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Critiques de Laurence Vilaine (93)
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La Grande Villa

« Ce que nous avons eu, que nous avons perdu, qui est parti, laisse en nous un vide permanent, irréparable. »



La narratrice est seule dans une grande maison au bord de la mer, c’est le deuil de son père qu’elle vient faire là, mais aussi la grande villa devient résidence d’écriture, pour se souvenir, pour sortir de soi les émotions enfouies et pour lui écrire sa peine, ses regrets, les mots qu’elle n’a pas su lui dire. Et comme il n’y a pas de boîte aux lettre à la grille des cimetières, elle en fait un livre entre récit et roman, entre ombre et lumière.



«  Reste à faire de la littérature pour remplir les espaces vides de la mémoire ».



On ne saura pas grand-chose de ce père mais elle assistera impuissante à sa lente décrépitude et à son isolement social, ne reste que la villa, les pièces où elle a entendu le son de sa voix, la lumière du matin à travers la fenêtre.



Disons que cette lecture avait mal commencé : que fait-elle seule dans cette grande villa ? Et pourquoi je n’arrive pas à prendre le train du roman ? C’est peut-être aussi le style qui m’a un peu dérouté au début. Et puis la magie des mots et les belles phrases sur la nécessité mais aussi les difficultés de l’acte d’écrire m’ont séduit.



Un texte très sensible, souvent poétique où l’on comprend que chaque phrase a été travaillée, ciselée, comme l’œuvre d’un orfèvre.



« Écrire, c’est peut-être ça. Un peintre qui s’envole et des lumières qui dansent ».



Challenge Riquiqui 2023.

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La Géante

Une pépite ! 📚🍃



Il y a des livres qui vous happent dès les premières phrases. Qui vous envoûtent. Des livres où vous ralentissez la lecture pour mieux vous imprégner de cette écriture, aussi rude et rocailleuse que l'histoire qu'elle raconte.

La Géante est de ceux-là.



La Géante, c'est la montagne au pied de laquelle vit Noële. Une vie âpre, dure, sans superflu, sans fantaisie, ni poésie autre que celle de ce frère qu'elle surnomme Rimbaud et qui ne parle qu'aux oiseaux. Une vie quasi mécanique, répétitive. Se lever le matin, se laver à l'eau froide, s'habiller couleur de roches et de terre, manger frugal, parcourir la montagne autant redoutée que vénérée, scruter le ciel, récolter bourrache et laurier, assembler du petit bois en fagots pour démarrer le feu, préparer des potions et des onguents pour soigner les gens, dormir et recommencer.



Un jour, pourtant, par l'entremise de lettres qui ne lui sont pas destinées, Noële va découvrir qu'une autre vie est possible. Ces lettres dont Maxim venu se terrer au village le temps d'un combat intérieur, ne veut plus. Elle va découvrir le pouvoir des mots, l'amour, le désir, le manque, la féminité. A travers les mots d'une autre, elle va apprivoiser la douceur et déplier timidement ses ailes.



Le début du roman est un peu mystérieux et lent, puis cette étrange et envoûtante histoire va s'éclaircir et vous offrir des images d'une fulgurante beauté au pied de cette montagne tutélaire impérieuse. Et ce portrait de femme infiniment émouvant, qui tous ses sens aux aguets, va littéralement se nourrir des mots d'une autre pour s'ouvrir à une vie rêvée, cheminer vers la lumière ...



Un livre comme un diamant brut, que j'ai eu envie de relire à peine terminé.
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La Géante

Ceci un roman d'amour je pense. L'amour découvert par une jeune femme solitaire au pied d'une montagne. Elle découvre que les gens s'aiment, parfois sans logique, sans le comprendre, sans l'accepter. Et que l'amour peut être puissant, même quand la mort est là, même quand l'exprimer est difficile. Que l'amour qu'elle doit connaître avant tout est celui dû à elle-même. Parce qu'elle aide les autres, elle aime son frère aussi. Mais c'est elle qui est oubliée, au pied de cette géante.

