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Critiques de Ryszard Kapuscinski (145)
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Autoportrait d'un reporter

Lu en 2017. Un petit ouvrage réflexif reposant sur les extraits d'entrevues d'un reporter décryptant son métier et ses enjeux.

Ryszard Kapuściński (décédé en 2007) témoigne sur la pratique du journalisme, sur ses différentes expériences à travers le monde, tout en élargissant le débat sur le rôle des médias et de l'information... Un petit livre instructif, objectif et réaliste, emprunt de passion, d'éthique et d'humanisme, d'une probante portée universelle.
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Ebène : Aventures africaines

Superbe photographie d'une civilisation africaine trop souvent ignorée ou méprisée, malmenée par un colonialisme venu de l'extérieur et motivé par ses propres intérêts. Le travail journalistique de l'auteur qui a sillonné l'Afrique profonde avec beaucoup d'humanité est remarquable.
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Ebène : Aventures africaines

Un ouvrage indispensable, tellement l'auteur a su fréquenter, comprendre et aimer l'Afrique qu'il a parcourue, écoutée et filmée. Quel regret qu'il ne soit plus en vie ! Cet ouvrage reste pour moi un classique. Cela étant, il convient d'y ajouter des lectures plus récentes, pour les situations géopolitiques et humaines (exemples, Soudan, Tchad...)
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Autoportrait d'un reporter



Ce petit opus de tout juste 100 pages a le double mérite de rendre hommage à un des plus valeureux reporters que le monde ait connu, le journaliste d’origine polonaise, Ryszard Kapuscinski (1932-2007) et de mettre les pendules à l’heure à un moment où la profession de journalisme traverse une période difficile à cause du développement inquiétant du "fake news" et l’organisation de fausses informations à travers les réseaux sociaux, telle l’usine à trolls de Saint-Pétersbourg par exemple.



Le professeur de lettres Patrice Kleff, assisté par Lucie Szechter, pour la rubrique "Un livre, un film" et par la traductrice professionnelle, Véronique Patte, a fait un excellent travail en constituant un dossier qui regroupe des textes importants et de notes pertinentes de maître Kapuscinski relatives à ce beau métier de journaliste.



Avant d’entamer une carrière comme administrateur au Parlement européen, mes premiers pas professionnels ont justement été dans le journalisme, comme collaborateur au magazine belge "Spectator", qui n’existe plus et qui était comparable à "L’Express" en France. C’est de cette époque que date mon admiration pour Ryszard Kapuscinski et son grand confrère français, Albert Londres (1884-1932).



Au fil des années, j’ai pratiquement tout lu du globe-trotter polonais et encore récemment une sélection d’écrits de lui et de sa compatriote et amie, Hanna Krall, réunis dans un bel ouvrage "La mer dans une goutte d’eau", que j’ai eu grand plaisir à commenter ici le 20 novembre dernier.



Cet ouvrage qui est avant tout instructif, a été édité chez Flammarion dans leur excellente collection "Étonnants Classiques" qui présente des textes abrégés avec dossiers destinés aux lycées et collèges.



Après une brève histoire des médias, illustrée par un fascinant tableau chronologique de 1452 (invention de la presse de Gutenberg) à 2010, comme "quatrième pouvoir" après les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire et comme un indispensable contre-pouvoir, le fascicule présente un résumé succinct de la carrière journalistique de Kapuscinski.



Suit alors le "Autoportrait d’un reporter" proprement dit, soit le recueil de textes laissés par Kapuscinski comme œuvre posthume, qui couvre une multitude de questions, telles l’indépendance de la presse, la neutralité et les risques du correspondant de guerre, l’objectivité du journaliste, les méthodes d’interview, la course à l’information et le marché de l’information. Ces aspects du monde du journaliste sont suivis par toute une série de photos sur la construction de l’information, où l’on voit entre autres une photo prise par l’auteur lui-même en 1975 d’enfants soldats en Angola.



La dernière partie du livre constitue un dossier avec un reportage de l’auteur sur la révolution iranienne et le Shah et ses vues sur la déontologie journalistique.

L’ouvrage se termine avec le thème "Un livre, un film", et la controverse autour du film "Spotlight" du régisseur américain Tom McCarthy de 2015.

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Mes voyages avec Hérodote

Voyage avec un livre en terres humaines...



Parfois c'est un livre qui vous amène au suivant.

C'est Irène Vallejo dans "L'infini dans un roseau" qui m'a orientée vers "Mes voyages avec Hérodote", et voici le début des pages qu'elle lui consacre :



"Au milieu des années 1950, dans une Europe divisée par le Rideau de fer, voyager au-delà des territoires alliés était une mission plus difficile qu'à l'époque d'Hérodote. En 1955, un jeune journaliste polonais, Ryszard Kapuscincki, aspirait, plus que tout, à "traverser la frontière". Peu lui importait laquelle et où, il ne rêvait pas de lieux enveloppés d'une aura capitaliste inaccessible, comme Londres ou Päris. Non, il désirait juste accomplir l'acte presque mystique et essentiel de franchir la frontière. Sortir du cloisonnement. Connaître l'autre côté. Il eut de la chance. son journal - qui répondait au nom exalté de l'Etendard de la jeunesse- l'envoya comme correspondant en Inde. Avant de partir, la rédactrice en chef lui offrit un gros volume relié : les Histoires d'Hérodote. Avec ses centaines de pages, ce n'était pas précisément un livre léger à embarquer dans une valise, mais Ryszard l'emmena avec lui. (...) Le livre d'Hérodote fut son vade-mecum et sa boussole dans la découverte de ce monte extérieur mystérieux. Des décennies plus tard, avec des kilomètres de déambulations internationales derrière lui, Kapuscinski écrivit un livre merveilleux, Mes voyages avec Hérodote, qui déborde de sympathie pour le Grec tourmenté en qui il trouva un compagnon de route et une âme soeur. Etc.

