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Citations de Paul-Jacques Bonzon (100)


DIX MINUTES plus tard, équipés comme pour une expédition au pôle Nord, nous quittions la Croix-Couverte. L'air glacé nous tranchait le visage. Dans la nuit, le thermomètre était descendu à zéro, car l'herbe craquait sous nos pas. Pas le moindre clair de lune, mais le jour ne tarderait pas poindre. Déjà, des lueurs verdâtres apparaissaient derrière les hautes cimes enneigées, du côté de l'est.
Émoustillé par le froid, Kafi gambadait en aboyant de toutes ses forces. Je le fis taire, pour essayer de repérer les bruits. Mais ceux-ci, depuis notre départ, ne s'étaient plus renouvelés. Lampes au poing, nous marchions rapidement, suivant ce que nous supposions être la bonne direction. Sans point de repère, j'eus bientôt l'impression que nous tournions en rond et Kafi, qui n'entendait plus rien, lui non plus, ne pouvait nous guider. Cependant, parvenu sur un monticule, Bistèque s'écria tout à coup :
« L'avion!... Il est là, tout près!... »
En trois bonds, nous rejoignîmes notre camarade. Dans le petit jour naissant, l'appareil se découpait sur le fond d'un léger vallonnement.
« Je suis sûr que les bruits venaient de là, déclara Corget. Regardez le chalet, derrière nous. C'est exactement la direction. »
Il y avait peut-être encore quelqu'un dans la cabine de l'appareil. La bande s'approcha prudemment. Non, l'avion était vide. Nous en fîmes plusieurs fois le tour, en le détaillant. C'était un joli petit appareil, couleur bleu azur.
« Curieux, fit la Guille en se glissant sous le fuselage, le journal parlait de son train d'atterrissage brisé. Apparemment, il est en bon état. Les pneus ne sont même pas crevés.
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À notre retour de promenade, Patati avait disparu. Nous avions hâte, cependant, de le revoir, car, à la lueur d'une longue discussion, la disparition de l'âne vert nous semblait de plus en plus bizarre. En arrivant à Meillerie, Corget proposa :
« Faisons un détour par le quai, nous retrouverons peut-être le clown. »
La tribu du cirque, presque au complet, se tenait à l'ombre sous les arbres. Une femme pelait des pommes de terre pour le repas du soir. La petite écuyère jouait à la poupée. Le patron lisait le journal, un sourire aux lèvres, assis sur une chaise, les deux pieds allongés sur une caisse. Patati, lui, n'était pas là. Cependant, à travers la toile du cirque, Gnafron reconnut sa silhouette. Il évoluait autour de la piste, monté sur un animal ressemblant vaguement, par ses contours, à Patata.
« Tant mieux, fit Bistèque, soulagé, il a peut-être retrouvé son âne... et son argent. »
Pour éviter d'être vus par la tribu, nous fîmes le tour de l'enceinte de toile dont Gnafron se risqua à soulever un pan. Déception! Patati ne chevauchait pas son âne vert, mais un zèbre, à peu près de la même taille, balançant la tête de la même façon et provenant sans doute du même manège.
Nous apercevant, le clown descendit de sa monture et vint à nous, un doigt sur les lèvres :
« Attention!si le patron vous aperçoit, il va vous faire décamper. Voyez! il est allé à Thonon, tout à l'heure, et m'a trouvé un remplaçant de Patata; il lui a posé des roulettes. J'étais en train de m'exercer pour ce soir... mais vous, pourquoi êtes-vous là?
- Nous aurions beaucoup de renseignements à vous demander, au sujet du vol. Quand pourrons-nous vous voir? »
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Le chauffeur avait abandonné sa camionnette au milieu de la chaussée où elle gênait la circulation; il regagna sa voiture, et les passants se dispersèrent. L'aveugle s'éloigna, le long du trottoir, pointant sa canne blanche en avant pour déceler les obstacles. Je le suivis du regard. Il avait parcouru une centaine de mètres à petits pas serrés et rapides, quant il parut soudain en difficulté. Ne retrouvait-il plus son chemin? Sa marche devint hésitante. Finalement, il s'adossa à un mur et sortit son mouchoir pour s'essuyer le front.

