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Critiques de Marguerite Yourcenar (824)
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Anna, soror...

Que dire de la plume de Yourcenar sinon qu'elle est aussi précise que poétique, aussi scientifique que sublimant les lieux qu'elle décrit ?

On plonge dans l'histoire napolitaine avec aisance, on devine Espagnols et Italiens au Fort Saint-Elme et l'on s'émeut sur la vie de Valentine, dont la seule rébellion vient des textes dont elle se permet la lecture.

Au-delà de ces plaisirs esthétiques, l'histoire elle-même et ses personnages m'ont par moment agacée, peu portée sur le drame et la séparation, je n'aime pas voir se flétrir les personnages d'un roman, et particulièrement sous fond de culpabilité religieuse et d'attente de la délivrance dernière...

Mais le style et le tableau historique valent pleinement la lecture!
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Anna, soror...

Nous sommes à Naples en 1575, Anna nait après un unique frère, dans une famille noble et très pieuse. Tout n'y est que devoir et érudition. Le père a des rapports réduits au plan matériel avec son fils, inexistants avec sa fille. Les enfants devenus jeunes adultes, accompagnent leur mère en Sicile pour surveiller des vendanges sur leurs terres. Tout y est : la chaleur, les insectes, l'ennui et le désœuvrement dignes d'un « Désert des Tartares » de Buzzati. Tout peut arriver aussi car la jeunesse ne peut se contenter de s'étourdir de prières et de lectures de philosophes.



Ce récit est une déambulation dans le temps passé, dans ces contrées d'Italie pour dénoncer avec habileté le statut de victime de la jeune femme, soumise, forcément coupable de tout puisqu'elle est une femme. L'auteure dénonce aussi l'hypocrisie de ces gens avec une finesse inouïe, un style à l'économie, subtil et efficace. Cette hypocrisie les amènent à des conduites complètement déraisonnables, à l'envers de ce que devrait édicter la religion ou la philosophie.



Son écriture relève presque d'un jeu mathématique : le jeu du mot adéquat pour viser au plus près l'impression, la sensation, le sentiment qui apparaissent et disparaissent fugacement.

Elle mène à un plaisir immense et intense : la littérature.



La postface de Marguerite Yourcenar est tout aussi captivante que le roman. Elle l'écrit en 1981, soit plus de cinquante ans après la rédaction du roman, pour sa réédition. Elle explique avec son style précis, entre autres, la genèse de cette histoire particulière.

Elle a vingt-deux ans et est en vacances à Naples où elle découvre tous les lieux qui lui inspirent cette histoire.

Elle justifie également le choix du sujet, que je ne vais pas dévoiler.



Laissez-vous tenter par cette longue nouvelle si vous n'avez pas encore eu la chance de découvrir cette grande écrivaine intemporelle.
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Anna, soror...

♥️ « Personne ne sait encore si tout ne vit que pour mourir ou ne meurt que pour revivre ».



♥️ Marguerite Yourcenar et moi nous rencontrâmes pour la première fois hier soir, le 19 décembre 2020, par une soirée d’hiver aveuglante d’obscurité, dans laquelle seule une petite lumière chaude m’éclairait. J’étais entièrement disposée à la découvrir ; je crois qu’il s’est passé une chose unique, que je n’ai connu qu’avec une seule autre auteure, Marguerite Duras - ce fut le coup de foudre. Il doit y avoir quelque chose entre les Marguerite et moi.



♥️ Anna, soror... Le titre m’a happée. Un prénom, une sœur, des points de suspension. Un mystère qui n’en était pas un, il se déroulait dans ces pages un drame aux racines antiques. Dans la Campanie du XVIème siècle, l’espagnole Donna Valentine se meurt. Épouse silencieuse, dévote et lasse, elle pousse son dernier soupir en ordonnant à ses enfants, Anna et Miguel, de ne point se haïr. Ce qui brûle en eux est d’une tout autre nature. Un désir intense les consomme, une attraction magnétique, une puissance incontrôlable. Fiévreux, Don Miguel tente de s’échapper, de s’éloigner, il rencontre une jeune fille étrange qui fait chanter les serpents, créatures sataniques annonciatrices de malheur... La nuit devient mère de tous les vices.



♥️ Don Miguel part en guerre, dans laquelle il trouve la mort, sans gagner la bataille qui faisait rage en lui. Dès lors que sa sœur apprendra cette fin tragique, elle n’aura de cesse de chercher le Salut de son âme, abandonnant son corps coupable à un mari indigne et, par la suite, à quelque autre amant insignifiant.