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La mer dans une goutte d'eau

D'après Margot Carlier, qui a réuni et présente en cet ouvrage les premiers textes de deux monstres sacrés de la littérature polonaise dans une spécialité propre au pays : le reportage littéraire. De cette forme artistique particulière, selon elle, Ryszard Kapuscinski et Hanna Krall sont considérés le père et la mère.



De Ryszard Kapuscinski, né en 1932 à Pinsk (à l'époque en Pologne, actuellement en Biélorussie) et décédé le 23 janvier 2007 à Varsovie, j'ai lu avec grand intérêt ses best-sellers "Ebène" ou ses aventures africaines ; "Le Négus" ou la biographie d'Haïlé Sélassié, empereur d'Éthiopie (1892-1975) et "Le Shah" ou la biographie de Mohammad Reza Pahlavi d'Iran (1919-1980). de Hanna Krall, je dois hélas avouer n'avoir lu aucun de ses livres, bien que dans la bibliothèque de Babelio y figurent quatorze.



Tout au long de leur longue carrière d'écrivain et de reporter, Kapuscinski et Krall ont été liés "par une solide et belle amitié". Dans "Autoportrait d'un reporter" de 2008 par Kapuscinski, dans la préface Hanna Krall note à ce propos : "Pendant des années, on se voyait avec Rysiek (son diminutif de Ryszard) toujours dans le même café, Place Bankowy. Sans rien demander, Sławek, le garçon, nous servait machinalement du Campari avec du jus d'orange. Nous échangions les dernières nouvelles, quelques potins, en pouffant de rire, et lorsqu'il se passait quelque chose d'important dans le monde, Rysiek m'expliquait la situation."

À la page 235 se trouve une belle photo des 2 artistes, tout sourire, à l'occasion de la Foire au livre de Leipzig en 2000 et la réception par Hanna du Prix de l'Entente européenne.



Margot Carlier, dans son introduction instructive et enthousiaste, spécifie que la plupart des textes contenus dans le présent volume sont inédits en France. Seulement 2 textes ont fait l'objet d'une publication antérieure, sur les 30 textes retenus, soit 15 d'elle et 15 de lui.



Quelles sont les caractéristiques principales des textes de ce duo ?

- Leur style est d'abord éminemment littéraire. Ils ont le souci de la narration tout en se servant des techniques de la fiction, comme le recours à l'ellipse, la métaphore, l'anecdote, l'ironie et à la poésie, mais toujours avec un très grand soin du détail.

- Écrits entre 1950 et 1970, ils reflètent la vie des gens ordinaires dans un système communiste oppressant aux conditions de vie souvent déplorables. Dans un contexte de grèves, de grisaille et d'injustices.



Il paraît qu'aujourd'hui en Pologne, le "krallovisme" et "à la Kapu" sont des termes encore toujours utilisés avec humour et respect par de jeunes écrivains et reporters pour qualifier le style de Krall et Kapuscinski.



Le titre du recueil trouve son origine dans une boutade de l'historien Adam Michnik : "Nous disions du reportage qu'il était l'art de voir la mer dans une goutte d'eau". Une façon de voir l'écriture sous la censure communiste.

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Ebène : Aventures africaines

Le voyage à travers divers pays d'Afrique et le regard pénétrant sur les pays émergents suite à la conquête de l'indépendance dès les années 60. L'auteur est attiré et fasciné par le détail ce qui nous mène à des émotions profondes et une empathie certaine par rapport au vécu des peuples qu'il rencontre lors de ses périples. Ce livre devient une sorte de guide universel pour les journalistes et les voyageurs, une inspiration pour aborder les sujets apparemment banals comme par exemple les routes de l'impossible ou la traversée de la pleine infinie de Serengheti dans une fascination d'un paradis à notre portée mais déjà perdu.
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Mes voyages avec Hérodote





Kapuscinsky, jeune journaliste, veut partir, franchir des frontières, s’évader, peu importe où, puisque nous sommes en 1954, quand dans son pays tout est sujet à caution, tout est suspect, toute phrase peut être équivoque.

Les « histoires » d’Hérodote furent publiées en Pologne en 1955. Quand le journaliste est envoyé en Inde, son supérieur lui offre le livre du grec. Il débarque avec un costume style «  pacte de Varsovie cuvée 56 », dit-il avec humour…

Le propos de ces «  Voyages »  n’est évidemment pas d’aller sur les traces d’Hérodote, qui ne connaissait que le monde connu autour de la Grèce en l’an 450 : l’Égypte, la Syrie, l’empire perse avec Babylone (dans l’actuel Irak) l’Ukraine actuelle et la Macédoine.



