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Critiques de Jules Barbey d`Aurevilly (289)
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La vengeance d'une femme

Une critique uniquement sur la nouvelle "La Vengeance d'une femme".

Ce court texte montre les tréfonds de l'âme humaine... Les premières pages sont une théorie sur la littérature et la vérité : non, les écrivains n'inventent pas quand ils présentent des horreurs immorales, crimes, incestes, viols... Tout est déjà dans la société, les monstres littéraires ne sont que des copies de Messaline, Lucrèce Borgia...

Et ici, c'est une femme le monstre - mais l'est-elle vraiment ? Surtout par rapport à ce que lui ont fait les hommes, ses proches comme ceux qu'elle rencontre. Sa vengeance se fait après tout sans verser le sang, et elle souffre autant que celui qu'elle hait. Je ne vais pas l'expliquer, mais la force du texte vient du contraste entre la vanité et la futilité du dandy qui nous est d'abord présenté face à la force d'âme héroïque de la femme décrite. Autre contraste qui sert le texte, la différence entre la sensualité voire l'érotisme du début, et la violence glauque du récit de l'héroïne.

Un court texte donc, mais marquant.
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L'Ensorcelée

Barbey d'Aurevilly rend à nouveau hommage à la Normandie, avec ses paysans rusés et avides, ses bergers errants un peu sorciers, ses femmes de tête et d'action, mais aussi ses chouans qui ont combattu pour Dieu et le Roi. Les sympathies de l'auteur sont bien visibles. Le récit du supplice du prêtre est d'ailleurs assez horrible, même s'il précise que les brutes violentes et cruelles se trouvent dans chaque camp.

C'est ce prêtre qui est le personnage le plus fascinant du récit, pour sa malédiction, pour ses souffrances, mais surtout parce qu'il ne s'exprime pas. On ne connaît pas ses pensées, il nous reste mystérieux : est-il envouté ou maudit ? amoureux ou damné ?

Et c'est cette multiplicité d'interprétations qui est intéressante, puisqu'on peut voir à la fois du fantastique dans le décor tourmenté de la lande normande ou le pouvoir de fascination d'un homme charismatique. Le récit cadre où le Narrateur, incarnation de l'Auteur, intervient, n'était cependant pas nécessaire.
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Le chevalier des Touches

D'abord, ce roman n'est principalement ni historique, ni un roman d'aventures. En effet, même si le récit rapporté se déroule pendant la guerre de Vendée, on ne sait rien du contexte ou des motivations, des combats des personnages. Les Bleus sont réduits à des figurants, les Blancs à des combattants de l'ombre, du bocage plutôt. Ce n'est pas non plus principalement un roman d'aventures, même si on trouve bien des combats épiques, des sièges de prison et des expéditions impossibles.

Non, la principale force du texte tient dans la galerie de portraits des personnages, ceux qui écoutent le récit - les vieilles filles et les vieux nobles émigrés de retour, comme ceux qui font partie de ce récit - les Chouans et les femmes qui les assistent. J'ai été d'ailleurs particulièrement intéressée par le retournement des genres : le chevalier des Touches est une princesse de conte qu'il faut délivrer dans sa tour, lui qui est beau comme une femme. Au contraire, Percy est une femme laide, intrépide, qui combat comme un homme, et qui vient le délivrer.

Et la fin se termine sur le destin tragique d'Aimée, Vierge-Veuve, un surnom évocateur.
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Le bonheur dans le crime - La vengeance d'u..

"Le bonheur dans le crime" et "La vengeance d'une femme" sont deux nouvelles extraites d'un recueil de Jules Barbey d'Aurevilly intitulé : "Les diaboliques". Deux portraits de femmes rapportés par des hommes les ayant ponctuellement côtoyé.

La première, Hauteclaire Stassin, fut initiée dès son plus jeune âge à l'art de l'escrime, faisant d'elle une redoutable et imbattable adversaire. A la tête de la salle de son père, elle croise régulièrement le fer avec le comte de Savigny. De ces échanges d'armes va naître bien plus qu'une simple compétition sportive...

