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Critiques de Ray Nayler (21)
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Protectorats

Émouvant, interrogeant, distrayant, un bon moment.



14 nouvelles dont plusieurs se déroulant dans un même univers uchronique ou dystopique, sans pour autant constituer un fix up, passent en revue différents sujets d’actualité comme l’intelligence artificielle, la parentalité, le dérèglement climatique, la différence, le devoir de mémoire, entre autres.



Je ne suis habituellement pas fan des recueils de nouvelles, je redoute souvent le manque de cohérence entre elles, et quand une histoire me plaît, j’enrage trop souvent sur sa brièveté. Cet assemblage (œuvre française me souffle-t-on sans équivalent anglo saxon) n’échappe pas totalement aux deux défauts sus-cités. Pour autant j’ai réellement apprécié ma lecture et seules trois nouvelles m’ont laissé indifférent.



Une SF assez « littéraire », résolument adulte, plutôt loin de la hard sf ou du space opera auxquels je suis plus habitué mais qui m’a séduit, par son écriture fine et toujours agréable.

Comme l’indique mon titre, la palette des sensations éprouvées à la lecture de cet ouvrage a suffi à mon bonheur de lecteur, même si à une exception notable près, l’humour brille par son absence.



Plutôt que détailler le background et/ou le sujet de chacun des 14 récits, je pense qu’il est préférable de voir l’ensemble comme un tout (malgré la disparité de certaines nouvelles), une œuvre de SF pour découvrir l’auteur et son écriture, passer un bon moment, se laisser porter et scientifiquement parlant : « traiter les données. C’est sans doute le mieux que nous puissions faire. La certitude, c’est ce que les charlatans proposent aux imbéciles ».
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Protectorats

Ray Nayler, auteur canadien anglophone que je découvre avec ce recueil de nouvelles, possède un ton bien à lui. Après avoir été découvert grâce à ses nouvelles depuis la fin des années 1990 il a publié récemment son premier roman, qui sera également traduit et publié par les éditions le Bélial.



Ici c'est d'une vaste randonnée dans ses nouvelles qu'il s'agit. La tonalité générale, à l'image de notre monde, n'est pas toujours très réjouissante. Les catastrophes, climatiques ou autres, sont très présentes. Les problématiques de l'intelligence artificielle, de la robotique et de la science en général sont au premier plan.



Ray Nayler parvient souvent à nous émouvoir et à nous laisser à penser à travers des personnages assemblés de bric et de broc. Mention spéciale à la nouvelle "Père" tout à fait digne d'un Ray Bradbury ou d'un Stephen King.



Les points communs entre ce choix de nouvelles, présentées non chronologiquement, sont assez nombreux pour qu'on puisse parler d'un auteur qui a un univers bien à lui. Qui sait être de son temps sans pour autant céder à des complications formelles destinées à en mettre plein la vue.



Une découverte qui ne restera pas sans suite en ce qui me concerne.
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Protectorats

La science-fiction est un genre bouillonnant, vivier infini d'imaginaires plus ou moins fous. Des imaginaires forgés bien souvent sur un monde pourtant bien réel. Ray Nayler en est l'exemple parfait.

Publié pour la première fois en France par la revue Bifrost et aujourd'hui traduit par Henry-Luc Planchat pour un sommaire conséquent composé par Ellen Herzfeld et Dominique Martel au sein de la Collection Quarante-Deux du Bélial', cet américain né au Québec a traversé le monde deux décennies durant. 

Russie, Kazakhstan, Afghanistan, Vietnam, Kosovo ou encore Tadjikistan, ce polyglotte bardé de diplômes a aussi bien servi au consulat américain d'Ho Chi Minh ville qu'au sein du Corps de la Paix au Turkmenistan. 

Une expérience pour le moins impressionnante qui semble lui avoir fourni un matériel fictionnel à la hauteur de son imagination. 

Au cours de quatorze nouvelles réunies dans ce Protectorats, Ray Nayler vous offre ce que la science-fiction moderne a de meilleur.

Rien que ça.



Le souvenir qui s'efface

Comme le dise si bien Ellen Herzfeld et Dominique Martel dans leur préface, Protectorats pourrait presque être qualifié de roman tant la cohérence thématique des idées de Ray Nayler et la vastitude de son univers partagé donne une impression d'unicité à l'ensemble.

Voilà qui devrait rassurer ceux qui ont d'ordinaire du mal à lire les recueils de nouvelles en se plaignant des trop grandes ruptures de ton qui existent entre les textes. Les autres, eux, goûteront d'autant plus le soin apporté à l'agencement méticuleux des nouvelles au menu. 

C'est avec « Mélopée pour Hazan » que s'ouvre Protectorats, un texte qui va jeter les bases de l'univers imaginé par l'américain dans lequel la technologie vient bouleverser le rapport de l'homme à l'Histoire. 

Ici, c'est une scientifique que l'on qualifiera de « gentiment excentrique » qui devient le centre de l'attention de notre narrateur passif, Baris. 

Nayler imagine qu'un nouveau procédé permet de balancer l'esprit d'une personne dans le passé pour être témoin des évènements de l'Histoire. 

Une chose interdite pour les risques que cela entraîne… et pas seulement d'un point de vue éthique. Grâce au « linceul », Hazan visite certains des évènements historiques les plus sanglants de la Seconde Guerre Mondiale, enchâssée dans la pierre ou le pavé, devenant la témoin privilégiée de l'horreur et de la souffrance. Car Hazan a une obsession : revoir la Seconde Guerre Mondiale du point de vue de ceux qui sont tombés et qui n'ont donc jamais pu raconter leur version de l'Histoire. Les morts peuvent enfin avoir leur vérité. Tout comme Baris sera témoin de l'autodestruction d'Hazan, piégée dans cette spirale infernale autour de l'homme et de sa cruauté. 

Le texte met d'emblée en place ce qui intéresse le plus Nayler dans son œuvre : la mémoire. Et plus précisément, notre capacité à user du souvenir et en quoi l'altération de celui-ci avec le temps va changer notre perception du présent et du futur. Pour cela, Nayler va investir un genre en parfaite adéquation avec ce pas de côté : l'uchronie. 



Repenser l'Histoire

En effet, la quasi-totalité des nouvelles de Protectorats se déroule dans un futur plus ou moins lointain où l'uchronie débute en 1938 quand les États-Unis découvrent une soucoupe volante. Dis ainsi, on pourrait penser que le procédé a de quoi saper le sérieux de l'entreprise. Mais il n'en est rien car la question n'est pas celle des Petits Gris mais de la technologie qu'ils ont laissé au passage, comme les visiteurs maladroits de Stalker. 

Grâce à ce pique-nique au bord du chemin, les autorités américaines profite d'une occasion en or pour effectuer un bon technologique impressionnant avec des armes à rayons, des terraplanes et autres dispositifs de mappage neuronal. 

Le résultat ? Une histoire complètement altérée que l'on découvre plus en profondeur dès la troisième nouvelle, « Père », que les lecteurs du Bifrost avaient déjà pu lire il y a quelques mois de cela. 

