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Citations de Philippe Grimbert (344)


Fils unique, j'ai longtemps eu un frère. Il fallait me croire sur parole quand je servais cette fable à mes relations de vacances, à mes amis de passage. J'avais un frère. Plus beau, plus fort. Un frère aîné, glorieux, invisible.
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Aussi longtemps que possible, j'avais retardé le moment de savoir : je m'écorchais aux barbelés d'un enclos de silence.
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Il fallait bien qu'un jour ou l'autre son fantôme apparût dans cette brêche, qu'il surgit de ces confidences. Ma découverte du petit chien de peluche l'avait arraché à sa nuit et il était venu hanter mon enfance. Sans ma vieille amie, peut-être n'aurais-je jamais su. Sans doute aurais je continué à partager mon lit avec celui qui m'imposait sa force, ignorant que c'était avec Simon que je luttais, enroulant mes jambes aux siennes, mêlant mon souffle au sien et finissant toujours vaincu. Je ne pouvais pas savoir qu'on ne gagne jamais contre un mort.
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Ma vie d'enfant me fournissait chaque jour des tristesses et des craintes que j’entretenais dans ma solitude.
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Citations (à ne pas lire si vous ne connaissez pas "le secret") :
- Tous mes proches savaient, tous avaient connu Simon, l'avaient aimé. Tous avaient en mémoire sa vigueur, son autorité. Et tous me l'avaient tu. A leur tour, sans le vouloir, ils l'avaient rayé de la liste des morts comme de celle des vivants, répétant par amour le geste de ses assassins."
- "Jusqu'à leur arrivée dans le café on n'entendra pas sa voix. Un peu plus tard elle parlera, pour la première fois depuis le départ de Paris. Alors elle prononcera une phrase, une seule, qui perdra Simon"
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Je m'étais choisi un frère triomphant. Insurpassable, il l'emportait dans toutes les disciplines pendant que je promenais ma fragilité sous le regard de mon père, ignorant l'éclair de déception qui le traversait.
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Et toujours ces questions : régulièrement on m'interrogeait sur les origines du nom Grimbert, on s'inquiétait de son orthographe exacte, exhumant le "n" qu'un "m" était venu remplacer, débusquant le "g" qu'un "t" devait faire oublier, propos que je rapportais à la maison, écartés d'un geste par mon père. [...]
Un "m" pour un "n", un "t" pour un "g", deux infimes modifications. Mais "aime" avait recouvert "haine", dépossédé du "j'ai" j'obéissais désormais à l'impératif du "tais".
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Le lendemain de mes quinze ans, j'apprenais enfin ce que j'avais toujours su. J'aurais pu moi aussi coudre l'insigne à ma poitrine, comme ma vieille amie, fuir les persécutions, comme mes parents, mes chères statues. Comme tous ceux de ma famille. Comme leurs semblables, ces voisins, ces inconnus, dénoncés par la dernière syllabe de leurs noms en sky, en thal ou en stein.
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Dans le lit une forme se devinait, entortillée dans les couvertures. Iannis dormait en position foetale, deux doigts enfoncés dans la bouche et je ne distinguais de lui qu'un profil délicat découpé sur l'oreiller. Une pointe du col de son pyjama masquait sa joue et seul un pli très marqué entre ses sourcils indiquait une tension que le sommeil même ne pouvait apaiser. Je fus saisi par la beauté de ce visage auréolé d'une masse de cheveux blonds, par la longueur de ses cils et la ligne de son nez, quand je m'attendais à un faciès déformé par les troubles psychiques.
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Il n’ignore pas que la menace se rapproche. Elle a pris le visage de celui que l’Allemagne a hissé au pouvoir. Il ne peut se défaire de l’image du pantin sinistre dont les vociférations lui ont rendu odieuse une langue qui, jusque-là l’avait bercé de ses lieder, de ses opéras, l’avait nourri de sa littérature et de sa philosophie. P 83

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Le parfum des livres neufs me grisait, je me soûlais aux amandes de la colle en pot, au cuir de mon cartable lorsque j’y enfouissais mon visage.
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Je savais désormais ce que recherchaient les yeux de mon père lorsqu'il fixait l'horizon, je comprenais ce qui rendait ma mère muette. Pour autant je ne succombais plus sous le poids de ce silence, je le portais et il étoffait mes épaules.
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Notre amitié est née presque en même temps que nous, Mando, c’est de là qu’elle tire sa force, du côté de la vie.
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[Incipit.]

Chapitre 1.

Fils unique, j'ai longtemps eu un frère. Il fallait me croire sur parole quand je servais cette fable à mes relations de vacances, à mes amis de passage. J'avais un frère. Plus beau, plus fort. Un frère aîné, glorieux, invisible.

