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EAN : 9782226461612
512 pages
Albin Michel (26/01/2022)
3.25/5   62 notes
Résumé :
Trois ans après une pandémie qui a tué 99 % des hommes, la vie continue et le monde est dirigé par des femmes. Cole veut à tout prix élever son fils Miles, 12 ans, un des rares garçons à avoir survécu, à l'abri des convoitises qu'il suscite. Traquée par Billie, son implacable soeur, elle n'a d'autre choix que de travestir Miles et de prendre la route.
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Après un Zoo City particulièrement remarqué, Lauren Beukes a vu plusieurs de ses romans traduits sous nos latitudes tels que Moxyland ou Les Lumineuses. C'est avec Afterland, son dernier roman en date, que nous revient l'autrice sud-africaine, cette fois-ci chez Albin Michel Imaginaire et sous une sublime couverture signée Aurélien Police.
De quoi rendre curieux le lecteur d'imaginaire et l'amateur de romans post-apocalyptiques qui sommeillent en vous…

Afterland se situe dans un futur proche où une catastrophe virale s'est abattue sur l'humanité (toute ressemblance avec des évènements réels…).
Ou, du moins, sur une moitié de l'humanité puisque le Virus Culgoa Humain (ou VCH) ne frappe que les individus de sexe masculin causant une vague de cancers de la prostate ultra-agressifs et mortels. En quelques mois, la population mâle de la planète s'effondre et la face du monde en est profondément altérée (notamment avec les accords de Reprohibition qui interdisent d'avoir des enfants pour éviter une nouvelle brusque mutation du virus).
On entre dans Afterland comme sur une scène de crime aux côtés d'une fuyarde, Cole, et de son fils, Miles. À terre, Billie, la soeur de Cole, qui a tenté de s'enfuir avec le jeune homme pour le revendre à son employeuse.
En effet, avec la rareté vient la convoitise et…le traffic. Miles passe donc en un clin d'oeil de garçon de treize ans à potentiel reproducteur, sex-toy, fils de substitution et sujet d'expérience. Enfermés dans un bunker tenu par l'Armée, Miles et Cole attendent la bonne occasion pour s'enfuir.
Leur but ? L'Afrique du Sud, le véritable foyer de Cole qui ne rêve que de quitter une Amérique qui la terrifie chaque jour davantage.
En route pour la côte Atlantique, Miles devient Mila et sa mère tente par tous les moyens de dissimuler leur véritable identité, terrorisée par la possibilité d'être capturée par le Département des Mâles et punie pour ses actes.
Elle ne sait pas que de son côté, Billie, sa soeur, a survécu… et qu'elle est méchamment prête à tout pour mettre la main sur Cole et le pactole qui lui tend les bras !
Afterland se divise en deux parties avec, entre deux, un interlude d'une vingtaine de pages. Dans sa première partie, le roman se scinde en trois fils narratifs adoptant alternativement les points de vues de Cole, Miles et Billie, jonglant entre flash-backs et récit principal. Rythmé, efficace, Afterland commence bien et prend même à contrepied les attentes du lecteur.
En effet, le récit n'est pas tant une histoire post-apocalyptique où l'on marche sur les décombres de l'humanité mais celui d'une transition vers un monde qui doit se reconstruire et se repenser sans les hommes. Rien de vraiment original au fond (Y, le dernier homme est déjà passé par là) mais Lauren Beukes, scénariste et productrice TV, connaît parfaitement son affaire pour rythmer son roman en alternant les chapitres courts et efficaces.
Davantage thriller que livre post-apocalyptique, Afterland papillonne et survole pas mal de sujets actuels tels que le racisme en Amérique (Cole est blanche, Miles métisse et son défunt père Devon est noir) ou la place prépondérante des hommes dans la société américaine avec le vide qu'ils laissent derrière eux, dénonçant la mainmise masculine sur des secteurs-clés et/ou à responsabilités. le problème, c'est que tout cela s'avère vite très superficiel puisque Lauren Beukes s'intéresse davantage à son intrigue typée thriller qu'à sa potentiel politico-social.

