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Citations de René Guy Cadou (222)


L’AMITIÉ
  
  
  
  
― Qu’est-ce qui se passe ici si tard ?
Un chemin creux n’est pas un boulevard !

― C’est un ami des temps anciens
Voyageur seul et sans bagage

― Femme prépare les vins fins
Les liqueurs des chaussons de feutre

― Ne viens pour boire ni manger
Mais pour parler des années douces

Max Jacob retour de Quimper
Le chat roux le quai de la Fosse

Fosse au passé fosse au remords
Ne te dérange pas si tu dors !

― Et pour qui me dérangerais-je
Sinon pour vous Amis les Anges ?

Les salles tristes du collège
Mais les dimanches sous les pins !

Je te retrouve après quinze ans
Mon lointain mon parent trop rare

Faut-il que tu passes si tard
Dans le corridor du destin !
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Tu es là...



Tu es là,
je tiens ton visage
De corail et de vent
Contre ma chair,
Je confonds soleil, prison.
Des peuples inconnus
Fuient ma convalescence.
Oh ! verse entre mes bras
L’odeur forte des mers.
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HORS DE MOI



Les cœurs sont à laver
Les plaies sont enlevées
L’étoile d’araignée brille dans la serrure
Il ne reste déjà qu’une ombre
Sur le mur
Et le peu de chaleur que tu m’avais laissée

Qu’importe
On vit sans peine
Une main qui rôdait va souffler sur la plaine
Un pli noir se détend
Et la roue du soleil fait chavirer le temps
Le ciel prend l’air

Me reconnaîtras-tu
Ma peau est à l’envers
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MAINTENANT ET À L’HEURE DE NOTRE MORT



Si facile d’aimer
Le vent
La porte ouverte
Et la lampe allumée
La même voix
La même plainte
Et les deux mains tendues où dépassent les pointes

Le bleu
La haute neige attardée sur ton front
L’églantier de tes yeux
Et tes yeux au plafond
Tout ce qui te ressemble

Il nous reste un pays sans borne
À mesurer
Des écarts de tendresse
Un pas lourd dans l’allée
Sur le bord de la nuit
La première fumée.
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Vive voix



Pleine terre à craquer
Maison de serre chaude
O visage à deux mains
Nacelle de l’oubli
Les copeaux du couchant volent sous l’établi

Tu veilles
Ton enfant se lisse dans ses ailes
Lentement tu descends les marches
Les prunelles
Une rose épargnée envahit la fenêtre

Déjà
Et dans le sang
Ta femme va paraître

Alors le vent soulève une larme
Un rideau
Le plafond s’enhardit jusqu’au bord du tréteau
Et la scène écartée du ciel et de la rampe
Appareille à jamais vers la plus haute lampe.
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LA CINQUIÈME SAISON




S’il faut nommer le ciel je commence par toi
Je reconnais tes mains à la forme du toit

L’été je dors dans la grange de tes épaules
Les hirondelles de ta poitrine me frôlent

Dressées contre ma joue les tiges de ton sang
Le rideau de ta chevelure qui descend

Je te cache pour moi dans la ruche des flammes
Reine du feu parmi les frelons noirs des âmes

Par l’automne épargnés tes yeux sont toujours verts
Les fleuves continuent de passer au travers

Ton souffle achève au loin le clapotis des plaines
On ne sait plus si c’est le soir ou ton haleine

En hiver tu secoues la neige de ton front
Tu es la tache lumineuse du plafond

Et je ferme au-delà des mers le paysage
Avec les hautes falaises de ton visage

L’étrave du printemps glisse entre tes genoux
Lentement le soleil s’est approché de nous

Tu traverses la nuit plus douce que la lampe
Tes doigts frêles battant les vitres de ma tempe

Je partage avec toi la cinquième saison
La fleur la branche et l’aile au bord de la maison

Les grands espaces bleus qui cernent ma jeunesse
Sur le mur le dernier reflet d’une caresse.
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La Haie Longue : 1 Km



extrait 2

Entre nous deux celle que j’aime et que tu prends
Pour un pommier sauvage, et toujours aussi belle
La poésie comme une graine dans le vent
Qui s’ouvre et se referme aux battements des ailes

Des maisons sont couchées sur des enfances basses
Pleines de géraniums et de bouquets chanteurs
Au creux de la vallée ce sont les trains qui passent
Et le convoi des solitudes sans chaleur

