Citations de Paul Féval (268)
La première sensation dont je me souvienne, c'est la douleur que donnent les coups ; aussi appris-je que j'existais par le fouet qui déchira ma chair.
Quelque part, tout au fond de l’inconnu, il est des trous enfumés pleins de moite chaleur et bourrés d’asphyxies, où vous tomberiez morte au bout de dix secondes, madame, mais où l’on s’amuse autant et mieux que chez vous. Il y a là des élégances relatives, des raffinements qui font peur, des galanteries, des comédies. On vit, on pêche, on aime, on trahit comme chez votre voisine ; c’est un monde, un vrai monde.
– Est-ce le diable ? dit Lecoq.
Samuel prit le mouchoir oublié sur le coussin.
– Le diable ne meurt pas, répondit-il.
Et il montra une tache rougeâtre qui restait à l’endroit où les lèvres du colonel avaient touché le mouchoir.
– Qu’est-ce que c’est que cela ? demanda Lecoq.
– C’est la fin, répliqua le Dr Samuel.
Lecoq examina curieusement la toile et dit :
– Pas possible ! je pensais que Dieu l’avait oublié.
– Tu crois donc à Dieu, toi, l’Amitié ?
– Non, mais tout de même ce serait drôle s’il y avait quelqu’un là-haut.
On avait dîné, au château de Conflans, chez Mgr de Quélen, archevêque de Paris ; le prélat avait une parenté très nombreuse dans le plus haut monde du faubourg Saint-Germain. À cause de cela, et aussi dans un but charitable, le château ouvrait parfois ses portes à une société fort pieuse assurément, mais tenant à la cour presque autant qu’à l’Église. Un soir entre autres, il y avait quelques dames de l’intimité de Mme la duchesse de Berry.
On pouvait voir, de la route qui mène à Charenton, le long du bord de l’eau, de sévères et riches toilettes au milieu des gazons.
Je ne sais pas pourquoi cette portion de la campagne de Paris est si triste. Comment ne sont-elles pas charmantes ces prairies où la Marne vient marier ses eaux à celles de la Seine ? Le vin est la gaieté, dit-on ; comment cet océan de vin qui submerge la commune de Bercy n’égaye-t-il pas un peu ces navrants paysages ? Tout Bacchus est là ; Bacchus, chanté avec tant de constance par nos poètes ébriolants. Bacchus ne peut-il rasséréner ces horizons en deuil ? ou faut-il croire que Bacchus lui-même, ennemi de l’eau, est incommodé par le voisinage de la rivière ?
Le lendemain matin, le paysage avait changé : c'était Vitré, la gothique momie, qui penche ses maisons noires et les ruines chevelues de son château sur la pente raide de sa colline ; c'était l'échiquier de prairies plantées ça et là de saules et d'oseraies où la Vilaine plie et replie en mille détours son étroit ruban d'azur.
J'ai ouï conter cette étrange aventure à un homme qui passait pour tenir de très près à la "police élégante" de Paris. Il était beau diseur et son histoire a grandement couru le monde sous le règne de Louis-Philippe. Je n'en garantis à aucun degré l'authenticité, mais j'affirme l'avoir entendue au commencement du second empire dans un salon politique qui eut ses jours d'éclat, en présence de l'un des éminents personnages cités dans le récit comme ayant assisté à la réunion de Conflans.
-Je ne m'occupe que des hommes au-dessus de cinq pieds quatre pouces.
-je n'ai que cinq pieds tout juste, fit observer Passepoil avec reproche.
Cocardasse junior lui tendit la main, et prononça ces bienveillantes paroles :
-Une fois pour toutes, ma caillou, souviens-toi que tu es en-dehors. L'amitié, capédédiou ! est un prisme de cristal à travers lequel je te vois, tout blanc, tout rose et plus dodu que Cupidon, fils unique de Vénus sortant du sein de l'onde.
La jeune fille, étendue sur les dalles de l'allée, venait de mettre au jour de la nuit, au milieu des souffrances les plus atroces, un enfant du sexe masculin, très bien conformé et très viable.