Après une première partie menée tambour battant entre road-trip et découverte d'univers, Afterland coupe tout et tente un interlude surprenant à la World War Z avec des témoignages et des articles de presse, histoire de mieux cerner les enjeux de la situation mondiale. Passionnant mais beaucoup trop court, cet interlude laisse la place à une seconde partie qui, malheureusement, s'enlise totalement. En explorant les rouages et les mécanismes d'une secte religieuse entre auto-flagellation et ascétisme, Lauren Beukes patine et laisse son récit se mordre la queue, oubliant les nombreuses rencontres de la première partie et ce que celles-ci pouvaient apporter en termes de diversité et de variété narrative pour se traîner une intrigue où la dissimulation devient fade et redondante, d'autant plus que le culte du Chagrin n'a pas grand chose de passionnant, bien loin de l'étrangeté des Renonçants d'un Leftovers ou de l'horreur des Servantes Écarlates de Margaret Atwood. Pendant ce temps, la traque de Billie tourne elle aussi en rond et n'en finit pas de ne mener nulle part. On s'ennuie ferme surtout que la Sud-africaine esquive les sujets les plus intéressants dont, notamment, les bouleversements que peut provoquer le changement d'identité sexuelle forcée de Miles en Mila, d'autant plus difficile dans une société où il devient un objet plutôt qu'un être humain. Beukes préfère s'attacher à décrire son coming-of-age et la prise de conscience de la naissance de son désir sexuel dans un monde exclusivement féminin. En toile de fond, l'univers semble pourtant extrêmement intéressant, d'autant plus que la disparition de l'homme n'a fait cesser ni les violences, ni les flambées religieuses ni les effets du réchauffement climatique. Mais rien n'est véritablement exploité et tout se résume finalement à la relation entre Miles et sa mère.
Une relation qui, heureusement, s'avère très réussie, montrant à quel point l'amour filial est complexe dans un monde en pleine mutation et avec un adolescent qui cherche encore sa voie (surtout face à un trop plein religieux qu'il reçoit quasiment sans filtre). Reste que lorsque Stephen King nous vend Afterland comme un thriller qui montre jusqu'où une mère peut aller pour protéger son fils… il a du louper pas mal de romans post-apocalyptiques autrement plus osés et cruels que celui-ci. La Route de Cormac MacCarthy pour n'en citer qu'un.
En réalité, Afterland tire à la ligne dans sa seconde partie, ne profite quasiment jamais des innombrables pistes narratives qu'il évoque en passant et mise tout sur une intrigue typée thriller entre fuite et cache-cache sauvée in extremis par la qualité d'écriture de Lauren Beukes. On se retrouve donc avec un roman trop long mais pas foncièrement désagréable à suivre, une sorte de thriller taillé pour un public nourri aux séries policières qui préfère s'ériger en page-turner qu'en livre émouvant et poignant comme pouvait l'être le Livre de M de Peng Sheperd. Dommage.

Plus réussi dans sa veine thriller que science-fictive, Afterland convainc à moitié, trop frileux pour explorer son véritable potentiel et trop calibré grand public pour offrir quelque chose de véritablement nouveau au lecteur expérimenté. Reste un roman efficace qui se lit vite et bien, un page-turner solide mais superficiel.
Lien : https://justaword.fr/afterla..
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Parmi les scénarios de fin du monde régulièrement envisagés en science-fiction, celui de l'épidémie figure en bonne place et prend généralement la forme d'un virus coupable de la zombification d'une partie de la population mondiale. Dans son dernier roman, Lauren Beukes opte elle aussi pour la pandémie mais laisse de côté les zombies puisque le virus imaginé ici a pour principal effet non pas de lobotomiser les gens mais de favoriser l'apparition de cancers de la prostate qui ne tardent pas à se généraliser. Or, qui dit prostate, dit homme. L'épidémie dont il est question ici ne touche en effet que les hommes qui se mettent peu à peu à tomber comme des mouches jusqu'à ne plus être qu'une poignée, et ce dans tous les pays du monde (les lecteurs de comics ne manqueront pas de penser à l'excellente série de Brian K.Vaughan, « Y le dernier homme » à laquelle l'autrice fait d'ailleurs un petit clin d'oeil). L'action se déroule plusieurs années après la pandémie qui, si elle n'a pas causé autant de dégâts qu'une apocalypse zombie, n'en a pas moins profondément bouleversé l'ordre mondial. Désormais seules maître(sse)s à bord, les femmes ont repris les rennes partout, avec plus ou moins de difficulté en fonction des secteurs, certaines professions étant depuis longtemps l'apanage principal des hommes. C'est dans ce contexte que l'on fait la connaissance de trois personnages qui vont nous servir de guide dans cette société traumatisée par le deuil de la moitié de sa population. La première, Cole, peut s'estimer chanceuse puisque, bien qu'ayant perdu son mari lors de la pandémie, son fils de douze ans, Miles, fait parti des rares individus masculins sur lesquels le virus n'a pas eu d'effets. Inutile de dire que cette poignée de garçons et d'hommes ayant survécu à l'épidémie font l'objet de toutes les convoitises, que se soit de la part des politiques et scientifiques afin de tenter de comprendre le virus, ou plus largement de celle de n'importe quelle femme refusant de faire une croix sur la maternité. Miles, justement, est notre deuxième protagoniste et permet d'avoir un point de vue légèrement décalé par rapport à celui de sa mère avec laquelle il s'est lancé dans un road-trip de la dernière chance afin de quitter les États-Unis pour retrouver leur pays d'origine, l'Afrique du sud. Enfin, notre dernier protagoniste est la soeur de Cole, Billie, laissée pour morte au début du roman après avoir tenté de kidnapper le garçon pour le compte d'un riche commanditaire et bien décidée à remettre la main dessus.