Dans ce superbe texte entre Ken Liu et Ray Bradbury, un gosse nous raconte comment un robot a pris la place de son père dans des États-Unis d'après-guerre où l'intolérance et la méfiance règnent à l'encontre de ces boîtes de métal, même quand elles viennent égayer la vie d'une famille d'ancien combattant. C'est la finesse du lien qui se tisse entre l'enfant et le robot, la beauté de cette relation qui consume le récit et la rage qui envahit le lecteur face à la cruauté du destin qui va venir couronner ce texte comme le premier joyau de Protectorats. 

Et des joyaux…il va y en avoir un tas !

Dans « Les Boucles de désintégration » et « Une fusée pour Dimitrios », on découvre plus avant l'uchronie de Ray Nayler et ses conséquences, de la poursuite de la Seconde Guerre mondiale entre les Alliés et la Russie en passant la l'hégémonie des États-Unis sur le monde. Tout a changé.

Ces deux nouvelles suivent les mésaventures de Sylvia Aldstatt, seule survivante des essais menés sur le dispositif extraterrestre appelé « Boucles » et qui permet de revivre certains instants d'un mort. 

Autant dire que l'OSS a de quoi vouloir garder jalousement cette technologie. Dans une ambiance rétro-futuriste mêlant espionnage, polar et science-fiction, Ray Nayler fait ce qu'il sait faire de mieux : triturer la mémoires et les souvenirs de ses personnages. Revisitant les charniers et les batailles, remettant en cause le bien et le mal, l'américain imagine une paix nouvelle en s'interrogeant sans tabou sur les guerres menées par le passé, envoyant des vrilles glacées dans l'esprit du lecteur. C'est fort, d'une maîtrise impressionnante et, surtout, cela convoque une poésie tout à fait inattendue, notamment avec le personnage de Dimitrios, ce criminel-victime qui rêvait d'Espace. 

Et ça tombe bien, puisque l'Espace sera la prochaine étape du voyage. 



Que les morts restent morts

Grâce au connectome et à tous les projets fulgurants autour du cortex humain et du transfert de conscience déjà entrevus dans la première nouvelles, les hommes ont ouverts les portes de l'espace lointain. 

Logique donc que Ray Nayler explore d'autres planètes hostiles et inquiétantes dans « Les Yeux de la Forêt » et « Sarcophage », enchaînant la moiteur de la jungle et le froid de la glace. Deux explorateurs, deux survivants, deux façons de concevoir le monde. Rien n'est vraiment ce qu'il paraît au premier abord chez Ray Nayler. Un prédateur peut n'être en réalité qu'un charognard, une bête dans le lointain un allié précieux pour la survie. Si le souvenir n'est pas fiable, la perception ne l'est pas non plus, toute liée qu'elle est aux standards humains et, surtout, Terriens. 

On retrouvera d'ailleurs ce thème central dans un des plus grand textes du recueil, « La Mort de la caserne de pompiers n°10 ». 

Mais n'allons pas trop vite en besogne car aux récits de survie en milieu hostile et de compréhension de l'autre succède un autre versant de l'univers imaginé par Ray Nayler : le transfert de conscience et les androïdes (que l'on avait déjà approché de loin avec « Père »). 

Dans « L'Hiver en Partage », deux agents s'aiment au sein du Protectorat d'Istanbul, l'un des terrain de jeu favori de l'auteur. Regina et Ilkay occupent tous deux des « vacants », des corps humains habités par d'autres esprits, comme un autre type de vaisseau qui n'a rien de spatial (ou presque). Encore une fois, l'histoire croise l'intolérance qui grossit comme une tumeur dans l'ombre de la rancœur et de l'ignorance, la beauté d'un amour qui se fout des apparences, et puis l'Histoire avec un grand H sur les rives du Bosphore. 

La mémoire continuera à jouer des tours pourtant, dans « Retour au Château Rouge »pour un voyageur de l'espace de retour sur une Terre où il semble ne plus connaître personne… sauf ce vieil androïde à la mémoire défaillante.

Mais parfois, l'oubli a du bon. Surtout devant l'horreur.

Reste alors à savoir si des actes indicibles doivent prendre le pas sur les belles choses, comme ces instants fugaces d'humanité partagés entre une petite fille et son tuteur. 

C'est l'heure des androïdes et de ce qui est humain et de ce qui ne l'est pas.



Es-tu humain ?

Le reste des nouvelles, du « Réparateur de moineaux » aux « Enfants d'Evrim » en passant par « La Pluie des jours », font intervenir des androïdes dans les rôles principaux. Des androïdes qui se demandent parfois s'ils rêvent de moutons électriques et s'ils sont uniques ou pas. 

Une copie est-elle une conscience à part entière ? 

Celui qui souffre mille douleurs pour maintenir la vie envers et contre tout est-il vraiment humain ? 

Ces robots qui sauvent des vies et mêmes les plus basiques parmi les leurs sont-ils doués d'humour et d'empathie ? 

Ray Nayler offre certaines des figures artificiels les plus émouvantes depuis longtemps.

« La Mort de la caserne de pompiers n° 10 » en sera l'apothéose. 

Un récit sans prétention à première vue qui imagine que dans ce monde où les intelligences artificielles sont partout, les bâtiments eux-mêmes ont des personnalités pour prendre soin des humains et du monde qui les entoure. 

Mais comment définit-on quelque chose qui est humain et quelque chose qu'il ne l'est pas ? Ou plutôt, comment définir ce qui a le droit de vivre et d'être considéré comme conscient ? Un être humain peut-il vraiment percevoir toutes les finesses des autres espèces ? 

Des corneilles sur les branches d'un arbre en passant par une IA de caserne amatrice de blagues un peu lourdes ? 

Le texte est un chef d'œuvre, à la fois sur la réflexion qu'il mène et sa façon de présenter les choses, une leçon véritable d'écriture et d'humanité. condensé en une seule nouvelle. 

« Les Hirondelles de Papier » referme finalement ce recueil en dehors de cet univers partagé avec les conclusions d'une enquête à propos de mystérieux morts à travers le globe, animaux ou humains. En miroir de la première nouvelle, Nino et Harlan regardent une autre folie de l'humanité, qui n'est ni la guerre ni le passé mais l'aveuglement face à la destruction de la planète, retrouvant la fibre écologique qui tient tant à cœur à Nayler dans le réel. 

Ainsi, les forêts brûlent.

Que restera-t-il du souvenir de notre vieille Terre ? 

Que garderont en mémoire ceux qui nous regardent nous consumer ? 

C'est peut-être notre plus grand mensonge commun : de croire que l'Histoire regarde ailleurs pendant que notre maison brûle. 



