Pour sa deuxième parution de l’année 2022, Albin Michel Imaginaire a misé sur l’autrice sud-africaine Lauren Beukes avec un thriller dystopique Afterland. Ce livre est le 5ème roman de l’autrice qui a obtenu auparavant le prix Arthur-C.-Clarke en 2011 pour Zoo City puis le prix British Fantasy en 2014 pour Les Lumineuses. Afterland date de 2020, la traduction est de Laurent Philibert-Caillat et la couverture est signée Aurélien Police.
Dans ce livre, en 2020, ce n’est pas le virus du Covid qui a fait son apparition mais le HCV (Human Culgoa Virus), une saleté qui au départ ressemble à une vilaine grippe puis entraine des cancers de la prostate mortels. Le virus s’est très vite répandu et a entrainé la mort de 99% de la population masculine. On est donc dans un univers post-apocalyptique qui vient de changer profondément et tout récemment, l’histoire se déroulant en 2023. Le monde est devenue un monde de femmes mais rien ne semble avoir vraiment changé, le monde semble chaotique et en transition. La violence y est toujours présente, le pouvoir et les lois aussi. Les accords de Buenos Aires ont instauré la « reprohibition » comme 100 ans auparavant mais cette fois il est interdit de procréer pour éviter la propagation de la maladie qui n’a pas encore disparu. Bien entendu, cette loi a autant de chances de fonctionner que la prohibition et le sperme est devenu une denrée extrêmement rare, plus que l’or.
Voici un aperçu du monde dans lequel se trouve Cole dont le mari est mort mais dont le fils a miraculeusement survécu, immunisé au virus sans qu’on sache pourquoi. Cole habitait Johannesburg avant que le chaos arrive et elle n’a qu’un désir y retourner avec son fils, Miles. Mais Miles attise les convoitises, il représente un espoir, espoir de comprendre pourquoi des personnes sont immunisées, de voir le monde renaitre. Pourtant, Cole a choisi la fuite, pour retourner chez elle et offrir une chance à son fils, une chance de survivre malgré le monde qui s’écroule. Cole est un beau personnage, quelqu’un de simple qui essaye de faire au mieux, de s’en sortir dans un monde devenu un enfer, qui ne fait pas forcément les bons choix mais qui essaye toujours d’aller de l’avant.
Le récit suit trois fils directeurs : celui de Cole, celui de Miles et celui de Billie la sœur de Cole. Miles a 12 ans, c’est un préadolescent, période déjà pas évidente mais encore moins dans le monde où il vit où tout le monde veut décider à sa place, veut ce qu’il représente mais pas ce qu’il est véritablement. Billie s’est engagée dans une spirale qui la dépasse, elle essaye de s’en sortir mais ce n’est pas un personnage agréable, bien au contraire. Ces trois destins qui s’entremêlent sont le cœur du roman, des récits de fuite dans un monde qui s’écroule, dans un monde en mutation où le chaos règne. Les femmes n’ayant connu qu’un monde où les hommes dirigeaient, essayent de s’en sortir mais en reproduisant les schémas du passé. Il faut dire que la catastrophe est récente, à peine 3 ans et que les fantômes des hommes sont toujours présents. C’est aspect du roman est vraiment intéressant mais Lauren Beukes n’en tire pas assez partie. L’univers aurait mérité d’être plus approfondi, plus fouillé. Il justifie le statut de Miles, ses questionnements et la fuite de Cole mais l’autrice laisse beaucoup de questions en suspend. Le rythme du roman a tendance à s’enliser vers les 2 tiers à partir du passage avec les religieuses. J’ai eu un peu de mal à croire d’ailleurs aux réactions de Miles à partir de là, même si ce qu’il vit est particulièrement difficile. La partie se déroulant dans une secte religieuse s’enlise, tourne en rond pour tous les personnages et c’est dommage. L’autrice survole les différentes thématiques présentes ( la place des femmes dans un tel monde, le racisme, la violence, la religion) et se concentre sur la fuite de deux personnages. Au delà de tout cela il reste une belle relation, celle de Cole et Miles, un amour filial qui sonne juste et un monde en pleine mutation plus qu’un univers post-apocalyptique.
Afterland est ainsi un mélange entre thriller dystopique et road movie. L’univers présenté est intéressant et ouvre la possibilité à de nombreuses thématiques mais l’autrice se concentre sur la relation entre une mère et son fils, sur une fuite aux accents de thriller qui font du roman une lecture agréable. Cependant, la seconde partie du roman se perd un peu en route et part dans trop de directions.
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