Le vieillard, dont la figure de hibou exprimait une cruauté incalculable, essayait d'une main d'étrangler l'enfant nouveau-né, et de l'autre, de poignarder la jeune fille avec un crick malais d'un travail curieux et manifestement empoisonné.
jamais vous ne trouverez le vrai courage dans l’âme des traîtres de mélodrame
Les amis, les parents, les domestiques vinrent pendant toute la journée du lendemain reconnaître dans ce rouge fouillis, les morceaux de ceux qui leur étaient chers. C’était horrible, mais intéressant
Quand une oeuvre est assez forte pour exprimer avec justesse les sentiments d'une époque, puis ceux de l'époque suivante, puis ceux d'une troisième et ainsi de suite, la postérité s'en empare.
Cocardasse et Passepoil, couchés sur leur paille, philosophaient et disaient d'assez bonnes choses, tant sur l'inconstance du temps que sur la versatilité de la fortune. Ils n'avaient pour toute provende qu'un morceau de pain sec, eux qui avaient soupé la veille avec le prince.
Gringalet aimait les lectures qui exercent l'esprit en fortifiant le cœur.
Les temps du mélodrame sont passés, c'est possible, mais il y a encore chez nous des alchimistes qui savent faire de l'or très légalement avec de la douleur et de la honte.
Il y a beaucoup d'Anglais et surtout d'Anglaises qui ont pudeur quand on leur raconte les actes d'effrontée piraterie dont les écrivains français sont victimes en Angleterre. Sa très gracieuse Majesté Victoria reine a signé jadis un traité avec la France dans le but louable de mettre fin à ces vols tant de fois répétés. Le traité est fort bien fait : seulement, il contient une petite clause qui en rend la teneur illusoire. Sa Très Gracieuse Majesté, en effet, défend à ses loyaux sujets de nous prendre nos drames, nos livres, etc., mais elle leur permet d'en faire ce qu'elle a la bonté d'appeler une "blonde imitation".
C'est joli, ce n'est pas honnête, le cher, l'excellent Dickens me disait un jour, en manière d'apologie :
- Je ne suis pas beaucoup mieux gardé que vous. Quand je passe à Londres et que j'ai par hasard une idée sur moi, je ferme à clef mon portefeuille, je le mets dans ma poche, et je tiens mes deux mains dessus. On me vole tout de même.
Le fait est que la "blonde imitation" en remontrerait aux pickpockets les plus subtils.
Ainsi, l'amie si charmante de Dickens, Lady B..., du château de Shr..., me répète, depuis vingt ans, la même question, chaque fois que j'ai le bonheur de la voir :
- Pourquoi ne volez-vous pas les Anglais à votre tour ?
- Ce n'est pas assurément, madame, qu'il n'y ait pas de choses adorables à prendre dans vos livres, mais peut-être que notre caractère national ne nous porte pas vers le "blond" escamotage.
Cette remarque a le don de faire rire Milady aux éclats. Elle va même jusqu'à me citer des noms très français et particulièrement recommandables...Mais chut !
Pourquoi ne garderions-nous pas ces noms : Faust et Marguerite ? Qu'est le chef d’œuvre de Goethe, sinon la splendide mise en scène de l'éternel fait de vampirisme qui, depuis le commencement du monde, a desséché et vidé le cœur de tant de familles ?
-; on a volé quatre mille francs, cette nuit dans la caisse de Monsieur bancelle, et on ne, accuse du vol.
Et il se racontait qu'une nuit, sur la Grand-Lande, à la Croix-qui-marche, le prêtre-jureur qu'on appelait le Janséneux et qui avait suivi le char de la déesse de la Raison à Vannes, était venu à l'heure de minuit avec Françoise Le Brec, Marianne et Gabriel, plus deux témoins qu'on avait pris en passant au cimetière. Les cierges s'étaient allumés sur le piédestal de la croix et une messe de malheur avait été dite : de malheur et de mariage.
Le Français, monsieur, est brave et léger, l’Italien astucieux, l’Espagnol cruel, l’Allemand lourd, le Russe brutal, l’Anglais joyeux et remarquable par sa générosité.
Si tu ne viens pas à Lagardère, Lagardère ira à toi !