« Les Enfants Verts» traduit par Margot Carlier (2016, La Contre Allée, 88 p.) est un tout petit opuscule censé narrer les « singuliers évènements survenus en Volhynie, consignés par William Davisson, médecin de Sa Majesté le roi Jean II Casimir » en l’an 1656. Convié par Louise Marie de Gonzague, l’épouse du roi, le docteur William Davisson parcourt les confins de la Pologne et peu loin de Mohilew, maintenant Moguilev en Biélorussie, il doit s’arrêter dans un manoir pour se soigner. On lui amène deux enfants sauvages. « Les enfants étaient gardés sous clef aurez-de-chaussée d’un entrepôt où se trouvaient une multitude de choses utiles et inutiles ». « Ils faisaient leurs besoins n’importe où, accroupis, mangeaient avec leurs doigts, goulûment, refusaient d’avaler de la viande qu’ils recrachaient aussitôt ». Peut-être étaient-ce « des elfes polonais ». Chose curieuse, leur « peau était comme parsemée de petits points verts, que j’avais d’abord pris pour de la crasse ». Le mythe du bon sauvage, qui ne mange pas de viande, thème cher à Olga Tokarczuk. C’est aussi la référence à l’autre, qui est différent et donc que l’on ne veut ni voir ni comprendre.
Commenter  J’apprécie         00
Les enfants verts est un petit conte fantastique d'Olga Tokarczuk. Idéal pour découvrir cette autrice polonaise (si ce n'est pas déjà fait), prix Nobel de littérature 2018 ! En plus c'est publié par une petite maison d'édition de ma région, La contre allée !
Comme toujours chez cette autrice, le surnaturel se mêle au réel. Ici, l'invention du peuple des enfants verts permet de questionner l'altérité et la peur de l'étranger, le tout sur fond d'histoire de la Pologne et de l'Europe.
Au XVIIe siècle, William Davisson, un botaniste, devenu médecin particulier du roi polonais Jean II Casimir, suit le monarque dans un long voyage entre la Lituanie et l’Ukraine. Esprit scientifique et fin observateur, il étudie le climat et les coutumes locales. Un jour, lors d’une halte, les soldats du roi capturent deux enfants. Les deux petits ont un physique inhabituel : outre leur aspect chétif, leur peau et leurs cheveux sont légèrement verts et ils ont la plica polonica...
Commenter  J’apprécie         00
Un polar antispéciste! Janina Doucheyko est une vieille originale qui vit dans un hameau des Sudètes, près de la frontière tchèque. Elle est ingénieur, enseigne l'anglais aux jeunes enfants et aide son ancien élève à traduire Blake, tout en se livrant à un exégèse astrologique. Surtout elle souffre énormément du traitement que ses semblables réservent aux animaux. Aussi quand des chasseurs, brutes sanguinaires, connaissent une mort violente, elle est persuadée que ce sont les animaux qui se vengent...
J'ai beaucoup aimé cette fantaisie et suis très étonnée qu'une telle œuvre puisse recevoir le Prix Nobel de littérature (positivement étonnée). J'en lirai sûrement d'autres.
Commenter  J’apprécie         00
Magnifique ! Quand j'ai commencé à lire je me suis demandée où l'auteur allait nous emmener et sans se rendre compte on est pris dans l'histoire, on finit avec la larme à l'oeil ... pourtant rares sont les livres qui me font cet effet.
Commenter  J’apprécie         00
Un livre bouleversant où les personnages vous pénètrent. Exceptionnel d’humanité, d’amour pour les gens différents, les laissés pour compte, ceux qui sont seuls.
Commenter  J’apprécie         00
Absolument inclassable. La narratrice, Jenina, ancienne ingénieure, vit dans les Sudètes. Elle est férue d’astrologie, qui d'après elle explique tous les événements de la vie. Une série de meurtres inexpliqués se produit. Toutes les victimes ont été des chasseurs. Jenina y voit l'intervention des animaux pourchassés.
Une intrigue très originale, mais au final une impression mitigée.
Commenter  J’apprécie         00
Bien sûr c'est lourd à manier, mais quel plaisir d'accéder à l'érudition par le biais de récits croisés croisant piété, émerveillement, bassesse, la vie d'alors ...
