombreval, un prêtre marié, bientôt veuf et père d'une pâle et chaste enfant, achève de se damner en essayant , par des recherches scientifiques -oh le vilain mot!- menées avec acharnement devant ses cornues d'alchimiste et ses fourneaux infernaux , de la sauver d'une étrange maladie nerveuse- un peu de somnambulisme, pas mal d'épilepsie, une pincée de catalepsie, et pour finir un bon tétanos des familles-



Alors que la cause de ce mal terrible est, vous l'avez deviné, ...sa propre apostasie! La pure enfant, prénommée Calixte, porte en effet au front les stigmates du péché de son père: une croix rouge et boursouflée que l'on cache pudiquement sous un bandeau écarlate...



Elle se meurt pour qu'il revienne à Dieu. Il s'enferre pour la sauver.



Un troisième larron, Néel de Néhou- pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?- un jeune noble, une sorte de chevalier normand un peu slave-il faut avoir du sang slave pour se jeter corps et âme dans un pareil marigot- se dévoue à la belle par amour, mais elle n'aime que Dieu...et son papa qui en est le double inverse!



Un même sort funeste pèse sur tous les trois.



Nous sommes en terre de Cotentin, où les Rompus reviennent à la brune, où les marais ont d'étranges fantômes, et le vent de sinistres complaintes.. Le Cotentin, presque une île...



Et c'est là que le charme agit, malgré la niaiserie sulpicienne du propos,malgré la simplification caricaturale de ce trio héroïque: sans la magie des paysages cotentinais, sur lesquels passent les saisons -été étouffant, automne alangui, hiver brumeux et perfide-, sans le magnifique personnage de La grande Malgaigne, normande Clôtho, fileuse de sorts et de morts violentes, sans la présence, çà et là, de ces aphorismes triomphalement réactionnaires qui font frissonner d'horreur et d'aise la vieille perverse gauchiste que je suis, je crois que je n'aurais pas supporté ce Barbey de trop !
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Un prêtre marié

" L’essence de l’amour n’est-elle pas de souffrir pour l’objet aimé, plus qu’il ne peut souffrir et même quand il ne souffre pas ?…".



Ces quelques mots de l'auteur, majestueux par leur vérité, suffisent pour résumer en un éclair l'essence même de ce grand roman catholique. Car, si la religion et la figure du prêtre demeurent le thème central de ce récit, il est aussi, et surtout, question de ces épanchements du coeur qui nous poussent à la folie, à la déraison, à la souffrance même, pourvu que par elle nous puissions aimer et sauver l'être chéri.



Voici donc l'histoire de Jean Gourgues, dit Sombreval, prêtre défroqué et veuf, désormais athée et père d'une sublime Calixte. La jeune fille, dont le physique et la pâleur ne sont pas sans rappeler la Lasthénie déjà rencontrée dans Une histoire sans nom, se destine à une vie de Sainte martyre, rendue malade par le péché de son père, et prête à le racheter par le don de sa propre vie. Menant une vie solitaire rythmée par la prière et les nombreuses crises dont elle est victime, elle fait pourtant la rencontre du jeune Néel, qui en tombe éperdument amoureux.



Comment trouver les mots justes pour décrire une telle oeuvre ? L'écriture est d'une justesse remarquable, précieuse et terriblement sombre à la fois, frôlant le fantastique dans les remarquables descriptions du domaine, de l'étang entouré de saules et plongé dans un brouillard éternel, des apparitions de pauvres fantômes errants et damnés… Tout envoûte, jusque dans le personnage de Calixte que l'on croirait faite de marbre blanc, reflétant presque les portes du ciel, si sainte que Néel ira jusqu'à l'imaginer flottant sur la mer et couronnée, comme la Vierge, de brillantes étoiles !



Telle est l'histoire de trois amours fous qui jamais ne s'apaisent : celui de Sombreval pour sa fille, de Calixte pour son père et son Dieu, et de Néel pour sa bien-aimée. Trois amours enchaînés à l'existence d'un Créateur renié, drame où se mêlent repentir, pénitence, impiété, mensonges, prières, absolution, rêve, folie et violence.