Le roman est un vrai thriller et se dévore comme tel, avec toutefois quelques coups de mou de temps à autre, notamment au milieu du récit. le voyage de la mère et du fils dans cette Amérique endeuillée et sur les dents est plutôt immersif, notamment en raison du décalage entre des scènes qui ne jureraient pas dans un post-apo traditionnel dans lequel toute la société se serait effondrée (visite de maisons abandonnées, rencontres avec des communautés qui ont choisi de surmonter la catastrophe de manière très différentes…) et des passages qui témoignent que la vie continue bel et bien et que la civilisation est loin d'avoir été annihilée. Les chapitres racontés du point de vue de Cole sont sans doute les plus captivants en raison de l'ambivalence du personnage, mélange de mère super-héroïne prête à tout pour protéger sa progéniture et femme paumée qui n'a pas la moindre idée de ce qu'elle fait les trois-quart du temps. Les passages consacrés à Miles sont en revanche moins réussis, sans doute en raison de l'âge du personnage qui entre dans la puberté et dont les préoccupations liées à l'éveil de la sexualité ou à sa volonté de s'affranchir de la tutelle maternelle ont tendance à tourner un peu en rond. le côté un peu « gentillet » des chapitres de Miles tranche d'ailleurs nettement avec le ton employé dès lors que l'histoire se penche sur le point de vue de Billie, sa tante. L'autrice se fait alors bien plus brutale, accumulant scènes de violence, vocabulaire plus cru et personnages secondaires décalés, dignes de figurer au casting d'un gros blockbuster à la « James Bond ». le contraste permet d'introduire un peu de tension dans ce road-trip qui, sans cette menace dont on sait qu'elle se rapproche de jour en jour sans que les principaux intéressés en soient conscients, pourrait paraître un peu trop mollasson. Finalement, les passages les plus captivants sont sûrement les flash-back au cours desquels on revisite par les yeux de Cole les événements qui se sont déroulés avant, pendant et juste après la pandémie. L'occasion d'en apprendre plus sur la manière dont le virus a totalement bouleversé la vie de toutes ces femmes, bien qu'en les épargnant, et d'assister aux premières réactions qui ont suivi l'identification du problème et la prise de conscience de ses conséquences.

Au delà de l'originalité qu'il permet d'apporter en tant que cadre à un thriller, ce nouvel ordre hégémonique des femmes permet évidemment aussi à l'autrice de porter un propos plus politique, même si cela reste très (trop ?) ténu et que les réflexions amorcées sur le sujet se révèlent finalement assez anecdotiques. Lauren Beukes profite par exemple de cette disparition soudaine des hommes pour mettre le doigt sur les problèmes posés par leur omniprésence dans la plupart des instances de décisions, et ce à toutes les échelles de la société, ainsi que dans certains corps de métier. On aurait pu croire que l'autrice s'emparerait également davantage de la thématique de l'identité de genre, mais cela se limite à une alternance entre les pronoms féminins et masculins pour qualifier le personnage ainsi qu'à un passage un peu surréaliste dans un bar trans, rien de plus. Parmi les bémols, on peut également citer la place centrale occupée ici par une communauté religieuse dans laquelle nos protagonistes vont trouver refuge et dont les délires mystiques ont tendance à devenir lassants. Enfin, quand bien même l'adage veut que le voyage importe plus que la destination, il faut admettre que la conclusion à ce road-trip mère-fils est pour le moins décevant. L'histoire se termine en effet de manière très abrupte par une confrontation attendue de longue de date mais qui se révèle peu satisfaisante et sans aucune surprise.