Ce livre est beau, l'écriture est belle. Pour moi c'est une histoire en creux. Pas celle de cet homme ou de cette femme que nous raconte la jeune fille, mais la sienne, avec la géante pour gardienne.
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Le silence ne sera qu’un souvenir

Une lecture chaotique, le début nous invite dans un drôle de souvenir, on ne sait pas trop où l'auteur veut nous emmener. Il faut dépasser plusieurs pages pour que le récit commence à poser ses jalons. Je dois avouer que c'est assez déroutant. Bien que le roman soit court, il y a beaucoup à en dire sur ce "témoignage" d'un peuple persécuté. La pauvreté, le rejet, l'indifférence, la maltraitance aussi, bien des sujets sensibles qui sont le lot des Roms.

C'est aussi l'histoire d'une Allemagne divisée, la chute du mur de Berlin, le nazisme avec les conséquences que l'ont connait.

C'est au-delà de tout cela, l'histoire d'un homme gadjo qui prend pour épouse une Rom, chose quasi impossible et pourtant. Mais le destin n'est pas toujours heureux, mais là s'arrête mon récit, à vous de poursuivre.

Vous serez certainement très sensibles à la magnifique plume de l'auteur et vous serez aussi touchés par cette histoire des Roms, et peut être cesser de leur coller des étiquettes de voleurs de poules. C'est un peuple avec ses croyances, ses traditions, ses coutumes et ses besoins de vivre dignement dans le respect de chacun. De très grands musiciens aussi et bien d'autres qualités que les gadjés n'auront jamais.

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La Grande Villa

Une femme, la narratrice (l’auteure ?), retrouve un lieu – la Grande Villa -, où elle a déjà séjourné, pour y effectuer une résidence d’écriture, alors qu’elle vient de perdre son père. Les mots manquent pour dire l’absence – on imagine que la perte est récente -, et l’écriture, qu’elle convie, ne répond plus, ce qui donne lieu à des réflexions sur l’écriture, n’apportant cependant rien de bien nouveau. Beaucoup sur la lumière, sur la nage, peu sur le père, sur le chagrin... L’exercice m’a laissée plutôt froide.
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La Géante

Texte de guérisseuse ou bien de mauvaise fée faut-il le lire et le relire, tenter d'escalader ces chemins de montagne, arriver au sommet pour mettre en mots des vies trop ardues où la parole est si rare qu' elle sert à peine à la survie.

Mais quelle herbe sauvage calmerait hurlements et colère face à la mort d'un proche?
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La Géante

La Géante, c’est une montagne que Laurence Vilaine nous invite à découvrir, à parcourir, de sentier en sentier à travers la forêt ou sur les pentes escarpées, une mère montagne secourable où on peut trouver les fagots de bois, les fruits sauvages et les herbes qui vous nourriront, vous chaufferont, vous guériront, mais aussi une montagne qui peut se montrer rude et peu accueillante si vous ne connaissez pas ses secrets. Une montagne au nom féminin où vont se croiser deux femmes : Noële (oui, avec un seul L), qui y est arrivée enfant, qui y vit depuis longtemps, qui connaît presque tous ses coins et recoins grâce à l’initiation de la Tante, une femme dont l’existence est marquée par l’exil, la mort, l’âpre réalité de cette existence en altitude ; Carmen, « la femme qui monte », l’étrangère, l’inconnue qui vient frapper de ses poings et de pioche le sol glacé du village de Noële. Un lien inconnu de Carmen unit les deux femmes : les lettres que Carmen n’a cessé d’envoyer à Maxim, un journaliste venu se réfugier dans la Maison Froide, en face de chez Noële. Lui qui aime tant les mots, les lettres, lus, écrits, a éveillé quelque chose chez celle qui parle très peu.