Un chef d'oeuvre où chacun, en voulant sauver celui qu'il aime le plus, finira par se perdre lui-même, par perdre l'autre. "Ces plaisirs violents ont des fins violentes", comme le disait Shakespeare.



Et quelle puissance !











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Un prêtre marié

Un homme, Sombreval, a été ordonné prêtre dans le Cotentin quelque temps avant la révolution. Envoyé à Paris, il y perd la foi, découvre la chimie et la science, se marie, perd sa femme qui lui laisse une fille Calixte.

Le roman commence lorsque Sombreval, inquiet pour la santé de sa fille revient dans le Cotentin. Nous sommes entre 1805 et 1810. La paix religieuse est revenue, mais les habitants n'ont pas oubliés l'ancien curé et le rejet local est immédiat. Dans ce recoin de la Basse-Normandie se joue en outre un double drame : Sombreval aime follement sa fille qui aime autant Dieu qu'il n'y croit pas ; dans le même temps, Néel, un gentilhomme du coin, tombe éperdument amoureux de l'inaccessible Calixte.

Un prêtre marié est un grand roman, écrit avec une très belle plume. Les mœurs de ces temps tragiques sont rendus comme aurait pu le faire Balzac, même si j'ai retrouvé les défauts qui m'agacent un peu chez Barbey : un excès de circonlocutions, et un symbolisme un peu excessif.

Sans doute faut-il aussi pour apprécier la grandeur du roman avoir le sens du sacré et celui du péché. Un prêtre marié est le roman d'un auteur catholique, qui croit au mal et à la grâce et en fait des acteurs de son récit.



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Un prêtre marié

Un prêtre, Sombreval, rompt son sacerdoce pour se marier. Après la mort de sa femme, il retourne avec Calixte, sa fille souffreteuse, dans sa campagne natale. Au fin fond d’une Normandie rurale et inhospitalière l’ambiance est lourde dans le château dépouillé. Les prédictions du démon, les médisances des villageois et l’opprobre public transforment leur séjour en retraite assiégée… jusqu’à l’arrivée du fougueux Néel de Néhou paré de mille vertus qui s’éprend immédiatement de la belle et vertueuse Calixte.

Pour échapper à la malédiction et épargner sa fille tant aimée le renégat Sombreval, antihéros fier et courageux, va devoir faire preuve d’un insensé dévouement.



Voilà un résumé bien sec, bien peu barbeyaurevillienesque. La distance multiséculaire (2) a fait jaunir cette trop longue histoire kitsch en diable - tant pis pour l’anachronisme - et sa fin totalement hallucinée.

Partir pour la campagne profonde dans la Manche au début du 19ème siècle est un dépaysement hardi. J’ai chevauché, bien secouée, sur des chemins de perdition, franchissant les fondrières, les landes et les marais, « un terroir aux arômes concentrés » où les villageois « patoisent » sans filtre. L’ambiance est malsaine, mystérieuse. Elle infuse tout le roman dans un halo brumeux de superstitions.

Outre ses qualités de conteur Barbey d’Aurevilly possède une autre corde à son arc. Sa plume assassine fustige sans prendre de gants ceux qu’il désapprouve. Très incorrect probablement déjà à son époque il l’est plus encore de nos jours. Ses considérations malheureuses sur les serviteurs noirs de Sombreval, et ses affirmations péremptoires sur l’éducation et le mariage des filles seraient juste impossibles.

Pourquoi alors lire un tel ouvrage aujourd’hui ? L’abandon de la religion et le trop grand amour paternel sont au cœur du récit. A l’évidence, ou plutôt à la lecture, c’est irréaliste et peu convaincant. Alors, pourquoi ? Pour l’écriture, la vie campagnarde, la restitution d’une époque et au final pour bien mesurer l’écart avec certains contemporains, Flaubert ou Balzac pour n’en citer que deux.





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Un prêtre marié

Jules Barbey d'Aurevilly est un auteur remarquable passionnant qui nous fait en même temps découvrir cette formidable Normandie .Écrivain que je trouve trop peu connu au regard de son immense talent. Tres beau style cela fait plaisir..A dévorer d'urgence "UN PRÊTRE MARIE"
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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