La seconde, la duchesse d'Arcos de Sierra-Leone, s'est retrouvée engagée dans un mariage sans amour entre deux puissantes maisons nobles. Pourtant l'amour, elle va le connaître et quand son époux la prend sur le fait, il ne se prive pas pour y mettre fin de la plus atroce des manières. Mais il n'a pas encore goûter à la vengeance d'une Turre-Cremata…



Je ne connaissais Barbey d'Aurevilly que de nom, et j'étais même bien incapable de le situer temporellement. En piochant régulièrement dans la collection Librio à 2€, je m'ouvre à des auteurs et des œuvres que je n'aurais pas tenté ou retenté de prime abord. Une bonne chose car je situe désormais mieux cet auteur et j'en ai apprécié les deux textes réunis ici. L'une comme l'autre des femmes présentées dans ces nouvelles incarnent une férocité et une détermination incroyable pour obtenir ce qu'elles désirent le plus ardemment : l'amour pour l'une et la vengeance pour l'autre. Chacune d'elle prête à se damner mais certaine de son succès.
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Le chevalier des Touches

Dans le bourg de Valognes, le soir à la veillée, une vieille fille, sœur de l'abbé du lieu, narre devant un public de vielles personne acquise à la chouannerie , les hauts faits du Chevalier des Touches, chouan de Normandie et les tentatives pour le libérer des geôles des bleus par un groupe de douze personnes des plus résolus.



Le connétable des lettres, Barbey d’Aurevilly, dans ce roman, évoque à partir d'un personnage qui a réellement existé, un épisode de la chouannerie, dont on oublie que la Normandie fut le théâtre. C'est un peu le pendant des Chouans de Balzac, en plus ramassé. Ce n'est pas assurément le meilleur de la production de ce grand écrivain un peu oublié. Cela reste un livre intéressant pour qui s’intéresse aux chouans.
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Les Diaboliques

Les Diaboliques est un recueil de six nouvelles de Jules Barbey d'Aurevilly, paru en novembre 1874 à Paris chez l'éditeur Dentu.

Le projet de ce recueil de nouvelles devait s'intituler à l'origine Ricochets de conversation. Il fallut cependant près de vingt-cinq ans à Barbey pour le voir paraître puisqu'il y travaillait déjà en 1850 lorsqu'il fit paraître Le dessous de cartes d'une partie de whist dans le journal La Mode dans un feuilleton en trois parties, La Revue des Deux Mondes l'ayant refusé. Barbey revint en Normandie à la faveur des événements de la Commune et l'acheva en 1873.
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Le bonheur dans le crime - La vengeance d'u..

Je suis peu encline aux critiques dithyrambiques qui usent de beaucoup trop grands mots pour des textes interchangeables, cependant c’est avec un tel enthousiasme et une telle admiration que j’ai refermé ce livre que je m’empresse d’ecrire une critique aussi enthousiaste et admirative que possible.

Car quel talent pour l'écriture dans un vocabulaire ciselé comme une dentelle de Calais et un timing précis comme une horloge suisse, quelle science pour les portraits psychologiques, quelle connaissance intime des femmes et des hommes il faut pour écrire un bijou pareil, que vous lirez en un peu plus d’une heure et qui vous feront peut être considérer Jules Barbey d’Aurevilley comme un des plus grands écrivains classiques. Ensuite, courez dévorer « une vieille maîtresse », c’est beaucoup plus long mais tout aussi savoureux.
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Le chevalier des Touches

C’est un roman de grand style que ce Chevalier Des Touches, écrit par le dandy du Cotentin, Jules Barbey d’Aurevilly…

À l’heure de l’encensement, presque sans restriction, des grandeurs révolutionnaires – tandis que la République n’est toujours pas fichue de reconnaître le génocide vendéen, car génocide il y eut ! –, voici un texte dissonant qui raconte l’autre camp, à savoir celui de la Chouannerie ; à ne pas confondre avec la révolte des Vendéens.

Ce roman, parfaitement ciselé, raconte en apparence une aventure contre-révolutionnaire et, plus en profondeur, une tragédie amoureuse comme l’Histoire en conçoit trop souvent, hélas…

Au moment où il débute, le récit présente des « gens du passé, rassemblés dans [un] petit salon à l’air antique, et qui parlaient entre eux de leur jeunesse évanouie et des nobles choses qu’ils avaient vues mourir. » Et, à l’occasion d’une apparition fantomatique de ce passé, ces gens se souviennent ; particulièrement Percy, femme au physique qu’elle s’est toujours reconnu ingrat mais dont la vaillance et le noble cœur l’élèvent au-dessus des considérations plastiques.

