Robert Dugoni

Quand un détective totalisait un nombre d’années suffisant pour pouvoir partir à la retraite à taux plein, il résistait difficilement à la tentation de laisser derrière lui les cinglés et les dépravés qui peuplaient son quotidien, pour mener enfin une vie normale.

La vision d'enquêteurs en train de rire sur une scène de crime pouvait facilement être mal interprétée. L'opinion publique ne comprenait pas que l'humour noir était souvent un mécanisme de défense utilisé par les enquêteurs pour effectuer leur travail sans dégoût.

Elle était venue à Seattle pour un boulot, mais cela n’avait pas marché, et elle n’avait pas réussi à en trouver un autre. La vie ici était plus chère qu’elle ne l’avait pensé, et puis sa voiture était tombée en panne. Elle m’a dit qu’elle s’était mise à la danse érotique pour payer ses factures.

Ils pouvaient bien faire toutes les suppositions qu’ils voulaient, faire remarquer que les preuves étaient douteuses. Ils pouvaient laisser entendre que des actes répréhensibles avaient été commis. Ce qu’ils ne pouvaient pas faire, c’était le prouver.

C’est moi qui aurais dû savoir qu’il allait s’enfuir. C’est moi qui ai pris les choses à la légère quand il a menacé de le faire.
Ce qui me rend responsable de ce qui se passe.
Et c’est toi qui seras responsable si on ne le retrouve jamais.
Je dis à Monsieur-Et-Si de la fermer, et il obéit.
Du moins, pour le moment.
Je continue de passer des coups de fil.

De toute évidence, la créativité et l’imagination n’avaient pas été au programme ici ; les pavillons, identiques, ne différaient que par leur orientation sur la parcelle et les plans intérieurs. Les façades étaient en brique et en bardage de bois gris, et l’emprise au sol était telle qu’il n’y avait guère de place que pour quelques mètres de haie et un carré de pelouse tondu en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire.

C’était une splendide journée de juillet, une de plus –avec son ciel bleu lumineux et sa chaleur estivale tempérée par une douce brise soufflant d’Elliot Bay et s’engouffrant entre les tours d’habitation. « Dieu prend ses quartiers d’été à Seattle », aimait à dire Kins. « Mais il se tire aussitôt qu’octobre se pointe. »

Ce matin-là encore, Dan s’était inquiété de la taille de leur cottage, avec son unique salle de bains, son unique chambre et sa cuisine minuscule.
- C'est un bébé, lui avait rappelé Tracy pour le calmer. On ne va pas adopter un éléphant. Il sera toujours temps de parler de rénovation ou de déménagement plus tard.

- Vous savez si c’est un garçon ou une fille ?
- Non, dit Tracy. Dan préfère ne pas savoir. Il dit que c’est une des dernières grandes surprises de la vie, et je ne suis pas loin de penser qu’il a raison.

Evidemment, pour ma mère, c'était la preuve formelle du plan que Dieu avait formé pour moi et mes yeux rouges. Si quelqu'un lui avait dit qu'un jour une fumée blanche d'élèverait au-dessus du Vatican, suivie de la proclamation de mon nom comme nouveau pape, elle n'aurait pas cillé le moins du monde.

La prote d'entrée s'ouvrit et Dan sortit dans la lumière de la pleine lune, flanqué de deux très gros chiens. Le poitrail large, le museau noir aplati et le poil ras, ils ressemblaient à des bouledogues gonflés aux stéroïdes. Assis à côté de Dan, ils lui conféraient l'allure d'un pharaon.
- Il n'y a pas de danger?
- Aucun, dès que tu leur auras été convenablement présentée.
[...]
-Voici Sherlock.
- Tu plaisantes?
"Élémentaire mon cher" avait été une des expressions favorites de Dan, qui reporta ensuite son attention sur l'autre chien :
- Et voici...
- Laisse moi deviner. Durex?
Une des autres expressions favorites de Dan avait été "Sortez couverts".
- Ça, se serait grossier! Non ce grand garçon s'appelle Rex, comme dans T-Rex.

Lorsqu'ils s'effondrèrent sur le sol, elle pressa les fils dénudés sur la pointe métallique, provoquant une étincelle. Un claquement sec résonna et l'odeur de chair brûlée s'éleva. Il trembla et se contracta, pris de convulsions, parcouru par le courant électrique. Enrique, son élève du collège de Cedar Grova criant "Conducteur!", lui revint en mémoire.

Veronica en a eu marre et s’est enfuie. Elle a vécu dans la rue puis a emménagé avec une crapule du nom de Bradley Taggart. Taggart a dix ans de plus qu’elle, et un dossier long comme le bras de roi des connards. Il aimait la tabasser. Une fois de temps en temps, ils faisaient assez de boucan pour que les voisins appellent les flics, mais Veronica n’a jamais voulu porter plainte. Cette fille est tombée dans les escaliers plus souvent qu’un aveugle.

J’adore le défi physique et psychologique, et j’adore tirer, j’ai toujours adoré cela. Le problème, c’est qu’on bâtit plein de plans pour son avenir et qu’on atterrit complètement par hasard dans ce à quoi on était destiné.

En dépit des points communs aux meurtres des deux danseuses, la hiérarchie policière et la municipalité n’étaient guère enclines à admettre l’existence d’un « serial killer ». Les deux institutions connaissaient par cœur la frénésie médiatique que ces deux mots pouvaient faire naître au sein d’une population qui avait connu plus que sa part de meurtriers tristement célèbres, sans parler des conséquences financières d’une task force sur un budget policier déjà bien éprouvé. Les tueurs en série pouvaient laisser libre cours à leurs activités pendant des années, quelquefois des décennies, pendant que les task forces engloutissaient des heures de personnel, des budgets et bien souvent des carrières.

- C'est un bébé, lui avait rappelé Tracy pour le calmer. On ne va pas adopter un éléphant. Il sera toujours temps de parler de rénovation ou de déménagement plus tard.

- Vera adore prendre soin des autres, dit Faz. C'est ce qui la rend heureuse.
Gonzalez eut un sourire.
- Alors elle va être aux anges quand elle verra dans quel état vous êtes.

- Si c'est ça le genre de garçon que je pourrais avoir, je préfère Sonny [le chien]. Au moins lui, il a le poil court, il se lave, et il vient quand je l'appelle.

- Après mon divorce, j'ai eu besoin d'un changement de décor.
- Moi, après le mien, j'aurais eu besoin d'un changement de planète.

Chez nous, les Italiens, une fois le repas terminé, la tradition veut qu'on salue le chef et qu'on rende hommage à la personne la plus importante de la pièce. Saluons donc la meilleure cuisinière de Seattle! lança-t-il en regardant sa femme.