Un roman très bref, mais dense et si dérangeant qu'il continue à trotter dans la tête un bon moment une fois qu'on l'a refermé.
Tout se déroule dans une demeure familiale ou Julia Leigh rassemble différents protagonistes, principalement les membres d'une même famille, mais aussi plusieurs personnes qui sont à leur service... et à leur image.
Il y a d'abord la mère, malade, mais toujours crainte et respectée.
Il y a la fille, prénommée Olivia mais le plus souvent désignée par l'auteur comme "la femme". Elle arrive au Château dès les premières pages, traînant derrière elle ses deux enfants. Elle a un bras dans le plâtre, elle est couverte de bleus, épuisée, déprimée. Et elle entre dans la propriété de sa mère par effraction, par une petite porte dérobée, abandonnée depuis des années. Elle a effectivement commencé par sonner, mais personne ne lui a ouvert la grande grille de l'accès principal. Avec cette première scène, l'auteur installe déjà l'ambiance étrange du roman, en croisant la froideur des uns et la résignation des autres.
Ensuite, il y a le fils, Marcus, qui arrive avec sa femme Sophie et (pour continuer dans l'insolite et ancrer plus encore le malaise dans l'esprit du lecteur), leur fille, un bébé mort-né que les deux jeunes parents inconsolables promènent avec eux, cajolent, bercent, présentent aux autres comme s'il était vivant. Marcus et Sophie sont théoriquement venus au Château pour enterrer leur petite auprès de son grand père, dans le parc familial... mais ils semblent avoir du mal à concrétiser cette intention.
J'arrêterai là la description du roman (sinon, je risque de trop en dire), mais les pages qui suivent, après cette "installation" du décor et des personnages, enchaînent les scènes de plus en plus troublantes, dans lesquelles il semble que les relations de cette famille sont régies surtout par le silence, la méfiance et, pour presque tous les membres, la recherche insistante d'un "ailleurs" irréaliste qui confine à la folie.
Cela peut paraître malsain, mais ce livre est surtout très bien écrit, très prenant et (comme tout bon roman) il est apte à porter chaque lecteur à s'interroger sur lui-même. Y compris une fois qu'on l'a refermé.
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