Ceux qui vieillissent dans l’usage et le soin du silence.
Et ce fut au couchant, dans les premiers frissons du soir encombré de viscères, quand, sur les temples frettés d’or et dans les Colisées de vieille fonte ébréchés de lumière, l’esprit sacré s’éveille aux nids d’effraies, parmi l’animation soudaine de l’ample flore pariétale.
Et comme nous courions à la promesse de nos songes, sur un très haut versant de terre rouge chargée d’offrandes et d’aumaille, et comme nous foulions la terre rouge du sacrifice, parée de pampres et d’épices, tel un front de bélier sous les crépines d’or et sous les ganses, nous avons vu monter au loin cette autre face de nos songes : la chose sainte à son étiage, la Mer, étrange, là, et qui veillait sa veille d’Etrangère — inconciliable, et singulière, et à jamais inappariée — la Mer errante prise au piège de son aberration.
L'inertie seule est menaçante.
Dédicace
Midi, ses fauves, ses famines, et l'An de mer à son plus haut sur la table des Eaux...
- Quelles filles noires et sanglantes vont sur les sables violents longeant l'effacement des choses ?
Midi, son peuple, ses lois fortes... L'oiseau plus vaste sur
son erre voit l'homme libre de son ombre, à la limite de son bien.
Mais notre front n'est point sans or. Et victorieuses encore de la nuit sont nos
montures écarlates.
Ainsi les Cavaliers en armes, à bout de Continents, font au bord des falaises le
tour des péninsules.
- Midi, ses forges, son grand ordre... Les promontoires ailés s'ouvrent au loin
leur voie d'écume bleuissante.
Les temples brillent de tout leur sel. Les dieux s'éveillent dans le quartz.
Et l'homme de vigie, là-haut, parmi ses ocres, ses craies fauves, sonne midi le
rouge dans sa corne de fer.
Midi, sa foudre, ses présages ; Midi, ses fauves au forum, et son cri de
pygargue sur les rades désertes !...
- Nous qui mourrons peut-être un jour disons l'homme immortel au foyer de
l'instant.
L'Usurpateur se lève sur sa chaise d'ivoire. L'amant se lave de ses nuits.
Et l'homme au masque d'or se dévêt de son or en l'honneur de la Mer.
(1957)