Protectorats marque la naissance d'un auteur de science-fiction incontournable. Ray Nayler sonde notre mémoire et nos souvenirs, opère au cœur de ce qui nous semble humain et de ce qui l'est sans que nous le sachions, voyage vers l'espace et l'ailleurs pour jouer avec nos perceptions limitées. C'est grand, redoutablement intelligent et simplement indispensable.
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Protectorats

Protectorats débute par une uchronie classique, la fin de la seconde guerre mondiale n'est pas celle qui a eu lieu, puis nous transporte dans le temps et l'espace grâce à des avancées scientifiques permises par un accident extraterrestre. Entre la Californie et Istanbul, ces nouvelles de Ray Nayler évoluent dans des décors en Technicolor, avec des scénarios en dentelles et des personnages qu'on aimerait suivre plus longuement, je pense notamment à Irem et ses différentes incarnations, quelques uns sont célèbres, Eleonore et Theodore Roosevelt ou Hedy Lamarr élevée ici (enfin ?) au grade de Général. On y croise aussi des  cerveaux humains, des morts, des corps androïdes, des moineaux, des corneilles, etc.

Des thèmes sont habilement abordés, l'intelligence artificielle, le transhumanisme.

Ce qui surprend c'est l'étonnante cohérence de l'ensemble alors que ce recueil n'a pas été pensé comme tel, toutes les nouvelles ont d'abord été publiées et éparpillées dans des revues aux USA avant d'être rassembler pour cette publication par l'auteur et son éditeur. Ce qui amène quelques répétitions parfois pour resituer les personnages mais c'est bien le seul défaut du livre. Des nouvelles résonnent sur d'autres, se répondent et apportent une épaisseur supplémentaire au recueil, en accentuant l'idée que Protectorats n'est pas un recueil de quatorze nouvelles aux liens éloquents ou ténus, mais plutôt la compilation de fragments d'une même histoire, comme un roman dans lequel on aurait coupé à blanc.

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Protectorats

Un recueil de nouvelles cohérent mais aux textes de qualité inégale.



Je ne partage pas complètement l'enthousiasme de beaucoup sur les nouvelles de Ray Nayler. Il se dégage de l'ensemble, c'est vrai, une atmosphère crépusculaire qui n'est pas déplaisante, et les différents protagonistes sont toujours très soignés. Les critiques ont d'ailleurs beaucoup insisté sur le fait que les nouvelles sont très centrées sur les personnages, mais compte-tenu du thème récurrent de la nature de la conscience au travers de sa représentation numérique, le connectome, il pouvait difficilement en être autrement il me semble.



Concernant mes réserves, simplement, l'art de la nouvelle est celui de l'ellipse, et à trop vouloir être elliptique, on perd parfois le lecteur en route, ou on le frustre juste assez pour que s'installe une petite gêne, toute petite, mais souvent là. Rien de rédhibitoire, et surtout rien qui ne doive nous empêcher de plonger dans ce livre qui contient quelques belles réussites. Une des plus marquantes est Père, qui m'a plaisamment rappelé la science-fiction de papa, j'imagine vraiment ce robot comme le classique modèle de fer-blanc à la voix un rien métallique... D'autres textes plutôt réussis sont les deux nouvelles consacrées aux boucles, Les boucles de désintégration et Une fusée pour Dimitrios (bien que la chute de cette dernière soit assez faible), et je citerai également Les yeux de la forêt, Les enfants d'Evrim et Les hirondelles des tempêtes, trois textes très différents les uns des autres, mais tous attachants et fort bien menés.



Ray Nayler est un auteur jeune, assez prolifique et à suivre, que ne peuvent certainement ignorer les amateurs. On saluera également l'initiative éditoriale : ce recueil est inédit en langue anglaise et a été composé grâce aux efforts enthousiastes de Feydrautha, prosélyte infatigable de Ray Nayler, et au professionalisme du traducteur et des directeurs de la collection Quarante-Deux. Merci à eux !

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Protectorats

La collection "Quarante-deux du Bélial' c'est un peu la Pléiade des nouvelles de science-fiction. Après Rich Larson il y a trois ans, c'est au tour de Ray Nayler de rejoindre le catalogue, lui aussi après des passages par le laboratoire Bifrost.



Je ne partais pas avec une confiance absolue, parce qu'en vrai je me moque pas mal des statuts. L'illustration de couverture de Manchu est sympa mais le design global fait un peu vieillot (j'ai quand même bien apprécié le logo du Bélial' partiellement masqué par des arbres au premier plan).

En quatrième, il est précisé que "Ray Nayler a vécu et travaillé à l’étranger pendant deux décennies – en Russie, au Turkménistan, au Tadjikistan, au Kazakhstan, au Kirghizistan, en Afghanistan, en Azerbaïdjan, au Viêt Nam et au Kosovo, autant de pays dont il maîtrise la langue." La formule finale sur "la" langue fait un peu tiquer (et quand on compare avec sa bio officielle, c'est partiellement inexact), et surtout je me dis que ça sent l'humanitaire à la sauce US, option #softpower, aka le Peace Corps [spoiler alert : oui, c'est bien en partie ça].

Enfin [mode confession ON], je lis assez peu les nouvelles dans Bifrost (problème pour moi de mise en page - j'ai un livre écrit par des potes dont je suis certain de la qualité du contenu que je n'ai toujours pas lu depuis plus de dix ans à cause de ça...). "Père" avait gagné le "prix des lecteurs de Bifrost" mais ça ne m'avait pas particulièrement poussé à la lire. Je lis principalement celles des gens que je croise, ai croisé ou vais croiser ! [mode confession OFF]



Protectorats, donc.

Un recueil de quatorze nouvelles, onze inédites et trois déjà publiées en Bifrosty. Elles se situent grosso modo à deux larges époques différentes : un XXe siècle uchronique et un futur estimé à plusieurs siècles. Mais toutes dans le même univers, formant un fix-up - sûrement mon format préféré.

Comme le suggère la couverture, une bonne partie des histoires tournent autour d'Istanbul, côté "uchronie" comme côté "SF" (tel que thématiquement découpé dans la préface). Parfois l'action se passe sur une lointaine planète, parfois aux USA (comme dans "Père").



La marche du monde a été bouleversé par le crash en 1938 d'une soucoupe volante dont l'extraction et l'étude de la technologie ont permis, d'abord de changer le cours de la Seconde Guerre Mondiale, puis un développement technologique exponentiel.

On croise des androïdes diversement malmenés selon les époques - métaphore classique mais toujours efficace.

Le transhumanisme se traduit par le transfert par laser de personnalités à travers l'univers à des fins de recherche de nouveaux mondes habitables. Elles atterrissent dans des enveloppes humanoïdes appelées "vacants". En théorie, tout du moins.

Le concept de "nécroterrorisme" est assez génial. Je ne sais pas si l'idée avait déjà été traitée, mais pour moi ce fût une découverte, et des plus plaisantes !



Les nouvelles uchroniques ont ma préférence. L'arc sur les "boucles" est formidable et "Père" est effectivement une superbe nouvelle.

L'expérience et les études dans le champ diplomatique de l'auteur se ressentent dans sa peinture uchronique du XXe siècle. C'est très savoureux et finement mené.