Récit à la fois mélancolique et cruel – voir l’épisode d’Avranches et surtout celui de la vengeance, laquelle change « un riant et calme Moulin bleu en un effrayant moulin rouge » – qui raconte, pour une grande part, l’expédition de sauvetage d’un chouan unique en son genre : le chevalier Des touches, « homme de guerre indifférent à tout ce qui n’était pas la guerre et farouches ambitions », inspiré de Jacques Destouches de La Fresnay. Être fantastique et ténébreux, il est de ces figures qu’affectionne l’auteur (lire, par exemple L’Ensorcelée).



Par la voix de ses protagonistes, Barbey en profite pour écorner les derniers Bourbons et leur ingratitude ; Bourbons qui, au moment de la publication du roman, sous le Second Empire, ne sont plus qu’un souvenir.

Parmi les autres personnages se trouve la figure pure et idéalement romantique – avec tout ce que cela comprend de drames – d’Aimée de Spens, devenue une « pauvre magnifique beauté perdue, qui n’entend même pas ce que je dis d’elle, ce soir, au coin de cette cheminée, et qui n’aura été dans toute sa vie que le solitaire plaisir de Dieu ! » Murée dans le silence, elle s’était arrêtée dans le temps lointain où son amour lui fut arraché.

Mais oublions l’intrigue – qu’il appartiendra à chacun de connaître en la lisant –et penchons-nous sur ces phrases qu’on pourrait extraire du récit pour en faire des maximes, dont celle-ci : « La foi sincère a souvent de ces familiarités avec Dieu, que des sots prennent pour des irrévérences ridicules, et des âmes de laquais ou de philosophes pour de l’orgueil. »

Et cette autre qui, en peu de mots, agencés avec un génie littéraire indéniable, dit tellement : « Si mademoiselle Aimée avait été brune, pas de doute que déjà, sur ces nobles tempes qu’elle aimait à découvrir, quoique ce ne fût pas la mode alors comme aujourd’hui, on eût pu voir germer ces premières fleurs du cimetière, comme on dit des premiers cheveux blancs que le Temps, dans de cruels essais, nous attache au front brin à brin, en attendant que le diadème mortuaire qu’il tresse à nos têtes condamnées soit achevé ! »

Quand l’art d’écrire atteint ces hauteurs, nous ne pouvons que nous incliner…







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Les Diaboliques

Jules Barbey d'Aurevilly, je ne connais que de loin, cité lors des lointains cours de français. C'est à l'occasion d'une lecture commune que j'ai pu le découvrir. Les diaboliques c'est un recueil de six nouvelles. Six nouvelles assez dérangeantes...

Dans Le rideau cramoisi, c'est un jeune militaire qui s'éprend de la jeune fille de ses hôtes mais il va se retrouver pris dans une situation quelque peu génante. L'auteur explore tout à tour, désir et désespoir du jeune homme mais le personnage au centre de la nouvelle est bien Alberte, qui devient la preuve d'une faute...

Dans Le plus bel amour de Don Juan, on présente le compte de Ravila qui raconte la plus belle conquête. La chute est à la hauteur des attentes de ses convives mais des lecteurs ?

Dans Le bonheur est dans le crime, l'auteur raconte la passion qui nait entre Mlle Hauteclaire Stassin et le comte de Savigny. Un amour tellement fort qu'il peut briser qu'il trouve entre eux...

Dans Le dessous de cartes d'une partie de whist, on découvre des femmes et leurs petits et horribles secrets. Cette nouvelle met beaucoup de temps à se mettre en place et n'a pas plus éveillé mon intérêt que cela...

Dans A un diner d'athées, on raconte la rencontre de Mesnilgrand à l'église, que fait-il donc là ? Mesnilgrand parle de sa passion brève et secrète avec la femme de son major... L'auteur ne manque pas de qualificatifs pour évoquer la fausse pureté de la femme, le final est assez troublant...

Dans La vengeance d'une femme, une prostituée raconte son histoire assez troublante, un mariage de raison et un amour tué à la racine... très forte aussi dans sa narration, on sent toute la haine que celle-ci éprouve.