« Afterland » est un bon thriller qui prend place dans un cadre science-fictif intéressant basé sur la disparition quasi totale des hommes partout dans le monde. On suit avec intérêt le voyage plus ou moins mouvementé d'une mère et de son fils pour quitter les États-Unis, de même que la progression de la poursuite de la soeur de Cole qui, bien qu'antipathique, permet d'ajouter un peu de tension et de suspens au récit. On peut néanmoins regretter que la réflexion de l'autrice sur le genre et la place des femmes dans notre société soit assez peu développée, ainsi qu'une conclusion bancale.
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Quand l'immense majorité des hommes a péri suite à un virus particulièrement sélectif, les femmes ont tendance à surprotéger les survivants. En les enfermant dans des prisons dorées, par exemple. C'est ce qui arrive à Miles, jeune garçon d'une douzaine d'années, dont la famille se partage entre les États-Unis et l'Afrique du Sud. Mais ces pièces rares attirent également la convoitise de nombreuses personnes. Et Miles va être enlevé.

Mais le jeune garçon va être enlevé… par sa mère, convaincue de l'intérêt de cette évasion par sa propre soeur. En effet, Miles vient d'Afrique du Sud et Cole, sa mère, espère pouvoir vivre plus librement dans son pays qu'aux États-Unis d'Amérique, où ils vivent enfermés dans une prison, de luxe, certes, mais une prison tout de même. Pour le protéger de voleuses, violeuses, meurtrières. Car les hommes peuvent servir de vaches à sperme. Ou, pour les plus jeunes, d'enfants de substitution. Car, tant que le virus n'est pas éradiqué ou, pour le moins, contenu, il est interdit de faire de nouveaux enfants, interdit de tomber enceinte. D'où les trafics les plus vils, mais aussi les plus lucratifs.
En tout cas, Billie, soeur de Cole et nièce de Miles, a besoin d'argent et est prête à tout pour s'en procurer. Même à sacrifier, sinon la vie, du moins la liberté de son neveu. Elle prépare donc son enlèvement en compagnie de sa soeur. Mais au dernier moment, celle-ci comprend le sort réservé à son fils et assomme d'un violent coup de pied de biche sur le crâne sa soeur. Qu'elle pense avoir tué. Et c'est parti pour une longue course poursuite.

Le roman est un long voyage avec, en ligne de mire, un bateau qui pourrait mener mère et fils en Afrique du Sud, terre de liberté. Mais, évidemment, les obstacles sont nombreux et Billie, revenue d'entre les morts, tel un zombie acharné, ne va pas lâcher l'affaire. Ce voyage est l'occasion pour Lauren Beukes de dresser un portrait peu complaisant d'un pays en déliquescence, qui tente de remonter la pente, mais n'évite pas les travers qu'on lui connaissait avant. Bref, le monde de femmes qui est ici représenté est aussi pourri que le monde mixte précédent. Mêmes inégalités, mêmes égoïsmes, mêmes délires. Cela ne donne pas envie.
Mais surtout, c'est long (eh oui, encore cet adjectif) : j'ai eu bien du mal à me motiver arrivé vers la moitié du récit. Mais dès le début, le personnage de Billie m'a indisposé. le côté j'ai la tronche défoncée et la cervelle qui sort par le trou, mais je vais quand même continuer presque comme si de rien n'était (quelques hallucinations, de grosses douleurs, mais finalement, c'est guéri !), j'ai eu du mal à le supporter. Peut-être est-ce dû à des années de films emplis de bagarres toutes plus violentes et irréalistes les unes que les autres et à une certaine saturation ? Je ne sais pas. Mais cette Billie, avec sa façon de parler excessive, dans le choix des mots comme dans les sentiments (enfin, les sentiments : à part penser à elle, pas grand-chose), m'a agacé longtemps. Bon, à la fin, j'ai fini par en prendre mon parti, mais elle reste une cause de mon adhésion partielle à l'histoire.