Laurence Vilaine, que je découvre enfin avec La Géante, nous conte cette histoire avec poésie et simplicité, avec pureté, oserais-je dire, rien que de nécessaire pour entrer avec délicatesse dans la vie de Noële, dans la nuit de Maxim, dans l’attente de Carmen et dans la douceur de Rimbaud. Un caillou, une fleur têtue, un fagot de bois, un peu d’eau fraîche, vous n’aurez besoin que de l’essentiel pour apprécier ce petit bijou littéraire.
Lien : https://desmotsetdesnotes.wo..
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La Grande Villa

Un court texte qui vagabonde. Des pensées qui s'écoulent au fil des pages et interrogent sur le sens à donner à l'écriture comme acte, aux souvenirs laissés par un père tout juste disparu ; des pensées qui éclosent à l'abri de la gangue protectrice qu'offre la Grande Villa.



De bien jolies phrases ciselées avec délicatesse, où les mots suggèrent plus qu'ils ne disent. Une réflexion sur le sens de ce que nous vivons, ressentons, sur le lien entre les générations, non pas structurée mais qui se développe par bribes et par petites touches.



Un rythme lent et apaisant comme une douce mélopée. Bref, un moment bien agréable au coeur de cette Grande Villa.
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La Grande Villa

Masse critique de Babelio. Encore une petite merveille de délicatesse. Une écriture vivante, sensible qui épouse la souffrance du deuil, qui l’allège. Chacun trouve ses outils pour faire face, la marche, comme dans « Inventer le jour « de Fabienne Thomas, la nage et l’écriture ici, pour moi, sans doute ces lectures. Un très bel hommage aux disparus, aux sillons qu’ils ont creusés sur le terrain de nos vies, à leur présence devenue absence. Une très belle évocation du vécu sensible et profond du manque, de la prise de conscience du non-retour, et un très beau ressenti sur l’écriture, sa difficulté et son pouvoir libérateur. Ce livre s’écrit au fil des jours, des humeurs changeantes mais toujours adombré par « la grande villa » devenue sous la plume de Laurence Vilaine un personnage vivant dont on sent le souffle vivant et dont on entend les palpitations.
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Le silence ne sera qu’un souvenir

Difficile de parler de ce livre... Soyons clairs, le texte est absolument magnifique, Laurence Vilaine a trempé sa plume dans un bain de poésie, aucun doute là-dessus...

Quant à ce qu'elle nous raconte... eh bien elle nous raconte plein de choses dont il est un peu difficile de faire le tri..., des choses dures, terribles, atroces même…

D'abord, il y a la communauté Rom : c'est Miklus le narrateur un vieux tsigane, qui raconte son histoire tout en évoquant sa communauté, ces Roms qui se sont sédentarisés sur la rive slovaque du Danube, de l'autre coté du rideau de fer (en tous cas jusqu'à la chute du mur de Berlin évoquée dans ce roman) ; ils se sont installés dans un campement de fortune sur les bords du Danube, un endroit qui n'est que poussière et chaleur en été, boue, déluge et froid en hiver, misère et saleté en toutes saisons. De ces Roms, il nous dévoile certains traits par petites touches, leur amour pour la musique, leur besoin de promiscuité, leur sens de la fête, leur méfiance envers les « gadgé »…

Ensuite il y a l’histoire dont il aurait du parler depuis longtemps mais qu’il n’a jamais eu le courage de révéler qui met en scène une jeune et belle femme Rom et un violoniste « gadjo ». C’est une histoire qui prend sa source pendant la 2ème guerre mondiale, sous le règne nazi, et qui se perpétue de nos jours, dans l’indifférence générale, voire l'hostilité que suscitent les malheurs du peuple Rom. Une histoire de malheur, de discrimination, de génocide, où la musique tient une place prépondérante et fait se rencontrer les communautés tsiganes et juives, les peuples opprimés et rejetés depuis l’aube des temps.