♥️ Dans la Postface de ce court roman, Yourcenar écrit : « Les faits qui ont compté, au lieu de se déposer au fond, emergent à la surface et gagne avec nous la mer ». Fidélité, amours interdites, religion et Histoire se mêlent ici pour créer un roman d’une pureté incomparable, d’une écriture passionnante et saisissante. La subtilité du langage électrise le lecteur qui, à tout moment, se demande si les personnages ont succombé aux pulsions qu’ils tentent en vain de combattre et qu’ils décident d’expier, au prix de leur propre vie, dans la Mort ou dans le Sacrifice.





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Anna, soror...

Œuvre de prime jeunesse, corrigée puis remaniée, Anna, soror... évoque la passion incestueuse qui lie un frère et une sœur.



Yourcenar, on le sait, est davantage graveur que peintre et son style cristallin voire janséniste, s'il sied à l'époque où elle situe sa longue nouvelle -la fin du seizième siècle à Naples puis dans les Flandres-, dessert les amours "cauniennes" de ses héros. La pénombre mordorée qui enveloppe les soies noires, les vertugadins repoussants ou les gants de cuir cordouan masque la fièvre des âmes et des corps. Les prunelles enflammées, les souffles courts, les objurgations et les pâmoisons ne suffisent pas à incarner cette lente montée d'un désir interdit entre le fier Miguel et la tendre Anna.



Ayant mis le mors et la bride à son histoire d'amour, Yourcenar s'égare alors sur les chemins de traverse du fantastique (quand elle évoque une serpentine sorcière) ou de la chronique historique et laisse cette transgression volontaire se frelater. Son brouet servi "En un vase à long col, et d'étroite embouchure" nous laisse sur notre faim.



Comme la diaphanéité de ces sardoines exposée "aux derniers rayons du soleil (...) et tout enveloppée de l'or oblique du crépuscule" Anna, soror... laisse transparaître, deçà delà, des flamboyances ou des ombres qu'on aurait aimé voir explorées. L'explicit, à ce titre, est superbe.



En effeuillant la Marguerite... Je l'aime, un peu.
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Anna, soror...

Fiévreux, c'est l'adjectif qui à mes yeux décrit le mieux ce court roman de Yourcenar. Il y a dans ces pages quelque chose d'étouffant, entre ce château de Campanie, bâti au-dessus d'un marais où rode le paludisme, et ce long voyage en huis-clos en compagnie d'un cadavre, et ces ors baroques des églises napolitaines. La muraille du fort Saint-Elme étouffe, elle aussi, avec ses murs épais, elle emprisonne une intrigue resserrée sur quelques personnages. Ma lecture elle-même a été fiévreuse, ou plutôt fébrile ; en un soir s'est déroulée cette histoire étrange d'un amour interdit et dévoreur entre un frère et une soeur - les silences et les non-dits s'accumulent dans une famille qui s'effrite.

Le style, assez dépouillé, transmet bien cette ambiance très "XVIIe espagnol" ; et l'Italie dépeinte par Yourcenar est presque méconnaissable tant elle paraît dure, voire hostile - on accueille avec bonheur les moments de fraîcheur nocturne.

Le livre m'a fasciné. C'est toute une époque que restitue Yourcenar, comme elle sait bien le faire ; et c'est l'ardeur dévote, la bravoure fanfaronne, la pompe baroque que l'on retrouve à la lecture d'Anna, soror.
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Anna, soror...



Après avoir posté une citation extraite de ce livre, je fus surprise par une réaction : « Histoire d'inceste entre un frère et une soeur. A fuir. » Qui doit fuir ? Ce fut en fait une succession de surprises. L'histoire est clairement annoncée. La thématique similaire est abordée dans par exemple « La Patiente » de Jean-Philippe Mégnin sans que cela fasse sourciller qui que ce soit. Ou pire encore, les romans qui abordent des « transgressions » de toutes sortes sont légion ne semblent pas effrayer plus que cela les lecteurs. Peut-être alors est-ce choquant de la part de Marguerite Yourcenar. Toujours est-il qu'au lieu de me refroidir, l'effet contraire se produisit, probablement lié à mon esprit de contradiction.



Cette histoire d'amour dans la Naples du XVIIème ressemble à un tableau tout en clair-obscur de le Caravage. L'issue est sans appel : suicide programmé pour l'un ; l'autre refuse le couvent pour expier sa faute en cette période de Contre-réforme et son mariage placé sous le signe de la fidélité ressemble à une petite mort. Roman court au style ciselé.