Car Kapuscinsky ne peut choisir où il va aller et il lit le livre là où il est envoyé par son journal, avec des comparaisons et des références, des retours sur l’enfance et les difficultés rencontrées par Hérodote.

« Les voyages avec Hérodote » est donc plutôt l’histoire de la vie et des coutumes en général à Athènes, où seuls les citoyens dont les deux parents sont nés en Attique peuvent bénéficier des droits politiques. Or Hérodote est né en terre d’Asie, l’actuelle Turquie, il n’a donc aucun droit.

Ce n’est pas une recherche « sur les pas de », un voyage reprenant les découvertes de ce premier géographe, le « père de l’histoire » selon Cicéron, que nous présente l’auteur. Ce sont ses réflexions personnelles, le choc qu’il a eu en Inde, où il découvre la pauvreté et le mysticisme : « Individuellement, en groupes, par clans entiers. Des colonnes de pèlerins. Des estropiés avec leurs béquilles. Des squelettes de vieillards portés sur les épaules de jeunes gens. Des êtres tordus et mutilés rampant avec peine sur l’asphalte éventré et défoncé. Des vaches, des chèvres ainsi que des hordes de chiens faméliques escortant »

L’auteur passe d’un relatif paradis polonais à un enfer absolu. Et en profite pour remonter dans l’histoire, non pas d’Hérodote, mais par exemple la pensée de Confucius lorsqu’il est envoyé en Chine : « Le confucianisme est une philosophie de pouvoir, de fonctionnaires, de structure, d’ordre, de garde-à-vous ; le taoïsme est la sagesse de ceux qui refusent de jouer le jeu et veulent rester ».

Il se sent en même temps attiré par ces civilisations si lointaines de la sienne, et pourtant pas intégré :

« Me sentais-je en sécurité ? Oui. Étranger ? Non. Bizarre ? Oui, mais j’aurais été incapable de définir cette sensation qui pourtant ne tarda pas à se préciser lorsqu’un homme aux pieds nus est entré dans ma chambre avec une théière et quelques biscuits. C’était la première fois de ma vie qu’il m’arrivait une chose pareille ».

Très érudit, reprenant les guerres médiques par le menu, la guerre de Troie, R K médite bien entendu sur les guerres, le pourquoi des guerres et le désir de vengeance. Il imagine aussi la manière de voyager d’Hérodote en Égypte, et nous livre ses propres aventures vécues dans le même pays. Enfin, au Congo, il lit Mary Kingsley et Balandier, sans oublier le livre d’Hérodote.

Finalement, que ce soit en Éthiopie, ou dans tous les autres pays d’Afrique qu’il doit chroniquer en tant que journaliste, R K est tellement obsédé par Hérodote qu’il en oublie, nous confie-t-il, le temps et les lieux.



Étrange manière de voyager, étrange livre, et pourtant bon voyage nous est offert dans l’histoire en général.

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Ebène : Aventures africaines

Quel voyage !



Un livre entre le journalisme et le récit qui nous emmène en l'Afrique entre 1970 à 1990. Mais cela ne ressemble à rien de ce que l'on croit savoir en Europe. L'auteur a su faire preuve de beaucoup d'humilité et de curiosité pour rapporter ses expériences auprès des peuples africains de l'époque.



On y trouve une explication africaine sur ce qui c'est passé au Rwanda très fine. Et tout est comme ça, creusé en profondeur. On découvre une culture que l'on ignore, et Kapuscinski nous donne les clés pour l'appréhender.



Le meilleur livre que j'ai pu lire sur l'Afrique !
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Ebène : Aventures africaines

Écrivain et journaliste polonais, l’un de plus traduits à l’étranger, Ryszard Japuscinski s’est rendu célèbre avec ses reportages sur l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Europe communiste.



Avec « Ébène » il nous démonte sa parfaite connaissance du continent africain, et plus particulièrement de l’Afrique subsaharienne. De la fin des années 1950 aux années 2000 il relate dans ce livre son expérience d’une contrée du monde qu’il aime, avec ses imperfections, ses difficultés, ses contradictions.



Chaque chapitre est un petit roman. Chaque rencontre est l’occasion d’évoquer une page de l’histoire d’un pays, une croyance d’un peuple, les superstitions d’un autre, la géographie d’une contrée et son contexte géopolitique. Il fait la démonstration que l’Afrique n’est pas « une » mais multiple. Sa connaissance des peuples, de l’histoire, des régions, de la politique lui permettent une analyse pointue des particularités de ce continent trop souvent traité globalement. Il nous permet de mieux comprendre ce qui se joue sur ce continent que l’Occident ne sait appréhender.



L’écriture est simple, claire et précise. La tragédie du Rwanda n'a jamais été aussi limpide, la personnalité d'Amin Dada si bien définie, les rôles de l'Europe si clairement présentés. Le récit commence alors que les États africains, créés par les Européens sans tenir compte des tribus, des ethnies, des cultures, accèdent à l’indépendance. Un monde entre deux modes de vie, des étapes cruciales pour la construction de ces jeunes nations sur base de conflits ethniques endormis pendant la colonisation. On y vit avec l’auteur les coup d’état, les épidémies, les désillusions de la décolonisation, une vie politique complexe.



