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Citations de Patrick Rambaud (447)


Caulaincourt se permit de lui rappeler qu’il devait encore signer les ratifications du traité voulu par les Alliés, que Macdonald porterait à Paris. C’est ainsi que Napoléon signa sans le relire ce long texte qui l’écartait de France sur une île, une île minuscule qui sentait le romarin mais ressemblait à une cage.
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Des paroles de son cher Sénèque lui revenaient : il faut toujours prendre les choses à la légère et les supporter avec bonne humeur ;il est plus humain de rire de la vie que d'en pleurer .
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On trouvait également des mots français chargés d’un autre sens qu’à leur origine : par exemple tout devenait disruptif, un terme de la physique né en 1856 : il rendait compte d’une étincelle qui dissipait en explosant une grande partie d’énergie accumulée. Dans la langue normale, cela en revenait au mot rupture, si trivial et moins moderne. On compliquait parfois pour rien. À quoi servait de changer concertation en coconstruction ? À devenir jeune et neuf.
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tel gazetier affirmer que les orages avaient impacté les vignes. Confusément, on comprenait que l’orage et la vigne avaient un point commun sans en connaître les dégâts ou les bienfaits. À la place d’impacter on aurait été avisé de se servir dans la gamme des verbes existants qui auraient nuancé une information qui ne nous informait plus : tremper, abîmer, balayer, pourrir, ratatiner, détruire, casser, foudroyer, brûler, noyer, accidenter, déraciner, esquinter, ratiboiser, dégrader, tuer, bouleverser, ruiner, déchirer…
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Quand, le rasoir à la main avant de se lisser le menton, Notre Prince Ébouriffant s'admirait dans la glace de son lavabo, il songeait que le terme de sa première année de règne approchait. Alors il se remémorait le chemin qu'il avait parcouru pendant ces longs mois laborieux. Il avait la baraka : l'essentiel de ses sujets lui avaient fait confiance. même si des signes d'impatience les tourmentaient, ils croyaient que le Prince les représentait au-dehors sous une image favorable ; pour cela il avait couru plusieurs fois autour du monde où il se construisit l'image d'un ambassadeur de l'Europe, et aussi de la francophonie.
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D'entrée, Melle de Montretout se moqua de son rival qui ne bronchait pas. Elle évoqua le péril de ces millions de migrants prêts à envahir nos villes et nos campagnes, elle faisait des gestes amples, brassait de l'air comme une oie cendrée à la surface d'un lac, devenait cocasse, manquait de tenue. Son numéro de music-hall eut un effet déplacé.
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Au mois de janvier 828, le doge du Rialto reçut deux de ses tribuns, Bon et Rustico. Il ne leur cacha pas son exaspération :
« Il n’est plus question d’être inféodés à Rome ! Qu’ont-ils de mieux que nous, les papes ? La relique de Saint-Pierre ? Ils s’en prévalent pour nous écraser ! À nous de trouver la meilleure façon de leur clouer le bec ! »
Le duc se radoucit et s’éclaira soudain :
« Vous savez mon idée là-dessus... Avant de partir en Égypte, l’évangéliste Marc a séjourné dans nos lagunes. Donc il nous appartient. Nous devons opposer sa relique à celle que possède Rome.
— Où est la relique de Marc, seigneur duc ? 

— À Alexandrie. 

— Chez les musulmans ? 

— Oui, et c’est là que vous intervenez. 

— Comment donc ? 