Celles qui se passent sur d'autres planètes remportent moins mon adhésion, mais en même temps quand je relis le sommaire et vois leurs titres, je me dis "c'était bien cool quand même".



Un recueil de grande qualité, riche en thématiques, accessible, maniant tendanciellement plus la géopolitique que la hard-SF.

Un auteur qui méritait de voir son travail ainsi compilé dans ce solide volume, aussi cohérent que polymorphe.



PS : j'aimerais bien entendre les Quarante-Deux sur les choix d'agencements des nouvelles, si l'occasion d'un live du Bélial' se présentait ! Sur ce recueil, comme d'une manière générale d'ailleurs.
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Protectorats

Ray Nayler est l'auteur d'une cinquantaine de nouvelles et d'un roman The Mountain in the Sea (qui paraitra au Bélial en début d'année prochaine). A l'instar de Rich Larson, il incarne le renouveau de la Science-Fiction outre atlantique. Depuis quelques années l'Epaule d'Orion fait la promotion de l'auteur en le mettant à l'honneur sur son blog, ce qui n'a pas échappé aux équipes du Bélial et en particulier à Ellen Herzfeld et Dominique Martel qui dirigent la collection Quarante-Deux. Les deux anthologistes ont ainsi regroupé quatorze titres au sein d'un recueil intitulé Protectorats qui n'a pas d'équivalent dans le monde anglosaxon. Trois des textes ont été initialement publiés dans la revue Bifrost, les autres étant complétement inédits mais l'ensemble fait partie d'un même univers les Protectorats d'Istanbul.



Un petit mot sur ces Protectorats d'Istanbul, univers uchronique dont le point de rupture arrive en 1938 quand une soucoupe volante s'écrase sur le sol américain. Ces derniers récupèrent des technologies extraterrestres et les utilisent sans toutes les comprendre parfaitement. Toujours est-il que cela change la face du monde, la seconde guerre mondiale se déroule différemment et les conséquences amènent un futur divergent. Les Etats-Unis sont toujours les maitres du monde, l'Europe leur vassal, la Chine débarrassé du communisme, la Russie reléguée au second rôle et la Turquie a un statut à part, celui d'un Protectorat qui s'étend sur une grande partie de l'Eurasie : voilà pour la géopolitique. Au niveau technologique, de nombreuses avancées font leur apparition tels des voitures volantes et des rayons de la mort (ce qui donne un petit côté Pulp) ainsi qu'un développement de pointe dans de nombreux domaines scientifiques, en particulier au niveau médical avec par exemple l'apparition d'artefacts permettant de s'immiscer dans le cerveau, la mémoire et les souvenirs. Bienvenue au connectome, vacant, boucles de désintégrations et autres technologies plus ou moins intrusives, plus ou moins dangereuses.



Je ne vais pas vous faire le catalogue des nouvelles, ce qui ici n'a pas vraiment d'intérêt contrairement à certains autres recueil. En effet, ici, toutes les histoires sont de qualité, chacun aura bien sûr ses préférences mais il y a une constance dans les textes, une régularité qui à l'instar de Ken Liu ou de Robert Charles Wilson met l'humanité en lumière. L'individu est la pierre angulaire de chaque texte, il est impossible de ne pas s'identifier et de ne pas ressentir les turpitudes de cet univers et d'en éprouver les émotions. Mais c'est aussi des textes très poussés sur la conscience, la connaissance, la mémoire et les souvenirs, il y a donc un peu de Greg Egan dans ce texte mais en moins abscons, plus compréhensible.



Prise individuellement les nouvelles sont très plaisantes mais parfois il manque un petit quelque chose pour bien appréhender l'univers (c'est peut-être le ressenti que vous avez eu en lisant Sarcophages ou L'hiver en partage dans Bifrost), et c'est là que l'on peut saluer le travail des anthologistes qui ont créé ce recueil à la fois unique et très pertinent. En effet chacune des nouvelles choisies éclaire les autres, permettant ainsi d'appréhender la globalité de l'imaginaire de Ray Nayler. Cette cohésion est le petit plus qui fait de Protectorats l'un des meilleurs recueils de la collection.


Lien : https://les-lectures-du-maki..
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Protectorats

Voici un recueil qui a bien failli ne pas être chroniqué sur le site. En effet, à quelques exceptions près comme je l’explique ici, je ne parle pas des livres qui ne me plaisent pas. Et Protectorats de Ray Nayler a le désavantage de commencer par une nouvelle Mélopée pour Hazan que j’ai trouvé détestable. Non pas que l’idée de science-fiction qui la sous-tend ne soit pas intéressante, bien au contraire ! Mais parce que la protagoniste, la fameuse Hazan est une tête à claques égocentrique et que le narrateur n’est qu’une carpette sans amour-propre au contraire. Et comme le précise les « Quarante-deux » dans leur introduction, ces nouvelles sont agencées de façon à pouvoir se lire comme un roman… Heureusement pour moi – et pour Ray Nayler – ces personnages exécrables ne reviennent plus directement. Et les 13 autres nouvelles de ce livre sont autrement plus intéressantes. Elles appartiennent toutes à une même uchronie où en 1938 une véritable soucoupe volante s’est écrasée dans le désert aux États-Unis, surement près de la zone 51. Alors que la Seconde Guerre fait rage en Europe, le pays s’empresse de l’exploiter techniquement, ce qui change le cours de la guerre, et les rapports entre les différents blocs (Staline meurt bien plus tôt et le bloc de l’Est est nettement moins puissant). De cette soucoupe naissent différentes technologiques : mappage de l’esprit humain via le connectome, apparition d’androïdes et d’immeubles intelligents, transferts d’esprits, voitures volantes, exploration spatiale (pas forcément réussite), etc. Et chaque nouvelle va explorer une partie de ces nouveautés en s’éloignant dans le temps et l’espace : Père, Les Boucles de désintégrations et Une fusée pour Dimitrios s’intéressent ainsi à l’immédiate après-guerre et au retour des vétérans, qu’ils soient dans leur corps d’origine ou non. Ils sont un petit côté rétrofuturisme et nostalgique plaisant. D’autres comme Les Yeux de la forêt, Sarcophage ou Les Enfants d’Evrim s’attaquent à l’exploration spatiale et ses aléas. D’autres comme Le Réparateur de moineaux, L’Hiver en partage ou Retour à Château Rouge s’interrogent sur ce qu’est être humain et être conscient dans un monde où la mort n’est plus tout à fait définitive et où cet état des choses entraîne de nouvelles inégalités et frictions. Attention, ce sont des nouvelles plutôt douce-amères, même si chacune a son propre ton distinct.