C’est un portrait assez effrayant qui est dessiné de cette Afrique noire divisée non seulement par l’influence de l’Europe, de la traite des noirs et de la colonisation, mais aussi par ses croyances, ses traditions, ses antagonismes internes. Avec pour base l’humain, les êtres qui composent cette Afrique magnifique et tourmentée, sans jamais poser de jugement.



À la fois récit de voyage et essai sociologique, «Ébène » est un livre passionnant écrit par un passionné, amoureux de cette terre riche de sa diversité.



« Ébène" a été élu « Meilleur livre de l’année 2000 » par la rédaction de Lire et a reçu le Prix Tropiques 2002 attribué par le Sénat et le prix Princesse des Asturies en 2003. Des récompenses qui saluent la valeur de ce livre.

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Ebène : Aventures africaines

J'ai adoré ce livre qui nous transporte littéralement dans quelques pays africains. Ce journaliste a très bien su mettre le lecteur dans le contexte choisi. Fait intéressant, il relate également la vie de certains anciens dirigeants dont Idi Amin Dada. Ce livre m'a tellement inspirée que j'ai écrit, en collaboration avec mon conjoint ('Marc Thibault), un ouvrage sur notre expérience africaine de travail sur une période de 20 ans.
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Ebène : Aventures africaines

Journal d'un voyageur pas comme les autres. Ryszard Kapuscinki a parcouru bien des pays du "Sud". Gourmand de gens, il a rencontré les grands, mais plus encore et surtout les locaux. Clin d'œil à l'écrit d'Albert Londres, Ébène revient sur ses expériences africaines. Tanzanie, Rwanda, Cameroun, Ghana... ce continent bouillonnant de rêves, décrit dans ses débuts d'indépendance, de futurs, mais aussi dans sa crudité de vie...



Un vrai coup de coeur !
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Ebène : Aventures africaines

Je ne sais, si je pourrais trouver les mots pour vous donnez mon ressenti à la lecture de ce livre. C'est très fort.

Une plume magnifique, des détails qui peuvent être donner que par une personne ayant vécu sur place et au plus près de la population. En un mot ne passez pas à côté, lisez-le, vous ne verrez plus tous ces pays de la même façon..



Un immense merci à Francine ainsi qu'à Pierre Duchesne III, qui m'ont fait un très beau cadeau, en me donnant l'occasion de lire ce très beau récit.



Ebène - Aventures africaines de Ryszard Kapuscinski, ce journaliste passionné, nous fait un magnifique reportage en sillonnant de nombreux pays africains, vivant au milieu du peuple, dans des conditions très difficiles que peu d'occidentaux auraient acceptées, mais pour lui, le principal était d'être au plus près des malheureux.

"Si l'un des gamins a de quoi manger, il mange. Cela peut-être un morceau de pain ou de biscuit, un bout de manioc ou de banane. Jamais il ne mangera sa portion tout seul, car les enfants partagent tout. Généralement l'aîné du groupe s'efforce de faire un partage équitable, même si chacun ne récupère que des miettes. Le reste de la journée ne sera plus qu'une quête permanente de nourriture. Car ses enfants sont constamment affamés."



Tous ces pays ont connu la colonisation. L'Europe a morcelé l'Afrique, ils ont pris tout ce qu'ils voulaient, vivaient comme des nababs, ils ont pratiqué l'esclavage, résidaient toujours près des ports, des voies praticables. Les hommes et les femmes qui peuplaient ce pays leurs servaient de domestiques tout simplement. Il ne fallait surtout pas se mélanger.

"Le drame de nos civilisations, et de l'Europe notamment, c'est que jadis les premiers contacts avec l'Afrique ont été le privilège d'individus de la pire engeance : voleurs, soldatesque, aventuriers, criminels, trafiquants d'esclaves, etc. Certes, il y a eu des exceptions : des missionnaires honnêtes, des voyageurs passionnés, des chercheurs, mais en général le ton, la norme, le climat ont pendant des siècles été dictés par des canailles, des brigands internationaux peu soucieux de découvrit d'autres cultures, de communiquer avec elles, de les respecter. C'étaient pour la plupart des mercenaires obscurs, butés, rustres, insensibles, analphabètes. La seule chose qui les intéressait, c'était conquérir, piller et massacrer."



Suite à la décolonisation, les africains ont du subir, des dictatures, génocides, coups d'état, la terreur, la faim, le manque d'eau, les maladies, toujours pour les mêmes, l'aide alimentaire ne leur parvenait pas, des chefs de guerre se servaient avant. Une honte.

"Ils attaquent et pillent les femmes et les enfants parce que ceux-ci sont les destinataires de l'aide humanitaire, des sacs de farine et de riz, des paquets de biscuits et des boîtes de lait en poudre en provenance du monde entier."



Il ne faut pas oublier que tout ce peuple couche à même le sol, ils sont aussi piqué par un grand nombre de bestioles, notre reporter en a fait les frais.