J'étais toujours envieux, en visite chez un camarade, quand s'ouvrait la porte sur un autre qui lui ressemblait quelque peu. Des cheveux en bataille, un sourire en coin qu'on me présentait en deux mots : "?Mon frère.?" Une énigme, cet intrus avec lequel il fallait tout partager, y compris l'amour. Un vrai frère. Un semblable dans le visage duquel on se découvrait pour trait commun une mèche rebelle ou une dent de loup, un compagnon de chambrée dont on savait le plus intime, les humeurs, les goûts, les faiblesses, les odeurs. Une étrangeté pour moi qui régnais seul sur l'empire des quatre pièces de l'appartement familial.

Unique objet d'amour, tendre souci de mes parents, je dormais pourtant mal, agité par de mauvais rêves. Je pleurais sitôt ma lampe éteinte, j'ignorais à qui s'adressaient ces larmes qui traversaient mon oreiller et se perdaient dans la nuit. Honteux sans en connaître la cause, souvent coupable sans raison, je retardais le moment de sombrer dans le sommeil. Ma vie d'enfant me fournissait chaque jour des tristesses et des craintes que j'entretenais dans ma solitude. Ces larmes, il me fallait quelqu'un avec qui les partager.

Chapitre 2

Un jour enfin je n'ai plus été seul. J'avais tenu à accompagner ma mère dans la chambre de service, où elle voulait faire un peu de rangement. Je découvrais sous les toits cette pièce inconnue, son odeur de renfermé, ses meubles bancals, ses empilements de valises aux serrures rouillées. Elle avait soulevé le couvercle d'une malle dans laquelle elle pensait retrouver les magazines de mode qui publiaient autrefois ses dessins. Elle avait eu un sursaut en y découvrant le petit chien aux yeux de bakélite qui dormait là, couché sur une pile de couvertures. La peluche râpée, le museau poussiéreux, il était vêtu d'un manteau de tricot. Je m'en étais aussitôt emparé et l'avais serré sur ma poitrine, mais j'avais dû renoncer à l'emporter dans ma chambre, sensible au malaise de ma mère qui m'incitait à le remettre à sa place.
La nuit qui a suivi je pressais pour la première fois ma joue mouillée contre la poitrine d'un frère. Il venait de faire son entrée dans ma vie, je n'allais plus le quitter.

De ce jour j'ai marché dans son ombre, flotté dans son empreinte comme dans un costume trop large. Il m'accompagnait au square, à l'école, je parlais de lui à tous ceux que je rencontrais. A la maison j'avais même inventé un jeu qui me permettait de lui faire partager notre existence : je demandais qu'on l'attende avant de passer à table, qu'on le serve avant moi, que l'on prépare ses affaires avant les miennes au moment du départ en vacances. Je m'étais créé un frère derrière lequel j'allais m'effacer, un frère qui allait peser sur moi, de tout son poids.

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Ceux qui assuraient la sécurité, réglaient la circulation, tamponnaient les papiers officiels, devenaient les auxiliaires zélés d'un projet implacable, fonctionnaires dont la simple signature peut bouleverser un destin.
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La tache jaune les désignait au regard des autres mais leur permettait aussi de se reconnaître, soudant une communauté qui, à force de se dissimuler s'était parfois ignorée.
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Qu’un grain se glisse dans la blessure si mal refermée et tout bascule : amours, rêves, certitudes. Notre chemin se perd sous le sable, pierre sans mémoire qui coule entre nos doigts, chair des destins fragiles, ciment des châteaux éphémères. P 41
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Obstinément, Mando restera fidèle à sa ligne, tentant de maintenir le mythe de l’âme sœur avec un aveuglement qui me serrera le cœur lorsque j’aurai enfin accès à ses cahiers. Pas une ombre n’y plane, tout au moins jusqu’à l’épisode de notre rupture, avec sa phrase sèche comme un constat de décès. P 82
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Nous avons remisé le malaise dans lequel nous avait plongés l’affaire de la colonie de vacances. Mando et moi voulions nous penser jumeaux, si transparents l’un pour l’autre mais, après ma trahison du parc, cet épisode avait projeté une deuxième ombre sur notre amitié. Un trouble qui ne trouverait son explication que longtemps après, quand j’apprendrais la vérité sur cet accident de ski. P 40
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L'ennemi n'est plus seulement reconnaissable à ses uniformes vert-de-gris, à ses longs imperméables, il peut aussi se dissimuler sous les manches de lustrine des employés de mairie, sous la pélerine des sergents de ville, sous l'autorité des préfets et jusque dans le regard amical des voisins.
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