Contente d'avoir découvert l'auteur mais je ressors mitigée de cette lecture, l'introduction des nouvelles, pour arriver au coeur de l'histoire est très longue et lasse. Ce qui m'a amené à découper ma lecture des nouvelles par fragments. L'auteur ne semble pas avoir une image très flatteuse de la femme : tour à tour, allumeuse, vengeresse, facile, criminelle... diabolique. Oui j'ai aimé sa belle plume, même si elle a tendance à s'étendre un peu dans la description des différentes poupées gigognes qui entourent ses histoires, on s'ennuie avant d'arriver au coeur du sujet. Dommage aussi que la misogynie ressorte un peu trop à mon goût de ses nouvelles.

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L'Ensorcelée

Sur fond de chouannerie, l'abbé Jéohël de La Croix-Jugan est, quelque part, un précurseur de Jack Torrance dans "Shining" de Stephen King... dans ce livre de 1852.

Cependant, comme c'est un drame du terroir Normand qui se situe sur Blanchelande, près de Neufmesnil, dans le Cotentin, il y a de la lenteur paysanne, comme dans "Regain" de Jean Giono, ou "Les Creux-de-Maisons" d'Ernest Pérochon.

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L'ensorcelée est Jeanne Le Hardouet, une fière Normande, née noble, née De Feuardant. La révolution et la chouannerie étant passées, elle a épousé un Bleu ( un républicain ), mais elle garde la fierté de sa noblesse. Quand elle retrouve un ancien chouan, Jéohël de La Croix-Jugan au visage ravagé par le plomb, elle retrouve l'esprit de la cause royale, et elle passe des heures avec lui chez la vieille Clotte.

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Jules Amédée Barbey d’Aurevilly, dandy normand de la Manche, doit bien connaître l'église et l'abbaye de Blanchelande qu'il décrit. Son style original, adulé ou méprisé par ses contemporains, est fascinant, malgré les lenteurs et les longueurs qui permettent au lecteur de pénétrer l'atmosphère paysan post-révolutionnaire. J'ignorais que la chouannerie avait atteint mon pays, la Normandie. 10.000 morts y sont recensés. Louis de Frotté était le chef résistant de ce secteur, de 1793 à 1799. Bonaparte a mis fin à la chouannerie.

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L'histoire de Jéohël et Jeanne est un roman à tiroirs.

-- C'est un roman raconté par un paysan du cru au narrateur ;

-- dans l'histoire s'est créée la légende,

-- due aux incertitudes : suicide ou meurtre, et par qui ?

-- due aux jaseries des commères du lavoir ;

-- due au sort ( ensorcelée ) jeté par le pâtre sur Jeanne ;

-- due à l'épeurement provoqué par le lieu : une rivière, une lande déserte la nuit, avec des lumières dans l'église de Blanchelande isolée, l'appel au meurtre du boucher dans le cimetière contigu, etc... Toute une atmosphère très bien rendue par Barbey.

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L'appel au meurtre du boucher sur la vieille Cotte est une très belle analyse du démarrage des mouvements de foule, foule qui s'excite sur des mots clés prononcés sans aucune preuve de quoique ce soit... "C'est "Humain, trop humain" ! Ces mouvements de foule m'intriguent, et depuis longtemps, je dois lire "La foule solitaire" de David Riesman.

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Je précise deux témoignages personnels :

-- le sort existe encore de nos jours. J'ai été victime d'un sorcier vaudou entre 2000 et 2004 pour rester avec la même femme. Je l'ai quittée 30 fois, et à chaque fois, je revenais vers elle.

J'ai assisté à deux cas de possession. Madame Visnelda, dont parle Tobie Nathan, désenvoûteuse, était ma voisine à La Réunion.

-- le revenant que voit le ferronnier à la fin du livre, cela existe : ce sont les esprits. Le ferronnier est sans doute une âme blanche qui peut voir les esprits. Ainsi, Jésus apparaît à certaines personnes après sa mort jusqu'à l'ascension.