Même s’il s’essaie à une très grande variété de styles et de sujets avec des idées de hard SF particulièrement intéressante, notamment les débouchés du connectome mis au point dans la toute première nouvelle, Ray Nayler excelle surtout dans la restitution d’une atmosphère et de sentiments. Il place le plus souvent ses histoires dans le Protectorat d’Istanbul et la ville devient un personnage à part entière au même plan que les humains, les vacants et les androïdes qui la peuplent. Son passé et son futur se mêlent dans une atmosphère nostalgique. Et l’écriture de ce Ray en rappelle un autre bien plus ancien, un certain Ray Bradbury, à la fois dans ses Chroniques martiennes que dans son Homme illustré. Au final, ce Protectorats est une belle occasion de découvrir un nouvel auteur. En attendant son futur roman à paraître chez le même éditeur ?


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Protectorats

Après avoir eu les honneurs du Bifrost pour 3 nouvelles, Ray Naler se voit publier dans la collection Quarante-Deux des éditions Le Bélial avec le recueil de nouvelles Protectorats. Ce recueil existe uniquement en France et n’a pas d’équivalent dans le monde anglo-saxon, où les nouvelles de l’auteur ont été publiées dans des revues ou des mensuels. Les anthologistes ont choisi l’agencement des 14 textes formant ce livre de manière à faire ressortir la cohérence de leur univers commun. Les textes sont liés entre eux, certains plus que d’autres, et se déroulent dans un univers uchronique. Protectorats est ainsi un fix-up de 14 nouvelles auxquelles s’ajoute une introduction par Ellen Herzfeld et Dominique Martel, et une bibliographie signée Alain Sprauel.



Quelques mots sur l’univers développé par l’auteur avant de parler des textes. Le monde a été bouleversé à jamais par le crash en 1938 d’une soucoupe volante. L’étude de la technologie présente sur cette soucoupe a changé le cours de la Seconde Guerre Mondiale, qui a duré plus longtemps, et a continué avec un front russe. Les développements technologiques et scientifiques ont été fortement impactés par ces découvertes. Des androïdes ont été créés, des sauvegardes de personnalité humaine permettent le transfert dans des enveloppes humanoïdes appelées « vacants », elles peuvent même se faire vers d’autres planètes. Ray Naler développe tout ceci à travers ses nouvelles se déroulant à plusieurs époques, proches ou très éloignées de la découverte du vaisseau extraterrestre. Dans cet univers, il existe des protectorats et beaucoup d’histoires se déroulent dans celui d’Istanbul. D’autres auront pour cadre une lointaine planète, et parfois les USA.



Ray Naler a construit un univers solide et cohérent, en détaillant les répercussions premières de la découverte de la soucoupe. Il a développé de nombreux concepts technologiques sans mettre de côté ses personnages et les thématiques. Chaque nouvelle prise seule est un plaisir de lecture, et s’intègre parfaitement avec les autres, emmenant une pierre à l’édifice de l’univers. Protectorats est ainsi un recueil parfaitement bien construit, écrit, où chaque nouvelle a son rythme propre, son ambiance particulière, ses thèmes développés. C’est incontestablement une grande réussite.



Les textes:



Mélopée pour Hazan: le texte se déroule dans le Protectorat d’Istambul, et suit le récit du professeur Baris Burakgazi. Celui-ci était un proche du professeur Hazan avec qui il travailla de nombreuses années au sein d’un institut de recherche. Ils vont travailler sur le connectome, un tissu artificiel où l’on peut momentanément charger la conscience d’un individu. La nouvelle parle de l’exploration du passé par la technologie, de la science et ses possibles dangers. Hazan est un personnage plutôt détestable, mais le narrateur permet de prendre du recul.



Mutabilité: dans un futur lointain, un homme se rend tous les jours dans un café où il va rencontrer une femme. Celle-ci lui fait part d’un fait étrange, elle a une photo d’eux deux mais à une époque passée. Le texte est bien écrit et on se laisse porter par l’histoire.



Père: sans doute la plus belle nouvelle du recueil. Elle a été publiée dans le bifrost n°105 et a obtenu à juste titre le prix des lecteurs Bifrost 2022 catégorie nouvelle étrangère. Aux États-Unis, dans le milieu des années 50, le Bureau des Vétérans organise une loterie pour les enfants dont le père a été tué lors de l’une des guerres. Les gagnants recevront un robot abritant l’esprit de leur défunt père. Le texte raconte l’histoire d’un petit garçon de 7 ans qui va ainsi partager 6 mois de sa vie avec ce robot si particulier. Le récit est très émouvant, on s’attache à ce petit garçon et au robot. Il y est fait mention de la découverte de la soucoupe en 1938 et de la guerre contre les russes qui a eu lieu après 1945.



Les Boucles de désintégration: dans les années 50, Sylvia Aldstatt fait partie des vétérans de la guerre. Elle a la particularité d’être la seule personne capable d’utiliser une technologie révolutionnaire utilisée par les services de l’OSS, les boucles. Cette technologie (conséquence de la soucoupe) permet d’interroger les derniers souvenirs des victimes de crime lorsqu’elles sont mortes. Cependant, les souvenirs peuvent être amenés à changer et sont de moins en moins fiables et importants au fil du temps. L’interrogatoire d’une victime va entrainer Sylvia dans une affaire d’espionnage international. La dimension enquête et espionnage est vraiment plaisante à découvrir, tout en étant mêlée à une technologie à la fois fascinante et dangereuse.



Une fusée pour Dimitrios : ce texte fait suite au précédent, mais peut-être lu indépendamment. On retrouve les deux mêmes personnages principaux en 1958 quelques mois après l’histoire précédente. Sylvia Aldstatt et Alvin, son supérieur à l’OSS, sont envoyés sur les rives du Bosphore dans le Protectorat d’Istanbul pour enquêter sur le fait qu’un autre vaisseau spatial serait tombé sur Terre en même temps que le premier. Le cadavre de Dimitrios Makropoulos, un criminel grec a été retrouvé. Ce dernier voulait vendre l’emplacement du second OVNI, information d’une importance capitale qui pourrait remettre en cause l’ordre du monde et la puissance américaine. Ray Naler continue de développer son univers en mettant au premier plan des personnages féminins dont il change le rôle historiques comme Hedy Lamarr et Eleanor Roosevelt. C’est à nouveau brillamment écrit avec une dimension espionnage fort bien amenée. Un des meilleurs textes du livre.



Les Yeux de la forêt : cette fois direction l’espace et une colonie humaine sur une planète lointaine couverte d’une immense forêt. Les descriptions de la nature sont particulièrement saisissantes. Les humains ont été forcés de vivre enterrés dans des grottes aménagées car la forêt est très dangereuse. Seuls quelques individus formés pour cela peuvent aller dans la nature, grâce notamment à des combinaisons protectrices. Le texte suit Sedef, jeune apprentie, ainsi que sa formatrice lors d’une sortie en territoire hostile. Le parcours de Sedef est vraiment passionnant à découvrir, l’idée du danger venant de l’environnement qu’on ne comprend pas est très bien exploitée.



