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Citations de Takiji Kobayashi (75)


Leurs membres pendaient raides et gelés, pareils à de gros radis blancs. Chacun retournait vers sa couche comme un ver à soie à son casier, et se réfugiait dans le silence. Affalés sur le flanc, ils se tenaient aux montants en fer. Le bateau se secouait violemment comme un cheval qui se débat pour se débarrasser d’un taon accroché à son dos.
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Dans la pénombre, des hommes grouillaient comme des porcs. A l'odeur aussi, une odeur à faire vomir, on se serait cru dans une soue.
"Ce que ça pue !
-Ben, c'est notre odeur, voyons ! Qu'est-ce que tu crois ! C'est l'odeur de la charogne !"
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Les "lois sur le maintien de l'ordre", visant à réprimer l'agitation ouvrière, sont adoptées en 1900, et seront renforcées en 1925 par la "loi sur le maintien de la paix intérieure", qui vise explicitement à s'opposer aux socialistes, communistes et anarchistes.
P. 166 & 167 (commentaires de la traductrice)
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L'éloignement des villes était, là aussi, un prétexte bien commode pour justifier les pires atrocités. Dans les chariots de charbon, on retrouvait parfois des pouces ou des auriculaires amalgamés au minerai. Mais les femmes et les enfants qui travaillaient là ne s'émouvaient pas pour si peu. On les y avait habitués. Le visage éteint, ils poussaient leur chargement jusqu'au point de stockage. - Ce charbon servait ensuite à alimenter de gigantesques machines qui produisaient les "profits" des capitalistes.
P. 78
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A présent, les neuf syndicalistes ne se comptaient plus individuellement : ils étaient un tank. Les bras fermement liés les uns aux autres, les épaules soudées les unes aux autres, ils fixaient la même direction, d'un regard sombre mais acéré - comme s'ils avançaient vers un seul et même objectif - comme s'ils faisaient marche vers la "révolution".
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- Paraît que ta grande sœur elle va à Sapporo, Yû ?
Quittant la protection de l’auvent pour la pluie de la route, l’un d’eux s’était désapé jusqu’au ventre pour se soulager.
« Qui qu’a dit ça ?
- Tout le monde. Qu’elle va faire la cocotte !
- Quoi, la cocotte !
- La cocotte ? Ah ouais ? » Tous s’esclaffèrent.
« Au crépuscule, le jour tombe... » Au loin se faisaient entendre les voix de trois ou quatre petites filles chantant à tue-tête.
Ouiiiiiiiiiin ! Yûzô éclata soudain en sanglots.
« Allez, arrête de pleurer, espèce de congre. »
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Pour ce qui est de l'arrestation de Mûto, l'inspecteur en second a affirmé sans détour : "Comme vous le dites très bien vous-mêmes, la police est au service des capitalistes. Vous feriez mieux d'en prendre votre parti."
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Anticipant à la fois une "opération gouvernementale d'achat de riz" et une mauvaise récolte, les prix s'étaient "envolés". Mais des bienfaits qui en découlaient, rien justement ne découlait jusqu'aux paysans eux-mêmes. A l'heure actuelle, qui donc avait la main sur les stocks de riz ? Sûrement pas les paysans. Ils avaient vendu les tout derniers grains en novembre ou décembre, quand le riz est le moins cher. Chaque fermier était conscient que de cette "opération d'achat", il ne verrait même pas la queue.
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"Il faut les récompenser - flatter leur sensibilité, les faire travailler par plaisir, sinon, ça risque de devenir n'importe quoi, avait suggéré Yoshida.
- On va dépenser un peu, leur sortir de beaux diplômes dorés, leur préparer des cérémonies ennuyeuses, très solennelles, tu verras que tous ces culs-terreux de paysans feront très vite profil bas".
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La terre dont, selon le secrétaire d'état, "une fois défrichés 60%, toute la superficie vous est attribuée", se situait à quatre vingt ou cent vingt kilomètre de la gare. Quelque céréale qu'on y fasse pousser, une fois acquittés les frais de transport, elle ne rapportait plus assez au prix du marché. De plus quand venait l'hiver dans ce coin retiré de Hokkaidô, vous vous retrouviez plus démuni que Robinson. Sans pouvoir trouver de quoi se nourrir, ni mettre en réserve la part d'un hiver, des familles entières étaient retrouvées au printemps, mortes de faim, ensevelies sous la neige. Les meilleurs terres d'Ishikari, Kamikawa et Sorachi, le secrétariat d'Etat les vendait par hectares à des familles nobles ou fortunées, pour presque rien, au titre du "financement du défrichement". Aux nouveaux arrivants et paysans immigrés, on réservait les terres du côté de Kushino ou Nemuro, aux tourbières nombreuses et dont, les eût-on données, personne n'aurait voulu.