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Anna, soror...

La notion de sociale de l’interdit et chrétienne de la faute sont balayés par la beauté des mots et des sentiments traduits grâce à l’érudition de l’auteure à seulement 22 ans. C’est bluffant.



C’est le roman d’amour d’Anna et Miguel comme celui de Thémar et Amnon dans l’ancien testament ou celui de Byblis et Caunus dans la mythologie grecque.

C’est l’extase et la souffrance d’une passion défendue.



C’est un roman historique où le royaume d’Espagne vers 1600 domine une partie de l’Europe avec le sud de l’Italie moderne : La Campanie, Naples, la Calabre et la Sicile ainsi que dans le nord : La Flandre espagnole.



C’est une tragédie où la passion est trop forte pour ne pas s’accomplir.

Miguel s’embarque sur une galère vers une mort annoncée comme un salut.

Anna sera mariée sans amour ni haine. « Il vit dans mon deuil »

Don Alvare, le père entre ascétisme et débauche ne pardonnera pas à sa fille la mort de son fils.



Les mots choisis avec soin ont à mes yeux une valeur si forte que je n’en mesure pas forcément la portée mais ils provoquent la sensation de me fondre tellement dans les personnages que j’en retire un plaisir quasi tactile. Leurs poids si lourds de sens pèsent sur le récit sans en obscurcir la compréhension.

C’est mon premier Yourcenar, j’évalue l’immensité de la culture de cette femme ainsi que son aptitude à transmettre l’ambiguïté des sentiments, l’intensité d’un deuil, la douleur de la culpabilité, l’austérité de la pénitence et la force à braver le proscrit. « C’est contre les falaises les plus abruptes que se lance le plus violemment la vague. »



Belle découverte, profonde et salutaire.

« Ainsi, chacun lisait différemment ce livre de la création qu’on peut déchiffrer en deux sens, et dont les deux sens se valent, car personne ne sait encore si tout ne vit que pour mourir ou ne meurt que pour revivre. »

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Anna, soror...

Court Roman ou longue nouvelle selon les avis;



Mon premier roman de l'auteur, une réelle découverte.



Conseillée par un libraire à qui je demandais quoi lire, pour commencer de cet auteur. Il m'a répondu, "par le début pardi", le roman qu'elle a écrit à 22 ans;

À son âge, je n'aurais pu écrire si bien et si intelligemment. Bon, ok maintenant non plus. Mais quand même.



Je sors littéralement de ma zone de confort. Le vocabulaire, le récit, l'époque et l'histoire... rien ne m'était familier.



Qu'à cela ne tienne.



Marguerite Yourcenar parle "comme on peint" dit un autre lecteur. Je trouve l'expression bien vraie et expliquant magnifiquement le style.



C'est très court, pas très drôle mais tellement beau.



Je déconseille fortement de lire les avis avant de lire un livre. Et je m'en félicite encore pour celui-ci. En lisant les autre avis, ils y révèlent toute l'histoire.

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Anna, soror...

« Anna, soror… » Deux mots tirés d’une épitaphe écrite par une sœur pour son frère bien-aimé. Aimé d’un amour interdit et aliénant, l’un et l’autre pourtant « imbus jusqu’aux moelles de la piété quasi pâmée de la Contre-Réforme ». C’est en l’an 1575 que naît Anna, derrière les épaisses murailles du Fort Saint-Elme dont son père, un homme froid et distant, est gouverneur. Sa mère Valentine, une femme « à la fois aimante et détachée, passive par sagesse et non par faiblesse », lui donnera un jeune frère prénommé Miguel. C’est à la mort de Valentine, sorte d’idéal féminin selon Yourcenar, que les deux enfants élevés dans un relatif isolement vont s’effrayer progressivement de l’attirance contre-nature qui les lie l’un à l’autre.



Un moment retenu par les filets de la raison et de la dévotion chrétienne, l’interdit sera vite consommé mais à jamais inscrit dans leur chair et leur mémoire. Don Miguel s’acquittera volontairement du prix de la défiance en s’engageant à bord d’une galère du roi tandis qu’Anna consentira à un triste mariage dans le plus grand détachement, tout entière retenue aux amarres du passé. Exil du corps et de l’âme, à jamais prisonniers d’une nuit défendue.