Autre bémol, le rythme : on est lancé dans l'action dès le début. À nous de recoller les morceaux de l'histoire et de comprendre peu à peu qui est qui. Jusque là, pourquoi pas. Mais, est-ce encore à cause de Billie, la mayonnaise a eu du mal à prendre pour moi et j'ai eu du mal à m'intéresser à l'histoire de ce couple en fuite. Malgré l'intérêt de l'idée de base (la disparition de la majorité des hommes et leur nouveau rôle), je me suis ennuyé parfois, avec une impression de déjà vu : les méchants sont des méchantes, mais elles ressemblent à leurs homologues masculins ; la fuite à travers le pays et les chausse-trappe et autres rencontres sentent aussi le réchauffé, pour certaines.
Alors pour sortir du côté négatif, Lauren Beukes a eu de bonnes trouvailles. La communauté religieuse qui sert un moment de couverture aux fuyards est assez réussie, malgré des outrances. La communauté qui les accueille un soir m'a forcément fait penser à une lecture récente, Subtil béton, et m'a semblé plutôt bien vue. D'autres points de vue sur la nouvelle société, qui émaillent le roman, ne manquent pas de subtilité ou de truculence. Les questionnements de Miles, jeune garçon obligé de se déguiser en fille pour ne pas être capturé ou pire, possèdent une bonne couche de profondeur (même si parfois, j'ai eu envie de lui donner quelques claques… je sais, la violence, c'est mal). Ils permettent de s'interroger sur la place de chacun dans notre société. Et c'est toujours bienvenu.

Entre le thriller, le post-apocalyptique et le road movie, Afterland coche bien des cases, mais ne convainc vraiment dans aucune. Ce roman propose une vision caustique et noire d'un monde sans (plus beaucoup d') hommes, mais peine à trouver un ton qui entraîne son lecteur tout du long. Les personnages sont parfois trop caricaturaux pour réellement séduire. Heureusement, la fin, rapide, permet de quitter l'histoire de Miles sur une impression correcte. Qui me fait dire que je me laisserai sans doute tenter, malgré cette légère déception, par le prochain roman de Lauren Beukes.
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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Afterland est un livre assez étrange. Lauren Beukes fait le choix de danser sur plusieurs pieds, au risque de perdre complètement l'équilibre.

Un choix qui au final lui permet de rester campé au sol, même si le résultat est alternativement brillant et un peu boiteux.

Au moins, l'autrice marque sa singularité, avec ce mélange qui fait autant penser à La route de Cormac MacCarthy qu'aux prémices d'une Servante écarlate inversée.

Bienvenue dans le monde de demain (qui débute en 2022), où un virus a décimé 99,99 % des mâles de la planète, en un temps record et dans d'atroces souffrances. La COVID est une plaisanterie par rapport à cette pandémie-là, qui déclenche de foudroyants cancers de la prostate.

On suit le sort de trois personnages principaux, Cole la mère, Miles son fils de 12 ans qui fait partie des 0,01 % rescapés. Et Billie la bizarre soeur de Cole qui n'a qu'une idée, attraper le gamin qui est une mine d'or sur pattes, source de la plus rare des substances : son sperme.

Le roman est à la fois un road trip tendu et le récit de la relation mère-fils qui est mise à rude épreuve. Il faut dire que Miles doit se cacher sous les traits d'une fille pour passer inaperçu, nom de code Mila.

Pas facile pour un jeune ado de gérer ce changement d'identité sexuelle, quand on est soi-même en pleine construction. C'est un des vrais intérêts du récit.

Ce monde après l'apocalypse, dû à la mort de la moitié de l'humanité, tient pourtant encore étonnement debout. L'écrivaine a fait le choix, original, de ne pas décrire un environnement totalement effondré. La crise économique est forte, mais la société américaine tient sur des bases vacillantes. Et le passage vers une société matriarcale est loin d'être idyllique.