Sarcophage :Dans un future lointain, l’humanité est partie explorer l’espace, et est parvenue à créer des copies informatiques des esprits pour les remettre dans un nouveau corps à la mort de celui-ci. Le narrateur est le seul survivant d’une expédition sur une planète hostile. Il doit atteindre une base susceptible de lui sauver la vie, mais la batterie de son scaphandre commence à s’épuiser. Sur le chemin, il aperçoit une silhouette particulièrement inquiétante. Le texte est très immersif, les paysages glacés sont magnifiquement décrits et Ray Naler a soigné l’ambiance de la planète. La solitude de l’homme accompagnée de ce monde désertique et glacé créent une atmosphère particulièrement prenante et angoissante.



L’Hiver en partage : Certaines personnes, par le biais d’une technologie nommée « les vacants », peuvent échapper à la mort et revenir posséder d’autres corps. Cette technologie n’est pas possible pour tous, et créé des mécontentements. Deux femmes se retrouvent tous les hivers pour quelques semaines de vacances et retournent ensuite dans leur bloc respectif. L’ambiance est très soignée, et l’histoire émouvante.



Retour au Château Rouge: futur lointain, une jeune femme a participé à une mission sur une planète glaciaire (sans doute la même que dans Sarcophage). Elle revient sur Terre des années après et tous les gens qu’elle connaissait sont morts. Elle est dans un vacant (un corps nouveau occupé par une personne dont on a téléchargé la conscience). Elle va essayer de retrouver l’androïde qui s’est occupée d’elle pendant ses études. Mais la situation sur Terre a changé et les androïdes sont très mal vus. La nouvelle parle de l’importance de la mémoire, du passé et des liens que l’on créé.



Le Réparateur de moineaux: un jeune homme a l’habitude de nourrir les moineaux tous les matins. Un jour il en trouve un blessé et l’amène chez le vétérinaire pour le faire soigner. Mais cette découverte va bouleverser sa vie. L’auteur continue à développer brillament le concept de transfert de conscience.



La Mort de la caserne de pompiers n° 10 : dans un avenir lointain, les intelligences artificielles sont partout et les bâtiments ont des personnalités pour prendre soin des humains et du monde qui les entoure. Le texte s’intéresse plus particulièrement à la destruction de la caserne de pompiers n°10. La nouvelle s’intéresse ainsi à la notion du vivant, de l’humain, de la conscience.



Les Enfants d’Evrim : on repart dans l’espace avec une mission pour une planète à coloniser. A bord du vaisseau Fram se trouvent la jeune Mae et le robot Evrim. Ce dernier va expliquer à Mae son passé, et ce qui est arrivé avant sa naissance. En peu de pages, l’auteur nous immerge dans cette histoire, une des plus réussies.



La Pluie des jours: dans le futur, une femme essaye de se remettre du décès de sa concubine à travers une thérapie. Le texte parle des souvenirs, des liens et de la guérison.



Les Hirondelles de papier : deux scientifiques s’intéressent à une série de morts mystérieux ( animaux ou humains) à travers le globe. Ils vont tenter en vain de prévenir l’humanité en leur présentant leur théorie concernant la destruction de la planète par les humains. L’auteur aborde l’écologie avec ce texte fort réussi.



Protectorats est un recueil magistral qui permet de découvrir un auteur talentueux qu’on espère lire à nouveau. On ne peut que souligner la qualité éditoriale de cet ouvrage et la manière dont les nouvelles sont agencées, formant ainsi un fix-up. Chacun des textes a un intérêt particulier, une ambiance propre, mais mis ensemble ils offrent un univers passionnant, uchronique et qui évolue sur de nombreuses années.


Lien : https://aupaysdescavetrolls...
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Protectorats

Protectorats - Ray Nayler



Je me lance dans une chronique à froid après avoir terminé il y a plus d’une semaine ce nouvel opus sorti chez Le Bélial dans sa collection « Quarante-Deux ». Sans plus attendre, voici les raisons qui doivent vous amener à vous plonger dedans.



Mon avis est quelque peu biaisé car « Quarante-Deux » est une collection que j’affectionne beaucoup, d’une part pour le format des nouvelles et d’autre part pour la variété des textes et des auteurs que l’on y trouve. J’ai pu lire « La Ménagerie de Papier » et « Jardin de poussière » de Ken Liu qui reste mon auteur fétiche (centré sur les personnages et les émotions) ainsi qu’« Axiomatique » de Greg Egan plus orienté sur de la Hard SF. « Protectorats » est ainsi ma quatrième lecture dans cette collection, dans laquelle Ray Nayler se fait sa place avec son propre style. L’auteur nous livre ainsi (avec une très bonne traduction) une SF abordable, variée dans les lieux et dans les thèmes explorés, qui dépeint un futur je dois l’avouer très convaincant: le dépaysement est garanti. De nombreux sujets sont abordés et permettront au lecteur de se projeter sur des futurs potentiels. Le transhumanisme est bien entendu central et notamment la survie de l’âme humaine sous différentes formes: transfert dans un objet, un corps d’emprunt, dans une machine. L’exploration spatiale et la recherche d’une nouvelle colonie pour les humains fait également partie des domaines phare du recueil. Je me suis aussi bien pris au jeu de l’exploration de boucles temporelles dans le cadre d’expériences mais encore pour mener à bien des enquêtes. Enfin, vous prendrez plaisir à découvrir ces liens parfois ténus entre les différentes histoires.



Le mieux pour vous mettre l’eau à la bouche reste de vous donner un aperçu des nouvelles que j’ai plus particulièrement appréciées. On retrouve sans surprise les textes qui ont suscité le plus d’émotions chez le lecteur.



Ma préférée est sans nul doute « Père » (Prix des lecteurs de Bifrost 2022). Comment ne pas craquer devant cet enfant de 7 ans, n’ayant jamais connu son père, qui se retrouve avec un robot endossant ce rôle du jour au lendemain. Un robot qui dispose d’un programme de comportement paternel, et qui s’acquitte avec amour de ses nouvelles prérogatives. Une relation Père - fils courte et atypique, je ne vous en dis pas plus et vous laisse découvrir cette très belle histoire.



J’ai beaucoup hésité et la nouvelle « Les enfants d’Evrim » se retrouve ex æquo avec la précédente. Je vous place simplement le cadre. Suite à un accident, Mae est la seule survivante (avec le robot Evrim) à bord du vaisseau Fram en partance pour une planète à coloniser. Gros tour de force de l’auteur qui nous immerge dans son univers en quelques lignes et nous livre une conclusion qui littéralement vous submerge.



Je conclus simplement sur la nouvelle « Mélopée pour Hasan » qui introduit le recueil et qui relate une très belle histoire d’amour entre deux être épris de science. Baris et sa compagne Hazan qui explore certains moments précis du passé grâce à une machine. Outre le fait qu’elle permet de découvrir et met en avant des moments sombres de notre histoire, j’ai adoré la conclusion tout en douceur de cette nouvelle qui montre le caractère immuable de l’amour.