Mais cette histoire, et je ne vous en révèlerai pas plus, est une histoire extrêmement triste, terrible, insoutenable, où le (mauvais) sort s’acharne, la folie rôde et le destin frappe avec une violence maléfique, à la limite du rationnel, alors que Miklus, rongé par le remords parce qu'il a plusieurs fois laissé passer l'occasion de parler et d'arranger les choses, mais plein de tristesse et d'humanité, dévide ses souvenirs...

Un récit envoutant et dérangeant, difficile à lire donc, et en ce qui me concerne, j’étais contente de refermer mon livre… en attendant le prochain roman de Laurence Vilaine dont la qualité d’écriture m’a « scotchée » !

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La Géante

La Géante est une montagne au pied de laquelle l'histoire se déroule. La narratrice a sept ans quand sa mère meurt en mettant au monde celui qu'elle appelle Rimbaud qui sera un enfant "différent": il ne parle pas mais vit avec la nature, notamment avec un petit-duc. Elle appelle la Tante celle qui les a hébergé: elle transmet à la gamine tout son savoir faire (fagots, plantes etc.)

La construction est un peu compliquée...la narratrice, adulte, suit une femme dans la montagne: cette femme enveloppée dans un grand manteau rouge voulait entrer dans la chapelle; elle n'y parvient pas, la nuit tombe et Rimbaud lui indique la Maison froide pour s'abriter. Sa soeur avait prévenu cette femme mais ne s'attendait pas à ce qu'elle vienne.

Suivent des lettres; certaines décrivent une situation difficile en RDC, elles sont adressées à Maxim et signées Carmen.

La femme au manteau rouge creuse une tombe au cimetière (normalement les cercueils sont gardés dans la chapelle jusqu'au dégel) Maxim est enterré et Carmen part dans la montagne suivie en douce par la narratrice qui sait tout de son amour depuis que pour aider le facteur, elle a porté elle-même les lettres à la Maison froide alors occupée par Maxim à qui elle apporte aussi des fagots. Il perd la vue et demande qu'on lui lise la lettre. Deux ou trois par semaine mais il les refuse et Noële les garde pour elle et...les lit. Elle va découvrir, l'amour, le désir, le manque, l'inquiétude de Carmen. "J'ai lu et relu ses lettres, j'ai répété les baisers, le creux des bras, les murmures..."

Noële s'occupe un peu de Maxim (qui préfère se débrouiller seul) De jour en jour, il s'affaiblissait. Il meurt et Noële prévient Carmen, la femme au manteau rouge qui est arrivée aussitôt. Je n'ai pas bien compris ce que la jeune femme est allée faire dans la montagne ni pourquoi Noële l'a suivie.

Un texte poétique parfois elliptique. Une construction complexe; amour, beautés de la nature. Un bon moment de lecture.
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La Géante

Noële vit au pied de la Géante. Elle ramasse branchages, bleuets et bourrache, en forme des fagots pour l'hiver et fabrique des onguents et des tisanes. Son frère qu'elle nomme Rimbaud est un bienheureux mutique, qui ramasse des cailloux. Repliés sur eux même, ils mènent une existence simple.

Maxim est journaliste, solitaire et se sachant atteint d'un mal incurable affectant sa vue, il est venu s'installer loin du bruit et des lumières de la ville.

Carmen quant à elle, parcourt le monde et entretient une relation épistolaire avec Maxim, qu'elle aime et pour lequel elle s'inquiète.

Noële va découvrir par le biais de ces lettres, que le facteur lui confie, le désir amoureux, le manque, leur pouvoir et leur fragilité...



L'écriture est singulière et la construction du texte surprenante, à tel point que, dans un premier temps, le lecteur se perd dans l'histoire, puis lorsqu'il en comprend le concept, la lecture devient délice.

Un roman libératoire, vibrant d'humanité, tendre et sensible où les silences résonnent dans la vallée des sentiments...

