A l'occasion du "Livre sur la Place" 2021 à Nancy, Nicolas Chaudun vous présente son ouvrage "La nuit des aventuriers" aux éditions Plon. Rentrée littéraire automne 2021.
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Note de musique : © mollat
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En seize ans et six mois de magistrature, Haussmann aura, de sa propre initiative, percé 64 kilomètres de voies nouvelles, suscité la construction de plus de 40 000 immeubles, multiplié par trois le nombre des réverbères à gaz, planté 80000 arbres d'alignement - cinq fois plus aux bois de Boulogne et de Vincennes ! - et creusé 585 kilomètres d'égouts ou de collecteurs souterrains.
Bien après la chute de l'hercule, Jules Simon, l'ennemi juré, sera bien obligé de le reconnaître : "II fit, en dix ans, plus qu'on avait fait en un demi-siècle."
Le repentir demeure en dessous de la vérité.

Et que dire de la table du préfet ? Les grands soirs, c’était encore un service à la française. Cent soixante domestiques déboulaient alors, leurs favoris au rouleau,
d'une raideur impeccable sous la livrée municipale : culotte rouge, habit bleu, aiguillettes d'or. Leur cortège serré passait une multitude de mets différents, sans discontinuer, parmi lesquels l'hôte époustouflé n'avait qu’à designer de temps à autre ce dont il voulait bien se régaler.
L'incroyable énumération de bisques et de fumets, de turbotines et de croustades, de poissons en gelée, de cailles et d'écrevisses en buissons, dont un passage de sorbets vous reposait avant l'attaque des salmis de volaille et des rots, des gigues et, pourquoi pas, des suprêmes, puis celle des desserts et des mignardises à n'en plus se relever, tout ce bréviaire français, en somme, courrait sur des pages entières d'un velin filet d'or fin. Oh! il y avait toujours une fine bouche pour se plaindre, tel ce Fortoul, pâle ministre de I'lnstruction publique, qui, au soir du baptême du prince imperial, notait dans son journal: « Le gras était bien mauvais, et Ie maigre peu abondant. »
L’abondance, pourtant, même pour un rapide buffet d'honneur, faisait les choux gras des gazettes quotidiennes. On s'en délectait à l'avance : "Sept grands buffets semés ça et là [...] distribueront aux invités 25 000 glaces, 35 000 verres de punch, 15000 bouillons, d'innombrables gâteaux, sorbets, chocolats, liqueurs fraiches, cafés glaces, vins de toutes espèces."
Ces vins, justement, éclipsaient bien souvent les prouesses culinaires. La cave de l'Hotel de Ville faisait l'orgueil de son hôte. Pour avoir régné sur la Guyenne, Haussmann, il est vrai, s'y entendait. Et cela se savait. Le beau monde sifflait donc tout ce qu'Yquem, Lafite et Léoville pouvaient livrer de flacons, auprès desquels un chambertin ou une romanée-conti trouvait parfois grâce. Ce vin-là devait vous griser sans vous abattre, puisque après il fallait danser.

Longtemps après la défaite, liquéfié sur votre lit de mort, vous accrocheriez la manche du fidèle ami qui vous veillait : "Dis-moi, Conneau, nous n'avons pas été des lâches à Sedan?" Non, Sire, vous n'avez pas été lâche. On vous reprochera amèrement d'avoir livré la place et l'armée sans avoir tout tenté, et cela 'malgré l'avis des généraux indignés", proclamerait jusqu'en 1918- quel hasard ! - le Nouveau Larousse illustré. Mais non, Sire, pas lâche ; un peu faible, peut-être ; humain, plutôt. Vous l'avouerez plus tard : "On a prétendu qu'en nous ensevelissant sous les ruines de Sedan, nous aurions mieux servi mon nom et ma dynastie. C'est possible. Mais tenir dans la main la vie de milliers d'hommes et ne pas faire un signe pour les sauver, c'était au-dessus de mes forces [...] Mon cœur se refuse à ces sinistrés grandeurs." Cette faiblesse, précisément, fut votre ultime grandeur. Car cette décision inéluctable, vous l’avez prise en souverain. Ce serait votre dernier geste d'empereur, un geste déplorable certes, mais accompli au-dessus d'une mêlée illisible, au milieu d'élans contraires et de tiraillements aveuglants. Vous avez "vu" le désastre et pris, d’autorité, la décision de ne pas le consommer tout entier.
De la même manière que le recouvrement de l'Alsace et de la Lorraine a pansé les plaies de la "débâcle", le siècle des totalitarismes a cicatrisé les égratignures du coup d'Etat. La grossièreté de nos mœurs politiques, leur attirail bling-bling surclasseront pour toujours la vulgarité présumée de la cour impériale. Napoléon III reparaît en champion des nationalités ; en homme fort par lequel aurait pu, dans la paix, arriver la démocratie... L'expédition du Mexique se justifierait presque, en contre-feu face à l'hégémonisme américain.
A ce train, on finirait par réhabiliter la plus fantasque de nos souveraines, et le plus lascif de nos monarques.
Ni Murat ni Ney n'ont fait Ie Premier Empire ; tout au plus l’ont-ils illuminé . Si Haussmann n'a pas plus fait Ie Second, il en apparaît comme l'atlante, et Ie restera parce qu'il en porte sur les épaules tous les paradoxes.

