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Critiques de Rachel Corenblit (514)
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Ce n'est pas ce à quoi elle s'attendait lorsqu'elle est entrée dans la boutique de ce tatoueur. En lieu et place d'un grand gaillard au look de biker et, évidemment, tatoué de partout, une jeune femme à peine plus âgée qu'elle, ni maquillée, ni percée, ni tatouée. Cette dernière a aussitôt prévenu Elsa que cela pourrait être douloureux. Qu'importe, elle y tient à ce tatouage qu'elle affichera fièrement à son avant-bras. Non pas un dauphin, une coccinelle ou une fée mais une série de 6 chiffres. Des chiffres importants pour elle mais aussi sa grand-mère, Claudia, qui, poussée par sa petite-fille, s'est confiée, par bribes, sur son passé. Presque des mots murmurés, si pesants...





Rachel Corenblit nous livre un texte court, sobre et percutant sur l'Histoire, la Shoah et le passé que, parfois, certains voudraient tenter d'oublier. L'auteure entremêle habilement la petite et la grande histoire, celle de Claudia, déportée alors qu'elle n'avait que 14 ans et celle d'Elsa, marquée par le passé de sa grand-mère et par ce que celle-ci lui a racontée, tentant de mettre des mots, autant que faire se peut, sur ce qu'elle a vécu. Tandis que la jeune fille, allongée sur la table, se fait tatouer, elle en explique les raisons, donnant plus que tout du sens à son geste et à ses chiffres. 146298, six chiffres qu'Elsa s'approprie, six chiffres encrés dans la peau et ancrés dans les mémoires.

Un roman adolescent intelligent et bouleversant, servi par une plume percutante. Pour ne pas oublier ce passé...





Merci pour le prêt, Cécile...
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Pas la fin du monde

Rachel Corenblit a choisi de situer l’intrigue de son roman à Toulouse, le 21 septembre 2001, jour de l’explosion de l’usine AZF. Les descriptions de cette catastrophe industrielle sont bouleversantes de vérité, je l’affirme d’autant plus que je me trouvais à quelques pas d’AZF ce jour funeste et j’ai, tout au long de ma lecture, j’ai eu l’impression de revivre cette journée particulière que je n’oublierai jamais.

Journée particulière donc, durant laquelle se cherche et s’affronte une famille désunie. Le parallèle est vite établi entre cette famille disloquée et les décombres dans les rues proches de l’usine.

Frida, toujours sur le mode colère et reproches, retrouve son frère Léon qui remâche un chagrin d’amour. Ces deux-là ne se voient que de loin depuis le divorce de leurs parents. Les retrouvailles se font chez Aida, la grand-mère invincible qui a vécu plusieurs vies. Au milieu de sa maison détruite, alors qu’elle a échappé de peu au verre meurtrier, elle se souvient.

« En sortant de la maison, Aida fut saisie par ce ciel et ne put s’empêcher de vaciller. Elle sentit le vertige l’envahir, la happer. Comme si on l’avait à nouveau jetée au cœur de l’enfer, soixante ans auparavant. »

Dans cette famille, il y a aussi le père, un grand émotif devenu dépressif depuis que sa femme, la belle espagnole, l’a quitté pour un autre. Et ce père a disparu dans la tourmente de cette journée folle. Frida et Leon, qui vont arpenter les rues de Toulouse à sa recherche, vont devoir se parler à nouveau et passer sur leurs différends. Les retrouvailles avec leur mère vont apporter leur lot de surprise et d’autres rencontres, nostalgiques, émouvantes ou cocasses, vont émailler leur périple. Tout est bouleversé par la catastrophe, ce n’est pas la fin du monde mais ça y ressemble quand même un peu. On croise des gens affolés, blessés, des chiens perdus, c’est le chaos d’où le soleil s’est absenté, caché par un nuage toxique.

« …ils virent un homme qui courait, tenant un enfant. Le gosse était conscient, plaqué contre la poitrine de l’homme, ses bras pendant le long de son corps et de ses bras coulait le sang. »

Cette traversée étrange, décalée, d’une ville ravagée donne le rythme au texte, et quel rythme ! On est à la fois pris dans le tourbillon des relations pleines de rancune et d’hostilité de cette famille désunie mais qui s’aime encore, et d’une ville enfoncée dans le chaos.

« Plus haut, la rue s’était transformée en hôpital de campagne à ciel ouvert, comme pendant les guerres de tranchées. »

Et si la ville rose a été meurtrie ce jour de septembre, ce désastre (l’une des plus grandes catastrophes industrielles du XXIe siècle) aura permis à une famille disloquée de tisser à nouveau des liens d’affection.

Une belle histoire traitée avec délicatesse et servie par une écriture allègre et énergique.

« Pas la fin du monde » est classé roman jeunesse mais s’adresse à un lectorat plus vaste.

Je remercie les éditions Bayard et Babelio pour cette découverte.



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À la dure

Cinq bassines. De grandes serviettes. Des couvertures. Des chaussettes en laine. Du riz, du gros grain qui ne colle pas à l'estomac et qu'elle pourra vomir. Des médicaments type Xanax ou Lexomil mais ceux-là ont été trop difficiles à se procurer aussi Arthur s'est-il rabattu sur le Doliprane qui restait à la maison et le Valium que Lisa a piqué chez elle. Tout ça pour So, la soeur aînée d'Arthur, qui, après des années de dérive et de désertion du domicile familial, revient. Elle revient de loin aussi, So. Tombée bien bas. Et aujourd'hui, profitant de l'absence de ses parents, elle va tenter de remonter, "à la dure", à la maison, avec l'aide d'Arthur, qui ne pouvait décemment pas abandonner sa soeur...