— Armez vos bateaux et filez à Alexandrie sous des prétextes commerciaux dont vous 
avez l’habitude, mais ramenez-moi la relique de Marc. Il deviendra le protecteur de Venise.
— Oui, seigneur duc, mais il a aussi été l’évêque d’Alexandrie. Ses restes doivent être très surveillés...
— Je vous sais rusés, débrouillez-vous mais rapportez ici la relique de l’évangeliste par tous les moyens ! Sous la protection de saint Marc nous pourrons traiter à égalité avec Rome. Et nous fondrons une République de mille ans ! »
Le duc avait raison. Mon livre détaille l’histoire de cette expédition branquignole et fondatrice. Suivez-moi, on embarque...
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- Une scie.
- Vous voulez acheter une scie?
- Oui, assez longue et solide, pas trop souple avec des dents fines.
[…]
- Monsieur, je ne vous imagine pas du tout en charpentier ou en menuisier.
- Et vous auriez raison ! Excusez-moi, je suis assez pressé, ce matin, je ne me suis même pas présenté : Docteur Percy, chirurgien en chef de la Grande Armée.
- Vous avez besoin d’une scie pour soigner vos malades ?
- Soignez ! J’aimerais bien, mais dans les batailles on ne soigne pas, on répare, on traque la mort, on coupe des bras et de jambes avant que la gangrène s’y mette. Gangrène, vous connaissez ce mot ?
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Sébastien montrait un diamant qu'il tenait entre deux doigts. C'est tout ce qu'il possédait, ces diamants du Kremlin. Les lanciers se lissaient la moustache, doutaient, hésitaient. L'or, l'argent, les pierres précieuses, ça ne servait à rien dans ce désert glacé. L'autre jour, Sébastien avait vu un isolé, posé par terre comme un mendiant ; il cherchait à échanger un lingot contre du pain mais les gens passaient devant lui sans s'arrêter : un lingot d'argent, ça ne nourrit pas.
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-Vous joué tout les rôles? Même celui de barbier?
-Tous les rôles, mon capitaine, dit Vialatoux en se rengorgeant.
On a dit que les comédiens n'avaient aucun caractère, parce qu'en les jouant tous ils perdaient celui que la nature leur avait donné, qu'ils devenaient faux, comme le médecin, le chirurgien et le boucher deviennent durs.
Je crois qu'on a pris la cause pour l'effet, et qu'ils ne sont propres à les jouer tous que parce qu'ils n'en ont point.
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Mademoiselle Julie avait dix ans de moins que la marquise de Pompatweet, laquelle, quand elle s'enamoura de François-le-Flambeur, avait dix ans de moins que l'archiduchesse des Charentes. Ainsi allait la vie chez les hommes vieillissants qui sentaient la rouille manger leurs os ; ils avaient l'impression rassurante de rajeunir au contact de compagnes plus jeunes que la précédente, et tant pis si la différence des âges se creusait chaque fois davantage. Mon prestige, pensaient-ils, contribue à ce qu'on oublie mes cheveux teints.
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Qu’apprenait-on de si précieux chez le vieux philosophe ? Qu’il n’y a pas de vérité unique mais qu’il fallait accepter plusieurs interprétations en même temps. Qu’on devait s’adapter sans cesse à la réalité, laquelle est mouvante. – C’est l’impermanence des choses, dit l’étudiant à son maître, comme chez les anciens taoïstes… – Si vous voulez, répondit le professeur.
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Sa Majesté Électrique oubliait que les gens ne vivaient pas pour travailler mais qu'ils travaillaient pour vivre. Leurs boulots les passionnaient rarement, qu'en général ils n'avaient pas choisis. Sur leurs écrans obligatoires ils rêvaient aussi, mais à leurs prochaines vacances.
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p. 103 Il croyait que le travail était une vertu à pratiquer joyeusement. Ceux qui l’oubliaient de s’y soumettre étaient rejetés sur le bas-côté. Qu’ils flemmardent et cueillent des renoncules dans les champs, qu’ils sirotent du vin frais sous le parasol, qu’ils se prélassent mais ne comptent pas sur les autres pour les sortir du marasme où les a menés leur périlleuse insouciance. Sa Majesté Electrique oubliait que les gens ne vivaient pas pour travailler mais qu’ils travaillaient pour vivre. Leurs boulots les passionnaient rarement, qu’en général il s n’avaient pas choisis. Sur leurs écrans obligatoires ils rêvaient aussi, mais à leurs prochaines vacances. S’ils semblaient affairés, les yeux papillotant sur leur ordinateur de bureau, ils comparaient les prix des campings, et songeaient à retenir des places avant la date fatidique où, enfin, ils pourraient ne rien faire d’utile, à mille lieues des lois implicites de Notre Suractif Souverain : performance, concurrence, rapidité, enthousiasme, record, héroïsme quotidien.
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Notre Eclectique Leader enchaîna les vitesses; il passa de sa visite courte au Vatican à la courte visite que lui rendit à Paris l'Empereur de Chine.
La route d'Orly et les boulevards périphériques parisiens furent longtemps bloqués pour permettre au Fils du Ciel de parvenir au Château.
Le Chinois Hu possédait le globe à peu près en entier, il tissait sur lui une toile fine comme la bave des hirondelles salanganes, nul ne pouvait le négliger, il était trop puissant, trop colérique, et Sa Majesté fit des courbettes de rigueur plus que quelques autres afin de ne point le courroucer.
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Quand Dieu apprenait le dessin nommait la sixième nouvelle de la sixième journée du Décaméron. Boccace y mettait en scène une discussion entre des jeunes Florentins qui cherchaient à dénicher la plus ancienne famille de leur ville. L’un d’eux proposa les Baronci et s’en expliqua ainsi : « Sachez donc que Dieu a créé les Baronci au moment où il faisait son apprentissage de peintre. Les autres hommes, il les a faits quand il savait déjà peindre. Pour vous convaincre que je dis vrai, comparez les Baronci à qui vous voudrez. Les autres ont des visages réguliers, aux proportions exactes.
Mais les Baronci ! Ici le visage est étroit et n’en finit plus, là il est d’une largeur indécente. Voyez ce nez qui s’allonge, et ce nez en pied de marmite. Voyez ce menton en  galoche ; voyez ces mâchoires : on dirait celles d’un âne ; ici l’œil droit est plus gros que le gauche ; ailleurs il est plus bas. C’est ainsi que les enfants dessinent d’abord les visages, quand ils reçoivent leurs premières leçons. Je le répète comme une évidence : Dieu a fait les Baronci quand il apprenait à peindre. Ils sont donc plus anciens que les autres. »
Au début du IXe siècle, il en était de même pour la Venise naissante, quand se déroule l’aventure que je retrace. Dieu était encore malhabile pour dessiner cette période brute, violente, mal sortie des brumes. Il ne pouvait pas avoir la délicatesse tremblée d’un Guardi ni la précision maniaque d’un Canaletto. Nous étions à l’âge des ténèbres, alors il barbouillait des personnages élémentaires et grossiers. Le palais des doges n’avait pas remplacé la lourde forteresse où s’enfermaient les ducs.
Les Vénitiens étaient ce peuple de marchands réfugiés dans les lagunes, entre les Alpes et l’Adriatique, pour se garantir des barbares qui désolaient le continent européen.

