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Savez-vous quelle femme a écrit quelques-uns des plus beaux poèmes d'amour ? Elle était russe et voulait tout embrasser.
« Les poésies d'amour », de Marina Tsvetaïeva, c'est à lire aux éditions Circé.
"Nos poèmes, ce sont nos enfants. Ils sont plus âgés que nous parce qu'ils vivront plus longtemps que nous. Plus âgés que nous depuis l'avenir. Voilà pourquoi ils nous sont aussi parfois étrangers."
Je suis exclue de naissance, du cercle des humains, de la société (...) Je suis sans âge et sans visage. Peut-être suis-je la Vie même.
... Je sais qui je suis : Une danseuse de l'âme.
L'amour est pour moi le lien privilégié de l'infini et l'étroitesse m'a toujours étouffée.
Neige, neige
Plus blanche que linge,
Femme lige
Du sort : blanche neige.
Sortilège !
Que suis-je et où vais-je ?
Sortirai-je
Vif de cette terre
Neuve ? Neige,
Plus blanche que page
Neuve neige
Plus blanche que rage
Slave...
Rafale, rafale
Aux mille pétales,
Aux mille coupoles,
Rafale-la-Folle!
Toi une, toi foule,
Toi mille, toi râle,
Rafale-la-Saoule
Rafale-la-Pâle
Débride, dételle,
Désole, détale,
À grands coups de pelle,
À grands coups de balle.
Cavale de flamme,
Fatale Mongole,
Rafale-la-Femme,
Rafale : raffole.
(1923)
Les nuits sans celui qu’on aime — et les nuits
Avec celui qu’on n’aime pas, et les grandes étoiles
Au-dessus de la tête en feu et les mains
Qui se tendent vers Celui —
Qui n’est pas — qui ne sera jamais,
Qui ne peut être — et celui qui le doit…
Et l’enfant qui pleure le héros
Et le héros qui pleure l’enfant,
Et les grandes montagnes de pierre
Sur la poitrine de celui qui doit — en bas…
Je sais tout ce qui fut, tout ce qui sera,
Je connais ce mystère sourd-muet
Que dans la langue menteuse et noire
Des humains — on appelle la vie.
Chaque chose doit resplendir à son heure, et cette heure est celle où des yeux véritables la regardent.
Dans la brume un monde s'élance - nomade :
Sur la terre ennuitée errance - des arbres
Le vin d'or en train de monter - aux grappes
De maison en maison tournée - d'étoiles
Les cours d'eau à rebours inclinent - à fuir
Et moi je veux sur ta poitrine - dormir.
14 janvier 1917
“Ah, nuit !
Quelque part des sources courent,
je glisse vers le sommeil.
Je dors presque.
Quelque part dans la nuit
un homme se noie.”
L'enfant commence en nous bien avant son commencement. Il y a des grossesses qui durent des années d'espoir, des éternités de désespoir.
Le diable et autres récits
(...)
Je suis passée sur terre d'un pas de danse ! --- Fille du ciel !
Un tablier plein de roses ! --- sans écraser les jeunes pousses !
Je le sais, je mourrai au crépuscule, ou le matin ou le soir !
Dieu n'enverra pas une nuit d'épervier pour mon âme de cygne !
D'une main douce, j'écarterai la croix sans l'embrasser,
Je m'élancerai dans le ciel généreux pour un dernier salut.
La faille du crépuscule, ou le matin ou le soir --- et la coupure du sourire...
---- car même dans le dernier hoquet je resterai poète !
Décembre 1920