Lauren Beukes est sud-africaine, et a eu la bonne idée de construire des personnages principaux qui ont la même origine, déracinés et perdus dans l'immensité américaine, avec comme seule envie de retourner chez soi. La vision d'une étrangère aux USA, avec un fils métis, permet de lancer quelques saillies bien senties envers certaines mentalités de ce pays.

Malgré le fait qu'il fasse 500 pages, l'autrice passe assez peu de temps sur le contexte. Alors que les chamboulements ont des effets sur les moindres actes de la vie courante, tout comme au long des différentes barres de l'échelle sociétale. Elle reste à la surface des choses. C'est dommage, à mon sens.

Et pourtant, le récit est paradoxalement rempli d'une foultitude de très bonnes idées.

L'autrice a préféré axer son récit sur la traque, le thriller, et sur la relation familiale troublée. Sur la mère courage, sur les petites histoires de rencontres aussi.

Les points de vue alternatifs permettent de garder un certain rythme, même si l'écrivaine a une manière bien à elle de raconter une histoire.

C'est son style qui frappe souvent, assez singulier, à la fois acide, provocateur et ironique. Avec un sens de l'humour bien à part.

Je ressors mitigé de cette lecture, déçu de ne pas avoir vécu une plus grande immersion dans ce monde retourné. Déstabilisé parfois aussi par le style. Mais Afterland a de vraies qualités, et les choix forts de Lauren Beukes en font une lecture qui ne peut laisser indifférent.

A noter la sublime couverture d'Aurélien Police (une fois de plus).
Lien : https://gruznamur.com/2022/0..
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Albin Michel Imaginaire a vraiment l'un des catalogues les plus éclectiques à mes yeux de l'univers des éditeurs de l'imaginaire et ses résumés alléchants me poussent souvent à faire des découvertes que je n'aurais pas osé faire autrement car je fais aveuglément confiance à son directeur de collection : Gilles Dumay, que je remercie d'ailleurs pour cette lecture.

J'ai déjà lu et surtout vu des romans et films avec un pitch vaguement similaire à Afterland, c'est-à-dire dans un monde où un gros drame s'est produit à l'échelle planétaire et où on suit un duo qui part sur les routes pour x ou y raisons. Souvent, je n'ai pas été particulièrement emballée par ce que j'ai lu ou vu parce que le mode road trip ne me convenait pas particulièrement dans la façon dont il était écrit ou parce que le drame était un peu trop vite oublié au profit de la série. Pourtant, ici, Lauren Beukes est parvenue à éviter ces écueils et à m'offrir enfin un road trip que j'ai apprécié de suivre !

Il faut dire que d'emblée, je savais grâce à la poignante couverture d'Aurélien Police que j'allais avoir un très beau duo. Cole et Miles/Mila sont une mère et son fils qui tente de fuir le gouvernement et ses sbires qui pourchassent les derniers hommes survivants à un terrible virus qui a éliminé la plupart d'entre eux afin de les garder en cage. Leur désir de liberté, enfin surtout celui de Cole, va alors devenir le plus grand moteur de cette vaste histoire.

Pour nous conter cela, Lauren Beukes a su faire preuve d'un rythme qui m'a totalement convenu. Elle alterne dans un premier temps de manière un peu aléatoire récit de la fuite de nos héros avec souvenirs de ce qui s'est passé pour qu'ils en arrivent là. On découvre donc très très progressivement ce qu'ils fuient et la catastrophe qui a frappé la Terre. Ils font quelques rencontres en cours de route pour les aider dans leur périple et alors que c'était sur le point de devenir un peu routinier à mi-tome, elle nous assène un revirement qui fait changer de direction son récit. Elle réveille ainsi le lecteur et apporte une nouvelle profondeur bienvenue pile au moment où il le fallait. Ce n'est ensuite qu'une succession de chapitre retrouvant un second souffle pour nous conduire jusqu'à un final évident mais juste.

