Citations de Pinar Selek (65)
Il y a mille façons de tuer.
Les routes des uns se séparent, celles des autres se rejoignent, dégagées ou ombragées, linéaires ou sinueuses. A chaque pas de nombreux choix s'offrent aux voyageurs. Certains le voient, d'autres non.
Que devient-on lorsqu'on oublie ? On s'habitue au mal.
Il faut allier le pessimisme de l'intelligence à l'optimisme de la volonté
P89
Je cessai de me de demander: «Où sont les Arméniens? » Je pris conscience que les Arméniens étaient désormais très peu nombreux en Turquie, qu'on les avait presque réduits à néant.
P65
La civilisation ne fonctionne-t-elle pas avec un postulat de rationalité qui lui donnerait la légitimité de remettre en « ordre » tout ce qui serait chaotique, marginal et extérieur à elle-même ? La domination de l’Occident sur l’Orient, l’esclavage des Noir.es, l’intervention dans les cultures dites primitives, le contrôle de la folie, la contrainte à l’hétérosexualité, l’exclusion des enfants de toutes sortes de décision, l’exploitation des pauvres, tout cela ne se nourrit il pas de cette idéologie ? Alors pourquoi tracer des limites sur les priorités ?
Il n’y a pas de système en dehors de nous. C’est important. On ne peut pas changer un système quand on ne se transforme pas. Étudier la sociologie m’a aidée à comprendre cela. Aucun système de domination n’est tombé du ciel ? Ils existent par nous, c’est nous qui les faisons vivre.
Le train qui fait Paris-Nice m’emporte dans une fiction dont je connais pas la trame. Je vais la découvrir de l’intérieur
Je suis entouré de Paranos, depuis que je suis à Nice, je vis avec des Zinzins qui jouent à cache-cache alors que personne ne les cherche
Je ne me rendais pas compte du temps qui passe une fois noyée dans le fil des nouvelles. Réussir à vendre ton papier en réunion ou en face du chef. Concevoir des articles sans saveur, comme des œufs de poule en batterie. Ne pouvoir écouter personne trop longtemps. Se fondre parmi les monstres qui jouent des coudes pour décider de quoi les gens parleront demain
Tout allait bien. L'avenir semblait clément.
Mais je ne suis pas fait pour l'espoir ... songea-t-il.
Les secrets se cachaient dans une forêt peuplée d'ashik [barde] et de chasseurs. Au pied d'un arbre dénudé, la vérité pleurait, oubliée de tous.
Istanbul est une ville immense, chargée de mythes. Tantôt elle pleure, tantôt elle rit. Un imbroglio de microcosmes. De temps et de lieux. De souvenirs et d'espoirs. De doigts tailladés, de lèvres de rose, de regards secrets ....
Dans les cours de littérature, on ne pouvait parler ni de Nazim Hikmet, ni de Yasar Kemal, ni de Kemal Tahir. Poésie ottomane par-ci, poésie ottomane par là. Alors, je m'étais assigné une mission: placarder des poèmes de Hikmet dans les couloirs de l'école. Mais ces affiches ne restaient pas sur le mur plus d'une heure.
C'était difficile de garder la tête froide. A Paris, chacun se surveillait, avait une foule d'obligations. A l'époque, un mouvement arménien armé avait vu le jour ; ses militants attaquaient les consulats turcs. Dans ce climat de règlement de comptes, ils ne faisaient que se consumer eux-mêmes. "Tu deviens leur sujet. Si tu pars, ils te brûlent, si tu restes, ils te grillent. Et si tu prends un vent contraire, tu es perdu. Le feu s'éteint, tout n'est que débris brûlés et odeur de plastic. A en avoir la nausée."
Où se trouvait-il, le pays des sorcières ? Je l’ignorais. Je me suis retrouvée dans un espace dont je ne connaissais ni la langue ni les réflexes et dont les tempêtes me désorientaient
Si on me demande où j’en suis, je réponds que je tiens bon la barre, que j’ai appris à jouer avec ces vents qui m’ont d’abord déroutée. Mais que je ne peux pas mettre le cap sur le lieu dont je parle, le pays qui me manque
L'heure est grave copine. Ta photo était dans le journal local hier... La femme qui enlève les chiens ! Ce n'est pas présenté comme ça bien sûr; ils se demandent plutôt : est-ce qu'elle enlève des chiens ou est-ce que cette farfelue est le brasniçois d'un réseau criminel ? Détient-elle le secret des chiens disparus ? Et tout un tas de trucs comme ça...
Cette étude sur le rôle du service militaire dans la structuration de la violence masculine avait en effet fortement agacé l’appareil politico-militaire turc
les mécanismes des violences structurelles qui façonnent l’ordre social et politique en Turquie. A savoir né du génocide des Arménien·nes de 1915 et des massacres de centaines de milliers de Grec·ques et de Kurdes