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Citations de Michel Moutot (82)


Bienvenue à San Francisco, jeune homme, le paradis de la liberté. Ici, la règle c'est chacun pour soi.
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Les reflets du soleil couchant teintent d'or des cathédrales de nuages, font cracher à un banc d'orques des jets de feu, nimbent plages et récifs d'une lumière irréelle.
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Je parle une demi-heure ; raconte le feu, la chaleur, la fumée, les odeurs, le danger, la flamme bleue qui mord l'acier, le masque dans lequel tu étouffes mais qu'il garder pour ne pas t'intoxiquer, les semelles qui fondent, les mains brûlées à travers les gants, les lames d'acier qui déchirent les vêtements et parfois la peau, les pinces géantes des pelles mécaniques, le grondement des bulldozer, la poutre découpée qui se cabre, la sirène des alertes quand il faut tout lâcher et détaler pour revenir au même endroit une demi-heure après, la peur quand tout s'effondre autour de toi, la camaraderie qui te fait serrer dans les bras des inconnus, les aboiements des chiens, l'horreur des corps morcelés que nous voyons avant les pompiers parce que nous sommes devant eux pour ouvrir la voie, les images qu'on ne peut chasser quand, le soir à l'hôtel, on essaie de dormir, les larmes qui creusent des sillons sur les visages mangés de poussière, les mains si douloureuses qu'on ne peut les fermer, le dos en feu, la toux qui te prend et ne te lâche plus, la bouteille d'eau comme une délivrance ; la fatigue, la colère, la frustration de ne trouver aucun survivant.
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Il glisse dans son étui l'outil des ironworkers : la spudwrench - clef à mâchoire. En acier noir, d'un côté elle sert à visser les gros boulons, de l'autre, avec son extrémité pointue, elle se glisse dans les trous percés en usine et permet d'aligner les orifices pour y glisser les boulons. C'est son arme, son trésor, son fétiche, son tomahawk. Dans la famille depuis trois générations, elle est émoussée côté clef et marquée de mille entailles côté pointe, mais rien ne la lui fera remplacer.
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A partir d'ici, la chaussée, les trottoirs, les voitures, les arbustes, les lampadaires, les panneaux, les poubelles, tout disparaît sous dix centimètres de cendres grises, fines comme du talc. Un paysage d'hiver nucléaire, un fim de science-fiction. Un Pompéi moderne. Comme les jours de neige sur New York, la rumeur de la ville a disparu. Le silence est si profond qu'il bourdonne dans mes oreilles. Je n'entends pas le bruit de mes pas ; le mélange de poussière, de cendres, de feuilles de papier et de béton pulvérisé étouffe tout.
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Il entend la machine avant de la voir. Le souffle rauque d’une bête de fer et de charbon, toutes les trois secondes. Grincements de chenilles, grognements mécaniques, craquements de roches, volutes de fumée et de poussière au-dessus du canyon. L’écho du bulldozer se mêle à la rumeur du Pacifique, la couvre par moments. C’était donc vrai.
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Un sentier serpente en remontant entre les massifs de pieds de sorcière, les lupins, touffes d'armoise, broussailles à fleurs jaunes et bleues. Il mène à un vallon creusé par un torrent qui chante entre les rochers avant de tomber en cascade dans l'océan. L'homme et sa monture cheminent plus d'une heure à flanc de colline, en direction d'une forêt de séquoias qui se dresse dans un repli, à mi-pente, comme les colonnes d'un temple naturel.
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Derrière lui, les sommets arides de la chaîne de montagnes Santa Lucia accrochent les nuages, dans un ciel céruléen. Un paysage de cyprès couchés par les vents du large, bosquets de pins Douglas dans les vallons, maquis impénétrable où les nuances de vert se marient au jaune des genêts, prairies salées par les embruns, sentiers millénaires des Indiens Esselen, ravins profonds où chantent des torrents, falaises sombres en à-pic sur les flots, chutes d'eau douce sur des plages de sable clair. Au loin, l'infini du Pacifique, son bleu cobalt, ses caps, ses récifs, ses îlots couverts d'oiseaux, ses forêts d'algues géantes, ses rouleaux couronnés d'écume, ses horizons mouvants où courent les tempêtes.