Pour ceux qui me prennent pour un zinzin, lire les ouvrages de Patricia Darré , Alain Joseph Bellet, ou le nouveau livre qui va sortir de notre ami Christian Boudeweel : )

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Lettres inédites à Trebutien : 1835-1858

Quatrième de couverture :

Après l'édition des Lettres à Trébutien en 2013, on croyait tout connaître de cette correspondance, assurément l'une des plus belles du XIXe siècle. C'est alors qu'on redécouvre à la bibliothèque d'Alençon une soixantaine de lettres de Barbey d'Aurevilly jamais publiées s'échelonnant de 1835 à 1858. Documents fascinants, elles éclairent sous un jour nouveau la relation entre les deux épistoliers et permettent de mieux comprendre les circonstances de leur éloignement réciproque. En ce qui concerne l'année 1857, elles apportent une foule d'éclairages précieux : publication de Madame Bovary, des Fleurs du Mal, morts de Béranger et de Custine... A un délitement sentimental s'ajoutent des divergences littéraires qui culmineront avec l'interminable feuilleton autour de la publication des oeuvres de Maurice de Guérin. Une extraordinaire découverte émerge de ces pages. Ces nouvelles lettres qui abordent de nombreux sujets importants sont tout aussi intenses et fougueuses que celles déjà connues, elles aident en outre à approfondir cette relation complexe.



Professeur émérite à la Sorbonne Nouvelle (Paris III), Philippe Berthier a consacré de nombreux travaux à Barbey d'Aurevilly. Dernièrement, une édition des Lettres à Trébutien (2013, Prix Sévigné) et des Memoranda (2016) aux éditions Bartillat.
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L'Ensorcelée

Encore un mauvais prêtre. Il y en a quelques-uns, des faux et des mauvais, j’ai l’impression, dans les œuvres de Barbey d’Aurevilly. Et pourtant il met du zèle à se présenter comme un catholique royaliste, franchement partisan des Chouans contre les Bleus, un vrai réactionnaire. Mais il trouvait peut-être quelque chose de mystérieux dans un homme derrière son sacerdoce.

L’abbé de La Croix-Jugnan est de ceux qui n’auraient jamais dû devenir prêtre, il est trop orgueilleux et même diabolique : il « avait le secret de consoler par l’orgueil les âmes ulcérées, comme s’il avait été un ministre de Lucifer au lieu d’être l’humble prêtre de Jésus-Christ. » Mais il ne se résume pas qu’à ça, il est aussi une victime de la Terreur. Et donc, malgré tout, une femme d’origine noble qui a été obligée de se marier avec un fermier, tombe amoureuse de lui, comme ensorcelée. Du pur Barbey d’Aurevilly en somme.

La base de cette histoire n’est pas très éloignée de celle d’Une Histoire Sans Nom, et j’imagine qu’Un Prêtre Marié doit avoir quelque chose de commun avec ces deux-là. L’auteur adopte le point de vue qu’aurait pu avoir un paysan normand, superstitieux, aussi introduit-il des bribes de fantastique, surtout vers la fin. Il utilise aussi avec délectation la façon de parler des Normands, leur accent, leurs expressions, etc.
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Les Diaboliques

Les diaboliques, Barbey D’Aurevilly « Les diaboliques », c’est un recueil de nouvelles qui porte merveilleusement bien son nom.

Au travers de six nouvelles (Le rideau cramoisi, Le plus bel amour de Don Juan, Le bonheur dans le crime, Le dessous de carte d’une partie de whist, À un dîner d’athées, et la vengeance d’une femme), Barbey D’Aurevilly s’intéresse à un thème qui lui est cher : le mal.

Au sens large, puisqu’il est question de passion, de désir, de violence, d’adultère, ou de mort.

Et quelle figure peut-être plus diabolique à l’époque qu’une femme pour exprimer cela ?



Servi par une écriture puissante, empreinte de beauté, ces femmes nous apparaissent déterminés, ensorcelantes, envoûtantes, dangereuses. Effrayantes.

Mais l’auteur nous confronte aussi au mal pour nous le livrer telle une critique, lui, l’auteur controversé mais le fervent chrétien.



À lire pour le style osé pour l’époque, et cette langue si riche et belle.