A découvrir sans faute.

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La Géante

Un bouillon d'émotions.

La narratrice Noële n'a jamais quitté sa montagne, surnommée la Géante. Sa vie est spartiate entre la préparation de ses tisanes, onguents et autres confitures. Elle passe ses journées dans la montagne à cueillir des plantes, ramasser du bois mort pour ses fagots. Son frère "Rimbaud" est là sans être là, mais toujours vigilant.

Face à eux, la Maison Froide où Maxim vient se réfugier pour faire la gerre à son crabe, loin de Carmen qui continue à lui écrire des lettres d'amour. Noële découvre alors tout ce qu'elle n'a pas connu et dont elle soupçonnait à peine l'existence.

L'écriture est sensible, l'histoire émouvante, le cocktail réussi même si pour moi le début a été difficile car les personnages apparaissent, s'entremêlent sans que nous sachions qui est qui, qui fait quoi, pourquoi ? La magie opère quand nous avons les réponses à ces questions.
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La Géante

Un roman court et poétique qui est mon premier contact, et quel charmant contact, avec la plume de Laurence Vilaine. Déjà, je sais que je chercherai à revenir à cette auteure à l'écriture agréable, qui colle au sujet avec talent.

Qu'est-ce qu'est la Géante? La Géante, c'est cette montagne au pied de laquelle vit notre narratrice depuis ses sept ans, sans jamais la gravir, sans jamais la quitter, cette montagne dont elle a appris à cueillir les plantes pour constituer ses remèdes, et qui va accueillir un homme malade, grand reporter, dont la narratrice, curieuse, va découvrir le courrier et par-là, s'éveiller à ce que sa vie lui refusait. Dans les mots d'une autre, la maîtresse de ce malade, la chrysalide va peu à peu s'ouvrir, jusqu'à l'arrivée de la femme derrière les mots, et le dernier acte.

C'est très beau, parfois un peu déroutant, ça monte lentement, sûrement, comme sur un chemin escarpé, de mots en mots, et c'est très fort. En revenant sur ma lecture, je me rends compte qu'il reste tout de même une question inachevée dans les révélations de la fin, quelque chose qui est un peu dommage, mais tant pis, la Géante peut bien garder quelques secrets!
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La Géante

La géante, imposante, règne sur le paysage et les êtres qui l'entourent. Noële d'abord qui vit à son rythme, qui fait commerce de ses fagots, de ses plantes et qui chante si bien la nature qui lui procure tout cela. Rimbaud, le frère de Noêle, chante lui aussi mais ne parle pas.

Et puis, arrive Maxim qui vient respirer le bon air de la Géante pour soigner son cancer...

Le verbe de Laurence Vilaine est fort et puissant, coloré et poétique, dédié à la nature et à la découverte de l'Autre.
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Le silence ne sera qu’un souvenir

Cette présentation de l'éditeur vous dit le récit. Je préfère vous parler des mots.



Ce roman là, c'est une voix, une voix d'outre-tombe, profonde, terrible, une voix aux accents tragiques, aux accords farouches, une voix de nuit, de loin, le verbe tranchant, la langue douloureuse, déchirante, pourtant retenue, pourtant éloquente; une voix comme un écho qui raconte les outrages, le gouffre de l'incompréhension culturelle, l'exclusion autant imposée que revendiquée.



C'est un roman, pas un essai. S'il raconte l'histoire de Tsiganes " retors à éduquer et à blanchir " [...] " dont on aura égaré le dossier à Nuremberg " installés sur cette rive du Danube, il le fait dans ce dernier souffle d'un vieil homme qui vous prend, prend tout. On s'abîme dans ce livre, le vent y est froid.



