Côtoyer Swann et sa femme, Gilberte et même le jeune Marcel sous le dessin et les couleurs de Stéphane Heuet dans A la recherche du temps perdu adaptée en BD est une pépite qu’il faut découvrir pour gouter la modernité du texte de Marcel Proust : l’émotion de retrouver un souvenir, le désespoir de perdre un être aimé ou le flamboiement d’une feuille au soleil, etc, mais surtout un hymne à la vie !
Vingt-quatre ans de travail, huit albums et deux intégrales ( A l’ombre des jeunes filles en fleur – Du côté de Swann ), Stéphane Heuet découvre la bandes dessinées en relisant Proust. Poussé par son ex-femme, il se met à apprécier toute sa complexité après l’avoir pourfendu. Habitué à dessiner pour son métier de marin, il se met alors à traduire cette histoire en images.
A partir d’une documentation phénoménale, Stéphane Heuet raconte qu’il choisit d’abord le texte. Il passe beaucoup de temps à élaborer son scénario. Puis il organise ses bulles. Par exemple, les photographies de Nadar lui permette de donner vie aux parents de Marcel. Il y a aussi tous les tableaux de peintres et pas uniquement les impressionnistes. les travaux sur Haussmann le documentent sur Paris et sa transformation.
Par ailleurs, concernant le mobilier, notamment la chambre du grand hôtel de Cabourg, il choisit « ses meubles ». De recherches en lectures nombreuses, les bulles sont autant de situations éclairées pour revenir au texte. La précision du dessin augmente d’autant le plaisir des mots. On retrouve les textes longs et les détails d’un Blake et Mortimer mais il y a aussi du Tintin, dans cette recherche là.
Dans ce tome, Marcel découvre qu’il n’aime plus Gilberte malgré tous les efforts qu’il a fait pour avoir sa place auprès de ses parents. Courtisant Mme Swann pour se faire aimer de sa fille , il la perd, irrémédiablement ! Le tome s’ouvre sur la sonate de Vintheuil, œuvre imaginaire d’un Proust farceur qui idéalise une musique pour mieux retrouver cette introspection si importante pour lui. Marcel rencontre Bergotte, son écrivain fétiche, mélange d’Anatole France qu’il appréciait beaucoup et de Paul Bourget.
L’œuvre de Proust décrit aussi la fin d’un monde, souvent de façon humoristique. Après l’affaire Dreyfus, mais surtout la guerre de 14, cette ambiance surannée d’une bourgeoisie oisive qui lorgne vers l’aristocratie de la fin du XIXème siècle jusqu’à la Belle Époque sera complétement dépassée.
Cette recherche-là, même les proustiens purs et durs lui trouvent de nombreuses vertus. Et, cette A la recherche du temps perdu, ne peut pas uniquement convaincre que les profs pour leurs élèves. Pour retrouver une œuvre déjà découverte, comme moi, ou l’appréhender pour la première fois, la justesse des traits d’un dessin, les détails du contexte sont autant d’éléments que Stéphane Heuet pose sur le texte qu’il a choisi de Marcel Proust.
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