So vit dans l'extrême, elle a quitté la maison et l'école et est partie on ne sait où avec un mec pas trop fréquentable, un trafiquant de drogue. Elle dérive, au fil des jours puis des mois. Jusqu'à ce point de non-retour. Décidée, sûre d'elle, elle veut en finir avec tout ça et requiert l'assistance de son jeune frère, Arthur. Ce dernier se confie, au fil des pages, sur le parcours de So, ses souffrances, ses manques, le lien indéfectible qui les unit et les terribles jours durant lesquels ils seront livrés à eux-mêmes. Rachel Corenblit nous offre un roman bouleversant sur la drogue et ses méfaits et sur l'amour et l'entraide fraternels. Elle nous plonge dans une ambiance pour le moins tendue et angoissante. L'on suit, jour après jour, cette sombre période et l'on espère plus que tout, pour So et Arthur, une embellie. Les mots, percutants, sonnent juste et l'écriture est haletante.



Merci pour le prêt, Cécile...
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Les jeux de l'amour et du bazar

A priori, Rachel Corenblit apprécie Le Jeu de l'amour et du hasard de Marivaux. Cela nous fait un point commun. « Adieu Camille, retourne à ton couvent »... Une des plus belles tirades du théâtre français, si vous voulez mon avis. Mais ce n'est pas le propos. Ici, ce sont Les Jeux de l'amour et du bazar. La comédie se transforme en roman mais garde ses trois actes. Le constat. L'action. Le final. Il y est question d'amour. Les protagonistes sont des adolescents qui interrogent ce sentiment qui les perturbe. Clara ne comprend pas l'intérêt que tout le monde porte à l'amour, elle n'a jamais rien ressenti qui puisse ressembler, de près ou de loin, à ce mystère... Enfin, presque. Lola est un coeur d'artichaut, elle aime comme elle respire, mais elle en souffre, alors elle se fait une promesse : plus jamais elle ne tombera amoureuse. Tarkan, lui, a l'amour fidèle : il a dans son coeur, depuis toujours, une jeune fille qu'il a connue dans son pays d'origine. Quant à Joshua, il eu le coeur brisé ; il a beau avoir un physique d'Apollon, il refuse de tomber dans le sentimentalisme mais il aimerait connaître l'amour physique.

Lever de rideau. « C'est l'heure des grandes décisions », dit Clara à son amie Lola. Réflexions, interrogations et quiproquos s'enchaînent alors grâce à la plume savoureuse de Rachel Corenblit, vrai point fort de ce roman. Vraiment, j'ai souri à de nombreuses reprises et j'ai trouvé certaines situations très drôles. Le ton est juste, l'histoire finalement très touchante et elle s'achève même avec un petit bonus, le dernier chapitre, où l'on nous raconte le premier amour de tous les autres personnages du roman. J'ai adoré cette fin. Un bémol cependant : j'ai lu ce roman sans avoir connaissance de la tranche d'âge à laquelle il s'adresse et j'ai été un peu décontenancée par certains passages, notamment ceux concernant Joshua car sa démarche est un peu particulière et je ne sais pas comment elle pourrait être reçue par des adolescents. Alors, je dirais 16 ans et plus.


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L'année des pierres

"Vous avez 0 jour de retard sur la publication de votre chronique." Je dois bien avouer que c'est cette phrase qui m'a incité à finir aujourd'hui ce roman plus que la réelle envie de connaître la fin de celui-ci. J'ai commencé ce dernier le 24 novembre mais ai finit par le mettre de côté en abandonnant ma lecture à sa moitié. Pourtant je dois bien avouer à la fin de ma lecture aujourd'hui être content de l'avoir terminé car l'année des Pierres et un bon roman jeunesse, il ne correspondait juste pas à ce à quoi je m'attendais en débutant ma lecture.



"Israël, décembre 1987. Lors d'un voyage de découverte, un bus de lycéens français est attaqué par des Palestiniens de leur âge, qui lancent des pierres. La première Intifada vient de commencer. Loin de leur pays et de leurs parents Daniel, Christophe, Rose, Lucille, Jeremy, Sonia, Amir, Benjamin, Anna et Anaïs ne soupçonnent pas l'ampleur du conflit dans lequel il se retrouve plongé"

Voilà le résumé qui m'a décidé à cocher ce livre lors de la masse critique du mois de novembre dernier. Je m'attendais lors de ma lecture à en apprendre plus sur cette première Intifada et à ce conflit dans laquel se trouve plonger bien malgré eux ses dix adolescents.



Ici cependant si l'élément central du roman et bien l'attaque de ce bus par de très jeunes Palestiniens on ne parle que peu très peu du conflit Israelo Palestinien en lui-même. D'ailleurs la fameuse attaque du bus n'intervient que très tardivement au sein du roman, il faut lire plus de la moitié de ce dernier pour savoir exactement ce qui s'est passé ce jour-là. Même si les détails de cette attaque n'interviennent que tardivement elle structure tout le roman la temporalité y étant tout le long fractionné entre l'avant et l'après. Entre l'avant, où nous découvrons comment et dans quelles circonstances ces 10 jeunes adolescents français, croyant ou pas vont se retrouver dans un internat en Israël, vont se côtoyer puis s'apprivoiser, apprendre à se connaître et à vivre ensemble puis l'après, l'après cette journée qui les marquera toute leur vie et créera un lien unique et particulier entre chacun d'entre eux dépassant la simple amitié mais dont aucun ne sortira totalement indemne.