Ce roman là, c'est un chant dont on connait trop certains refrains sans avoir jamais écouté les couplets, une ballade qui n'est pas sérénade, une complainte qui n'est pas plainte, une mélopée en mémoire communautaire, la tradition de l'oralité, le monologue devient choral. Le Rom ne lit pas l'écriture ou la partition, ne s'y lie pas, sa musique qui raconte se transmet et se partage, elle ne s'apprend pas.



Cette lecture qui saisit, c'est une main posée sur le bras qui vous retient, juste une pression qui vous retourne, des mots et un regard envoûtants aussi sombres et durs que le bois des marionnettes, que celui des violons. Qui résonnent. Longtemps. Depuis longtemps.



Ce livre, c'est une exigence et une révélation. Pour ce qu'il dit et pour la façon dont il le dit.



" Gadzeske basavav andro kan, rineske andro jilo, disaient nos ancêtres, je joue à l'oreille des gadjé, je joue au coeur des miens. ". Pas cette fois, cette musique là atteint tous les coeurs. Et malgré le titre, c'est bien le silence qui s'impose la dernière page tournée.




Lien : http://www.lire-et-merveille..
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La Géante

J'ai pris un plaisir incroyable à lire ce livre de Laurence Vilaine.

Les mots coulent, glissent et résonnent. Pas de fioriture, juste quelques regards, paroles et pensées magnifiquement déposés sur ces quelques pages.

L'intrigue s'entremêle parfaitement avec la maitrise des mots de l'autrice.

Les temps se mélangent, la Nature et les émotions humaines cohabitent.

L'espace des possibles dans l'ombre d'une montagne immuable et mystique appelée La Géante.

L'histoire d'une femme solitaire qui rentre en écho avec les sentiments amoureux de deux inconnus.

L'amour des lettres et des mots, la Poésie qui surgit au détour d'une virgule, le Brut, le Simple et le Beau qui se réinventent à chaque page…



Je viens de refermer ce livre et manque ostensiblement de subjectivité, mais si cette citation de Laurence Vilaine vous évoque un tant soit peu quelque chose, nul doute que vous ne perdriez pas votre temps à découvrir et parcourir ces quelques pages …



« Ecrire, c'est crier sans bruit, cracher entre les lignes, aimer en secret, frissonner beaucoup ».
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La Géante

L’auteur possède une belle écriture, très poétique. J’ai aimé les lettres de Carmen, mais je me suis ennuyée pendant le reste du récit. Trop de poésie tue la poésie et j’avoue que tant de métaphores m’ont complétement éloigné de l’histoire et des personnages. J’ai eu du mal à gravir la montagne, j’ai peiné, me suis arrêtée, j’ai repris ma marche et enfin terminé ma route, mais que me restera-t-il finalement : une grande tristesse devant cet homme qui maltraite son amoureuse passionnée. J’aurais tellement aimé apprécier ce livre qu’une amie m’avait conseillé. Une autre fois peut-être.
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La Géante

Au pied de la Géante, la montagne dominant la vallée, Noële vit avec son frère Rimbaud dans un univers minéral et végétal. Les plantes guident sa vie et ses décoctions qu'elle revend le samedi. Tisanes, onguents, pommades, solutions qui apaisent les maux et éloignent le mauvais œil. Seule la fleur bleue des sommets résistent à Noële. Elle a appris son savoir de sorcière guérisseuse depuis ses 7 ans auprès de la Tante, depuis la mort de sa mère et la disparition de son père, depuis le premier cri muet du frère.

Dans cette vie en harmonie avec la nature et les saisons, deux âmes blessées surgissent : Maxim, reporter malade, venu se réfugier dans la maison froide et Carmen, photographe journaliste, en mal d'amour qui lui écrit des lettres sans réponse.

Bouleversement de l'amour et de la beauté en ces paysages arides et sauvages, Noële devient factrice et spectatrice des messages et attentions.