(INCIPIT)
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Des crétins wahhabites se rappelaient à notre attention pour délivrer le Prince de ses soucis immédiats.
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Regardez cette vieille, tordue sur sa canne à l'embout de caoutchouc, ou ce vieux qui avance à pas lents et glissés. S'ils observent de près le trottoir, c'est que celui-ci présente sans cesse des embûches ; ici il est en pente, là des dalles sont disjointes, on risque de s'y prendre le soulier et de s'étaler. Des passants qui marchent vite les bousculent cent fois, ils sont bien obligés de rester stoïques, voilà tout ce qu'il leur reste, avec leur tête remplie de souvenirs, de mots et d'images.
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- Davout, je hais le Danube comme vos soldats vous haïssent ! (Napoléon)
- Dans ce cas, Sire, je plains le Danube. (Davout)
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Le capitaine d'Herbigny se sentait ridicule. Enveloppé dans un manteau clair dont le rabat flottait sur les épaules, on devinait un dragon de la Garde au casque enturbanné de veau marin, crinière noire sur cimier de cuivre, mais à califourchon sur un cheval nain qu'il avait acheté en Lituanie, ce grand gaillard devait régler les étriers trop courts pour que les semelles de ses bottes ne raclent pas le sol, alors ses genoux remontaient, il grognait : « A quoi j'ressemble, crédieu ! de quoi j'ai l'air ? » Le capitaine regrettait sa jument et sa main droite. La main avait été percée par la flèche envenimée d'un cavalier bachkir, pendant une escarmouche ; le chirurgien l'avait coupée, il avait arrêté le sang avec du coton de bouleau puisqu'on manquait de charpie, pansé avec du papier d'archives à défaut de linge. Sa jument, elle, avait gonflé à force de manger du seigle vert trempé de pluie : la pauvre s'était mise à trembler, elle tenait à peine debout ; quand elle trébucha dans une ravine, d'Herbigny s'était résigné à l'abattre d'une balle de pistolet dans l'oreille (il en avait pleuré).
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