Citations de Robert Merle (785)
L'homme, c'est la seule espèce animale qui puisse concevoir l'idée de sa disparition et la seule que cette idée désespère. Quelle race étrange : si acharnée à se détruire et si acharnée à se conserver.
Notre Führer Adolf Hitler avait défini une fois pour toutes l'honneur SS. Il avait fait de cette définition la devise de sa troupe d'élite : "Ton honneur", avait-il dit, "c'est ta fidélité". Désormais, par conséquent, tout était parfaitement simple et clair. On n'avait plus de cas de conscience à se poser. Il suffisait seulement d'être fidèle, c'est-à-dire d'obéir. Notre devoir, notre unique devoir était d'obéir. Et grâce à cette obéissance absolue, consentie dans le véritable esprit du Corps noir, nous étions sûrs de ne plus jamais nous tromper, d'être toujours dans le droit chemin, de servir inébranlablement, dans les bons et les mauvais jours, le principe éternel : L'Allemagne, l'Allemagne au-dessus de tout.
Extrait de la préface du livre écrite par Robert Merle signé du 27 avril 1972
Il y a bien des façons de tourner le dos à la vérité. On peut se refugier dans le racisme et dire : les hommes qui ont fait cela étaient des Allemands. On peut aussi en appeler à la métaphysique et s’écrier avec horreur, comme un prêtre que j’ai connu : « Mais c’est le démon ! Mais c’est le Mal !... ».
Je préfère penser, quant à moi, que tout devient possible dans une société dont les actes ne sont plus contrôlés par l’opinion populaire. Dès lors, le meurtre peut bien lui apparaitre comme la solution la plus rapide à ses problèmes.
Ce qui est affreux et nous donne de l’espèce humaine une opinion désolée, c’est que, pour mener à bien ses desseins, une société de ce type trouve invariablement les instruments zélés de ses crimes.
C’est un de ces hommes que j’ai voulu décrire dans La Mort est mon Métier. Qu’on ne s’y trompe pas : Rudolf Lang n’était pas un sadique. Le sadisme a fleuri dans les camps de la mort, mais à l’échelon subalterne. Plus haut, il fallait un équipement psychique très différent.
Il y eu sous le nazisme des centaines, des milliers, de Rudolf Lang, moraux à l’intérieur de l’immoralité, consciencieux sans conscience, petits cadres que leur sérieux et leurs « mérites » portaient aux plus hauts emplois. Tout ce que Rudolf fit, il le fit non par méchanceté, mais au nom de l’impératif catégorique, par fidélité au chef, par soumission à l’ordre, par respect pour l’Etat. Bref, en homme de devoir : et c’est en cela justement qu’il est monstrueux.
La méfiance a ceci de commun avec les autres vertus : elle n'est efficace qu'à la condition de n'admettre pas d'exception.
N'oubliez pas que, si longue vous apparaisse votre existence, votre mort, elle, est éternelle.
Nous sommes très occupés et pourtant, rien ne nous presse. Nous disposons de vastes loisirs. Le rythme de la vie est lent. Chose bizarre, bien que les journées aient le même nombre d'heures, elles nous paraissent infiniment plus longues. Au fond, toutes ces machines qui étaient supposées faciliter notre tâche, autos, téléphone, tracteur, tronçonneuse, broyeur de grain, scie circulaire, elles facilitaient, c'est vrai. Mais elles avaient aussi pour effet d’accélérer le temps. On voulait faire trop de choses trop vite. Les machines étaient toujours là, sur vos talons, à vous presser.
[...] il n'est pas nécessaire de croire en Dieu pour avoir le sentiment du divin.
Quand on ne peut pas labourer avec un cheval, on laboure avec un âne.
- En fait, reprit-il, tuer n'est rien. C'est enterrer qui prend du temps.
L'homme a deux morales, selon qu'il bénéficie ou non de l'acte qui le scandalise.
On devrait vivre en portant plus d'attention à la vie. Elle n'est pas si longue.
La méfiance a ceci de commun avec les autres vertus : elle n'est efficace qu'à la condition de n'admettre pas d'exception.
L'homme, c'est la seule espèce animale qui puisse concevoir l’idée de sa disparition et la seule que cette idée désespère. Quelle race étrange : si acharnée à se détruire et si acharnée à se conserver.
L'homme, c'est la seule espèce animale qui puisse concevoir l'idée de sa disparition et la seule que cette idée désespère. Quelle race étrange : si acharnée à se détruire et si acharnée à se conserver.
La nuit commence ce jour de Pâques où l'Histoire cesse, faute d'objet : la civilisation dont elle racontait la marche a pris fin.
Certes, j'ai pour elle gratitude et amitié. Mais le premier feu du désir passé, est-ce que je l'aime ? Je veux dire est-ce que je l'aime plus que j'aime Emmanuel, Peyssou ou Meyssonnier ? Et, pourquoi aimerait-on davantage une femme – sous prétexte qu'on couche avec elle – que son ami ? Je soupçonne beaucoup de mensonges et de conventions dans ce romantisme de pacotille.
(...) je vis qu'il fallait , comme dans une usine, mettre en place une chaine continue qui conduirait les personnes à traiter, du vestiaire à la chambre à gaz, et de la chambre à gaz aux fours, dans un minimum de temps.
Dans la société de consommation, la denrée que l'homme consomme le plus, c'est l'optimisme. Depuis le temps que la planète était bourrée de tout ce qu'il fallait pour la détruire - et avec elle, au besoin, les planètes les plus proches -, on avait fini par dormir tranquille. Chose bizarre, l'excès même des armes terrifiantes et le nombre grandissant des nations qui les détenaient apparaissaient comme un facteur rassurant. De ce qu'aucune, depuis 1945, n'avait encore été utilisée, on augurait qu'on n'oserait et qu'il ne se passerait rien. On avait même trouvé un nom et l'apparence d'une haute stratégie à cette fausse sécurité où nous vivions. On l'appelait "l'équilibre de la terreur".
Je suis très méfiant, et pas seulement à l'égard des prêtres. j'ai, par exemple, la plus vive antipathie pour les gens qui se vantent d'avoir supprimé Dieu le Père, traitent la religion de "vieillerie" et la remplacent aussitôt par des gris-gris philosophiques tout aussi arbitraires.(...) J'éprouve un attrait sentimental pour les habitudes religieuses de mes ascendants. Bref, toutes les fibres ne sont pas rompues. D'un autre côté, je m'en rends bien compte : adhérence ne veut pas dire adhésion.
A qui puis-je dédier ce livre,
sinon aux victimes de ceux pour qui la Mort est un Métier