Dans ce roman de moins de cent pages, écrit par Marguerite Yourcenar à l’âge de vingt-deux ans au cours d’un séjour à Naples, le style déjà savamment ciselé, bien que retravaillé cinquante-cinq ans plus tard, augure déjà pleinement la grâce littéraire à laquelle l’autrice parviendra. La plume est souple, bien que structurée d’une élégante richesse, et l’histoire s’articule sans longueur ni temps mort. Yourcenar aurait voulu pour cette œuvre de jeunesse un roman-océan, mais les hasards de la vie lui dictèrent un autre chemin. Ce n’est peut-être pas plus mal, car la concision sied bien à cette histoire d’inceste et de destin résigné. Voilà une invention romanesque d’une étonnante maturité pour une créatrice à l’époque si jeune et encore naïve des choses de la vie. La postface rédigée en 1981 par l’autrice éclaire brillamment les racines et l’âme de ce texte qui mérite que l’on s’attarde un moment dans le crépuscule napolitain.
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Anna, soror...

“Je vais vous raconter, avant de vous quitter, l’histoire d’un petit inceste près de Napoli…” que Dalida me pardonne, j’ai pris quelques libertés avec les paroles, dictées par le contexte…



Marguerite Yourcenar, première femme élue à l’Académie Française, plaçait ce court roman, écrit dans la fulgurance d’un séjour transalpin, sous le patronage de peintres de la Renaissance, El Greco et Caravaggio et c’est vrai… elle écrit comme on peint.



Pourquoi cette impression ? Sans doute parce qu’elle embrasse l’Histoire, politique ou culturelle, dans l’histoire (voyez la nuance de “h”…). Cela sans même avoir besoin de s’abaisser à une énumération pompeuse d’oeuvres artistiques, elle nous en dit le moins possible mais nous encourage à créer le décor, à enrichir l’atmosphère. Charge à nous d’ajouter le son lointain d’un luth, le vent qui souffle entre les colonnes du cloître, le froid du marbre contre le dos d’Anna. L’écrivain, exigeante, stimule le lecteur, elle convoque son imagination et son érudition, même inconsciente, nous prenons une part active à l’effort.



“Les adieux s’étaient prolongés en silence. Il avait dû, très doucement, dénouer les bras tièdes qui se serraient contre sa nuque. Sa bouche gardait encore la saveur âcre des larmes”



Ce récit de jeunesse, quelque peu remanié de l’aveu même de l’auteur, ne souffre aucune surabondance. Le style est d’orfèvrerie, d’une limpidité rare, la succession des phrases est d’une exigence formelle vertigineuse. C’est fascinant comme suivre des yeux le cours limpide d’un ruisseau. Du reste, c’est bien la métaphore aquatique qu’avait en tête Yourcenar qui voulait initialement nommer son roman “Remous”.



Certainement, les détracteurs de Yourcenar pourront arguer que, comme souvent, la distanciation et la froideur du récit ne permettent pas une empathie des plus immédiates mais cela ne doit plus nous surprendre… derrière cette apparence, dur de ne pas penser à la douleur secrète de Marguerite l’orpheline de mère dans la narration du trépas de Dame Valentine.



Yourcenar se justifie vaguement dans sa Postface, d’avoir choisi, comme sujet de son roman d’amour, un inceste entre frère et soeur. Elle rappelle certains exemples littéraires et conçoit l’inceste comme le dernier tabou, le dernier interdit, et l’on entend “dit” dans interdit c’est à dire quelque chose d’indicible, dans un XXème siècle où, selon l’auteur, l’adultère et l’homosexualité ne goutent plus assez le souffre d’époques plus corsetées. Cela se discuterait, car c’est précisément l’homosexualité doublée d’adultère qu’a choisi Marguerite Yourcenar pour thème d’Alexis, quelques années plus tard.



Il manque justement quelque chose de l’étoffe de “Alexis ou le traité du vain combat”, dont j’ai déjà parlé ici, qui partage avec “Anna, Soror…” la grâce de la plume yourcenarienne, merveilleuse de précision mais qui comporte, en sus, de nombreuses et incisives réflexions sur la nature humaine, dont on manque un peu ici.

Ce n’est pas à dire que la profondeur de la rivière est moindre dans “Anna, Soror…” l’ascèse janséniste du père Don Alvare pour qui “tout n’est rien”, et la résilience constante d’Anna par exemple placent ces deux personnages bien au delà du commun des mortels, si le cours d’eau est un peu moins sinueux, peut-être est-il voulu plus trouble par l’écrivain…

Ce roman en clair obscur est une très belle parenthèse esthétique et historique mais ne charrie pas toutes les demi-teintes, toutes les nuances de gris qui font la richesse du roman d’Alexis.



