AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Sarah Jollien-Fardel (207)


C’était immonde. À voir et à ressentir. Si je ne connaissais pas encore la manière dont les traits se métamorphosent sous la puissance de la jouissance, ou du pouvoir sur l’autre, j’ai vu la bestialité d’un homme, un père, le mien. Au-dessus de moi, il avait relâché l’étreinte de ses mains de géant, les balançait partout sur mon corps maigrichon. Ma tête, mon torse, mes bras. Au lieu de me protéger, sidérée, je le regardais les yeux écarquillés à me faire mal aux paupières.
Commenter  J’apprécie          80
Mon père achetait un cochon par an. «C'est pour les truies», il disait
Commenter  J’apprécie          70
Mon corps fait mal et je renie ses douleurs, brûlures d’estomac, ulcère à vingt ans, dos en pagaille. Mon corps n’existe pas, mon corps ne connaît ni la consolation ni la jouissance. Mon corps ne m’appartient pas. Mon cœur a été évidé. Le rêve est dans la tête, l’espoir est dans l’esprit, plus puissant que moi, que tout : partir.
Commenter  J’apprécie          70
J'observe à la dérobée la spécifiée Charlotte.Avec les années de recul ,je comprends ce qui ébahit les autres dans cette bulle hypocrite des apparats: son allure,ses grands airs,ses moues étudiées, sa façon de laisser penser à l'autre qu'il est unique.Encore plus maniérée que dans mon souvenir,le visage déjà marqué par les injections et la chirurgie,alors que nous étions loin des quarante ans.Trop de parfum,trop de grands gestes, trop de théâtre, trop de blablas.Elle méduse les hommes autour d'elle,rit trop fort à leurs blagues, complimente les femmes ,module ses phrases avec des intonations doucereuses.( Page 100).
Commenter  J’apprécie          70
De l'attirance, du désir ou même de mes goûts, je ne savais rien. Rien. Si, à vingt ans j'étais si indifférente au sexe, c'est que j'étais imperméable à tous les plaisirs. Être aux aguets avait accaparé tout mon être. Esprit et corps. Chaque jour. Anticiper les gestes de mon père, avoir peur à chaque instant. Faut l'imaginer ça, tous les jours la trouille, tous les jours.
Commenter  J’apprécie          70
LA MORT DE MON PÈRE ne m’a pas libérée. Au contraire, elle m’a accablée plus encore que les départs d’Emma et de maman. Je n’avais pas de chagrin. Cette absence de tristesse n’était pas une enveloppe bricolée, une fausseté pour tenir à distance les autres ou pour survivre. Je n’éprouvais, sincèrement, aucune peine. Je crois que j’aurais voulu sentir un peloton de larmes dans la gorge, plutôt que cette masse dure dans mon estomac. La haine et la colère restaient comme figées. Je suis devenue rance. Je détestais celle que je devenais. Incapable de pardon, incapable d’avancer ou de me défaire des frusques puantes de mon enfance. Plus je me détestais, plus je me cloîtrais.
Commenter  J’apprécie          60
Il renifle et entre deux hoquets :
« C’était comme ça, à l’époque.
– Quoi ? Putain ! Quoi, c’était comme ça ? T’es cinglé, ou bien ? Non, c’était comme ça par ta faute, parce que tu es une sale merde. Chez mes copines, non, c’était pas comme ça. Je suis pas née au Moyen Âge, bordel de merde ! Alors, va te lamenter ailleurs. Pas chez moi. Crève ! Le plus vite possible. »
Commenter  J’apprécie          60
Qu'est-ce que je retiens ? Si peu. Alors je sais. Je sais que je n'ai jamais trouvé de sens. Je n'ai pas fait semblant, j'ai vécu un jour derrière l'autre sans qu'aucun n'ait pu effacer la peur et l'arracher de mon enfance. Ce n'est pas grand-chose pourtant, une enfance. Mais c'est tout ce qui subsiste pour moi. Je ne sais pas me réfugier ailleurs.
Commenter  J’apprécie          60
Après. Après il faut revivre. Après le décès de ma mère. Après ces heures tendres et étourdissantes, ces heures insensées avec Paul. Continuer. Faire semblant. Mentir. Les sentiments se chicanent entre eux. C’est un manège entre chagrin et l’amour, entre mes valeurs et ma déloyauté. Vivre dans la solitude de la cachoterie et le déchirement des sentiments contraires.
Commenter  J’apprécie          60