Mais près d’ici la bonne auberge, la tonnelle
Où volètent les mains fluviales les prénoms
Aimés ; et sur la table ronde qui chancelle
un verre vide avec des larmes dans le fond.
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L'ALLÉE DU CALVAIRE



extrait 9

     Je regagnais la maison les bras chargés de longues herbes que dans mon pays on nomme herbes à tourterelles ou herbes tremblantes, et auxquelles mon amour ne donna jamais d'autre nom.
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L'ALLÉE DU CALVAIRE



extrait 8

     J'entraînais Grand-Mère, mécontente et boudeuse, par un raide petit escalier jusqu'à un terre-plein situé juste au-dessus de la chapelle. Dans une niche haute trois fois comme moi et grillagée, une statue de la Vierge aux couleurs délavées, et que j'aime beaucoup. Je lui porte des fleurs qui foisonnent sur le terre-plein, pervenches que je pique dans le treillage, entre deux étoiles au bleu pâli et un croissant. Dressé en équilibre sur le toit de zinc de la petite chapelle, j'aperçois là-bas, derrière la fuite des arbres, la morne étendue de la Grande Brière et le clocher de Saint-Joachim. Les Moulins de la Fortune tournent en chantant, un vent frais se lève soudain, je suis heureux. Mais je l'étais plus encore à l'époque de la Saint- -Jean, lorsque, mené par un grand gars de paysan, et tenu sur la selle trouée de la faucheuse, je faisais les foins à l'intérieur du calvaire — chaque année, quelques jours avant la procession.
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L'ALLÉE DU CALVAIRE



extrait 7

      « Donnez-nous, aujourd'hui, notre pain quotidien ! »...
« Quotidien », c'était pour moi un nom inscrit en caractères rouges sur le journal que chaque jour le facteur apportait à mon père. Pourquoi, le pain ? je n'en manquais guère et lui préférais les gâteaux à étoile de sucre, les castilles et le reinet gris de la mère Couvrant.
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L'ALLÉE DU CALVAIRE



extrait 3

     Telle tu m'apparais encore, tapissée d'aiguilles de pin, ombreuse et bourdonnante de mille insectes à la fois éveillés. L'air monte lentement de la terre en petites fumerolles à odeur de résine ; il étouffe un peu, comme une effusion maternelle qui se prolonge ; il est plus frais dans le fossé où je descends souvent, une cuillère brisée à la main, creuser dans la glaise des miniatures de fours à pains et de cavernes. Je m'arrête au bruit d'une pomme de pin qui roule et dont le bruit se répercute un instant sous les branches. Un écureuil, comme une étincelle dans la soie, grignote le ciel immuable du feuillage. Je me couche alors sur le dos pour mieux voir, les yeux me brûlent, je vis en rêve et j'aperçois, par un trou bleu des arbres, de grands palais de nuages qui déambulent et où il fait bon habiter.
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L'ALLÉE DU CALVAIRE



extrait 2

     Malgré tout, mon élan ne me menait jamais plus loin que la grille d'entrée ; parmi les fleurs jetées à gauche du portillon, je découvrais des débris de couronnes, j'en défaisais les perles avec lesquelles, le soir venu, je faisais des bracelets sous la lampe. Inquiet de mon larcin et délicieusement troublé, je revenais en hâte sur mes pas qui, invariablement, me conduisaient dans l'allée du calvaire.
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Femmes d'Ouessant

Un soir de pauvreté comme il en est encore
Dans les rapports de mer et les hôtels meublés
Il arrive qu'on pense à des femmes capables
De vous grandir en un instant de vous lancer
Par-dessus le feston doré des balustrades
Vers un monde de rocs et de vaisseaux hantés
Les filles de la pluie sont douces si je hèle
A travers un brouillard infiniment glacé
Leur corps qui se refuse et la noire dentelle
Qui pend de leurs cheveux comme un oiseau blessé
Nous ne dormirons pas dans des chambres offertes
A la complicité nocturne des amants
Nous avons en commun dans les cryptes d'eau verte
Le hamac déchiré du même bâtiment
Et nous veillons sur nous comme on voit les pleureuses
Dans le temps d'un amour vêtu de cécité
A genoux dans la gloire obscure des veilleuses
Réchauffé de leurs mains le front prédestiné.
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23 avril 46


Mon amour ! Il y aura demain quatre ans

Que nous sommes dans cette même chair

Quatre ans que je promène à la surface de ton corps

Les lourds hameçons de la tendresse !