"Les murs, le lit, la petite table et le plancher sont noirs. Noirs de cafard. J'ai déjà eu l'occasion de vivre avec toute sorte de vermine, parmi des millions de mouches, de cousins, de blattes et de punaises, au coeur d'innombrables nuées, d'essaims de guêpes, d'araignées, de carabes, de scarabées, de taons, de moustiques et de sauterelles voraces. Mais cette fois-ci, je suis frappé par la dimension des cafards, la taille de chaque insecte séparément. Ces ont des bestioles énormes, larges comme des tortues, sombres, luisantes, velues et moustachues. Leur taille monstrueuse me tétanise."



Je peux vous dire que j'ai été horrifiée, je connais les cafards, mais là ce sont des phénomènes...

Ce livre m'a beaucoup touchée, de voir ces milliers de personnes, dans le dénuement le plus complet, affamées, malades, toujours à la recherche d'ombre, d'eau, de nourriture. La cause de tous ces maux, le pouvoir qui en veut toujours plus au détriment de leurs congénères.

Très triste.

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Ebène : Aventures africaines

Entre chronique politique et carnet de voyage, ce sont des petites pépites qui donnent à voir une Afrique sensible, belle et cruelle (ça date un peu mais la lecture en reste très intéressante). J'ai rarement lu un livre qui décrive aussi bien les enjeux, les espoirs et les écueils de l'Afrique post-coloniale. L'écriture est juste, sensible et très évocatrice : les cinq sens en éveil, nous voilà plongés au plus profond du continent africain !
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Ebène : Aventures africaines

Bien que Ryszard Kapuscinski dans son incipit se garde bien de généraliser sur l’Afrique, il le fait quand même, en en relevant les ressemblances psychiques, au delà des dissemblances évidentes entre quelques pays où il vit.

C’est un monde, ce livre, une Bible, une étude particulièrement aigue, reconnaissante, proche de la réalité des manières de vivre de certains africains.

Un chef d’œuvre pour qui veut comprendre quelques points communs à la partie sub-saharienne de l’Afrique.



1-Le temps n’a pas la même valeur qu’en Europe où l’on court et où on oublie de respirer et de penser ( enfin, certains ) Le temps, en Afrique, « est une catégorie beaucoup plus lâche, ouverte, élastique, subjective, ».C’est l’homme qui invente son temps, avec l’aide des ancêtres toujours présents, et les dieux, aussi.

Le temps est mis en marche par nous les humains, il n’existerait pas si nous n’y pensions pas. ( Saint Augustin l’Africain le disait déjà.)



2- La mobilité : les villages sont parfois en proie aux épidémies, aux invasions, au feu, à la stérilité des sols, d’où la nécessité de migrer par « l’esquive, la dérobade et la ruse »



3-La solitude, une situation intenable pour un africain, qui vit regroupé en famille, protégé par le clan, faisant toujours « partie de ». D’où la difficulté pour les écrivains africains de s’isoler pour écrire. Car survivre, dans des conditions précaires, ne peut se faire qu’en groupe, avec l’aide , de plus, des ancêtres, confondus dans l’imaginaire avec les dieux.



4- La Matrilinéarité : l’enfant appartient aux deux époux, cependant, c’est bien l’ascendance de la femme qui prévaut, entre autres avec le pouvoir de l’oncle maternel, vrai père de l’enfant. (Matrilinéarité n’est pas matri localité, les femmes continuent à aller habiter chez leurs époux, le pouvoir cependant leur appartient.)



5- Les esprits. Ils existent, des sorciers peuvent faire du mal, « manger les âmes », ce que nous européens appelons dépression, tout en étant aussi démunis pour en comprendre les raisons que eux, qui croient aux sorciers sans jamais en avoir vu un.

Les sorciers agissent souvent à distance, et agissent.



6- Les bestioles : « des fissures du plancher et des murs, des chambranles et des coins, dessous les tasseaux et rebords des fenêtres sortent au grand jour des armées de fourmis, de mille-pattes, d’araignées et de scarabées, s’envolent des nuées de mouches et de papillons de nuit. »Et les plus redoutables, les moustiques.



7- Le partage : jamais un enfant ne mangera sans en donner aux autres, la nourriture étant un acte social par excellence. Même si elle est rare, surtout si elle est rare, elle se partage, le jour même. ( d’ailleurs, garder de la nourriture est un acte condamné d’avance, vu le nombre de souris affamées elles aussi)



Journaliste polonais appelé sur les zones de conflits, Kapuscinski ne se contente pas de ces idées générales, il analyse les raisons des guerres, avec une vraie connaissance et vraie compréhension de ce dont il parle. Une appartenance aux civilisations qu’il visite, on pourrait dire de l’intérieur, sans ingénuisme, sans idée préconçue, au plus près de la vérité, relevant les paradoxes ; j’en cite certains :



Le Ghana est le premier pays au Sud du Sahara à obtenir l’indépendance, Nkrumah partisan du panafricanisme, accueille tous les mouvements activistes du continent et des Noirs Américains , avec les dissensions inattendues, ou comment une vraie bonne idée peut capoter( voir Maya Angelou)



Zanzibar a été peuplé de musulmans réfugiés de Chiraz en Iran, qui ont vaincu les Portugais , avant d’être colonie britannique. Puis un agitateur déclare que les Arabes, propriétaires des plantations de girofliers et de cocotiers, et cerveaux de la traite et de la vente des esclaves, -servant souvent de porteurs de l’ivoire, huile de palme, peaux de bêtes sauvages , pierres précieuses, à destination de l’Orient- sont des étrangers, et donc, à combattre. Et l’Indépendance, justement, pour les Arabes, signifie prendre le pouvoir, les Noirs veulent aussi le pouvoir. Problème.