Encore un très bon moment passé avec ce très beau recueil (magnifique objet livre) que je vous recommande comme porte d’entrée dans le domaine de la SF.
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Protectorats

Extrait de ma chronique :



"Symptomatiquement, sur le modèle peut-être de la Paprika de Satoshi Kon, Ray Nayler décrit souvent des femmes (Hazan Terzi, Sylvia Aldstatt deux fois, Irem Bulut, Sandra) voyageant (plus ou moins profondément) dans des "labyrinthes mémoriels" (page 147), appartenant soit à tous (la simultanéité d'"Une mélopée pour Hazan"), soit à un autre que soi ("Les boucles de désintégration", "Une fusée pour Dimitrios", "Retour au Château-Rouge"), soit à soi-même ("La Pluie des jours").





Tout aussi symptomatiquement, 5 des 6 nouvelles qui traitent frontalement la problématique de la mémoire (les 5 citées au paragraphe précédent, plus "Mutabilité") se réfèrent (pages 40, 61, 112, 144 et 179) aux découvertes d'Elisabeth Loftus sur la plasticité, donc "le manque de fiabilité de la mémoire" (page 125), qui se modifie à chaque accès."
Lien : https://weirdaholic.blogspot..
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Protectorats

Ca m'arrive rarement, mais au moment de rédiger cette critique j'ai aussi eu envie de baisser la note déjà mise à ce livre (de 4 à 3,5/5). Pourquoi ? Parce que si j'ai pris du plaisir à les lire, je me rends aussi compte que quelques jours après les avoir posées, il ne me reste vraiment pas grand-chose de ces 14 nouvelles de Ray Nayler.



Sympathique et parfois pertinent dans son traitement des rapports humains/androïdes ou de l'intelligence matérielle, ce recueil reste quand même un exemple de plus d'une SF "à la papa", où il est beaucoup question de guerre (notamment de la Seconde Guerre mondiale et du Vietnam), et dans lequel les personnages dépassent rarement le stade d'enveloppes assez spectrales, uniquement là pour se laisser traverser par le récit. "A la papa" aussi parce qu'on y sent finalement beaucoup de nostalgie, que les thèmes traités (voyages dans le temps, conquête spatiale...) sont déjà poncés avec plus de talent par des dizaines d'auteurs.



Il y a quand même quelques touches d'originalité dans ces histoires, notamment le cadre d'Istanbul qui apporte une atmosphère différente (mais survolée), une pincée de hopepunk (pour contrebalancer la nostalgie) et la volonté de donner une voix à l'IA. Oui mais voilà, le style assez plat n'aide pas, et on est par exemple bien loin de la pertinence d'un Ted Chiang - qui reste pour moins une référence absolue en nouvelles SF. Avec ce recueil, j'ai quand même eu l'impression de me retrouver embarqué dans un exercice de style, pas forcément désagréable, mais pas non plus inoubliable.



Je recommanderais plutôt ce livre à des amateurs passionnés de SF qu'à un public plus généraliste, et surtout à des lecteurs qui aiment la SF soft et intimiste. Peut-être que son roman à paraître me convaincra plus, pour l'instant c'est un bilan en demi-teinte.
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Bifrost, n°112 : Dossier Anne Rice

Retour express sur le Bifrost 112 consacré à Anne Rice, une autrice que je n'ai encore jamais lue et qui ne m'intéresse pas plus que ça. J'ai parcouru (en diagonale) le dossier qui lui est consacré et cela me conforte dans mon idée : ce n'est pas ma came.



Au sommaire de ce numéro : un édito d'Olivier Girard qui revient sur la liquidation judiciaire des Editions ActuSF (on a appris depuis qu'elles allaient renaître de leurs cendres, espérons que cela soit pérenne !), un carnet des critiques bien fourni mais où rien ne dénote vraiment et où l'on remarque que la "vraie" SF se fait de plus en plus rare, le traditionnel coin des revues et une interview intéressante de la traductrice Nathalie Méges. A la suite du dossier, on retrouve avec plaisir le professeur Lehoucq qui nous parle aujourd'hui des pulsars et enfin l'appel au urnes pour élire la nouvelle francophone (j'ai été incapable de choisir, aucune ne m'a vraiment emballé cette année !) et la nouvelle étrangère (j'ai eu du mal à choisir parmi les nombreux textes de qualité proposés encore cette année : Robert Charles Wilson, Ray Nayler, Alastair Reynolds, Ken Liu pour sélectionner au final Pissenlit d'Elly Bangs !)



Ce numéro est l'occasion de découvrir des plumes inconnues et de retrouver avec plaisir des auteurs que l'on affectionne.

Dans le corps du ciel - Robert Charles Wilson

On ne présente plus Robert Charles Wilson, même si cet auteur canadien se fait rare depuis quelques années. Il n'a jamais été un grand novelliste, je parle ici en quantité, en effet sa bibliographie ne comporte que peu de textes courts. Pourtant il peut aussi être très efficace dans cet exercice.



Tout commence au XIIIème siècle quand des objets "célestes" traversent le ciel mais ce n'est qu'un millénaire plus tard que les conséquences se feront sentir. Robert Charles Wilson fait ce qu'il sait faire, du mystère, du rêve et du grand spectacle avec en fond cette dose d'humanité qui lui est si personnelle. En quelques pages, il effleure les thèmes à la mode du moment, Intelligence Artificielle, Post/Transhumanisme, Ecologie... Un texte tout en mélancolie, duquel se dégagent à la fois espoir et grande tristesse.



Le maître de musique - Morgane Caussarieu

Les éditions du Bélial ayant toutes les peines du monde à pouvoir créditer à ce Bifrost un texte d'Anne Rice, c'est Morgane Caussarieu la spécialiste du fantastique noir, des vampires et de l'horreur qui nous propose un court texte hommage à la défunte autrice de La reine des damnés.



Dès les premières lignes Morgane Caussarieu pose un univers, une ambiance et une petite histoire un peu lugubre. C'est fluide, ça se lit bien, c'est assez addictif mais il manque un peu de volume, il faut dire que les cinq pages semblent bien trop courtes pour que l'on soit pleinement emballé ou franchement déçu.



Par une route sans fin - Elodie Denis

Elodie Denis est une illustre inconnue dans le milieu de l'imaginaire même si elle a déjà publié quelques textes ici ou là. Son entrée dans Bifrost est retentissante avec un joli texte sur les voyages temporels en multipliant les références dont la première est que son héroïne conduit une DeLorean.



Abi fait des sauts dans le temps selon les ordres de Central. Pour quelles raisons ? Cela restera mystérieux (un peu trop à mon goût !) jusqu'au jour où elle contrevient aux instructions et déclenche des conséquences inattendues. Le voyage est intrigant, nébuleux jusqu'au final aussi improbable que surprenant.



Une jolie plume, un style bien à elle, une histoire originale mais il m'a manqué un petit quelque chose pour être pleinement convaincu. Mais le talent est là, et j'espère que l'on pourra lire d'autres textes de l'autrice dans un futur proche.



Le loup du passé - Ray Nayler

Les lecteurs de la revue connaissent bien Ray Nayler, qui a déjà vu trois de ses nouvelles publiées dans Bifrost en un peu plus d'un an. Il a également eu l'honneur d'avoir un (excellent) recueil publié dans la collection Quarante-Deux : Protectorats.



