AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Stefan Zweig (6042)


Les pensées d’Irène refaisaient sans cesse le chemin, et chaque fois qu’elle revivait l’horrible moment où elle était tombée sur cette extorqueuse, elle était saisie d’épouvante. Elle levait alors les yeux pour se rassurer, son regard caressait les uns après les autres les objets autour d’elle qui tous avaient une âme : chacun se trouvait là, chargé de souvenir et de signification ; elle retrouvait alors un certain calme. Et la pendule, dont le lent rythme d’acier arpentait le silence, redonnait imperceptiblement à son cœur un peu de son insouciante et imperturbable régularité. 

La peur, Vienne 1910
Traduction de Marie-Dominique Montfièyre
Commenter  J’apprécie          00
Partir, c’était alors la seule chose qu’elle désirait, de tout son être, quitter cet appartement, cet immeuble, fuir l’aventure, retrouver la tranquillité de son univers bourgeois. [C’est à peine si elle osait se regarder dans le miroir, redoutant la suspicion dans son propre regard, mais il lui fallait pourtant vérifier si aucun désordre dans ses vêtements ne trahissait ces moments de passion.]  

La peur, Vienne 1910
Traduction de Marie-Dominique Montfièyre
Commenter  J’apprécie          00
Cette première angoisse, à laquelle se mêlait cependant une brûlante impatience, se dissipait dans l’étreinte passionnée des retrouvailles. Mais ensuite, quand elle s’apprêtait à rentrer chez elle, c’était un frisson différent, une mystérieuse terreur, confusément liée cette fois à l’horreur de la faute commise et à cette illusion absurde que, dans la rue, chaque regard étranger pouvait, en la regardant, deviner d’où elle venait, et adresser un sourire insolent à son désarroi.  

La peur, Vienne 1910
Traduction de Marie-Dominique Montfièyre
Commenter  J’apprécie          10
Lorsque Irène quitta l’appartement de son amant et descendit l’escalier, cette peur irraisonnée s’empara d’elle à nouveau, tout à coup. Une forme noire se mit soudain à tourbillonner devant ses yeux comme une toupie, une affreuse raideur paralysa ses genoux, et elle fut obligée de se retenir très vite à la rampe pour ne pas tomber brutalement en avant. Ce n’était pas la première fois qu’elle osait prendre le risque de venir ici, et cette terreur soudaine ne lui était pas du tout inconnue ; elle avait beau lutter de tout son être, chaque fois qu’elle repartait elle succombait à ces accès de peur absurdes et ridicules.  

La peur, Vienne 1910
Traduction de Marie-Dominique Montfièyre
Commenter  J’apprécie          00
Par moments, la torture mentale devient extrême. Il ne s'agit plus alors uniquement de souffrance : Irène est guettée par la folie. En effet, lorsque la menace perd tout caractère concret pour devenir insaisissable, un climat d' " inquiétante étrangeté " s'installe, qui provoque chez l'héroïne des accès de paranoïa. Ils sont si violents qu'elle semble au bord de la perte d'identité. De tels moments de confusion psychique, dont le lecteur se demande sur quelle issue fatale et imméritée ils vont déboucher, confèrent au récit un caractère particulièrement tragique.

Edition établie, présentée et annotée par Brigitte Vergne-Cain et Gérard Rudent
Commenter  J’apprécie          00
Indépendamment de la qualité de son action, ce récit se présente comme l'analyse minutieuse, la description quasi entomologique de la dégradation qu'un être en proie à l'angoisse subit dans son âme et dans son corps. si, par moments, une "diversion" est provoquée par le souvenir de l'adultère et de la délicieuse transgression qui s'y attache , le lecteur assiste à une progression dans l'horrible souffrance, dont les manifestations -frissons glacés, troubles nerveux, hallucinations visuelles et auditives- sont décrites avec le même souci de précision que l'on trouve, bien sûr, chez les écrivains réalistes (par exemple Maupassant ou Zola), mais aussi dans certaines oeuvres de la même époque, où l'expressionnisme perce derrière le naturalisme, qu'il s'agisse des drames de Sprindberg ou, toutes propositions gardées, de certains tableaux de Spillaert ou de Munch.

Edition établie, présentée et annotée par Brigitte Vergne-Cain et Gérard Rudent
Commenter  J’apprécie          00
Irène, une femme de trente ans qui, pour échapper à l'ennui d'une vie conjugale sans surprise, a noué une liaison avec un jeune pianiste, se trouve soumise à un chantage qui lui offre comme "alternative" l'aveu ou la peur d'être découverte.
Cette situation de départ (l'aveu est impossible, l'absence d'aveu est invivable) crée d'emblée une grande tension. Zweig va l'utiliser pour construire un récit presque exclusivement fondé sur la montée de l'angoisse, donc à la fois très épuré et aussi efficace qu'un roman policier "psychologique". Le lecteur se pose bientôt une question ( "Qu'est-ce qui est réel ? Qu'est-ce qui relève d'un fantasme de l'héroine ? ", question qui révèle son intérêt pour l'intrigue, mais tout autant pour les mécanismes psychiques déclenchées par la peur. Cette subtile imbrication digne d'un film d'Alfred Hitchcock est d'une grande puissance dramatique : tout en participant à l'angoisse d'Irène, le lecteur dispose de certains points de repère qui, à la différence des passages où tout est vu selon le point de vue du personnage, opèrent le retour à la réalité. "