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Les Diaboliques

Jules Barbey d'Aurevilly nous entraîne là où les narrateurs s'enchaînent. Il nous tient en haleine, maîtrisant l'art du discours mais plus encore celui du silence. Un maître du mystère, avec ses faits divers romanesques où le désir et le crime deviennent sublimes.
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Une page d'histoire

Une page d'histoire est une nouvelle bouleversante! Dans un langage poétique, Barbey nous relate l'histoire d'une famille de Normandie, les Ravalet, qui, subissant une espèce de sortilège, se salissent toujours les mains dans les affaires à scandales, comme l'a été la famille Borgea en Italie. Une atmosphère ténébreuse et vicieuse a régné sur cette famille partant de leurs aïeux jusqu'à leur dernière descendance. Si ce n'est pas qu'un Ravalet ait violé une fille, puis l'ait jeté dans une fossé, ça sera un Ravalet qui tuerait un prêtre parce qu'il lui a refusé la prise de l'hostie.... Il y a de quoi ne pas s'étonner de voir leur descendance se livrer à un amour incestueux, entre un frère et une sœur...

Un petit texte bien écrit qui serait un essai plutôt qu'une nouvelle. L'auteur cherche à dépasser l'histoire, trouver des indices, des raisons en tant que poète de cette nature pécheresse qui a mit en déroute cette famille jusqu'à ce qu'elle s'éteigne!
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Le Cachet d'Onyx

Une petite nouvelle très dense, intense en émotions! L'auteur crache les déchirures de son cœur de jeune homme, blessé en amour, qui ne pense que vengeance. Le ton est rude, les mots, les phrases pleuvent comme sous l'effet d'un enchantement. On croirait que le texte a été écrit sous l'impulsion d'un état extatique purement surnaturel. L'auteur semble porter le crime d'Othelo, ou vais-je dire sa vengeance, oui il veut venger Othelo avec ce texte, c'est une vibrante haine portée envers cette femme qu'on aime à la folie, qu'on rejette comme par un coup de tonnerre, et qu'on veut tenir comme une esclave, on lui marque d'un cachet d'Onyx à un endroit tenu secret...en tout cas, c'est une nouvelle qui ne se lit pas facilement tant l'auteur y fait bouillir ses émotions d'un jeune désespéré, assoiffé de vengeance!
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Oeuvres romanesques complètes, tome 1

Ni diabolique, ni céleste mais... sans nom. (préface)

Barbey est inspiré par l'horreur, son étude des sentiments, sa description des états d'âme des protagonistes est précise comme un scalpel, désuete comme cela peut être si on la lit en 2018 et étrangement dérangeante et émouvante.
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Un prêtre marié

Dans les années troublées qui ont suivi la Révolution française, Jean Sombreval, ordonné prêtre, quitte son village normand pour aller perdre son âme à Paris. Et il la perd doublement. Non seulement il renonce à sa foi pour se consacrer à la Science, mais il commet le péché suprême en se mariant. Au-delà même du péché de chair, c'est Dieu lui-même qu'il assassine.

Sur le point d'accoucher, sa malheureuse épouse apprend l'horrible vérité et meurt en mettant au monde une enfant marquée par cette effroyable naissance. Calixte, une jeune fille sainte mais perpétuellement souffrante, atteinte d'une maladie des nerfs que Sombreval met toute son énergie et sa science à vouloir guérir. Mais seule la grâce divine le pourrait…



De retour dans son pays natal, il va s'installer en solitaire avec sa fille dans une propriété abandonnée car maudite depuis des années. Malgré le charme angélique de la jeune fille, les pires médisances vont vite courir sur le prêtre marié et sa fille…considérés par les villageois comme des créatures diaboliques.

Seul un jeune homme, Néel, fils du vicomte de Néhou, va braver l'opprobre général et se languir d'amour pour la belle Calixte qui s'est donnée à Dieu pour racheter la conduite de son père. Situation sans issue d'autant que la santé fragile de la jeune fille épuise son système nerveux dans des crises de plus en plus violentes.



La Malgaigne, vieille femme un peu sorcière des temps jadis leur a prédit à tous une destinée tragique. Et Barbey nous emmène jusqu'au bout de sa malédiction, l'enfant sacrifiée au péché du père qui s'abimera à son tour dans une mort violente et l'amant désespéré partira offrir sa jeune vie sur les champs de bataille napoléoniens.