Mady me saisit le bras.

"Il est peut-être malade! Allons voir!"
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Le chauffeur remonta à son volant et le camion démarra plus doucement qu'il ne s'était arrêté.
« Je ne comprends pas, non, je ne comprends pas, répéta N'Goum en le voyant s'éloigner. Allons, rentrons vite maintenant; reprenez vos bagages et venez. »
La lune s'était levée dans un ciel où flottait comme un tissu de gaze, la nuit tropicale. A cause de N'Goum, nous avions hâte d'arriver. Nous ne sentions plus la fatigue. L'étudiant avait pris la tête de la troupe, et marchait à longues foulées, silencieux, inquiet. Enfin on atteignit un rivage où les coquillages craquaient sous nos pas. L'océan clapotait doucement.
« Samiouth est là-bas, de l'autre côté de ce bras de mer, expliqua N'Goum. Nous allons prendre une pirogue. »
Sept ou huit embarcations étroites, effilées, creusées à même des troncs d'arbres, gisaient sur la grève. Aidé du Tondu, le plus fort de l'équipe, N'Goum en tira une pour la mettre à l'eau en expliquant :
« En principe, elles sont faites pour cinq, mais vous n'êtes pas lourds. Nous y tiendrons tous avec le chien et les bagages. »
Il aida Mady à monter à bord en lui recommandant de s'asseoir à l'extrémité, avec Kafi. Nous suivimes, l'un après l'autre, et N'Goun, armé d'une longue perche, sauta le dernier pour guider la pirogue.
La traversée n'était pas longue, deux kilomètres tout au plus, sur des eaux calmes et tièdes. Malgré l'étroitesse de l'embarcation, nous n'avions pas peur. D'ailleurs, nous savions tous nager. Debout, à l'arrière, maniant avec souplesse sa longue perche, l'étudiant se taisait. Pour rompre le silence, Mady lui demanda :
« Qu'est-ce qu'on aperçoit, de très sombre, à gauche, sur la mer?
- L'île des palétuviers. Autrefois, dans notre dialecte, on l'appelait Mandraga : l'île des démons.
- Nous pourrons y allr?
- Je ne vous le conseille pas. Elle a mauvaise réputation. Les gens du pays n'y abordent jamais.
- Ils ont peur des démons?
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Un matin de juillet, Mady, la seule fille de notre équipe des Compagnons de la Croix-Rousse, monta chez moi, rue de la Petite-Lune.
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Au lieu de s'éclaircir, le mystère devenait plus épais que jamais.
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C'est l'entrée du parc. Diabolo sort vivement de sa cachette. Il découvre un jardin immense, beaucoup plus grand que celui de Sylvia. Des massifs multicolores parsèment les pelouses fraîchement tondues. Oh ! les belles fleurs... mais comment reconnaître celle qui sourit ?
"Je vais me renseigner" se dit Diabolo.
Il aperçoit un jardinier qui porte un tablier vert, de la couleur de la pelouse.
Il demande :
"Monsieur le jardinier, je cherche la Fleur-qui-sourit."
Ce jardinier, un bonhomme aux cheveux blancs, doit être très savant sur les fleurs. Cependant, il paraît embarrassé et regarde Diabolo d'un drôle d'air.
"La Fleur-qui-sourit ?... Les fleurs ne sourient pas. Elles ont de belles couleurs, elles sentent bon, mais elles ne sourient pas. Comment une fleur pourrait-elle sourire ?"
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Ce jeudi-là, un après-midi de février, toute la bande se retrouva dans la "caverne".