Le Rwanda : ce petit pays est divisé en non pas deux ethnies, deux tribus, deux religions différentes mais en deux castes, comme sous l’ancien Régime en France : les propriétaires de bétail, Tutsis, 14% de la population, et la caste des agriculteurs, les Hutus , 85% de la population. Révolution des uns contre les autres, répression et mise à feu, vengeance , peur de la vengeance, très profondément ancrée chez les africains, dit l’auteur et génocide que l’on connait.



Le Libéria : seul pays d’Afrique de l’Ouest à ne pas avoir connu le colonialisme, d’anciens esclaves venus d’Amérique y accostent. Ils sont affranchis, et, comble du malheur dont Graham Greene parle dans son livre « Voyage sans carte », ils vont se conduire comme des colons. Ils n’ont connu que l’esclavage, puisqu’on sait qu’ être affranchi aux USA , c’est être toujours esclave, alors, ils le recréent , ce statut, à leur avantage sur ces sauvages indigènes.

Malheur, malheur. Suivi d’autres malheurs, coup d’Etat, dictatures, terreur, coup d’Etat.



Et livre absolument génial, historique, attentif aux histoires qu’il transmet, une somme, un chef d’œuvre, qui m’a été offert par Dombrow01, Pierre Duchesne III .





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Mes voyages avec Hérodote

MES VOYAGES AVEC HÉRODOTE de RYSZARD KAPUSCINSKI

Auteur d'un livre que j'avais trouvé très bien fait sur l'Afrique

" Ébène " j'ai eu envie de lie autre chose de lui. Polonais, jeune journaliste il découvre les " histoires " d'Herodote. Son premier voyage va l'emmener en Indes puis en Chine et dans tous ces voyages il va mettre en parallèle les voyages d'Herodote premier " journaliste/ historien " à avoir laissé des écrits aussi denses variés et précis. Questionnements passionnants , on passe de Mao et sa révolution , à Xerxes et ses guerres contre les grecs dans une écriture plaisante. Même si , avec le recul des années, certains des propos peuvent sembler un peu simplistes, c'est un livre de réflexion sur l'histoire qui ne manque pas de charme.
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Mes voyages avec Hérodote

Autoportrait avec historien ?

J'ai adoré ce livre atypique d'un grand journaliste polonais que je ne connaissais pas. Il y a là une très grande richesse car le parcours personnel de cet auteur est passionnant. De la Pologne communiste, directement parachuté en Inde, puis en Chine puis en Afrique en pleine décolonisation, en Algérie....Je retiens une magnifique et bouleversante scène de concert de jazz avec Louis Armstrong à Khartoum...

Maus surtout, l'auteur évoque son compagnonnage sur des décennies avec Hérodote et intercale les passages sur lui et les récits d'Hérodote qui sont parfois proprement stupéfiants. Ce qui est très beau c'est que l'auteur se pose bien plus de questions qu'il n'apporte de réponses sur les récits du grand historien grec et c'est là que l'on glisse vers un aspect passionnant du livre, une réflexion fine sur le métier de journalisme, sur les horreurs des temps et même peut-être (mais l'auteur est trop modeste pour le dire ouvertement) une forme d'autoportrait déguisé en Hérodote.

Pour moi qui (bien que prof d'histoire, j'ai honte) ne suis pas un grand passionné d'histoire antique, le livre m'a vraiment passionné car il met le doigt sur le problème que nous avons avec les sources antiques, c'est que souvent il est bien difficile de démêler le vrai du faux...

Si le sujet peut faire peur (un truc compliqué sur l'histoire Antique), il faut bien au contraire se laisser porter par ce très très beau livre que je ne suis pas prêt d'oublier !
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Ebène : Aventures africaines

Dès 1962, Ryszard Kapuściński (1932-2007) travaille pour l'Agence de presse polonaise en tant que correspondant permanent, notamment en Afrique. "Ebène" est une compilation de ses "aventures africaines", ainsi que le précise le sous-titre de l’ouvrage. D’aventures il y est en effet bien question, puisqu’il y relate entre autres son combat contre un puissant cobra, comment il a cru mourir sous des tirs de roquette lors d’une embuscade, puis pris dans une tempête au large du Zanzibar, ou encore la fois où, tombé en panne en plein milieu du désert en compagnie d’un chauffeur peu bricoleur, il s’est demandé si ce dernier allait partager son unique gourde d’eau…

Ces péripéties plus ou moins anecdotiques animent ses récits -en même temps qu’elles forcent l’admiration-, mais sont surtout représentatives de ce qu’est le journalisme selon Ryszard Kapuściński : une immersion totale au cœur de ses sujets, motivée par la quête d’objectivité, une curiosité profondément constructive, et un immense intérêt pour l’autre. Il vit ainsi la plupart du temps parmi les Africains, installé dans des quartiers misérables et parfois réputés dangereux où ne traîne aucun touriste car son objectif est de faire connaissance avec le peuple, de découvrir son mode de vie, sa culture, ses difficultés. En vrai caméléon, il s’adapte à tout, et en retire une grande richesse grâce aux multiples rencontres que lui permet cette immersion.