À aucun moment,je ne l'ai touché. Enfin le départ.
Marine se penche pour embrasser ses joues.Je reste debout à ses pieds empantouflés.Il me regarde avec une tristesse terrible.Il sait que son heure point.Avec ses croyances,l'enfer l'attend.Ou alors,malin comme il est ,son repentir de chien battu,ses déclarations d'affection pour ma mère ne servent qu'à le laver de ses pêchers. Dieu pardonne .Pas moi.
《 Ciao》 ,je dis.
Il m'attrape le poignet ,il m'importe du regard.Pitié!Pas ça. Il va chialer en plus ,il parle si péniblement, je suis exaspérée d'avance de sa probable litanie.
《 Je sais que tu me déteste. Mais moi je t'aime》-- une pause et puis : 《 Pardon》.
J'ai entendu le hoquet de Marine, derrière mon dos ,qui r avalait des sanglots.Filmé ça aurait filé la chiale à n'importe qui.Je ne suis pas n'importe qui.Je suis la fille de ce monstre je suis la femme qui trompe ,je suis la femme qui a frappé, je suis la femme sèche de l'intérieur, je suis la femme aux entrailles pourries ,je suis la fille qui n'a sauvé ni sa mère ni sa soeur,je suis la fille vide qui regarde son père mourir, je suis la femme qui n'écoute pas sa compagne lui dire :《 Fais la paix》.
Je suis la femme sans rémission.
Je l'ai regardé ,non pas regardé,toisé.Il y avait une pointe d'émotion et de peur dans mon ventre.Je l'ai regardé encore.
Je lui ai craché au visage.( Page 187).
Commenter  J’apprécie          60
Tout à coup,il a un fusil dans les mains .La minute d'avant ,je le jure ,on mangeait des pommes de terre .Presque en silence.Ma soeur jacassait.Comme souvent. Mon père disait《 elle peut pas la boucler,cette gamine》Mais elle continuait ses habillages. Elle était naïve,joyeuse ,un peu sotte,drôle et gentille.Elle apprenait tout avec lenteur à l'école.Elle ne sentait pas lorsque le souffle de mon père changeait, quand son regard annonçait qu'on allait prendre une bonne volée. Elle parlait sans fin.Moi,je vivais sur mes gardes ,je n'étais jamais tranquille ,j'avais la trouille collée au corps en permanence.Je voyais la faiblesse de ma mère ,la stupidité et la cruauté de mon père. Je voyais tout.Et je savais que je n'étais pas de la même trempe qu'eux.Ma faiblesse à moi,c'était l'orgueil .Un orgueil qui m'a tenue vaillante et debout.Il m'a perdue aussi.J'étais une enfant .Je comprenais sans savoir.(Page 11).
Commenter  J’apprécie          60
Je ne suis pas n'importe qui. Je suis la fille de ce monstre, je suis la femme qui trompe, je suis la femme qui a frappé, je suis la femme sèche de l'intérieur, je suis la femme aux entrailles pourries, je suis la fille qui n'a sauvé ni sa mère ni sa sœur, je suis la fille d'un meurtrier, je suis la fille vide qui regarde son père mourir, je suis la femme qui n'écoute pas sa compagne lui dire: «Fais la paix.»
Je suis la femme sans rémission.
Commenter  J’apprécie          60
« Je sais que tu me détestes. Mais moi je t’aime » – une pause et puis : « Pardon. »
J’ai entendu le hoquet de Marine, derrière mon dos, qui ravalait des sanglots. Filmé, ça aurait filé la chiale à n’importe qui. Je ne suis pas n’importe qui. Je suis la fille de ce monstre, je suis la femme qui trompe, je suis la femme qui a frappé, je suis la femme sèche de l’intérieur, je suis la femme aux entrailles pourries, je suis la fille qui n’a sauvé ni sa mère ni sa sœur, je suis la fille d’un meurtrier, je suis la fille vide qui regarde son père mourir, je suis la femme qui n’écoute pas sa compagne lui dire : « Fais la paix. »
Je suis la femme sans rémission.
Je l’ai regardé, non pas regardé, toisé. Il y avait une pointe d’émotion et de peur dans mon ventre. Je l’ai regardé encore.
Je lui ai craché au visage.
Commenter  J’apprécie          50
J’étais verrouillée, sans accès aux plaisirs, sauf à celui de nager, que j’avais découvert loin de mon père. Tout le reste confluait vers lui. Les besoins élémentaires, comme manger ou dormir, recelaient un danger. J’avalais la nourriture tout rond et somnolais sans tranquillité.
Commenter  J’apprécie          50