Le début du roman est assez long et c'est là sans doute le plus gros défaut de celui-ci, ils sont dix adolescents, tous différents. Rachel Corenblit prend ici le temps de tous nous les présenter. Cependant c'est grâce à cela que prend ici tout le sens et la portée de ce roman jeunesse, roman où ces jeunes déracinés de leur cadre de vie familier vont malgré leur différence apprendre à se connaître, à échanger, devenir ami, s'aimer et aussi se disputer, ils vont aussi et surtout apprendre sur eux-mêmes. Sur ce point-là  ce roman est vraiment une réelle réussite. J'ai également apprécié la thématique de la famille que développe également ici l'auteure, là encore le tout se développe sur le tard mais je dois dire que l'auteur a réussi à m'émouvoir et clôture par ce point ce roman jeunesse en toute beauté.



Je sors donc finalement assez content de cette lecture qui s'avéra être agréable bien que différente de ce à quoi je m'attendais. Je remercie Casterman et Babelio pour l'envoi de celle-ci.
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Que du bonheur !

De Rachel Corenblit , j'avais beaucoup aimé "40 Tentatives pour trouver l'homme de sa vie ". Des petites nouvelles toutes plus intelligentes les unes que les autres, écrites dans un style incisif, cynique et délicieux .

Aussi lorsque j'ai vu qu'elle écrivait aussi pour les ados , j'ai dit : "Banco .Que du bonheur !

Mais pour Angela 15 ans , c'est plutôt la scoumoune , la "tepoisse", une année de merde ...Les trucs moches arrivent toujours groupés , c'est connu , et pour elle , ça s'enchaine : nez cassé, harcèlement scolaire, trahison de sa meilleure amie , divorce des parents, vacances minables , son "petit chat est mort" ...

Moi je dis stop! Il faut faire quelque chose pour Angela , lisez son livre , au moins elle aura du soutien . Angela n'a pas de bol mais Angela est vraiment une chouette fille . Elle a le sens de l'autodérision, philosophe avec impertinence et moi j'adore les filles marrantes .

C'est bien écrit , Rachel Corenblit a le don pour choisir les mots avec précision , pour surprendre par le choix des associations . Les thèmes abordés rencontreront forcément un écho .

Le livre est court, j'aurais aimé passer plus de temps avec Angela , je verrais bien une suite ... Angela c'est que du bonheur !

Par contre la couverture , hum... Faut réagir Rachel , te laisses pas faire ! La prochaine fois , n'écoute-pas tes éditeurs , adopte un illustrateur.com ...

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146298

La peau. Un support formidable pour écrire les maux.

Eczéma, psoriasis. Auto-mutilation. Ceux-là s'imposent, on les subit, alors on ne sait pas toujours les décrypter (donc les guérir).

Le tatouage en revanche, on le choisit. En principe...



Pour Elsa, le '146298' qu'elle s'apprête à se faire tatouer a un sens, il va matérialiser des stigmates qu'elle porte déjà : la déportation et l'internement de sa grand-mère Claudia dans un camp nazi.

Elsa a toujours vu ces six chiffres sur le bras de la vieille femme, personne n'a jamais voulu lui expliquer. Sa mère « clame haut et fort qu'on accorde trop d'importance au passé », et pour Claudia, rescapée des camps, les souvenirs sont trop douloureux.



Après un cours sur la Shoah en classe de troisième, Elsa a commencé à deviner l'horreur. Elle a lourdement insisté pour que sa grand-mère lui raconte : « Elle s'attendait à quoi ? Que je la laisse silencieuse, avec son nombre ? Elle a commencé par dire que c'était le passé. Que le passé, on le laissait dans un trou et qu'on le recouvrait de terre et que c'était inutile de vouloir le déterrer. Rien de bon ne sortait du chaos. Et son passé, c'en était un, de chaos, immense. L'apocalypse. »

Les adolescents sont des éponges, des écorchés-vifs, ils ont besoin d'expérimenter pour comprendre. Elsa va tenter à sa manière de revivre ce qu'a subi sa grand-mère...

« C'est pas imaginable, elle me répond. N'essaie pas d'imaginer. »



Excellent roman pour adolescents sur la Shoah qui m'a fait penser au témoignage de Marceline Loridan-Ivens ('Et tu n'es pas revenu').

Court, à la fois sobre et terrible, ce texte évoque la déportation, les camps, le retour (l'horreur ne s'est pas arrêtée quand les alliés sont arrivés en Allemagne, il a fallu rentrer).

Ce passage de relais émouvant entre Claudia et Elsa nous montre également le poids du passé familial et nous invite à réfléchir au casse-tête de la transmission entre générations : que dire à nos enfants des traumatismes de leurs ancêtres, des drames vécus dans la famille ? A quel âge ? Certains événements sont indicibles, trop lourds à entendre, trop difficiles à revivre par la parole, aussi...

Pas facile de s'y retrouver entre le non-dit, le mal-dit, le trop-dit...