L'Homme est un loup pour l'Homme (enfin surtout pour les Femmes !) c'est un peu la morale de ce texte percutant. Dans un monde post apocalytique où les hommes sont revenus à l'élevage et où les loups menacent les troupeaux, une jeune fille récupère les vestiges robotiques de la guerre pour en faire un chien de berger plus qu'efficace qui au final aura un tout autre rôle.



Ray Nayler montre encore une fois l'étendue de son talent et son humanisme tout Wilsonien. Un vrai grand auteur que l'on pourra découvrir dans une forme plus longue en septembre 2024 avec son premier roman : La montagne dans la mer.


Lien : https://les-lectures-du-maki..
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Bifrost, n°112 : Dossier Anne Rice

C’est sous les auspices de la reine des vampires que Bifrost livre son dernier recueil de l’année. Anne Rice, dans toute sa splendeur, y est décortiquée, tout comme son oeuvre, riche, pléthorique et résolument inégale. J’avoue que comme l’équipe de rédaction, la saga de Lestat m’a emballée dans ma lointaine jeunesse pour, au fur et à mesure des titres, finir par me lasser. Reste qu’indéniablement la Dame est incontournable pour les accros des dents longues.

Quant aux nouvelles, l’optimisme et la joie de vivre ont décidément été aux abonnés absents durant cette année… Les textes proposés, sans être totalement mauvais, manquent de clinquant et d’ampleur : « Dans le corps du ciel » de Robert Charles Wilson est anecdotique ; « Le maître de musique » de Morgane Caussarieu est bancal ; « Le Loup du passé » de Ray Nayler est très classique. Reste « Par une route sans fin » d’Élodie Denis qui, seul, a éveillé mon intérêt.

Il y a des livraisons enthousiasmantes… et il y en a d’autres qui le sont moins…

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Père

Prix des lecteurs Bifrost 2022, cette nouvelle est une formidable porte d'entrée dans le pendant uchronique de l'oeuvre de Ray Nayler.



Dans ces États-Unis d'Amérique post-seconde guerre mondiale des robots peuvent venir remplacer les pères tombés au combat. Le point de divergence est situé en 1938, avec la chute d'un vaisseau extraterrestre et l'extraction de technologies de celui-ci.



Une histoire de violence, de cruauté banale, de parentalité protéiforme.

À lire !
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Protectorats

Les 14 nouvelles de ce recueil sont de petits bijoux, qui se répondent les unes aux autres à travers un recueil très bien construits. Certaines sont bouleversantes d'humanité (Père), d'autres parlent de l'altérité avec un talent que l'on sent directement puisé dans le parcours de vie de l'auteur. Je suivrai de très près ses prochaines publications.
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Protectorats

Laborieuse(s).

Telle a été ma lecture de ces nouvelles.

Pourtant, je partais avec un a priori plus que positif puisque la collection "Quarante-deux" est celle qui a édité l'excellentissime recueil "Ménagerie de papier" de Ken Liu.

Ici, j'avais l'impression de lire de la SF des années 50 avec des thèmes peu novateurs. Il y a deux ou trois nouvelles qui se passent dans le même univers, c'est bien l'unique originalité que j'y ai trouvé.

La prose est extrêmement plate, rien ne vient retenir l'attention du lecteur.

Enfin, on n'est pas dans de la nouvelle à la King ou à la Matheson: les chutes sont inexistantes.

Reçu lors d'une Masse Critique, je remercie tout de même "Le Bélial" et Babelio pour cet envoi.
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Bifrost, n°112 : Dossier Anne Rice

- Dans le corps du ciel de Robert Charles Wilson : 9/10

Excellente nouvelle dans un style maîtrisé traitant d’un premier contact original. Quelques descriptions parfois un peu longue.



- Par une route sans fin de Elodie Denis : 4/10

Nouvelle longuette avec un style inutilement ampoulé et un étalage de références tirant vers le « bling-bling littéraire ». Le récit manque de tension mais l’ensemble est cependant riche et travaillé.



- Le loup du passé de Ray Nayler : 9,5/10

Cette nouvelle passionnante présente un personnage attachant autour d’un thème fort et inattendu. La construction du récit est intéressante et maintient la tension jusqu’au dernier moment. Une nouvelle émouvante et habile.



- Le Maître de musique de Morgane Caussarieu : 3/10

Un texte très court dont la lecture ne m’a rien apporté. Le début du texte est pénible à lire avec des phrases très courtes puis au moment où l’on se prendrait enfin d’intérêt pour les personnages, c’est la fin.

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Protectorats

Je découvre cet auteur avec cette anthologie. En quelques mots : c'est lisible, mou, parfois pas très bien écrit, mais avec quelques idées et atmosphère sympathiques ici et là. Au niveau des concepts ; c'est surtout du classique voir parfois de la SF vieillotte.



Ce qui est très marquant et l'incapacité de l'auteur à maitriser le format de la nouvelle ; la narration est régulièrement passive, sans accroche, ni rythme ni enjeux et se termine régulièrement de manière bâclée et décevante. Les personnages sont aussi souvent ternes et peu crédibles.

Les décors et atmosphères sont variés ; allant du style James Bond rétro au Space Opera. Il est a noté que de nombreuses nouvelles se passent à Istanbul, ville que j'aime beaucoup moi aussi, mais ce ne sont pas forcément les meilleurs et l'ambiance de la ville n'est pas vraiment bien rendue j'ai trouvé.



Sur les 14 nouvelles, il y en a quand même certaines qui m'ont beaucoup plu :



- Mutabilité : une belle ambiance pour cette nouvelle intime et presque onirique dans un café d'Istanbul.



- Les Yeux de la Foret : ou l'apprentissage de la survie dans une exoforêt exotique et dangereuse sur une lointaine planète – un texte haut en couleurs !



- La mort de la caserne de pompier n 10 : l'idée est très amusante, même si ce n'est pas très bien écrit, c'est bien trouvé et intelligent.



Mais j'en ai trouvé aussi de très mauvaises comme : Mélopée pour Harzan, L'hiver en partage, le réparateur de moineaux, Les enfants d'Evrim ou Les Hirondelles des tempêtes (dont les premières et dernières du livre – étrange choix de l'anthologiste !).



Donc pour moi avec 3 bonnes nouvelles, 5 mauvaises et 6 moyennes cela se lit - mais c'est globalement très mou. Si l'on a la patience, on appréciera les quelques textes agréables dans ce livre.
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Protectorats

Recueil de nouvelles monté comme un roman, qui se déroulent dans un passé-présent-futur non défini. Après quelques chapitres, un fond commun se dessine, basé sur des sciences futuristes et un questionnement sur l'avenir de l'humanité. Chaque chapitre répond au précédent,des histoires et des destins qui se croisent sans jamais se toucher. Un thème commun qui est le souvenir, celui qui traverse les siècles et les hommes, chacun le sien et pourtant celui de tous...
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