Ce que nous appelions notre "caverne" était un ancien atelier de tisserand, dans le quartier de la Croix-Rousse, au bas de la Rampe des Pirates. Il nous servait de lieu secret de réunion. Assis en rond, sur des caisses, nous y discutions de toutes sortes de choses et y préparions nos vacances.

Ce jour-là, nous cherchons à résoudre un problème difficile: réunir assez d'argent pour nous procurer, en commun, un appareil photographique.

Ce projet, à vrai dire, n'était pas nouveau. Que de fois, pendant les vacances, avions-nous regretté de ne pas pouvoir reporter quelques clichés que nous regarderions, ensemble, dans cette "caverne" ! Il est vrai, que depuis certaine aventure en Savoie, tout ce qui, de près ou de loin, touchait a la photographie nous effrayait un peu.

Le projet oublié était donc revenu à la surface quelques jours plus tôt, quand un grand journal de lyonnais avait annoncé un concours de chasseur d'image dans les vieux quartiers de la ville. Le premier prix en tétait un vélomoteur de luxe.
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Le Tondu nous entraîna donc vers le commissariat, au bout de la rue Jonchères. Des badauds stationnaient sur le trottoir, des femmes pour la plupart, que cet odieux enlèvement indignait. Par l'une d'elles nous apprîmes que deux nouveaux inspecteurs étaient arrivés de Lyon, pour s'occuper spécialement de l'affaire; du moins, le bruit en circulait. Des gens entraient dans l'immeuble, ou en sortaient; mais ces visites n'avaient sans doute rien à voir avec la disparition de Christian.
Nous étions là depuis une demi-heure, quand les premières gouttes de pluie, des gouttes énormes et tièdes, claquèrent sur le trottoir. Les badauds se dispersèrent, sauf une femme, qui ouvrit son parapluie mais, finalement, se décida à partir.
« Attendons encore, décida Mady en inspectant le ciel, ce ne sera qu'une averse. »
Elle se mit à l'abri, contre un mur, et toute la bande l'imita, y compris Kafi qui secouait les oreilles pour chasser les gouttes d'eau. Cependant, au bout d'un quart d'heure, la vraie pluie se mit à tomber. Nous allions partir quand une fourgonnette noire de la police déboucha d'une rue voisine, effectua un virage en nous éclaboussant copieusement et vint s'arrêter devant la porte du commissariat. Mon cœur se mit à battre.
« Ce sont peut-être les voleurs de Christian », murmura la Guille.
Un agent sortit du commissariat et lança au chauffeur de la fourgonnette :
« Nous vous attendions. Alors, vous le ramenez? »
Le chauffeur fit un signe affirmatif. Les deux battants de la porte arrière de la voiture s'ouvrirent. Un gendarme mit pied à terre, puis un second qui se tourna vers l'intérieur de la voiture pour inviter un troisième occupant à descendre. Une silhouette apparut. Mady étouffa un cri.
« Le clochard! »
Nous l'avions reconnu en même temps qu'elle. Il descendit de la voiture, menottes aux poignets. À ce moment, il nous découvrit tous les six, alignés contre le mur d'en face. Il nous reconnut, ou plutôt parut reconnaître Mady et Kafi. Alors, l'espace, son visage triste s'éclaira. Instinctivement, Mady fit un pas en avant et lui sourit. L'homme voulut répondre à son sourire d'un signe de la main, mais ses poignets étaient attachés. D'ailleurs, impatient, un gendarme le poussa vers le commissariat où il disparut.
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Il caresse la joue de l'enfant et ajoute: " Tu es trop jeune pour comprendre, mon petit Christian mais plus tard, ta maman t'expliquera que tu as été sauvé par l'amitié qu'une bande d'enfants portait à un vieil homme, presque inconnu d'eux, et alors, tu trouveras cela merveilleux".
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Mais bientôt la brume s'épaissit au point que Corget jugea prudent d'ordonner le retour. En vrai capitaine, il avait emporté sa boussole. Il nous suffirait de mettre le cap droit au sud pour rejoindre Meillerie. Bistèque, qui tenait les avirons, me céda sa place.