Je conseille aux adolescents, notamment à ceux de Troisième, en complément aux cours d'Histoire et à la préparation de l'oral d'HDA. Les 66 pages très aérées se lisent en 1/2 h., ça ne devrait pas les effrayer...
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Nos futurs désirables

Douze nouvelles qui tranchent avec un passé et un présent morose et plein de fureur.



Ce recueil de nouvelles juxtapose des textes d’auteur-e-s établis et connus comme Rim Battal, Laurent Petitmangin, Bertrand Vergely, Patrick K. Dewdney,... et de jeunes étudiant-e-s tels René Tamin, 20 ans, qui fait sciences politiques, Pauline Lachèvre, qui est en troisième année de lettres modernes et Lucille Petit, 17 ans, sortie première au concours d’écriture de l’AMOPA (Association des Membres de l’Ordre des Palmes Académiques).



L’initiative de ce recueil s’inscrit dans le cadre du projet ECOPOSS, lancé par l’Université Catholique de Lille. Ce projet relie des acteurs de la "transition écologique de demain" : étudiants, enseignants, chercheurs et entreprises.



ECOPOSS part du principe qu’il ne suffit pas d’alerter le monde sur les menaces écologiques futures, mais qu’il faut, au contraire, chercher des réponses concrètes pour y faire face, stipuler des actions positives pour pouvoir y arriver.



Dans les nouvelles retenues il est question des futurs dans lesquels seraient possibles "des relations plus saines aux autres, à la nature, à l’humanité, à la technologie, à l’économie...des futurs imaginés et sources d’une joie profonde "...



Ainsi, dans sa nouvelle "L’envolée", Laurent Petitmangin parle d’un "air nouveau", vers lequel les gouvernements, qui avant avaient aidé les marchés, imposeraient règles et interdictions.



Rémi Tamin dans "L’ours et l’enfant" insiste pour retrouver la nature perdue, tandis que Yohann Natale situe son conte "Dar-win" carrément dans le futur, au début de l’année scolaire 2025, où le jeune Yanco espère devenir médecin pour sauver sa belle Margot d’un cancer.



Rachel Corenblit dans "Soufflait un vent léger" nous confronte avec des records de chaleur, de sécheresse, des orages destructeurs et incendies mortels... et la guerre en Europe : ce "mépris des gens, de ce à quoi nous aspirions, la paix, la tranquillité".

"Vous êtes abîmée par la vie, Camille. Un peu d’espoir. C’est important l’espoir, c’est ce qui nous sauvera."



L’historienne Pauline Rouge nous explique dans "Guerre propre" comment éviter des guerres sanglantes et mortelles et Lucie Rico de Perpignan dans "Quand tu as voulu revenir" aimerait retrouver "les vœux que j’avais écrits pour le futur", son dernier devoir d’école.



La contribution qui m’a émerveillé le plus est la nouvelle de la jeune Pauline Lachèvre "Bientôt-vécu", comme l’opposé du "déjà-vu", que je vous laisse découvrir, car "il serait dommage de passer à côté d’un si bel avenir."



Le récit du théologien et essayiste Bertrand Vergely, intitulé "Le futur" constitue un tour de sagesse auprès de quelques éminents penseurs, tels Leibniz, Bergson, Paul Ricœur, Michel Foucault.



L’auteur franco-britannique Patrick K. Dewdney dans "Le futur, c’est maintenant" aurait voulu qu’on lui dise de beaucoup de choses pourquoi elles sont comme cela...



La poétesse et journaliste d’origine marocaine, Rim Battal, veut dans sa nouvelle "L’anniversaire" des réponses claires de sa chère maman sur son passé et le sens de l’existence.



Ces 12 nouvelles fort différentes de contenu et de style forment un ensemble harmonieux pour la bonne cause, un avenir radieux pour nous et nos descendants.

Si je peux me permettre de vous suggérer de ne pas les lire d’affilée, afin d’en mieux saisir leur signification profonde et leur portée.

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Un petit bout d'enfer

La première chose que j'ai faite après avoir refermé ce livre a été de consulter le site des Editions du Rouergue pour voir à quelle tranche d'âge est destiné ce roman. « Ados et jeunes adultes ». J'en côtoie, des ados, et clairement je ne pourrais pas mettre ce livre entre leurs mains. 16 ans me semble être un âge raisonnable, pas moins. C'est d'ailleurs l'âge que prétend avoir la narratrice – qui en réalité n'est âgée que de 14 ans. 16 ans c'est ce qui l'unit au deuxième narrateur du roman. Leur point commun en quelque sorte. Plutôt troublant. On pourrait croire au départ que lui aussi a 16 ans, mais pas du tout. En fait, il ne s'agit pas de son âge. Lui, cela fait 16 ans qu'il est marié avec sa femme. L'une cumule les bêtises propres aux adolescents de son âge, l'autre commet l'acte le plus horrible qui soit. Et leurs deux chemins se croisent, au cinéma, une rencontre d'une banalité incroyable et profondément dérangeante.

Honnêtement, j'ai lu ce court roman d'une traite. Je commence à être familiarisée avec la plume de Rachel Corenblit, je la trouve particulièrement efficace, alors même que ses romans abordent des thèmes tout à fait différents. La construction du roman m'a également beaucoup plu, notamment cette aura de mystère qui plane sur le personnage masculin et qui s'interrompt brusquement, dans un chapitre qui est un véritable coup de poing. Après, bien sûr on comprend relativement vite comment les choses vont tourner et on devine assez facilement la fin de l'histoire, fin que l'on pourrait juger simpliste et qui, de fait, semble venir « apaiser » en quelque sorte la dureté des événements racontés. Mais ce serait sans lire entre les lignes car cette fin, moi, je l'ai trouvée assez troublante.