Et tout peut s'écrouler

Tout est pollué

Tout suit l'enterrement

Tu es toujours plein d'arbres

Mon amour !
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La nuit ! La nuit surtout je ne rêve pas je vois
J'entends je marche au bord du trou
J'entends gronder
Ce sont les pierres qui se détachent des années
La nuit nul ne prend garde
C'est tout un pan de l'avenir qui se lézarde
Et rien ne vivra plus en moi
Comme un moulin qui tourne à vide
L'éternité
De grandes belles filles qui ne sont pas nées
Se donneront pour rien dans les bois
Des hommes que je ne connaîtrai jamais
Battront les cartes sous la lampe un soir de gel
Qu'est-ce que j'aurai gagné à être éternel ?
Les lunes et les siècles passeront
Un million d'années ce n'est rien
Mais ne plus avoir ce tremblement de la main
Qui se dispose à cueillir des œufs dans la haie
Plus d'envie plus d'orgueil tout l'être satisfait
Et toujours la même heure imbécile à la montre
Plus de départs à jeun pour d'obscures rencontres
Je me dresse comme un ressort tout neuf dans mon lit
Je suis debout dans la nuit noire et je m'agrippe
À des lampions à des fantômes pas solides
Où la lucarne ? Je veux fuir ! Où l'écoutille ?
Et je m'attache à cette étoile qui scintille
Comme un silex en pointe dans le flanc
Ivrogne de la vie qui conjugue au présent
Le liseron du jour et le fer de la grille.
---

Une lampe naquit sous la mer
Un oiseau chanta
Alors dans un village reculé
Une petite fille se mit à écrire
Pour elle seule
Le plus beau poème
Elle n'avait pas appris l'orthographe
Elle dessinait dans le sable
Des locomotives
Et des wagons pleins de soleil
Elle affrontait les arbres gauchement
Avec des majuscules enlacées et des cœurs
Elle ne disait rien de l'amour
Pour ne pas mentir
Et quand le soir descendait en elle
Par ses joues
Elle appelait son chien doucement
Et disait
« Et maintenant cherche ta vie ».







Chargeme
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Destin du poète
Le soir qui bouge son oreille
Comme un vieil âne abandonné
Le dernier corset d'une abeille
Oublié sur la cheminée
La cloche triste de l'asile
Et le pas qui répond au pas
Dans la mesure où ce qui veille
Encourage ce qui n'est pas
L'oiseau qui tombe sur la pierre
Le sang qui tombe sur le cœur
La bonne pluie des réverbères
Qui donne à boire au malfaiteur
Le trou d'aiguille par où passe
Le fil ténu de la clarté
La bobine du temps qui roule
Sous les lauriers sous les sommiers
Mais se savoir parmi les hommes
En un présent aventureux
Une petite lampe à huile
Qui peut encor mettre le feu.
---
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Le chant de solitude
Laissez venir à moi tous les chevaux toutes les femmes et les bêtes bannies
Et que les graminées se poussent jusqu'à la margelle de mon établi
Je veux chanter la joie étonnamment lucide
D'un pays plat barricadé d'étranges pommiers à cidre
Voici que je dispose ma lyre comme une échelle à poules contre le ciel
Et que tous les paysans viennent voir ce miracle d'un homme qui grimpe après les voyelles
Étonnez-vous braves gens ! car celui qui compose ainsi avec la Fable
N'est pas loin de trouver place près du Divin dans une certaine
Étable !
Et dites-vous le soir quand vous rentrez de la foire aux conscrits ou bien des noces
Que la lampe qui brûle à l'avant du pays très tard est comme la lanterne d'un carrosse
Ou d'un navire bohémien qui déambule
Tout seul dans les eaux profondes du crépuscule
Que mon Chant vous atteigne ou non ce n'est pas tant ce qui importe
Mais la grande ruée des terres qui sont vôtres entre le soleil et ma porte
Les fumures du Temps sur le ciel répandues
Et le dernier dahlia dans un jardin perdu !
Dédaignez ce parent bénin et maudissez son Lied !
Peut-être qu'un cheval à l'humeur insolite
Un soir qu'il fera gris ou qu'il aura neigé
Posera son museau de soleil dans mes vitres.
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Si mes yeux si mes mains
Si ma bouche encor tiède
Si la terre et le ciel
Venaient à me manquer
Si le vent n’allait plus
Porter dans sa nacelle
Mes oiseaux et la part
Infime du secret
Si les tiges de blé
Qui ferment ton visage
N’éclairaient plus la route
Où j’avance à pas lents
Si ce poème enfin
N’était rien qu’un poème
Et non le cri d’un homme
En face de sa nuit
Mon Dieu serait-ce alors
Besoin de tant de larmes.
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René Guy Cadou
Toute poésie qui coule de source, se jette dans la mer, tend à rejoindre l’universel.
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René Guy Cadou
Déclaration d’amour

Je t’aime
Je te tiens à mon poing comme un oiseau
Je te promène dans la rue avec les femmes
Je puis te rouer de coups et t’embrasser
Ô poésie
En même temps
T’épouser à chaque heure du jour
Tu es une belle figure épouvantable
Une grande flamme véhémente
Comme un pays d’automne démâté
Tu es ceinte de fouets sanglants et de fumées
Je ne sais pas si tu t’émeus
Je te possède
Je te salis de mon amour et de mes larmes
Je te grandis je te vénère je t’abîme
Comme un fruit patiemment recouvert par la neige.

(René-Guy CADOU, Le Cœur définitif, Paris, Seghers, 1961)
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