« Rame lentement, Tidou », me lança la Guille, peu pressé de rentrer.
Nous avancions depuis un quart d'heure à peine quand, tout à coup, Kafi, qui avait repris sa place sur la minuscule plate-forme à l'avant, se mit à aboyer. Corget l'invita à se taire; Kafi n'écouta pas. J'essayai de le calmer à mon tour, en vain. Penché sur la gauche, il avait certainement vu ou entendu quelque chose dans cette direction.
« Nous avons dû frôler un flotteur à filets qui l'a intrigué, dit Corget. Ce n'est pourtant pas la première fois que nous en rencontrons.
- Justement, fis-je aussitôt, ce n'est pas normal qu'il aboie. Gnafron, allume la lampe! »
Gnafron promena le faisceau lumineux autour de la barque, sur l'eau et, soudain, poussa un cri :
« Un homme!... nous venons de le dépasser. Vite, Tidou, rame en arrière! »
C'était un homme, en effet. Il était accroché à un de ces flotteurs métalliques en forme de double cône, qui servent de repère aux pêcheurs pour leurs filets. Il paraissait sans vie. Seuls, ses bras et sa tête émergeaient.
« Hissons-le à bord, cria Corget... mais attention à ne pas faire chavirer le canot. Tidou, présente la barque par l'arrière, ce sera plus facile. »
Je ramai lentement, en marche arrière (manœuvre peu commode pour un débutant), puis je freinai en pesant sur les avirons.
« Prenons garde! cria Corget, ne lâchons pas le corps; il coulerait à pic et ce serait fini! »
Pour être plus sûr de sa prise, la Guille saisit l'inconnu par les cheveux tandis que Corget et le Tondu soutenaient le corps par les épaules. Mais au moment de sortir le noyé hors de l'eau, Bistèque et la Guille durent leur venir en aide tandis que Gnafron éclairait la scène avec la lampe et que je maintenais le canot en bonne position.
Le malheureux fut étendu au fond de la barque, après qu'un des deux bancs eut été enlevé. Alors, Gnafron braqua la lampe électrique sur son visage.
« Mais... mais... s'écria Bistèque, c'est Totor! »
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Ce qui tracassait le plus Tidou - et il en parla au Tondu - c'était de ne rien savoir sur l'horaire des « autres », ceux que, faute de mieux, ils baptisaient « la bande à Schmitz » et « Bec-d'aigle » . Si ceux-ci arrivaient par la Nationale 6, les Compagnons les manqueraient puisque la sortie de l'autoroute, où ils se trouvaient, était au nord de la petite ville. Et si les adversaires débouchaient soudain de l'autoroute, ils risquaient de repérer ce groupe de garçons, auxquels Blouson-bleu avait eu affaire.
« Dispersons-nous, proposa alors le Tondu. Moi, je reste ici pour attendre Momo. Tidou et la Guille iront rôder aux abords de l'église; Bistèque et Gnafron se tiendront à l'écart, près de ce garage, là-bas... »
Ils n'eurent pas le temps de mettre leur projet à exécution. Une auto sortait du péage, moins branlante et pétaradante que ne l'avait prétendu Momo? et à côté de celui-ci au volant, ils aperçurent Mady. Derrière elle, Kafi aboyait et grattait les vitres de ses pattes. Le conducteur freina dans un grincement déchirant.
« Trois quarts d'heure de retard! cria Bistèque. Pas trop tôt! Tout est peut-être fichu à cause de toi!
- C'est pas ma faute! mugit Momo, devenu tout rouge d'indignation. Au moment où j'allais partir...
- Évidemment, avec un tacot pareil!... intervint Gnafron.
- C'est pas ça! protesta Momo. Mais j'ai failli être coincé! Un gars qui m'attendait... vous savez? Celui qui était venu frapper à ma porte dans l'après-midi, quand nous nous sommes cachés...