Un joli roman à la plume poétique qui m'a, je l'avoue, parfois un peu perdue. L'introspection teintée d'impressions fugaces rendent abstrait ce tableau de paysage où l'humain et la nature ne font qu'un.
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La Géante

« La Géante » Laurence Vilaine (Zulma 188p)

Magnifique…

… Même si j'ai été un peu dérouté par le début de l'histoire, où tout semble se mêler, les personnages, les lieux, et surtout l'intrigue en elle-même, avec des rebonds parfois elliptiques ; d'où mon envie aussi de n'en rien dévoiler ici, de laisser chacun se débrouiller et faire son chemin en suivant les mots de la narratrice, pour entrer à son rythme dans la trame du récit.

Mais au bout de quelques pages, je me suis laissé apprivoiser par le texte de Laurence Vilaine, j'ai saisi les fils narratifs de la pelote qu'elle déroule ou tricote pour nous, et, entré certes avec un peu d'hésitation ou de perplexité, une fois dedans, je n'en suis plus sorti, je n'ai plus lâché le roman.

Il y a quatre personnages féminins dans ce récit. La Géante, c'est la montagne de ce coin magnifique et reculé du Mercantour (ceux qui connaissent s'y retrouvent), la montagne à l'ombre de laquelle se déroule ce récit plein de douleurs. La Tante, elle, a élevé Noële la narratrice et Rimbaud le petit frère muet, simple mais si proche de la nature, après la disparition de leur mère. La Tante, qui a transmis à Noële son savoir-faire des plantes de la montagne est morte depuis longtemps, ce sont donc deux personnages silencieux qui accompagnent de leur présence muette et forte le récit, c'est leur ombre tutélaire qui imprègne toute l'histoire.

Et il y a donc Noële la narratrice, qu'on imagine plus toute jeune, qui vit seule à l'écart du village, aux côtés de son frère Rimbaud. Et enfin Carmen, journaliste aux quatre coins du monde, qui écrit à Maxim, l'homme qu'elle aime passionnément et qui s'est retiré dans une cahute reculée au pied de la Géante.

Noële, on le sait vite, de sa vie de peu, de sa vie solitaire, n'a jamais rien su de l'amour. Elle va en découvrir la puissance extraordinaire en entrant secrètement et par effraction dans le lien qui unit Carmen à Maxim.

Mais au-delà de l'histoire si émouvante, ce qui m'a impressionné plus que tout dans ce roman, c'est la poésie magnifique de Laurence Vilaine. Flotte dans son récit un parfum chargé de mélancolie d'un Giono en hiver, ne serait-ce que par la proximité avec la nature. Et surtout, je ne peux m'empêcher de songer à Erri de Luca, à l'extraordinaire ciselure de son écriture. Crayon en main, j'ai souligné et souligné nombre de phrases si belles…

« Septembre marchait vers l'automne sans brusquerie… »

« L'orage de la nuit avait lavé le ciel, dans le bleu je suis allée chercher de la paix. »

« Rimbaud n'a pas beaucoup encombré la Tante. S'il pleurait, c'était en silence et il ne dérangeait pas. Il ne parlerait pas et serait donc idiot, et elle l'a laissé faire, tout seul le tour de la maison à quatre pattes, tout seul ses premiers pas. Il a appris à marcher en s'écorchant le nez sur les montagnes, les papillons et les oiseaux l'ont fait se relever en souriant, et les chèvres puis les chamois lui ont indiqué le chemin toujours plus haut. »

« Ça sentait le serpolet qui faisait paillasson à la porte, elle regardait la nuit dans les yeux… »

« La Géante boudait entre l'hiver et le printemps. »

« Rien jamais ne console sauf peut-être la vérité à condition qu'elle ose. »

« Le vent énervait maintenant la montagne, couchait les herbes autour des petits lacs et les peignait dans l'autre sens. »

« (…) l'amour est capable de ça, il a la force de chasser novembre pour recevoir juillet (…) »

Etc, etc…

« La Géante », un livre superbe à lire deux fois, au moins.

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