Ce très beau roman est assez central dans l'oeuvre de Barbey d'Aurevilly car il éclaire sa vision du monde et de la vie humaine. Si sa description de la passion paternelle est très moderne, il reste attaché à une conception traditionnelle et religieuse de la place de l'homme dans l'univers, menacé par le châtiment divin s'il prétend s'en éloigner. Mais par la magie de sa puissance d'écriture et sa description des caractères humains, on reste sous le charme.

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Les Diaboliques

Un recueil de six nouvelles cohérent. Elles se passent toutes dans la France postrévolutionnaire, sous l'Empire ou la Restauration, et surtout elles sont faites sur le même modèle, avec un sujet très précis. Chaque fois, on commence par faire la connaissance d'un narrateur (ça prend un peu de temps), plus ou moins libertin ou athée, qui va raconter une histoire sur une femme ou une fille. Ce modèle est le plus commode pour le propos de Barbey d'Aurevilly, puisqu'il cherche à montrer le côté mystérieux de ces femmes dont jamais on ne pénètre la psyché. Il les compare à des félins, pas de gentilles petites chattes mais des sphinx, des pumas, des panthères, des chasseuses.

Maintenant, il y a un problème : c'est la préface de l'auteur et le titre de l'ouvrage. Il faut d'abord rappeler que ce livre a été publié en 1874, c'est-à-dire une quinzaine d'années seulement après Madame Bovary qui avait été accusé d'outrage aux bonnes moeurs (incroyable pudeur de l'époque ! et c'est précisément cette hypocrite pudeur qui est visée dans ce livre) et Barbey d'Aurevilly va allègrement plus loin que Flaubert. Alors peut-être a-t-il voulu se prémunir d'éventuelles attaques en plaçant inopportunément son recueil dans le domaine de la morale, alors qu'il est amoral et cherche avant tout à révéler une vérité.

La vérité, il me semble, c'est que Barbey d'Aurevilly avait comme sujet le désir féminin, qui peut parfois se révéler destructeur et horrible, comme le désir masculin, mais avec la particularité d'être souvent nié. Et donc les femmes de ce recueil font avec, c'est-à-dire qu'elles se dissimulent, soit dans la plus froide hypocrisie, soit dans une paradoxale pudeur, toujours avec une impérieuse passion cachée. Ce ne sont pas des histoires libertines mais pas dévotes non plus, elles se trouvent entre les deux, là où les opposés, le bien et le mal, s'attirent.

Bref, il écrit une chose très belle : « Il en est également de la musique et de la vie. Ce qui fait l'expression de l'une et de l'autre, ce sont les silences bien plus que les accords. » Il possédait un grand sens de la formule et on ressent son plaisir d'écrire, de manier les expressions, de créer des métaphores audacieuses, avec une « culture Ancien-Régime » qu'il est préférable de connaître un petit peu si l'on veut comprendre toutes les allusions ; et tout le dégoût que lui inspiraient les mésalliances (mêlé à la fascination des passions amoureuses), car c'est aussi l'histoire de la décadence de l'ancienne noblesse française.
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Un prêtre marié

Dire que le retour de Jean Gourgue, dit Sombreval, dans son village natal de Normandie, suscite l'effroi, est un euphémisme... et si cet enfant du pays cristallise autour de lui autant de rejet, c'est qu'il a bravé le pire des interdits : devenu prêtre, il a renié Dieu au profit de son amour pour la science et pour l'alchimie, s'est marié et a eu un enfant. Sa femme, découvrant avoir épousé un prêtre défroqué alors qu'elle était déjà enceinte, en est morte d'affliction peu de temps après avoir donné naissance à une petite fille souffreteuse au physique délicat.



Malgré sa santé fragile, Calixte a grandi, adorée par un père dont elle devient malgré elle le châtiment, habitée par une religiosité fervente qu'elle manifeste très jeune (aidée par un religieux bien intentionné qui a pris soin de l'instruire des circonstances dramatiques de sa venue au monde...), et par la conviction que sa destinée est de ramener son père à la foi. Elle voue pourtant un profond amour à cet homme qui consacre son existence à la recherche d'un remède pour la guérir du mal étrange qui la plonge dans d'interminables évanouissements.