Ses textes, en balayant plusieurs décennies de reportages, nous emmènent de la fin des années 50 à l’aube des années 2000 et du Sénégal à l’Ethiopie en passant par l’Erythrée, le Ghana, le Nigéria, l’Ouganda, la Somalie, le Mali, le Liberia…



La diversité et la multiplicité de ses voyages démontrent une évidence qu’il énonce d’emblée : "l’africain" n’existe pas en tant qu’entité à part entière. L’Afrique regroupe des centaines d’ethnies et de clans. La notion d'identité est pour la plupart de ses habitants déterminée par le lien avec la famille, le groupe, et non par le village ou la ville où ils sont nés. C’est ainsi que depuis toujours, c'est une terre à l’intérieur de laquelle le mouvement, la migration sont permanents. On retrouve néanmoins au fil des récits certaines constantes, des caractéristiques liées à un héritage culturel ancestral ou aux impératifs d’un environnement naturel hostile qui impose certain mode de vie : l’importance du clan et de la solidarité dont on doit faire preuve en toutes occasions avec ses membres ; l’omniprésence des ancêtres, même morts ; la hantise de la solitude, considérée comme une malédiction, une condamnation ; la vision à la fois existentielle et surnaturelle portée sur les événements, en se convaincant que les tragédies sont liées à l’intervention de forces occultes. La notion même du temps est déterminée par les contraintes extérieures : c’est l’événement qui, lorsqu’il survient, détermine le moment, et non le contraire. On ne prévoit rien, puisque quand on part, on ne sait jamais quand on arrive, et la question n’est jamais de savoir quand on revient, mais si on revient.



L’auteur dépeint la vie quotidienne au sein des villages ou des villages, avec ses rituels et ses contraintes, les règles qui régentent les relations entre les individus. La faim est omniprésente : trouver de quoi boire, se nourrir -généralement une seule fois par jour-, détermine l’organisation des journées. Ses reportages l’amènent tantôt au cœur de vastes étendues vides où règnent la sécheresse -domaine des Touaregs-, tantôt dans le grouillement des villes où déferle en permanence une population en quête de nourriture et de travail, qui meurt passivement de faim et de soif dans des bidonvilles insalubres, faits de bric et de broc.



Le dénuement, la pauvreté, l’instabilité sociale et politique qu’évoquent les textes imprègnent le lecteur avec force.



"Ebène" est un ouvrage très précieux pour comprendre comment et pourquoi l’Afrique s’est engluée dans ce marasme. Ryszard Kapuściński nous explique de manière limpide mais jamais simpliste les enjeux politiques et démontre leurs imbrications avec un héritage historique dont les conflits actuels tirent souvent leurs origines.



Il a assisté aux remous récents de l’histoire africaine, présent au Ghana en 1958 au moment de la conquête de l'indépendance, en Ethiopie lors de la chute de l’empire d’Hailé Sélassié, au Zanzibar au moment de la révolution qui met fin à 200 ans de domination d’élite arabophone. Il était à Lagos en 1966 lors du putsch militaire qui a conduit à l’assassinat de masse de figures politiques… Des années 1970 aux années 1990, il couvre guerres civiles, révoltes, coups d'état, massacres et famines. Il croise des anonymes et des dictateurs : Amin Dada en Ouganda, Samuel Doe au Liberia… Il tient une conférence sur la genèse du génocide rwandais.



Il lie les événements dont il est le témoin au contexte, présent et passé, qui les a engendrés, en insistant notamment sur les plaies qu’ont laissées l’esclavage et la colonisation sur l’Afrique, qui ne s'est toujours pas relevée de ces calamités. Ce continent, où s’étaient déjà imposés les religions d’occupants -catholiques ou musulmans- qui ont appauvri une culture indigène basée sur l’oralité, a ensuite été vidé par les trafiquants d'esclaves, le condamnant à une vie végétative. Aujourd'hui encore, de nombreux territoires sont dépeuplés, transformés en désert. Mais les conséquences de cet asservissement sont également psychologiques, à l'origine d'un complexe d'infériorité dont les Africains ont du mal à se défaire, ayant empoisonné les relations humaines, semé la haine et la guerre.



"De l'Afrique, l'européen ne voit que l'enveloppe extérieure, une partie, peut-être la moins intéressante et la moins importante. (…) Le drame de nos civilisations, et de l'Europe notamment, c'est que jadis les premiers contacts avec l'Afrique ont été le privilège d'individus de la pire engeance. (…) Les relations humaines ont été fixées d'après le critère le plus primitif : celui de la couleur de peau. Le racisme est devenu une idéologie selon laquelle l'homme définissait sa place dans l'ordre mondial. (…) Le racisme, la haine de l'autre, le mépris et le désir d'extermination trouvent leurs racines dans les relations coloniales en Afrique. C'est là-bas que tout a été inventé et mis en pratique, bien des siècles avant que les systèmes totalitaires ne viennent greffer leurs expériences lugubres et honteuses sur l'Europe du 20e siècle."