- Oui, oui, coupa Mady. Celui que la bibliothécaire appelait le professeur. Bec-d'aigle! »
Maintenant ils étaient tous réunis auprès de la vieille auto fatiguée, à la peinture bleue écaillée. Du coup, deux motards de la police, qui patrouillaient aux environs, s'approchèrent de ce rassemblement de jeunes.
« Allez! circulez! dit l'un d'eux. Vous embouteillez la sortie de l'autoroute! »
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Le lendemain matin le piège était en place.

À neuf heures du matin, Momo quittait sa chambre, échangeait quelques mots avec le Tondu qui allait prendre le premier tour de garde.
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"Il fait trop froid, dit Mady, ne m'accompagnez pas chez moi. Je n'ai pas peur de rentrer seule, puisqu'il y a encore du monde dans les rues.

-Pas questions de te laisser, ta mère serait fâchée de savoir que nous t'avons semée en route."

Les cinq garçons remontèrent donc avec elle les voies tortueuses de la colline où les rues se transformaient souvent en escaliers. Ils débouchaient dans célèbre Grande-Côte, bien connue des Lyonnais pour sa pente, quand ils croisèrent un homme portant sous le bras un encombrant paquet rectangulaire et plat enveloppé dans un papier journal.
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Le lendemain, bien avant l'heure des cours, elle faisait les cent pas sur le boulevard de la Croix-Rousse. Comme par hasard, les cinq garçons arrivèrent ensemble, Tidou, un journal à la main.
« Quoi de nouveau? demanda-t-elle.
- Pas un mot sur l'explosion de la rue Longue. Ou bien la police tient à garder le secret de l'enquête ou bien elle a laissé tomber l'affaire.
- Le journal ne parle pas d'une autre explosion mystérieuse à Cannes? .
- À Cannes? Quel rapport?
- Passe-moi le journal, Tidou, je vous expliquerai après. »
- Elle déplia le quotidien et, ensemble, ils feuilletèrent les seize pages. Rien sur cette explosion de Cannes, sans doute parce qu'elle n'avait fait ni dégâts sérieux ni victimes. Alors Mady répéta mot pour mot ce qu'elle avait entendu sur son transistor.
« Vous voyez, fit-elle, comme pour M. Thévenet, il s'agit d'objets de toilette; ça m'a frappée.
- D'accord, approuva Bistèque, mais l'explication de la grenade enfouie dans le sable est plausible. Des éclatements d'engins datant de la guerre arrivent souvent. Les grenades remontent peu à peu à la surface et, crac! un beau jour, c'est l'explosion.
- Admettons, fit Mady, je ne connais pas grand-chose aux engins de guerre, mais j'ai entendu mon père dire qu'une grenade n'éclate que si on la dégoupille.
- En principe, oui, répliqua Tidou, mais une grenade enterrée depuis des dizaines d'années est forcément rouillée, rongée par le sel contenu dans le sable. Elle peut éclater toute seule. »
Et, avec un sourire un peu incrédule :
« Je crains, cette fois, Mady, que tu ne fasses fausse route. »
Mady allait répondre quand la cloche du lycée de garçons tinta. Elle courut vers sa propre école toute proche. Quelque peu distraits pendant leurs cours, les Compagnons réfléchirent à ce que Mady venait de leur annoncer. Évidemment, dans les deux cas, il était question d'objets de toilette, mais de là à établir un lien entre les deux événements... De plus, de Lyon à Cannes la distance était grande. Cependant, à la sortie de midi, quand les garçons retrouvèrent Mady, ils se montrèrent plus intrigués qu'ils ne voulaient le laisser paraître.
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La petite caravane pétaradante suivait Taras de très loin. Il était en effet inutile de se faire repérer, puisque l'on savait quel était le but de sa sortie. Taras roulait assez lentement, sans zigzaguer, bien à droite dans les virages. Sur la route peu fréquentée à cette heure, les poursuivants étaient assurés de ne pas le perdre de vue.