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La Route One arrive de Los Angeles, d'où elle est partie il y a plusieurs années, pour rallier San Francisco, dans le cadre des grands projets du président Roosevelt. Pour les Californiens des villes, c'est un symbole de progrès, le point final à l'épopée de la conquête de l'Ouest ; les ouvriers au chômage depuis le début de la crise de 29 et tout juste embauchés sur le chantier y voient la fin de leur cauchemar, un retour au travail, la satisfaction d'empoigner un outil ; les fermiers de la région l'opportunité d'exporter plus facilement récoltes et bétail, l'armée une voie nécessaire à la protection de la côte, les politiques une réalisation prodigieuse à mettre à leur actif.
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Il a fallu bâtir trente-deux ponts, faire sauter des pans de montagne et s'abîmer dans l'océan des dizaines de machines, aplanir des collines, creuser défilés et tunnels pour mettre ce point final à la conquête de l'Ouest. Les Dodge et les Caterpillar ont remplacé les lions des montagnes et les mustangs, les derniers grizzlys se terrent au fond des canyons, survolés par les condors de Californie que des chasseurs venus des grandes villes vont bientôt exterminer. Des motels, des stations-service et des parcours de golf vont pousser le long de la route, les touristes vont accourir de tout le pays pour découvrir ces grandioses paysages, les bus des Greyhound Lines vont relier en quelques heures Los Angeles à San Francisco.
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Devant le tracé de la route One entre Monterey et San Luis Obispo sur un plan de trois mètres de long déplié sur une table de travail, l'entrepreneur décrit avec exaltation "l'oeuvre pionnière" que son entreprise a l'honneur de mener à bien, "le point final à l'histoire de la conquête de l'Ouest", "un balcon sur l'océan unique au monde", "la plus belle route d'Amérique" que des automobilistes viendront parcourir de tout le pays, et au-delà. Les paysages sont extraordinaires, c'est un privilège de faire partie des hommes qui vont les révéler au monde. Il ne dissimule pas les difficultés de la tâche, au premier rang desquelles les risques d'éboulement et les glissements de terrain.
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Les six flèches gothiques du grand temple mormon, visibles à des kilomètres à la ronde au-dessus des toits de Salt Lake City, lui servent de repère. (..)
Il vient de passer trois jours éprouvants dans les Grandes Plaines, enfilant d'interminables lignes droites au rythme entêtant du bicylindre qui, à soixante-dix ou quatre-vingt kilomètres à l'heure, tourne à bas régime. Les paysages du Midwest, avec leurs champs de blé ou de maïs, leurs fermes flanquées d'éoliennes et leurs granges peintes en rouge, ont fait place à des prairies sans fin, océans d'herbes qui ondulent sous le vent, où paissent des troupeaux de vaches parfois surveillés par des hommes à cheval qui saluent sur son passage, en agitant leurs chapeaux, le cavalier mécanique. Il s'est longuement arrêté près d'une rivière en s'apercevant que ces animaux à l'épaisse fourrure qui s'abreuvaient n'étaient pas des boeufs mais des bisons, comme sur les gravures des journaux illustrés qu'il dévorait, enfant, au coin de la cheminée à Bangor.
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Trente hommes viennent d’être embauchés, dont cinq Noirs venus de la Nouvelle-Orléans, des as du marteau-piqueur à ce qu’on dit. Pas de place pour eux aux river camp, l’administrateur a été formel.
S’ils veulent bosser, ils feront des allers-retours entre Vegas et le chantier tous les jours. Même paie que les autres, on n’est pas dans le Mississippi, mais ils se démerdent pour manger. Seaux d’eau séparés. On ne va quand même pas boire dans la même louche que des negroes, pas vrai les gars ?

p. 207
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Le fleuve descendu des Rocky Mountains déchire ses oripeaux de torrent de montagne, se teinte de rouge des filons de cuivre et de fer qu’il éventre depuis des millénaires, devient le maitre du Sud-Ouest, la source de vie, l’artère que des hommes intrépides, des rêveurs ou des fous ont décider de fermer ou d’exploiter.