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Encore plus de bonheur

Bon, évidemment, je n'avais pas fait attention au fait qu'il y avait un début à l'histoire d'Angela. Je suis impardonnable. C'est écrit clairement, dès la première phrase présente sur la quatrième de couverture (« la suite de mes aventures »), mais je les survole de plus en plus… J'avais envie dans tous les cas de poursuivre ma découverte de Rachel Corenblit et j'ai passé avec Angela un très bon moment. Je précise qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu Que du bonheur ! pour comprendre et apprécier ce livre.

Angela a seize ans, c'est une ado qui a vécu une première année de lycée absolument pourrie, disons-le clairement, et le pire du pire, c'est qu'elle redouble. Angela est motivée, pleine de bonnes résolutions, elle ne veut pas voir se renouveler les moments catastrophiques vécus quelques mois plus tôt. Et pourtant, à peine quelques jours après la rentrée, la voilà qui s'étale de tout son long devant ses camarades lors du cross du lycée. L'année va être longue, très longue… Par un concours de circonstances, elle se retrouve élue déléguée et doit apprendre à partager ce rôle avec Félix, l'intello, le boulet. Entre les relations difficiles qu'elle entretient avec ses anciens camarades de classe et les moments passés avec ses parents, Angela a parfois du mal à trouver sa place. Et s'il suffisait d'ouvrir les yeux et d'apprendre à profiter de l'instant ?

Avec intelligence et humour, Rachel Corenblit brosse le portrait d'une adolescente tout à fait réaliste et vraiment attachante. Un grand merci à Babelio et aux Éditions du Rouergue !


Lien : http://aperto.libro.over-blo..
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146298

Je ne connaissais pas cette collection "D'une seule voix" chez Actes Sud Junior. C'est assez particulier comme récit je dois dire. Je ne sais pas si la forme du monologue intérieur, caractéristique de la collection, peut fonctionner avec n'importe quel sujet. En tous cas, elle me paraît particulièrement adaptée au public cible : les adolescents.



Tout commence chez un tatoueur. La narratrice va se faire tatouer 146298 sur le bras, et l'on se demande bien pourquoi. Et même lorsque l'on découvre en milieu de livre ce que signifient ces chiffres, on se demande encore pourquoi elle en arrive à cette extrémité. Je ne vous donnerai pas le fin mot de l'histoire (même si vous trouverez l'information un peu partout), mais je peux vous dire que c'est fort en émotions et que ça a trait à l'Holocauste.



Dans 146298 , Rachel Corenblit utilise des phrases courtes, un ton parfois brutal, en tous cas toujours exalté. Le texte est jeté sur la page blanche tel quel (pas de "justifié"). Le format est lui-même particulier : 11 x 17.6, soit un livre très fin, assez haut mais pas très large. Si c'est un peu inconfortable au premier abord, on comprend assez vite que cette mise en page convient parfaitement au principe de la collection : laisser s'exprimer une voix en un souffle, toute en émotion contenue ou au contraire en rage folle.



C'est une très belle et émouvante évocation du lien entre une grand-mère et sa petite fille, faite de souvenirs et de non-dits, de souffrance et de liberté.
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À la dure

Cinq bassines, des chaussettes chaudes et des couvertures douces en polaire, des draps de rechange, des bouteilles d'eau et des grandes serviettes de plage dont celle que préférait So quand elle était petite, la délavée avec Batman.

A quelle expédition se prépare Arthur en s'équipant ainsi ? A un sauvetage, celui de sa grande soeur, tombée très bas, partie très loin...



Un roman beau et poignant qui traite des dégringolades possibles à l'adolescence, des mauvaises rencontres, de l'amour entre frère et soeur, des liens qui unissent une famille, de la douleur des autres quand l'un va mal.



Une histoire forte, ponctuée de moments intenses et d'images marquantes : « Papa et maman couchés par terre, l'un dans les bras de l'autre. Ils ne m'ont pas remarqué, occupés qu'ils étaient à chuter plus bas que terre. C'est l'effet que ton départ a eu sur eux. Tu leur as coupé les jambes, ils ne tenaient plus debout. »



J'ai pensé à l'excellent roman 'Moi et toi' de Niccolò Ammaniti en lisant cet ouvrage.

A faire découvrir dès 15 ans.
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La maledetta

Eva, 16 ans, part avec sa. mère, son frère Anthony, et Samy, le meilleur ami de son frère, dans une maison isolée en pleine montagne, que sa grand-tante a léguée à sa mère.

Eva découvre qu’au village on appelle cette maison « La maison des mortes », et que sa grand-tante se serait pendue pour échapper aux esprits qui hantent sa demeure.



On avait découvert la plume de Rachel Corenblit enseignante en primaire puis formatrice d’enseignants pendant près de 20 ans avec les attachants, sensible quotidien d'une institutrice paru en 2017



Celle qui est avant tout reconnue comme une grande romancière jeunesse change totalement de registre avec "La Maledetta", son nouveau roman destiné aux grands ados ( à partir de 15 ans), mélange de thriller, fantastique et d'horreur autour d'une maison isolée dans lequel les esprits, et histoires ssombres cachées du passé reviennent à la surface.