Edition établie, présentée et annotée par Brigitte Vergne-Cain et Gérard Rudent
Commenter  J’apprécie          00
La plupart des gens n'ont qu'une imagination émoussée. Ce qui ne les touche pas directement, en leur enfonçant comme un coin aigu en plein cerveau, n'arrive guère à les émouvoir ; mais si devant leurs yeux, à portée immédiate de leur sensibilité, se produit quelque chose, même de peu d'importance, aussitôt bouillonne en eux une passion démesurée. Alors ils compensent, dans une certaine mesure, leur indifférence coutumière par une véhémence déplacée et exagérée.
Commenter  J’apprécie          10
Je ne crois qu'en toi, je n'aime que toi et ne veux survivre qu'en toi
Commenter  J’apprécie          00
Toi, toi seul tu m'as oubliée, toi, toi seul, tu ne m'as jamais reconnue
Commenter  J’apprécie          00
Personne ne t'a aimé aussi fort, comme une esclave, comme un chien, avec autant de dévouement que cet être que j'étais alors
Commenter  J’apprécie          00
Cette unique seconde suffit à faire une femme de l'adolescente que j'étais, et cette femme fut à toi pour toujours
Commenter  J’apprécie          10
Mais depuis cette seconde, depuis que j'eus senti sur moi ce regard doux et tendre, je fus tout entière à toi
Commenter  J’apprécie          00
Daigne, je t'en supplie, ne pas te fatiguer d'entendre parler de moi pendant un quart d'heure, moi qui, toute une vie, ne me suis pas fatiguée de t'aimer
Commenter  J’apprécie          00
Mais… comme j’arrivais à bord… la nuit… à minuit…mon ami m’accompagnait… à ce moment-là… à ce moment-là… ils étaient justement en train de hisser avec la grue quelque chose… de rectangulaire et noir… son cercueil… entendez-vous : son cercueil… Elle m’avait poursuivi jusqu’ici, comme je la poursuivis… et je devais assister à cette scène en feignant d’être un étranger, car il
était là, son mari… Il accompagne le cercueil jusqu’en Angleterre… peut-être veut-il, là-bas, faire autopsier le corps… il s’est emparé d’elle… À présent, elle lui appartient à nouveau… elle n’est plus à nous… à nous deux… Mais je suis toujours là… jusqu’au dernier moment, je la suivrai… Il ne découvrira jamais rien, il le faut… Je saurai défendre son secret contre toute tentative… contre ce coquin devant qui elle a fui dans la mort… Il n’apprendra rien, rien… Son secret m’appartient, à moi, à moi seul…
Commenter  J’apprécie          130
Dans son discours en forme de portrait (surHugo Von Hofmannsthal), Zweig se souvient d’abord le choc provoqué, pour sa génération, par la découverte du jeune poète, ce « génie ». Ses œuvres apparaissent d’emblée « immortelles ». C’est tout simplement « un miracle », que l’on ne peut comparer, pour la langue allemande, qu’à ceux de Goethe (« une telle ivresse »), de Novalis ou Hölderlin. Et puis la source se tarit, mais la « force poétique » reste et prend d’autres formes. On retrouve en effet la « perfection », la « pureté », le « classicisme », la « noblesse » d’Hofmannsthal dans « sa prose, son théâtre symbolique », puis dans ses adaptations pour la scène d’œuvres étrangères ou du passé et dans ses livrets d’opéra (Elektra, Le Chevalier à la rose ou La Femme sans ombre), tout cela « ne se déplaçait jamais ailleurs que parmi les ordres les plus élevés ». Artiste absolu, et en cela modèle indépassable, porté par un idéal d’élévation sans doute à jamais perdu, Hofmannsthal doit rester, selon Zweig – il parle, rappelons-le, en 1929 –, un exemple à une époque qui lui était devenue étrangère. Celle-ci semble malheureusement préférer l’immédiat à la « tradition sacrée », que Hofmannsthal avait si bien su régénérer. Nul doute que Zweig, qui s’interrogea toute sa vie sur sa vocation d’écrivain (...).

Introduction
Commenter  J’apprécie          60
Rilke avait en effet débuté tôt et avait tâtonné avant d’atteindre la perfection. C’est l’une des raisons qui faisaient de lui le héros de la génération de Zweig. Son art offrait certes un modèle, mais aussi « un encouragement », par la perfectibilité de ses premiers essais. Surtout si on compare Rilke avec l’autre grande référence des lycéens de Vienne, l’autre poète majeur, Hugo von Hofmannsthal, immédiatement « infaillible ». Dans Le Monde d’hier, Zweig revient longuement sur ces deux figures essentielles. Nés à un an seulement d’écart, en 1874 et 1875 (Zweig, lui, rappelons-le, était de 1881), ces deux « phénomènes » étaient deux phares éclairant la jeunesse, réalisant « non pas seulement ses plus hautes ambitions, mais encore une perfection poétique absolue ». 