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Les suspensions du Golden Gate Bridge seront posées, la Porte d’Or sera franchie. Le planning de l’ingénieur en chef Joseph Strauss, qui a jusqu’ici été tenu, voire devancé, prévoit une inauguration de l’ouvrage avant l’été 1937.

Vues de la berge, leurs silhouettes graciles se détachent sur le bleu dur du ciel de mai. Bridgemen et ironworkers, les meilleurs spécialistes de la construction d’ouvrages métalliques sont venus de tout le pays pour participer à ce chantier dont tout le monde savait, avant le premier coup de pioche, qu’il entrerait dans la légende.

p. 85-86
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"C'est la deuxième pelle à vapeur qu'on perd, en plus des trois camions et de je ne sais plus combien d'ânes, Ça commence à faire beaucoup. Et avec le morceau de montagne qui vient de descendre, on n'est pas près de passer ce cap. Même le sentier a disparu. il va falloir bâtir des structures de soutènement. Allez me chercher le géomètre, il faut qu'on refasse les calculs.(P. 159)
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ls n’ont aucun document d’identité, aucune existence légale, descendants des premiers habitants de ces montagnes Transformée par l’arrivée des conquistadors en clandestins, fuyards perpétuels, proscrits sur les terres de leurs ancêtres. S’ils connaissent chaque sentier, chaque ruisseau et chaque séquoia géant, qu’ils traitent et honorent comme des divinités, s’ils prédisent l’arrivée d’une tempête ou quand se lèvera le brouillard de mer, ils n’ont aucun droit face à l’administration naissante de l’État de Californie.
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« Rien de trop beau pour mon Willy. Diplômé, mon fils. Et avec avec les honneurs. En route pour l’université, des études d’ingénieur. Mon dieu, si sa mère pouvait le voir, si Helen était encore parmi nous… Comme elle serait fière de son petit orphelin… Ce garçonnet au regard de chiot inquiet que nous avons découvert dans le bureau du directeur de St Cloud’s, que nous avons adopté, nourri, protégé, aimé, à nous en faire exploser le cœur. Pourquoi n’est-elle pas à mes côtés pour le voir, grand adolescent musclé, presque un jeune homme, sourire de miel, jambes d’athlète et bras de statues grecque ? Quelle injustice ! »
Will n’évoque pas souvent son souvenir. Son père s’en étonnait un peu, au début. Mais quatre ans ont passé, c’est ainsi qu’il calme sa peine. Il apprend à vivre sans elle, de tourne vers l’avenir, et c’est bien. Tous deux regardent parfois, au moment du dîner, la photo encadrée sur le mur de la cuisine, où ils sont tous les trois sur la plage, en tenue de bains. Son père pose la main sur son épaule. Il sourit, ne trouve pas les mots. Lui non plus. Elle est là, entre. Pas besoin de parler.
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Arrivé au sommet d’un petit mont, il embrasse du regard une côte découpée, des rocher sombre où s’accrochent des cyprès torturés par les vents du large, des successions d’îlots et de récifs sur lesquels se brisent, dans des gerbes d’écume, les vagues du Pacifique. Les rayons du soleil, à travers les milliards de particules dorées, nimbe le paysage d’une lumière irréelle. Plus loin, ils devine des alignements de falaises, succession de montagnes couvertes de forêts de pins et de séquoias. Par endroits, là où s’engouffre la furie des tempêtes océane, des prairies sont piquetées d’arbustes nains, comme plaqués au sol par la main d’un géant.
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"Un royaume à l'écart du monde,une nature généreuse, d'une beauté spectaculaire, une mine d'or secrète, deux épouses pour suivre la Voie de Dieu, trois enfants et un quatrième à venir, pas un voisin à la ronde, c'est tout ce que j'étais venu chercher en Californie", se dit Moses, qui se félicite d'avoir rompu avec l'Eglise de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, ses taxes, ses règles, ses hypocrisies et ses injonctions.
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