Tout au long de cette lecture, j'ai été très touchée par le duo Cole/Miles-Mila. L'autrice décortique très bien les personnalités de chacun d'eux, dont on entend tour à tour la voix, mais également leur relation un brin compliquée avec ce qui est arrivé. Ce sont les deux survivants de leur famille, le mari/père étant mort et étant chacun à un âge différent de sa vie, étant également d'un sexe différent, ils n'ont pas au final les mêmes aspirations, ce que l'on va découvrir au fil de l'histoire. C'est donc un superbe numéro d'équilibriste auquel se livre l'autrice pour nous décrire cette relation tendre mais compliquée avec une mère qui veut à tout prix sauver son ado de fils, mais avec un ado, qui lui découvre la vie et aspire à une liberté différente, se posant mille questions au cours de ce voyage par rapport à ses croyances mais aussi son genre et sa sexualité.

Le road trip, lui, m'a totalement convaincue parce qu'il n'était pas l'élément essentiel ici. Il partage la vedette avec le récit passé de la façon dont le virus a surgi, s'est propagé puis a changé la vie de milliards d'habitants. Il partage également le haut de l'affiche avec la relation compliquée dont je viens de vous parler, mais également avec le personnage de la soeur de Cole, qui va être l'électron libre et totalement fou, qui va les poursuivre dans leur cabale pour tenter de tirer profit de son neveu. Avec elle, nous touchons à ce qui se fait de pire dans l'humanité : mafia, trafic, drogue, tentative de meurtre, etc. Je n'ai pas du tout aimé son personnage. Je n'ai pas du tout aimé les chapitres quasi psychédéliques où elle intervenait, mais je reconnais son rôle dans cette histoire et le contrepoint qu'elle fournit.

Ainsi, nos héros vont vivre de sacrées aventures en traversant les États-Unis pour tenter de gagner leur liberté. Cela rappelle une littérature foisonnante sur le sujet aussi bien pour le mode road trip, que pour le désir de survivre, mais l'autrice à l'intelligence de toucher aussi à des questions comme la foi, la religion, la mixité ethnique, la sexualité et le genre, ce qui rend le titre vraiment plaisant à lire, car en plus de l'aventure, il y a de la réflexion. 

Afterland a donc été pour moi une excellente surprise, la preuve que moi aussi je suis capable d'apprécier un road trip survivaliste tant que l'auteur ne se cantonne pas à ça et ajoute avec intelligence d'autres éléments à son histoire. Ici, j'ai été touchée par la relation de cette mère et son fils. J'ai beaucoup aimé cette mère courage qui fait tout pour survivre et aussi accepter son fils qui traverse l'adolescence et le deuil de son père. le décor SF avec ce terrible virus était fascinant et bien développé. Je n'ai pas vu les pages défiler tant j'étais prise dans l'aventure de ce duo émouvant parfaitement croqué par Aurélien Police. Alors si la couverture vous intrigue, laissez-vous séduire, vous ne regretterez pas l'expérience humaine que ce voyage vous fera vivre.
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Imaginez, si vous le voulez bien, l'impact que ça aura sur l'industrie, l'agriculture, les transports, l'extraction, l'énergie, la construction, les pompiers, la maintenance des satellites, qui sont tous des domaines généralement pénis-centriques. J'imagine que les féministes avaient raison, pour le coup : le patriarcat n'aura réussi à personne, finalement !
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Pour la rassurer, Devon lui disait que l'ingrédient principal des pires scénarios était la testostérone. Comme si les femmes n'étaient pas capables de commettre des saloperies toutes seules.
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C'est peut-être ça que cachent les super-héros derrières leur masque : non pas leur identité secrète, mais le fait qu'ils sont morts de trouille.
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Je t'aime. - Moi aussi », réussit-il à souffler. Appel automatique, réponse automatique, comme à l'église. Sauf que leur cathédrale se résume aux chiottes d'une station-service abandonnée, dont la rangée de box Vides s'ouvre comme une bouche édentée sous la lumière qui précède l'aube, les toilettes depuis longtemps arrachées par des vandales.
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Oui, on habite là-bas [...] Loin des nazis du quotidien, des tueries si fréquentes qu'elles faisaient désormais presque partie du calendrier scolaire, au même titre que le bal de fin d'année ou la saison de foot, loin de la lente mise à mort de la démocratie, des flics à la gâchette facile et de la terreur d'élever un fils noir en Amérique. Comment faites-vous pour vivre à Johannesburg ? lui demandait-on en Amérique (et particulièrement Devon, son mari américain). N'est-ce pas trop dangereux ? Elle avait envie de leur répondre : Et vous, comment faites-vous pour vivre ici ?
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