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Les palans de ce rafiot étaient aussi solides que des genoux nécrosés. De temps en temps, l'une des poulies se bloquait, tandis que l'autre continuait à laisser filer le câble. La chaloupe victime de ce palan éclopé se retrouvait alors pendue en oblique, comme un hareng fumé. Dans ce genre de cas, les pêcheurs postés en dessous couraient un assez grand risque s'ils ne réagissaient pas assez vite. - C'est précisément ce qui arriva ce matin-là. «Ah ! Attention !» cria quelqu'un. La chaloupe lui tomba en plein sur le crâne, enfonçant sa tête dans le tronc comme un pieu en terre.
Ses compagnons le portèrent à l'infirmerie. Parmi eux, il y avait certains jeunes pêcheurs qui voulaient en découdre avec "le salaud 'intendant". Ils étaient bien décidés à demander au médecin un certificat médical car ils étaient certains que l'intendant, qui n'était qu'une vipère déguisée en humain, chercherait à prouver qu'ils étaient dans leur tort. Un certificat médical serait alors précieux pour contrer ses arguments. Et puis, le médecin s'était toujours montré compréhensif.
Une fois, il avait même avoué son étonnement. "Sur ce bateau, il y a beaucoup moins de blessures et de maladies dues au travail proprement dit que de complications liées à des coups ou à des mauvais traitements". Il avait même ajouté qu'il faudrait qu'il note scrupuleusement tout cela sur son registre pour en conserver la preuve. Il était donc plutôt bienveillant envers les pêcheurs et les ouvriers qui le consultaient.
Cependant, au mot de certificat, il eut l'air de tomber des nues. Il répondit en bredouillant :
" Ah... Un certificat médical... C'est à dire que... Euh...
- Ecrivez tout simplement ce que vous constatez".
La tension se faisait palpable.
" C'est que sur ce bateau, on n'a pas le droit de délivrer des certificats médicaux. Je sais, ça peut sembler arbitraire... C'est pour parer aux conséquences."
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«Moi aussi, j'ai été stupéfait d'apprendre ça, mais on m'a raconté qu'en fait, toutes les guerres menées par le Japon, si on gratte un peu pour voir ce qui se cache au fond du fond, eh bien dans tous les cas, elles ont toujours été décidées par deux ou trois gros riches (mais alors des très très riches), et pour le prétexte ils trouvent toujours quelque chose. Ces types-là, quand ils guignent "une zone prometteuse", ils font des pieds et des mains pour l'avoir. - On est mal barrés.»
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Accrochée au mur à côté de la table, il y avait une affichette couverte de caractères tracés d'une main maladroite :

> Ceux qui se plaignent de la nourriture ne sont pas bien respectables.
> Ne gâchons pas la nourriture. Chaque grain de riz est le fruit du sang et de la sueur.
> Sachons endurer les contraintes et les souffrances.

Dans le blanc sous le texte, il y avait des graffitis obscènes, comme ceux des toilettes communes.
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Le lendemain matin, quand les ouvriers descendirent à l'usine, ils découvrirent l'étudiant de la veille [NB : qui s'était écroulé de fièvre et d'épuisement en plein labeur] ficelé au montant d'une machine. Sa tête pendait sur sa poitrine dans la posture d'un poulet étranglé, une grosse vertèbre saillant en haut de sa colonne vertébrale. En guise de bavoir, il avait une pancarte en carton où l'on reconnaissait clairement l'écriture de l'intendant.

«CE TRAÎTRE EST PUNI POUR CAUSE DE MALADIE SIMULÉE. INTERDICTION FORMELLE DE LE DÉTACHER.»
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L'intendant pris la parole : "Je ne serai pas long." Il avait une stature imposante de chef de chantier. Un pied posé sur le rebord d'une couchette, il triturait l'intérieur de sa bouche avec un cure-dents, et de temps en temps il en extirpait ce qui s'y trouvait coincé.
"Comme on a déjà dû vous l'expliquer, vous êtes embarqué sur ce bateau-usine pour des raisons qui dépassent de loin les profits d'une entreprise donnée, n'est-ce pas, c'est une affaire de la plus haute importance pour les relations internationales... Il s'agit de montrer qui est le plus fort : le peuple du Grand Empire nippon, ou les Russkofs. C'est un duel entre eux et nous ! Et s'il arrivait que, - je dis bien "si" parce que évidemment c'est impossible -, si le Japon perdait, alors vous, fils de l'Empire, vous vous retrouveriez les couilles ballantes et n'auriez plus qu'à vous tailler le ventre avant d'aller finir au fond de la mer du Kamtchatka. On est moins grands qu'eux, mais c'est pas une excuse pour plier devant ces lourdauds de Russkofs."