Sombreval ayant racheté le domaine normand du Quesnay, qui tombait en décrépitude, ils quittent Paris pour s'y installer, accueillis par l'opprobre, et exclus par la communauté. Précisons que Jean Gourgues n'est pas qu'un prêtre défroqué, il est aussi un paysan qui, bénéficiant du bouleversement sociétal provoqué par la Révolution, accède à une condition supérieure et prend la place, au sein de sa nouvelle demeure, d'aristocrates déchus, symbolisant la fin de Dieu comme de la noblesse... Cependant, leur solitude ne reste pas totale bien longtemps : la beauté éthérée de Calixte attire le regard, puis la présence croissante sous leur toit de Néel de Nehou, issu d'une famille de chevaliers chrétiens. Le jeune homme devient rapidement la proie d'une passion dévorante et exaltée, prêt à mêler son destin à celui, funeste, qu'a prédit la vieille Malgaigne -qui fut pour Jean une mère de substitution- aux Sombreval.



Autour du trio que forment le père, la fille et son amoureux transi, se noue une insoluble tragédie, chacun étant condamné au malheur à la fois par l'amour qu'il éprouve, et par son incapacité à satisfaire les attentes de l'autre. Jean ne peut redevenir croyant pour rendre le bonheur à Calixte, qui ne peut aimer Néel que d'une affection fraternelle puisqu'elle a marié son âme à Dieu... Ils sont comme prisonniers de quelque chose qui les dépasse, contraints d'assumer jusqu'au bout leurs convictions respectives, jusqu'au déchirement...

L'auteur accentue cette dimension tragique en exhaussant certaines caractéristiques de ses personnages -notamment la pureté quasi surnaturelle de Calixte- et en insérant dans le récit des signes et des scènes censés évoquer la douloureuse et violente irrémédiabilité de leur destin : coups de tonnerre assimilés à des avertissements divins, prédictions sinistres de la Malgaigne, omniprésence d'une nature devenant subitement menaçante...



J'avoue avoir eu parfois du mal avec ces envolées mélodramatiques mises au service d'un propos qui m'a par ailleurs semblé hors d'âge... celui de l'opposition entre la foi et la science, cette dernière étant considérée comme mauvaise (l'image de Sombreval retranché dans son laboratoire tel un savant fou composant des philtres pour sauver sa fille est comme attendrie par l'amour paternel qu'elle révèle, mais traduit surtout une certaine condescendance). L'ancien abbé est par ailleurs présenté comme une victime de son athéisme, sorte de maladie dont il ne parvient à se guérir, l'auteur occultant la possibilité du libre arbitre... J'ai de même été gênée par le fait qu'il semble dédouaner les concitoyens des Gourgues de leur bêtise et de leur méchanceté, en faisant passer leur rejet des Sombreval pour un châtiment divin...



Paradoxalement, Jules Barbey d'Aurevilly a eu l'intelligence de ne pas faire de son héros un monstre, bien au contraire. Derrière son apparence rustre -l'homme est imposant, presque bestial avec sa figure osseuse et labourée de rides, ses yeux perçants sous des sourcils touffu- et son irréductible athéisme, il est dépeint comme un homme bon, que sa noblesse d'esprit et son amour pour sa fille empêchent de répondre à l'offense, et inclinent à la charité, y compris envers ceux qui le rejettent...



"Un prêtre marié" peut ainsi se révéler déroutant, le positionnement de l'auteur sur son personnage ne paraissant pas toujours très clair. On a l'impression à la fois qu'il condamne sa perte de la foi, tout en reconnaissant les qualités humaines -voire chrétiennes ?- de Sombreval. Mais c'est sans doute cette incertitude qui constitue l'un des principaux intérêts d'Un prêtre marié. Au-delà de la grandiloquence, et des excès de romantisme auxquels il se laisse parfois aller, Jules Barbey d'Aurevilly manie l’ambiguïté avec talent, nous surprend en opposant à l'apparence d'emblée caricaturale qu'il colle à certains de ses protagonistes (Jean Gourgue en tête, bien sûr, mais je pense aussi à la Malgaigne) une complexité qui rétablit leur crédibilité. Son texte en acquiert une texture d'autant plus sombre et plus dense, et je réalise finalement avoir été envoûtée par ce drame dont les envolées romanesques n'occultent pas la dimension lugubre et équivoque...


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