La sombre bâtisse va dévoiler peu à peu ses non moins sombres secrets au yeux de nos trois héros plus ou moins apeurés et téméraires ...



Fantômes, possessions, cauchemars...Rachel Corenblit nous offre un récit bien menée et à l'écriture fluide et dynamique, et à l'intrigue originale surtout pour un roman young adult, peu habitué à balayer ces terres là .
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Que du bonheur !

350 ! C'est en gros le nombre de JDM (journées de m****) qu'Angela a enchaînées depuis son arrivée au lycée.

Dès le jour de la rentrée en Seconde, elle se prend les pieds dans le sac de LA bombasse-pétasse de la classe, se casse le nez. Et c'est parti pour un tour de piste quasi-complet des pires cauchemars ados : visage abîmé, brimades de la blondasse et de ses copines, complicité muette des adultes. Et si encore Angela pouvait oublier ses problèmes en rentrant chez elle, mais non, on lui en remet une bonne louche : les parents se séparent, le vieux chat adoré rend l'âme, sa meilleure amie la trahit, ses vacances d'été s'annoncent pourries...



Rachel Corenblit reprend ici des recettes qui marchent en littérature pour jeunes ados. Sur la forme, d'abord : témoignage tragicomique ponctué de quelques photos, illustrations, commentaires manuscrits. Et sur le fond : comme dans les séries 'Nine' (Géraldine Maillet) et 'Mentine' (Jo Witek), il est question d'amitié et d'amour, de harcèlement entre ados, de divorce parental (et de la dépression maternelle qui l'accompagne parfois), de troubles du comportement alimentaire, de rapports conflictuels avec les parents, et de l'échec scolaire qui résulte de tout ce bazar...



Malgré ces sujets graves, le ton reste léger, grâce au sens de l'autodérision de la narratrice. Trop léger, peut-être, eu égard aux problèmes évoqués : le harcèlement et la boulimie peuvent s'installer durablement et faire de gros dégâts...* Ce roman s'adresse donc plutôt aux jeunes adolescent(e)s, de onze à quatorze ans.



Merci, Iris29, pour l'idée : j'ai passé un bon moment de lecture plus souriante que larmoyante. Avec sa mauvaise foi et sa lucidité impitoyable et drôle, Angela est une ado de quinze ans grincheuse comme on en croise tous les jours...



* n° vert si vous êtes victime ou témoin de harcèlement : 30 20

et ce site : http://www.nonauharcelement.education.gouv.fr/
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Un peu plus près des étoiles

Rémi, 15 ans, est un adolescent solitaire. Trimballé par son père, médecin remplaçant, de ville en ville, il n'a jamais le temps de se faire des amis et de se poser dans un "chez soi". Entre le père et le fils, la communication n'est pas simple et c'est dans la musique que Rémi trouve du réconfort. Cette musique , c'est celle que lui a laissée sa mère décédée, la musique des années 1980. Un vieux casque vissé sur les oreilles, le walkman dans la poche qui déroule les cassettes, Rémi s'évade ainsi. Alors lorsque lui et son père posent leurs valisent dans un centre de repos pour les grands brûlés, les accidentés et les amputés qui viennent de subir une opération chirurgicale, Rémi compte bien ne rien changer à ses habitudes. Mais c'est sans compter Sara et sa bande. Des défigurés, des amochés, des gueules cassées qui vont lui apprendre que derrière les apparences se cachent des gens formidables.



C'est une très belle et émouvante histoire que nous relate ici Rachel Corenblit. Une histoire d'amitié, de courage, d'espoir et de solidarité. Cette bande d'ados éclopés offre une formidable leçon de vie à Rémi tout d'abord, au lecteur ensuite, révélant qu'un individu est avant tout une personnalité, un caractère, des émotions, et que le corps ne peut être le reflet de notre âme. Et que oui, c'est très banal, la beauté est avant tout à l'intérieur. C'est beau ce qu'il se passe entre ces jeunes déjà broyés par la vie et je trouve bienvenue cette thématique dans la littérature ado, à un âge où l'apparence justement prend trop souvent une importance disproportionnée.

Autre intérêt, la vie quotidienne de ces grands blessés, rythmée entre espoir et désespoir, opérations et et risques, l'autre blessure infligée par le regard que leur portent les autres dits "normaux" et enfin la difficile acceptation de soi.

Enfin, l'histoire personnelle de Rémi est un autre sujet à exploiter, révélant les craintes et les questions qui se posent face à la folie d'un proche, la difficile communication entre un père qui s'évade dans le travail et un fils qui a une tonne de questions. le lien que Rémi conserve avec sa mère à travers la musique est également très touchant.

Une belle découverte à travers une lecture aisée et un style agréable, à lire et à écouter avec la playlist.



Sélection prix des Incorruptibles 2021-2022, niveau 3e/lycée.
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Des chiffres dont elle n'avait jamais compris la signification.

Jusqu'au jour où elle découvrit l'horreur.

Et où elle fit le rapprochement.



Un texte court mais fort. Qui parlera aux ados et à leurs aînés. Poignant. Éloquent. Intense. Loin des manuels d'histoire et des cours magistraux. Sans trop en dire, il fait réfléchir, se souvenir, ne pas oublier.



