Selma Lagerlöf

- J'ai possédé le bonheur et je l'a repoussé. Je l'ai repoussé de mes propres mains. Pourquoi ne l'ai-je pas gardé ?
Ah ! Gösta Berling, le plus fort et le plus faible des hommes !

Elle n'avait pas plus de lucidité que n'en a quelqu'un qui rêve.

Il soupira fortement, car c'était une tare lourde et contraignante dans la vie que d'avoir comme lui peur de tous les animaux à quatre pattes. À vrai dire, il n'avait peur que des chèvres, et il n'aurait eu peur ni des chevaux ni des chiens ni des chats si seulement il avait pu être sûr qu'ils n'étaient pas quelque espèce de chèvres transformées. Et, de cela, il n'en était jamais certain.

Il n'est pas bien difficile non plus de remarquer que quelqu'un va bien ou se morfond. Il suffit d'apercevoir une lueur de bonheur quand la personne rentre du travail, ou s'installe devant la cheminée.

Qui ne pensait qu'à la beauté n'attendait pas le printemps.

Personne ne comprenait à quel point elle serait capable de travailler et de peiner pour celui qui l'aimerait. Pour lui, elle serait capable d'endurer chagrin, maladie, mépris et pauvreté. Pour lui, elle serait forte comme une géante et résistante comme une esclave.

Car celui que personne n'aime n'a pas le droit de vivre.

Qui sort droit d'une tombe brasse des pensées douces et lumineuses à l'égard de tout ce qui vit et bouge à la surface de la terre.

Car il en va ainsi que l'on oublie tout quand on a peur.

Quiconque a laissé entrer la crainte en son âme ne peut plus raisonner ainsi. La crainte est chose difficile, et pesante pour celui en qui elle a élu domicile.

Non, n'était vraiment artiste que celui qui savait rendre un être heureux.

Ils servaient toujours l'art, et celui-ci valait qu'on lui reste fidèle jusqu'à la mort. Toujours, toujours des artistes !

Oh comme ils valsaient, comme ils valsaient ! Sautillant à petits pas et tournant serré, ils ne franchissaient pratiquement jamais les limites de la couverture. Leurs visages rayonnaient de satisfaction et de ravissement. Ce qu'on sentait en ce vieux couple, c'était la joie de la jeunesse et le vertige de l'amour.

Les vraies oies sauvages doivent apprendre à se nourrir d'air et à boire du vent.

J'aimerais savoir, poursuivit-il d'une voix encore plus basse, s'il existe quelqu'un qui pourrait m'expliquer pourquoi une telle nostalgie plane ici sur ce plateau d'Alvar. Je l'ai ressentie à chacun des jours de ma vie, et je me dis qu'elle doit s'insinuer dans la poitrine de tous ceux qui vivent ici. Je voudrais savoir si quelqu'un d'autre a compris que toute cette nostalgie vient de ce que l'île entière est un papillon qui regrette ses ailes.

De "mère" Akka (l'oie meneuse) à Poucet (Nils), pages 603 et 604 - note 149

"Si tu as appris des choses utiles en notre compagnie, Poucet, tu dois certainement penser maintenant que les humains ne sont pas les seuls à avoir le droit d'être sur terre, dit solennellement l'oie meneuse. Dis toi que vous possédez un grand pays, et que vous auriez certainement les moyens de nous laisser, à nous autres pauvres animaux, quelques îlots dénudés, quelques lacs peu profonds, tourbières humides, montagnes isolées ou forêts éloignées, où nous pourrions vivre en paix ! Durant toute ma vie j'ai été poursuivie et chassée. Ce serait bon de savoir qu'il existe aussi un refuge pour quelqu'un comme moi."

La note 149 précise : "Akka fait là, un véritable plaidoyer pour les parcs nationaux. Le premier parc protégeant la faune et la flore fut créé aux Etats unis en 1872 (Yellowstone), en Suède, il fallut attendre 1909, et en France, 1963 !

"Les morts se dit-elle, ne se soucient pas qu'on ait les joues rose et les pieds légers. Ils ne demandent qu'un peu de chaleur. Mais les jeunes gens ne pensent point à ces choses-là. Oh non! Et comment les trépassés se protègeraient-ils contre le froid infini de la mort, si le cœur des vieilles gens ne leur venait en aide ?"

La vieille Agneta

Les hommes mettent tant d'ardeur à tout arranger au mieux dans leur monde, répond Georges, que je crois que le jour viendra où la pauvreté, l'alcoolisme et ce genre de fléaux qui raccourcissent la vie n'existeront plus ; mais il n'est pas dit que la tâche du cocher sera moins pénible pour autant.

Maintenant je sais mieux qu'autrefois ce dont les hommes sont capables. Ils vaincront sans nul doute un jour cet ennemi grâce aux armes de la connaissance et de la persévérance. Ils ne s'accorderont pas de repos tant qu'ils ne seront pas débarrassés de toutes ces grandes maladies qui les fauchent avant maturité.