DE L’ATTIRANCE, DU DÉSIR, ou même de mes goûts, je ne savais rien. Rien. Si, à vingt ans, j’étais si indifférente au sexe, c’est que j’étais imperméable à tous les plaisirs. Être aux aguets avait accaparé tout mon être. Esprit et corps. Chaque jour. Anticiper les gestes de mon père, avoir peur à chaque instant. Faut l’imaginer, ça, tous les jours, la trouille, tous les jours. En rentrant de l’école, se demander s’il sera là, s’il sera bourré, énervé. Avoir le souffle bloqué au moindre bruit ou, pire encore, au son de sa voix, à sa manière de poser ou de jeter ses chaussures, être en apnée à table ou dans la salle de bains, en faisant les devoirs ou en lisant. Mon corps est un rempart – jamais de nonchalance, de la nervosité dans les jambes pour détaler. Mon corps est un radar – détecter la présence de mon père, courber la nuque, mais garder les yeux levés, tête et épaules rentrées, la bosse de bison naîtra vite. Mon corps fait mal et je renie ses douleurs, brûlures d’estomac, ulcère à vingt ans, dos en pagaille. Mon corps n’existe pas, mon corps ne connaît ni la consolation ni la jouissance. Mon corps ne m’appartient pas. Mon cœur a été évidé. Le rêve est dans la tête, l’espoir est dans l’esprit, plus puissant que moi, que tout : partir.
Quand, bien plus tard, j’avais avoué à Marine n’avoir jamais eu la moindre pensée sexuelle pendant mes années adolescentes, elle s’était exclamée :
« Mais, c’est impossible… tout le monde pense au sexe ! C’est la vie, le sexe ! »
Moi, je suis née morte.
Commenter  J’apprécie          50
Tout à coup, il a un fusil dans les mains. La minute d’avant, je le jure, on mangeait des pommes de terre. Presque en silence. Ma sœur jacassait. Comme souvent. Mon père disait “elle ne peut pas la boucler, cette gamine”. Mais elle continuait ses babillages. Elle était naïve, joyeuse, un peu sotte, drôle et gentille. Elle apprenait tout avec lenteur à l’école. Elle ne sentait pas lorsque le souffle de mon père changeait, quand son regard annonçait qu’on allait prendre une bonne volée.
Commenter  J’apprécie          50
- J'ai le coeur tellement sec.
- Tu trouveras ton arrosoir, répond-elle du tac au tac.
Commenter  J’apprécie          50
Mon corps n'existe pas, mon corps ne connaît ni la consolation ni la jouissance. Mon corps ne m'appartient pas. Mon coeur a été évidé. [...]Moi, je suis née morte.
Commenter  J’apprécie          40
Je savais. Pas dans les détails, mais je savais, tout le monde savait pour ton père. Personne n’a rien fait. C’était comme ça. On ne disait rien, on ne se mêlait pas de la vie des autres. On se taisait. Mais, moi, j’avais une responsabilité, j’étais médecin. J’aurais dû vous aider. À cette époque, il n’y avait pas les moyens d’aujourd’hui. Mais j’aurais dû, j’aurais pu trouver une solution.
Commenter  J’apprécie          40
– Jeanne, je suis désolé. Je l’aimais. Chuis tellement malheureux sans elle. »
La colère. La colère immense. Des années de colère qui montent.
« Comment tu oses ? dis-je en haussant le ton à chaque phrase. Comment tu oses ? Tu ne te souviens plus d’avoir jeté maman sur le sol de la cuisine, de t’être assis sur son torse, tes jambes emprisonnaient ses bras et tu la giflais ? Tu ne te souviens plus d’avoir trempé sa tête dans la baignoire, comme quand tu avais noyé le chat d’Emma ? Tu ne te souviens plus d’avoir tapé le visage de ma sœur dans de la purée chaude parce qu’elle parlait, à la fin la purée était rouge et son visage à elle aussi. Tu ne te souviens plus quand maman a lâché un paquet de riz et que tu l’as forcée à ramasser les grains avec sa bouche en la tenant par les cheveux, tellement que tu en avais arraché des poignées ? Tu te rappelles plus tout ça ? Moi, oui ! En boucle, ça tourne. Ah ! et Emma, Emma, EMMA, tu t’en souviens ? Emma que tu violais ? Tu t’en souviens ? Tu t’en souviens, salopard ? »
Commenter  J’apprécie          40



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Sarah Jollien-Fardel (1439)Voir plus

Quiz Voir plus

Pierre de Marivaux ou Alfred de Musset

Il ne faut jurer de rien ?

Pierre de Marivaux
Alfred de Musset

10 questions
5 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}