Car même si le passé doit rester enterré dans son trou, on peut tout de même crier "plus jamais ça".
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Les attachants

Ce roman est tout aussi attachant que les élèves de CM2 décrits par cette jeune institutrice. Rachel Corenblit a réussi a sublimer le roman de société pour montrer au plus juste et au plus prêt la quantité de bienveillance, de soutien et de détachement qui sont indispensables pour exercer le métier d'institutrice aujourd'hui.

Cette classe à l'ecole des Acacias est le reflet d'une classe ordinaire aujourd'hui avec des élèves aussi durs, pénibles, méchants qu'attachants, ce lien qui petit à petit se crée avec l'élève.

A travers la force des sentiments liés à l'exercice du métier, le lecteur suit aussi l'impact sur la vie personnelle d'Emma, jeune adulte en construction.

Rachel Corenblit ne lâche pas ses lecteurs en Prolongeant le récit dix ans après en suivant à la vie des différents personnages après cette fameuse année de CM2 à l'école des accacias. Une très belle lecture pour un vrai regard porté sur son temps.
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Pas la fin du monde

Dans Pas la fin du monde, son nouveau roman paru le 24 août, Rachel Corenblit revient sur l'explosion survenue à l'usine AZF le 21 septembre 2001. le moins que l'on puisse dire est que l'autrice ne perd pas de temps : après un court chapitre initial centré sur le personnage de Léon et la relation qu'il entretient avec sa grand-mère, elle plonge le lecteur au coeur du drame en exposant les sensations du jeune homme au moment de l'explosion : d'abord, une vibration indéfinissable, puis un bruit terrible, enfin le souffle coupé et l'incompréhension. À partir de là, seront présentés tour à tour les différents personnages qui gravitent autour de Léon, et notamment sa grand-mère, sa soeur et son père, toujours avec en toile de fond la Ville rose et le chaos régnant ce triste jour de septembre.

C'est le premier point qui est, à mon avis, contestable dans ce roman : Toulouse est présente et certaines descriptions sont aussi poignantes que réalistes pour quiconque a vécu le drame de 2001, mais il s'agit surtout d'un prétexte à l'exposé des difficultés familiales des personnages. C'est une famille qui a en partie explosé – analogie volontaire – sous le poids des reproches maladroits et des non-dits pernicieux. Cette famille, je n'ai pas vraiment réussi à m'y attacher, peut-être parce qu'elle réunit trop de caractères et de problématiques divers. Pour le dire simplement, je me suis souvent dit « C'est too much ! » Par exemple, je sais que c'est un détail, mais pour moi l'histoire personnelle d'Aida, la grand-mère, arrive comme un cheveu sur la soupe et je n'ai vraiment pas compris pourquoi il fallait ajouter du drame au drame. Après, reconnaissons que le roman est bien écrit et qu'il se lit sans aucune difficulté, il est relativement rythmé et il pourrait donc plaire aux adolescents à qui il est destiné, même si ces derniers n'étaient pas nés lors des événements narrés. de mon côté, lectrice adulte et toulousaine, je reconnais une petite déception…

Je remercie Babelio et les Éditions Bayard pour cette lecture !


Lien : http://aperto-libro.over-blo..
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Les attachants

Madame Corenblit, page 183, vous prêtez à votre lecteur l'idée que l'écrivain a dans ce livre « … mélangé la réalité avec sa drôle d'imagination qui lui fait raconter des trucs tordus pour donner des peurs rétrospectives aux lecteurs tranquilles qui essaient de vivre mieux que les personnages perdus des romans qu'on veut bien leur proposer. »

Eh bien, sachez, Madame, qu'à aucun moment, je ne me suis dit : tiens, n'importe quoi, elle veut nous faire peur celle-ci, rien à voir avec la réalité de l'école tout ça, encore une alarmiste, une râleuse comme il y en a tant dans ce milieu, une qui est toujours dans la rue les jours de grève, une qui veut encore révolutionner le système, une qui..., une qui..., une qui…

Non, hélas, de tout coeur, j'aurais préféré ne pas croire à ce que vous racontez, ranger le livre sur l'étagère des « romans » et passer rapidement à autre chose…

Mais, dans quelques jours, Madame Corenblit, ce sera ma 29ème rentrée, certes pas à l'école primaire mais au collège et croyez-moi, des Ryan, des Michel, des Dimitri, des Myriam, mes collègues et moi les avons devant nous chaque année, comme vous les décrivez et nous les accueillons comme ils sont, nous donnant corps et âme pour qu'ils aient le plaisir d'être en classe, pour qu'ils viennent à l'école avec le sourire, qu'ils en repartent avec une autre façon de voir le monde et nous l'espérons, le coeur plein de confiance en l'avenir.

C'est pourquoi, Madame Corenblit, j'ai trouvé votre livre magnifique, très juste et nécessaire. Je ne vous cache pas qu'il m'a beaucoup touchée. Parfois j'ai dû m'arrêter dans ma lecture tellement je sentais l'émotion me gagner.