Commenter  J’apprécie         00
Même si l'oeuvre semble manquer, apparemment, de... sérieux ? sa pertinence psychologique est irrésistible: Janina Doucheyko existe, on l'a rencontrée dans « sa » forêt polonaise et poétique, militante vivace, sympathique - jusqu’au dénouement brutal: aimer les bêtes, c’est aussi oublier... pourquoi.
Commenter  J’apprécie         00
Une mort étrange sur un plateau isolé entre la Pologne et la Tchéquie dont est témoin Janina Duszejko, la narratrice, vieille intello astrologue et révoltée contre les chasseurs, est le point de départ de ce thriller écolo…
Il y a des morts et une énigme bien sûr, mais surtout beaucoup d'humour, une dénonciation d'une société patriarcale et violente (pas très différente de celle de nos campagnes françaises) et une description passionnée et poétique de la nature et des habitants des Sudètes.
Commenter  J’apprécie         00
? pas lu plus de 50 pages
Commenter  J’apprécie         00
Critique de Bernard Quiriny pour le Magazine Littéraire
Découverte en France voici dix ans avec Dieu, le temps, les hommes et les anges, et surtout Maison de jour, maison de nuit, Olga Tokarczuk, 48 ans aujourd'hui, a obtenu pour Les Pérégrins le prix Niké, la grande récompense littéraire polonaise. (Elle l'a même reçu deux fois, aussi bien le jury que les lecteurs ayant voté pour elle.) Ceux qui ont lu ses romans labyrinthiques et fragmentés ne seront pas surpris par la forme de ce pavé inclassable inspiré par le thème du voyage, qui tire son titre du nom d'une secte russe, laquelle associait l'immobilité au mal et le mouvement au salut. Il suffit de faire défiler les pages pour constater que Les Pérégrins ne relèvent d'aucun genre : outre que s'y succèdent des textes de toutes les tailles (de quelques lignes à plusieurs dizaines de pages), on y trouve de superbes reproductions de cartes et de plans en noir et blanc, toutes plus bizarres les unes que les autres, tirées d'un improbable recueil hollandais intitulé The Agile Rabbit Book of Historical and Curious Maps. À elles seules, elles constituent déjà une invitation au dépaysement et renforcent l'impression grisante d'avoir affaire à une sorte de cabinet de curiosités littéraires, un recueil qui mélange nouvelles, récits, témoignages, contes orientaux, anecdotes vécues ou historiques, considérations morales et autres remarques philosophiques, dans un ensemble où tout se répond.
Au fil des pages, donc, on visite des aéroports, des salles d'attente, des chambres d'hôtel, des musées (le Josephinum de Vienne, avec sa collection de cires anatomiques). On rencontre des conférenciers littéraires, des scientifiques de retour de colloque (thème : la matière noire), des explorateurs. Quelques allusions littéraires apparaissent ici et là, spécialement à Borges. Se dessinent ainsi des thèmes récurrents qui dépassent de très loin le motif initial du voyage et qui confèrent indistinctement au livre son unité - notamment le goût de l'auteur pour les monstruosités anatomiques, les collections d'organes anormaux et la meilleure manière de conserver tout cela dans le formol, évoqués à de nombreuses reprises. Il y a dans ce livre plein de richesses un côté «miscellanées», presque revendiqué quand Olga Tokarczuk signale que, sur l'emballage de ses serviettes hygiéniques (!), sont imprimées des informations cocasses et sans rapport entre elles, avec quelques exemples croustillants. Mais, tandis que le principe des miscellanées est d'accumuler les éléments en vrac, Les Pérégrins sont truffés de passerelles secrètes, de clins d'oeil et de renvois internes, qu'on peut lire dans le désordre mais qui gagnent à être lus linéairement, pour profiter des échos conçus par l'auteur. En résulte un bel ouvrage original et décalé, à la fois léger et profond, érudit sans ostentation, qu'on referme en songeant que même les plus acharnés sédentaires, les lecteurs enracinés dans leur fauteuil, ne sont après tout, eux aussi, que des passagers en transit sur Terre.
Commenter  J’apprécie         00