Qu’en pensez-vous ?

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Archives du nord - Souvenirs pieux

Peut-on parler d’autobiographie si l’on considère que Marguerite Yourcenar fait partir son tracé généalogique depuis « La nuit des temps » (chap. I) pour finir à son arrivée au Mont Noir à l’âge de six semaines ? (p 370).

Elle ne réfute pourtant pas ce nom (p 340, p 373) quand bien même elle parle plus de sa famille que d’elle-même. Elle se justifiera lorsqu’elle affirme que « le reste est peut-être moins important qu’on ne croit » (p 374) assurant que pour son père « l’idée de se dépeindre ou de s’expliquer profusément ne lui venait pas « (p 343). Elle lui ressemble sur ce point. Lire plus sur http://anne.vacquant.free.fr/av/index.php/2022/06/14/marguerite-yourcenar-archives-du-nord/
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Blues et Gospels

Marguerite Yourcenar s’était installée aux Etats-Unis et très tôt, lors de ses voyages dans les états du sud, le Deep South, elle avait été fascinée par les chants profanes ou sacrés de la communauté noire. Tout au long de sa vie elle rassembla et traduisit des negro-spirituals, des blues et des gospels. Chants de ferveurs, certes, de gaité et d’espoirs, mais aussi de misère et d’errance. Dans ce livre quatorze blues et autant de gospels accompagnent les photos de Jerry Wilson : des paysages grandioses, des couchers de soleil sur les eaux d’un fleuve (est-ce le Mississippi ?), des arbres centenaires, des enfants, des vieillards, aux visages creusés, visages lourds d’ans et de secrets, des cérémonies religieuses, et des scènes de bar. Tout un monde, plein de couleurs, le plus souvent attachant, où cependant se laissent deviner, ici et là, l’accablement et la détresse sociale. Marguerite Yourcenar était une grande femme de lettres, mais aussi une mélomane et une militante. Un livre qui ressemble donc, écrit au crépuscule de sa vie, à un véritable don.
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Comme l'eau qui coule

Des nouvelles pas toujours faciles à lire, avec pour sujet l'inceste entre un frère et une sœur, qui se situe à Naples, au XVIe siècle. Et puis il y a Nathanaël, un homme presque sans culture, dans cette Hollande du XVIIe siècle. Vient aussi Lazare son fils... Un ouvrage prenant, pour le moins.
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Comme l'eau qui coule

La vie de Nathanaël, dans la Hollande du XVIIe siècle, est le sujet d’Un homme obscur. Un homme ordinaire, qui, à cause d’une méprise (ou plutôt d’une peur infondée) s’enfuit, quitte sa famille, pour échapper à une mise à mort qu’il imagine certaine, et toute sa vie sera faite de fuites en avant, de recherche de travaux faciles et de voyages, pour comprendre que tout aurait pu être différent s’il n’avait pas pris une décision finalement lourde de conséquences alors qu’il n’était qu’adolescent…

On sent tout le respect, la tendresse même, de l’auteure pour ce personnage discret et sans orgueil, qui pose sur toutes choses un regard dénué de préjugés et plein d’humanité, reste digne et honnête au cours des tribulations qu’il subit plus qu’il ne les choisit, et savoure l’existence dans ce qu’elle lui apporte. Malgré son « clair-obscur » personnel (le premier titre de cette nouvelle était « D’après Rembrandt », un maître du genre) c’est-à-dire des lacunes dans sa culture et son éducation, il contemple, compense et comprend son époque, très contrastée elle aussi (on sent que l’on passe graduellement des ténèbres – bien injuste formule – du Moyen-âge au futur avènement des Lumières) avec l’intelligence du cœur. Et en gardant l’esprit ouvert, sans doctrine ni a priori. Un cas rare en ce siècle.



Le héros d’Une belle matinée est Lazare, le fils de Nathanaël, un enfant doué pour le théâtre, qui finira par être emmené par une troupe de comédiens shakespeariens, pour son plus grand bonheur. Comme son père, il est sans prétention, fait ce qu’on lui demande et ne se pose pas trop de questions. Comme lui aussi, il voyagera et se contentera de ce que la vie lui apportera.