De nouveau, ils remontèrent la pente, émergèrent des bois de pins, se heurtèrent au vent qui sifflait toujours sur les étendues sauvages et ravinées proches de la crête. Puis ils redescendirent vers le ruban de l'auto-route que traçaient les phares d'auto.
Lorsqu'il approcha des premières maisons, après avoir franchi l'autoroute, Tidou amorça une descente plus rapide, afin de se rapprocher de Taras. Il roulait de front avec Bistèque, Kafi galopant toujours à leurs côtés.
Soudain à l'entrée du faubourg, une auto surgit silencieusement derrière eux, lança un appel de phare et un bref coup d'avertisseur pour obtenir la voie libre, et les dépassa à toute vitesse. C'était une ID noire, étincelante.
« Pressé, çuilà! Pourrait pas attendre? » glapit Bistèque, surpris par ce brutal dépassement amorcé au dernier moment. Mais lui-même était aussi dans son tort, puisqu'il roulait de front avec Tidou. « Bande de chauffards! Assassins! »
L'auto, qui filait devant eux, dut ralentir à un carrefour. Machinalement les deux garçons accélérèrent, mais très vite la voiture reprit son avance. Ils la retrouvèrent alors qu'elle allait déboucher sur le quai Alsace-Lorraine. Elle était maintenant à la hauteur de Taras...
« Oh! regarde! » cria Tidou.
L'auto noire venait de faire une brutale queue de poisson à Taras. Dans un grand crissements de freins, elle stoppa. Taras heurta le pare-chocs arrière, culbuta, et comme il se relevait en glapissant, les portières s'ouvrirent, deux hommes en jaillirent et se ruèrent sur le motard.
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Ainsi, l'équipe s'égailla à travers la ville. Pour mon compte, je m'étais affecté le troisième arrondissement qui jouxtait le populeux faubourg de Villeurbanne. Ma liste comportait 13 adresses. Je commençai par explorer le quartier dense des bords du Rhône, puis m'éloignai vers la ville neuve de la Part-Dieu pour suivre ensuite l'interminable avenue Lacassagne et les rues avoisinantes. J'avais déjà rayé huit adresses sur ma liste, m'entendant partout répondre la même chose : non, la petite clef, peut-être, mais certainement pas la grosse.
La neuvième serrurerie était, comme la plupart des autres, située dans une petite rue. J'eus un moment d'espoir en voyant l'ouvrier tourner et retourner la grosse clef entre ses doigts.
« J'en ai fait une presque semblable, il y a une quinzaine de jours, fit-il, mais on ne m'a pas, en même temps, demandé de reproduire une clef de cadenas. »
Ce n'était pas là non plus. De toute façon, la date ne concordait pas et Rougemont aurait certainement fait exécuter les deux clefs en même temps.
Il était déjà six heures et demie. Il me restait encore quatre noms sur ma liste. Je commençais à trouver, comme M. Sabatier, que nos recherches étaient insensées quand tout à coup, en marchant à pied, la main au guidon de mon vélomoteur, à cause du sens interdit, je découvris cette enseigne : Clef seconde.
C'était un atelier comme les autres, qui vendait aussi toutes sortes de plaques : « Chien méchant » ... « Fermez la porte, S.V.P. » ... etc. Je n'avais pas cette adresse sur mon papier. Àout hasard, j'entrai et montrai mes clefs. Le jeune ouvrier qui gravait une plaque secoua la tête.
« Non, je ne vois pas... mais peut-être que le patron... »
Se tournant vers la porte d'une arrière-boutique, il appela :
« Patron! On vous demande! »
Un homme au visage anguleux s'approcha. Je lui montrai les deux clefs, en insistant sur la grosse. Il demeura quelques instants silencieux, les sourcils froncés, examinant la grosse clef puis, sans hésiter, il déclara :
« Oui, c'est moi qui l'ai faite. Elle était trop compliquée pour que je la laisse à mon apprenti... Vous voudriez encore les mêmes?