Avec la décolonisation, les africains ont cru qu’ils accéderaient à la liberté et à une vie confortable. Or, le terrain sur lequel les indépendances ont pris pied était miné, et ce n'est pas ce qui s'est passé. Dans un contexte de guerre froide, l'est et l'ouest ont ignoré les problèmes et les affaires des pays faibles et dépendants, les gérant seulement selon leurs propres intérêts, avec leur supériorité et leur arrogance ethnocentriques d’occidentaux.



La décolonisation a ravivé d'anciennes relations interethniques, un réseau complexe d'antagonismes et de ressentiments que le pouvoir étranger avait ignoré, allant jusqu’à imposer comme condition à l’indépendance que les ennemis d'hier s’associent. L'espoir des années 50 et 60 des pays enfin libérés du joug colonial a ainsi fait place à des luttes acharnées pour le pouvoir, aux conflits tribaux et ethniques, à la corruption et aux assassinats. À l'image de la frénésie et de la précipitation avec laquelle tout se fait au 20e siècle, il a suffi de quelques jours pour qu’émerge alors une classe gouvernante de nouveaux riches, qui se sont empressés de se remplir les poches. On est passé de l'optimisme à une amère désillusion ainsi qu’à une haine tournée vers les élites régnantes et une atmosphère propice aux révoltes et aux coups d’état, les armes automatiques apportées -avec plus d’empressement que l’électricité ou les infrastructures- par la civilisation moderne décuplant alors le nombre de victimes.



C’est ainsi qu’au cours du XXème siècle, une majorité de noirs a péri de la main de noirs.



A cela s’est ajouté le fléau de la sécheresse qui s'est abattue sur le continent dans les années 70 puis 80, brûlant les champs, décimant le bétail. Des millions d’africains sont morts de faim pendant que des millions d'autres allaient chercher le salut dans les villes où était distribué une aide internationale que l’inaccessibilité des villages empêchait d’arriver jusqu’aux campagnes.



Un bilan post-colonial bien désespérant, d’autant plus que l’Afrique a perdu la plupart de ses intellectuels, partis vivre à l'étranger, amoindrissant encore les opportunités pour ce continent de se développer, et a fortiori de participer aux grandes mutations mondiales.



Pour autant, la note sur laquelle Ryszard Kapuściński clôt son recueil n’est pas désespérée : en donnant la parole à de nouvelles voix, celles justement de certains de ces intellectuels que compte dorénavant l’Afrique, convaincus que l’instruction est l’enjeu primordial de l’Afrique puisqu’elle permettra entre autres de lutter contre un aveuglement ethnique qui ne peut qu’entraver son développement, il sous-entend, même si la route est longue, la possibilité de lendemains meilleurs…



Un ouvrage essentiel, passionnant et humaniste.



"L'Afrique a toujours été perçue, et elle continue de l'être, comme un objet, comme le reflet d'une autre étoile, comme un terrain d'action pour les colonisateurs, les marchands, les missionnaires, les ethnographes toutes sortes d'organisations caritatives. Néanmoins elle existe, en dépit de tout, pour elle-même, en elle-même : continent éternel, fermé et isolé, terre de bananeraies, de petits champs irréguliers de manioc, jungle, Sahara immense, fleuves qui se dessèchent lentement, forêts qui s'éclaircissent, villes malades et monstrueuses, espace chargé d'une électricité nerveuse et violente."


Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Mes voyages avec Hérodote

Un journaliste qui n’a jamais quitté sa Pologne, fermée par le rideau de fer, et il a pour lecture favorite les récits de voyage d’Hérodote. Il rêve de franchir des frontières.

Il atterrit en Inde, il ne parle pas anglais, il est déboussolé dans cet immense pays dont il découvre les codes sans bien comprendre. Il est ensuite envoyé en Chine. Dans ces deux pays, il pressent le risque de se perdre à essayer de les étudier.

Ses reportages l’emmènent ensuite au Congo, en Iran. Il emporte toujours son livre favori qui nourrit sa réflexion.

J’ai préféré les récits de voyage de Ryszard Kapuscinski, je ne partageais pas sa passion pour ceux d’Hérodote. Et puis, au fil des chapitres, il a réussi à m’intéresser à ce vieux voyageur de l’Antiquité.

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Ebène : Aventures africaines

La route de koumassi. C’est le Deuxième livre de cet auteur que je lis. Il a été traduit par Veronique Patte.A quoi ressemble la gare routière d’Accra . A un grand cirque qui fait une brève halte et qui est un festival de musique et de couleurs. Les bus font davantage penser à des pullmans glissants sur des autoroutes. Autobus aux couleurs vives. j’ai lu de lui un livre sur le Négus qui était fort intéressant. L’Africain croit à l’existence de 3 mondes parallèles. Celui qui l’entoure fait de réalité palpable. le monde des ancêtres défunts. Enfin le monde des esprits ou les swahili mangent les petits enfants. cet écrivain dit sèchement les choses qu’il voit. Je deviens plus critique et pourtant j’aime cet auteur. Je suis né dans

ces années de décolonisation et plein d’espoir. Je suis marqué par ce point de vue. Je pense au sommeil, à Vero qui dort mal, a l’émission de télé sur la 5 qui en parle. Je pense aussi a l’assoupissement de l’auteur en camion. On se penche sur moi. Il fait encore nuit.

J’aime les livres papiers qui encombrent la maison.
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