Introduction
Commenter  J’apprécie          00
Dans cette conférence tardive, donnée en 1936 à Londres, Zweig fait de Rilke un idéal plus que jamais inaccessible, qu’il se console de ne pouvoir jamais atteindre en en décrivant la sainte perfection. Plus on s’éloigne de la mort du poète, survenue à la suite d’une leucémie, à cinquante et un ans seulement, le 30 décembre 1926, plus Zweig voit l’horizon s’obscurcir, et plus il idéalise Rilke. Dans ses Souvenirs testamentaires, il s’interroge : Rilke serait-il encore possible « dans notre époque de turbulence et de désordre universel41 » ? 

Introduction
Commenter  J’apprécie          00
Parmi les « grands personnages » qu’affectionnait Zweig, il faut donner ici une place de choix aux deux plus grands poètes de langue allemande de leur  temps, Rainer Maria Rilke et Hugo von Hofmannsthal. Rilke est né autrichien de l’Empire, à Prague. Il n’a jamais vraiment été viennois, même s’il partage l’idéal cosmopolite de la ville et en incarne le plus haut raffinement. Selon Zweig, qui l’a bien connu, Rilke est un être à part. En lui se confondent l’homme et l’œuvre, « la pure existence poétique » et « la parfaite façon de mener sa vie ». Cette harmonie est « exemplaire », et la « puissance formatrice » de Rilke reste également incomparable. Il est « un modèle », le modèle, tout simplement. Mais Rilke aime « cacher le plus possible sa personne comme sa personnalité » et a horreur « de l’épanchement et des émotions trahies ». Une telle réserve, explique Zweig, n’est chez lui « en aucun cas de l’orgueil ou de l’anxiété »… Rilke, selon Zweig, possède cette capacité unique et particulièrement exigeante de « rendre tout harmonieux autour de lui, d’assourdir la brutalité, de dissoudre la laideur jusqu’à la changer en harmonie ». Autre caractéristique essentielle : la liberté. L’auteur des Cahiers de Malte Laurids Brigge ne se crée aucune attache, n’a « pas d’habitudes, pas d’adresse ». Quand on le rencontrait, se souvient Zweig, c’était toujours « par hasard », « chez un bouquiniste parisien ou dans une assemblée autrichienne »… 

Introduction
Commenter  J’apprécie          00
On ne saurait réduire la vie littéraire autrichienne et viennoise à ces grandes figures que restent pour nous Arthur Schnitzler, Joseph Roth ou Stefan Zweig. Vienne, ville de rêves est l’occasion de découvrir d’autres personnalités importantes bien que ne figurant dans aucune histoire officielle. Ces artistes embrassent différents styles et complètent le tableau d’une époque encore plus riche qu’on ne le pense, aux courants multiples et aux influences les plus diverses. Quoi de commun, en effet, entre Peter Rosegger (1843-1918), poète de la nature, originaire de Styrie, « chéri du peuple », « empli de nostalgie » et Albert Ehrenstein (1886-1950), autre poète, Juif viennois ami de Kokoschka et précurseur de l’expressionnisme, provocateur « fanatique, abrupt, véhément» ? Entre deux écrivains aussi perspicaces et sensibles à la condition humaine que Rudolf Kassner (1873-1959), traducteur et essayiste né en Moravie, porteur d’une « imposante gravité», et Jakob Wassermann (1873-1934), Allemand un temps réfugié à Vienne, romancier « sensoriel et visionnaire », auteur de L’Affaire Maurizius, « dont le talent a ses racines dans la judéité orientale de l’Ancien Testament » ? 
Stefan Zweig brosse leur portrait à l’orée de leur carrière viennoise, preuve, s’il en était besoin, de son rôle de passeur. Car cet infatigable découvreur de talents était toujours dans « une démarche de sympathie » comme l’a bien dit sa biographe Dominique Bona. Il n’aura pas lié de véritable amitié avec ces écrivains mais nous rappelle, par ses articles, que l’art, quel qu’il soit, n’a d’autre finalité que d’unir les hommes. Il nous propose également de découvrir des œuvres qui « ouvrent le cœur, aèrent l’intelligence et pacifient ».

Intoduction
Commenter  J’apprécie          10



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Stefan Zweig Voir plus

Quiz Voir plus

Le joueur d'échec de Zweig

Quel est le nom du champion du monde d'échecs ?

Santovik
Czentovick
Czentovic
Zenovic

9 questions
1884 lecteurs ont répondu
Thème : Le Joueur d'échecs de Stefan ZweigCréer un quiz sur cet auteur

{* *}