- Non, je... j'aimerais seulement savoir qui vous les a apportées et quand?
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Le Tondu montra son portefeuille vide, et répéta ce qu'on venait de lui dire au bureau des objets trouvés.
« Ça ne m'étonne pas, fit le gardien. Tu vois, je ne m'étais pas trompé... Et dire qu'en ce moment ton voleur est peut-être en train de délester un autre touriste!
- Oh! s'indigna le Tondu.
- Il n'a pas été pris; rien ne l'empêche de recommencer, au même endroit. Les voleurs de ce genre ont leurs quartiers préférés, ils opèrent souvent dans les mêmes lieux. »
À l'idée que le malfaiteur était revenu là-haut, le Tondu se sentit poussé par une sorte de rage vengeresse. Avec ce qui lui restait d'argent, dans son porte-monnaie, il acheta un ticket et s'élança dans l'escalier.
Le cœur battant, il déboucha sur la première plate-forme. Quelle foule! Deux fois plus compacte que la veille. Comment retrouver son voleur puisqu'il n'avait aucun signalement?
« Je suis stupide, se dit-il, si les agents ne parviennent pas à prendre les pickpockets, ce n'est pas moi qui réussirai. »
Mais le Tondu était tenace. D'ailleurs, que ferait-il de son après-midi puisqu'il n'avait pas d'autre projet? Sans argent, qu'aurait-il pu visiter?
Il se mit à déambuler dans la foule, faisant dix fois le tour de la plate-forme, s'arrêtant à chaque passage devant la marchande de cartes postales et de souvenirs pour observer les clients. Mais il existait deux éventaires sans parler de la boutique d'un marchand de glaces. Son voleur, s'il était un habitué de la Tour, ne devait pas opérer toujours près de la même boutique.
Il essaya de s'imaginer l'allure du pickpocket. À coup sûr, celle d'un touriste, avec guide à la main et appareil photo à l'épaule, pour passer inaperçu. Il devait même changer souvent d'accoutrement, pour ne pas être remarqué des agents de la Tour ou des employés des ascenseurs.
« S'il est revenu, pensa encore le Tondu, il a peut-être changé d'étage. Malheureusement, je n'ai plus assez d'argent pour monter au deuxième. »
Alors, il recommença de tourner en rond, détaillant les visages, s'interrogeant sur ceux qui paraissaient s'intéresser à autre chose qu'au paysage.
Soudain, alors qu'il repassait devant le marchand de glaces, il lui sembla reconnaître un touriste correctement vêtu, un appareil photo suspendu au cou par une courroie, qui semblait attendre quelqu'un. Il l'observa à la dérobée. L'homme ne s'éloignait pas du marchand de glaces. Avait-il donné rendez-vous là à sa femme, à un enfant, monté au second étage?
Patiemment, le Tondu attendit. Tout à coup, il vit le touriste jeter un coup d'œil à la ronde, puis s'approcher du parapet. Pour ne pas le perdre de vue, il se fraya un passage au milieu d'un groupe d'étrangers. Le temps d'un éclair, il vit une main glisser vers une poche. Il bondit. Au même moment, un touriste se retourna en criant :
« Au voleur!... Au voleur!...On vient de me prendre mon portefeuille.
- Je l'ai vu! dit vivement le Tondu.
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Dans la poussière de craie qui flottait à travers la salle, nous achevions de bourrer nos cartables, pleins à craquer. Derrière les stores baissés, la chaleur était accablante. Debout sur l’estrade, le maître, en manches de chemise, donnait ses derniers ordres.
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Enfin, la cloche tinta. Nous étions libres pour deux longs mois. Le maître donna le signal de la sortie. Ce fut la ruée générale vers la cour avec les cinq cents autres élèves de la Croix-Rousse.

À peine dehors, sur le boulevard, je sentis une main se poser sur mon épaule. C’était celle de mon camarade Corget.
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