Le palais d'Orsay et ses décors par Chassériau? On l'a oublié. La manufacture des Gobelins avec sa collection de tapisseries dont certaines dataient du XVème siècle? Bah! les lissiers n'en ont pas moins poursuivi leur activité. L'Hôtel de Ville? On l'a rebâti; son pastiche a effacé dans les mémoires les fastes de l'original et les plafonds à jamais perdus d'Ingres et de Delacroix. Les Tuileries? Mais c'est un jardin! Ah? Il y avait un château, aussi? Oui, symbole de la monarchie...Oh bon! Mais le Louvre? Qui se rappelle l'incendie du Louvre. Peut-on imaginer un instant ses collections réduites en cendres? ses charpentes carbonisées? ses murs noircis? Le palais pourtant a perdu là ses avant-bras, pas encore dévolus au musée, fort heureusement . Il y a perdu également un pavillon et sa galerie, avec mille richesses, cette fois des trésors de bibliophilie... Il s'en est fallu d'un rien pour que la Grande Galerie de peinture ne flambe comme paille au milieu des combats.

Ce 1er septembre se lève à peine, et déjà s'avance le cortège des désolations. Il n'est pas 6 heures quand une ambulance ramène en ville le maréchal de MacMahon méchamment blessé. Ange s'est immédiatement porté à son chevet : un éclat d'obus lui a emporté la fesse. Il a aussitôt confié le commandement au général Ducrot, qui depuis deux jours milite pour le retrait sur Mézières. Tout semble donner raison à Ducrot : à Mézières, où Palikao l'a fraîchement expédié en train, le corps d'armée du général Vinoy attend l'arme au pied ; d'autre part les wagons de vivres qu'on avait vus en souffrance à Carignan ont, presque par erreur, fini leur course là-bas - c'est ainsi qu'on manque de tout à Sedan. Ducrot sait ce qui lui reste à faire. Il n'empêche, ce changement de chef est un coup dur. Car voilà maintenant deux heures que l'on se bat. Des Bavarois se sont lancés à l'assaut de Bazeilles, un village prospère à trois kilomètres au sud-est de la citadelle. Pour le moment, les "marsouins" de la division d'infantene de marine du général de Vassoigne - on dit la "division bleue" en font du pâté-Mais pour combien de temps ?
Le peuple, la belle affaire : Les élus de la République le piétinent. Ils n'entendent rien à ses aspirations, restent sourds à ses appels à l'aide. Alors il s'émeut, le peuple, il déferle dans la rue, se masse aux carrefours. Il bloque des quartiers entiers... Et c'est l'armée, elle-même que, de plus en plus souvent, on a recours pour réprimer ses émois.
Accaparée par des arguties institutionnelles et les indices boursiers, une élite haut perchée, véritablement hors-sol, paralyse le pays.
– Mais pas à n’importe quel prix ! Je suis la voix du peuple, pas son bourreau ! Je ne m’empare du pouvoir que pour lui redonner sa dignité.
– Le peuple de Paris ne veut pas qu’on lui donne. Il veut prendre. Prendre des libertés et non en recevoir ; prendre des palais et non y être convié… L’ordre et la prospérité ne peuvent tolérer cette impudence.
– J’entends démontrer le contraire.
Le cinéphile de 30 ans vous émunerera sans hésitation les productions des trois dernières années,le nombre d'entrées de chacune, es effets spéciaux- la oui, les effets spéciaux. De surcroit, il fredonnera de bon coeur Gainsbourg ou les Kinks, courra à Londres visiter l'expo Pink Floyd et se ruinera pour un strapontin à l'ultime concert des Stones, ce qui au passage, en fait le compagnon de sortie idéal de son père voire du père de celui ci, preuve indiscutable d'appréciation rétrospective!
Pour autant, Murnau, Capra, Mankiewicz, De Sica, Kurosawa, ces noms là ne lui disent rien : il ne conçoit tout simplement pas de culture cinématographique.