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Exténués par les cadences infernales, les hommes avaient de plus en plus de mal à se lever le matin. Ce jour-là, l'intendant parcourait le dortoir en tapant de toutes ses forces sur un bidon d'essence vide, tout près des oreilles des dormeurs, jusqu'à ce qu'ils ouvrent les yeux et se lèvent. Un homme qui soufrait du béribéri leva un peu la tête et dit quelque chose. Mais l'intendant fit semblant de ne pas le voir et continua à taper sur son bidon. L'homme, dont la voix était couverte par le tintamarre, ouvrait et fermait la bouche comme un poisson rouge qui gobe de l'air à la surface de l'eau dans son aquarium. Après avoir tapé pendant un bon moment, l'intendant se mit à tonitruer : «Qu'est-ce qui vous arrive ? Je vais vous faire lever de gré ou de force, moi ! N'oubliez pas que le travail, c'est la patrie ! C'est comme la guerre ! Soyez prêts à donner votre vie ! Au travail, bandes d'imbéciles !»
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Un étudiant s'était assis un instant derrière les caisses, à l'abri du vent, pour faire une pause. L'ancien mineur apparut au détour d'un angle et vint le rejoindre en soufflant dans ses mains.
«On risque not'peau, pas vrai ?!»
L'étudiant fut estomaqué par ce cri du cœur.
«Bien vrai, c'est comme à la mine, ici ! Toujours vivre en s'disant qu'on va crever. J'avais la trouille du grisou, mais les vagues, ça fout la trouille aussi.»
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Pour être attribuées, les « aides au défrichement » d’environ trois cents yens étaient bien attribuées. Mais une fois déduits les frais d’installation pour toute une famille, il n’en restait plus que pour une année. En fin de compte, il fallait contracter un « prêt à taux réduit », et se débrouiller tant bien que mal. Quand, après cinq, voire six années de travail, ils avaient réussi à en faire un champ ou une rizière, les paysans se trouvaient pieds et poings liés, des dettes jusqu’au cou.
Quant aux propriétaires qui avaient concédé ces milliers d’hectares, alors qu’ils attiraient les fermiers par la promesse de leur donner gratuitement la moitié de ces terres le jour même où le défrichement en serait achevé, ils rompaient d’un coup cette promesse, ou ne la tenaient simplement pas.
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« Si, dans les départements de Naichi, il est très difficile de recevoir de nouvelles terres, non seulement en propriété, mais également en fermage, vous installer à Hokkaidô vous permet d’obtenir une parcelle déterminée. Quand, dans un délai de cinq ans, vous en avez défriché au moins 60 %, ce terrain vous est attribué gratuitement, de sorte que vous devenez immédiatement propriétaire de cinq à dix hectares de terre. Pour ceux qui sont en fonds, il est également possible d’acquérir en concession des terres non défrichées à raison de vingt hectares pour à peine huit cents yens. C’est pourquoi qui sait être travailleur n(a en général aucune difficulté pour vivre après son arrivée… » (Guide de l’immigrant à Hokkaidô, secrétariat d’État à Hokkaidô, bureau du défrichement et de la colonisation)
« …après quelques années et l’achèvement des travaux de défrichement, céréales et légumes poussent en abondance, la vie se fait moins dure, votre cabane de paille est remplacée par une maison digne de ce nom, les arbres fruitiers du jardin commencent à porter leurs fruits, votre joie ne saurait être plus grande. Cette terre est transmise à vos enfants, puis à vos petits-enfants, qui peuvent se dire fièrement : ce sont mes aïeux qui les premiers ont cultivé ce champ, ce sont mes aïeux qui ont planté cet arbre, et nous avons le devoir de perpétuer leur effort. » (Directions pour le défrichement et la culture des terres, secrétariat d’État à Hokkaidô, bureau du défrichement et de la colonisation)
(…)
Cela faisait près de trente ans que le village de S. avait été défriché. Et alors, les paysans de S. étaient-ils donc tous « propriétaires » de cinq à dix hectares de terre ? Et leurs cabanes de paille avaient-elles été remplacées par des maisons dignes de ce nom ?
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Gardez en tête que s'il y avait pas les marins et les machinistes, il bougeait pas ce bateau. Si les travailleurs ne trimaient pas, pas un sou entrerait dans les poches du patron.
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