Merci de rappeler à ceux qui ne travaillent pas dans l'Éducation Nationale ce qu'est l'école aujourd'hui, les difficultés que l'on rencontre en tant qu'enseignant et notamment jeune enseignant, trimbalé à droite à gauche, sur plusieurs écoles à la fois, à des kilomètres de distance, placé sans aucune expérience devant des enfants cabossés par la vie et usés par les écrans, mal formé, mal considéré, très peu reconnu ou respecté, démuni face à un sentiment d'absurdité et de perte du bon sens, dans l'obligation d'appliquer des réformes ou des méthodes d'apprentissage dont l'efficacité reste à prouver, soumis à une terminologie ridicule et absconse ou à des sigles indéchiffrables, accablé par l'accumulation de tableaux ou paperasses inutiles à remplir - comme si c'était ça l'essentiel du métier -, luttant contre des rythmes scolaires insensés, pleurant après des horaires « peaux de chagrin » (quatre heures, ma bonne dame, quatre pauvres petites heures par semaine en troisième pour enseigner le français, à savoir, la compréhension de texte, la grammaire, l'expression écrite et orale, l'orthographe, la conjugaison, le vocabulaire et si possible un peu de lecture de l'image ou de l'analyse filmique si on a le temps…) et malgré tout, se battant coûte que coûte, montant des projets en veux-tu en voilà, retravaillant les cours parce que Dimitri n'a rien compris ou que Myriam n'a visiblement pas été intéressée, rencontrant des parents fatigués, dépassés parce que les modes de vie ont en quelques années beaucoup changé et qu'ils n'y comprennent plus rien, et nous, à dire vrai, pas beaucoup plus et pourtant, on est là, on ne lâche pas, on réexplique que les écrans doivent être éteints le soir, les portables posés dans l'entrée, on rappelle qu'une demi-heure de lecture avant de se coucher, c'est pas mal, que travailler dans le silence, c'est mieux, que dormir au moins huit heures par nuit permet de ne pas s'effondrer sur sa table le lendemain en classe...

Pour toutes ces raisons, Madame Corenblit, j'ai beaucoup aimé votre livre, votre personnage, Emma, professeur des écoles, qui s'accroche, qui en veut, qui résiste et essaie de comprendre. Une Emma « Antigone », entière, intransigeante, refusant les misérables compromis, prête à rentrer dans le lard de ceux qui disent que ça ira, que c'est pas terrible mais bon, on fera avec…

J'ai aussi trouvé très juste le personnage du directeur, monsieur Aucalme, qui fait ce qu'il peut, le pauvre homme, et qui visiblement, à la fin, n'en peut plus. Je l'ai aimé parce qu'il est très humain, il ne veut pas faire de vagues (d'ailleurs Emma le traite de « lâche »), il essaie d'arranger les choses mais il s'use et la scène finale de son départ à la retraite, toute en retenue, est magnifique .

Non, la réalité n'est pas simple, oui, il faut se battre, pour eux, j'allais dire malgré eux, parce que plus tard, ils seront les premiers à courir vers nous, comme vous le dites si bien dans le livre, en nous appelant par notre nom, redevenant soudain l'enfant ou l'adolescent qu'ils étaient, nous avouant, un peu essoufflés, les joues rosées, un vaste sourire aux lèvres, à quel point l'exposé sur tel bouquin, le poème qu'ils avaient écrit puis lu devant la classe ou le rôle qu'ils tenaient dans telle pièce de théâtre, ils ne l'ont jamais oublié - et ça, c'est du vécu et rien que pour ça, ça vaut le coup !

Merci Madame Corenblit d'avoir mis toutes ces choses, les belles et les moins belles, dans ce magnifique livre plein de désespoir, de joie, de violence, de poésie, d'humour et de rire.

A coup sûr, je penserai à vous lundi lorsque je me retrouverai devant mes futurs « attachiants », heu, pardon, attachants !


Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Ceux qui n'aiment pas lire

Samuel n'aime pas lire. Enfin si, mais des BD, et ça, pour ses parents, c'est pas de la lecture.

Ce qui l'agace, Samuel, c'est que sa mère l'oblige à aller tous les mercredis à la bibliothèque, et qu'elle se plaint partout de l'aversion de son fils pour les livres, sollicitant des idées auprès des enseignants pour le « guérir ».



Bref, Samuel a la pression, et il en a ras le bol. Alors il crée « le Club de ceux qui n'aiment pas lire », de ceux que les livres effraient, ennuient, de ceux qui en lisent seulement par devoir jusqu'à l'indigestion, de ceux qui trouvent que les livres puent, de ceux dont les parents attendent des lectures plus 'intelligentes'...

Pourquoi pas ? Sauf que ces lascars imaginent non seulement de pourrir la vie de leurs parents avec moult sabotages domestiques, mais aussi de s'en prendre aux bouquins, de les détruire. Double bof.



Je n'attendais pas forcément un happy end à cette histoire, une solution miracle pour faire aimer la lecture aux plus réfractaires (quoique : quid de la lecture des premiers chapitres à voix haute, pour donner envie ?), ou que les parents lâchent du lest sur les préférences littéraires de leurs petits, mais la tournure prise par le récit avec cette rébellion m'a vraiment déplu.



J'ai trouvé intéressante la question dans les dernières pages « Eduquer, c'est punir ? », mais hélas, il n'y a rien derrière...

A qui se destine cet ouvrage ? A ceux qui n'aiment pas lire ? Pour leur donner des idées de vengeance ? A ceux qui lisent déjà ? Pour les conforter dans l'idée qu'ils sont "du bon côté" ?



Les dessins illustrent astucieusement le texte, mais j'ai trouvé le trait moche et flippant.



- De cette auteur, j'ai beaucoup aimé 'Le métier de Papa'.
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Dans l'histoire « l'amour vache », la narratrice compare la seconde femme de son père à :

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