Mais il recevra toute la clarté à laquelle son père – qu’il n’aura pas connu – ne tenait pas : celle du passage de l’ombre de la mort à la lumière, puisqu’il porte le nom d’un ressuscité, celle des feux de la rampe, la flamme d’une passion pleinement vécue. Et celle, radieuse, d’une belle matinée. Avec le joli double sens de la matinée théâtrale ?

Cette fois on sent tout l’amour que Marguerite Yourcenar porte au théâtre, qui permet de vivre cent vies en une, à la fougue de la jeunesse, à l’engagement des acteurs dans un vibrant hommage sans réserve.

Deux êtres qui n’ont pas été soutenus par leurs familles (d’ailleurs inexistante pour le plus jeune), ce qui leur a finalement conféré une grande indépendance de pensée et de destinée. Deux trajectoires originales.

Une écriture superbe et des textes qui ne peuvent laisser insensible…
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Comme l'eau qui coule

Mais comment est-il possible qu'à mon âge, je n'eusse encore jamais lu Marguerite Yourcenar ? Moi qui aime tant le beau style et la belle écriture, qui tente de privilégier les plumes féminines, pourquoi n'avais-je encore jamais rencontré la première femme élue à l'Académie française ?

Je sens que mon histoire avec elle ne fait que commencer.

Nous sommes au 17ème siècle, en Italie, en Hollande ou au Nouveau Monde.

"Anna, soror…" raconte l'amour de deux enfants orphelins, perdus dans le monde et dans la vie ; un amour d'autant plus intense qu'il doit rester caché, retenu. En quelques brèves scènes, Yourcenar dresse magistralement le décor et l'atmosphère de tous les épisodes de ces vies sacrifiées.

"Un homme obscur" m'a plu encore davantage. La courte existence de Nathanaël est celle d'un jeune homme sensible et réfléchi, un homme sans orgueil ni ambition, mais qui sait découvrir dans toutes les circonstances la beauté du monde, qui se laisse toucher par la Nature ou la musique : "Il pensait en tout cas qu'il eût été mal de ne pas s'absorber dans la lecture du monde qu'il avait, maintenant et pour si peu de temps, sous les yeux."

"Une belle matinée", la dernière et la plus courte de ces trois nouvelles, nous permet de terminer sur une vision enfantine pleine de fraîcheur et d'enthousiasme, celle du petit Lazare quittant sa vie terne pour rejoindre une troupe de théâtre, tout bouleversé qu'il est par les mots de Shakespeare.

Et moi j'ai été bouleversée par les mots de Yourcenar, par la très grande beauté de sa langue ciselée, impressionniste, et par ses héros aussi modestes que profonds.



Challenge ABC 2023-2024
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Comment Wang-Fô fut sauvé

Marguerite Yourcenar a adapté pour les enfants une histoire extraite des 'Nouvelles Orientales' qu'elle a écrites en s'inspirant de vieux contes chinois.

Cette histoire sous forme de conte terrible et magnifique à la fois se termine bien : Wang-Fô échappe à la cruauté de l'Empereur en s'enfuyant à l'intérieur de sa peinture.
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Comment Wang-Fô fut sauvé

L'histoire de Wang-Fô illustre bien que l'art est un miroir trompeur de la réalité. Un conte oriental cruel et poétique.
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Comment Wang-Fô fut sauvé

Un texte merveilleux !!!!!!!!!!
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Comment Wang-Fô fut sauvé

Ce livre ne m'a pas plus car l'histoire est très étrange . Même si il y avait pas mal de suspense comme quand Wang-Fô est arrêté ,ont ne sait pas pourquoi il est arrêté.J'ai appris qu'en Chine on peut être arrêté pour avoir fait des bonnes choses. Mes émotions : J'ai été ému car ce vieux peintre donnait ou échangeait ses peintures alors qu'il pouvait être riche.Mais un jour cet homme fut arrêté alors qu'il n'avait rien fait.Je trouve que ce livre est triste.
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Comment Wang-Fô fut sauvé

Avec Comment Wang Fo fut sauvé, Gallimard Jeunesse nous livre un conte merveilleux qui allie la poésie de Marguerite Yourcenar à l'art de Georges Lemoine. Ce grand illustrateur a écrit à propos de son travail « J’ai l’impression de ne pas avoir illustré cette histoire du peintre Wang-Fô, J’ai seulement marché sur les chemins où lui-même et Ling venaient de passer. J’ai touché le sol gelé de l’auberge et regardé les pavements du palais impérial ». Les aquarelles de Georges Lemoine frappent par la pureté des lignes et le jeu de tons pastel. Magique !

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