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Citations de Takiji Kobayashi (68)


"Que valent un ou deux gars de votre espèce ? Mais vous avisez pas de perdre ne serait-ce qu'une chaloupe ! Hors de question !" Les propos de l'intendant avaient le mérite d'être sans ambiguïté...
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"C’est parti ! En route pour l’enfer !"
 Accoudés en bastingage, les deux pêcheurs contemplaient Hakodate. La ville embrassait la mer de son corps d’escargot s’étirant hors de sa coquille. L’un des deux cracha une cigarette fumée jusqu’à la base des doigts, qui fit plusieurs pirouettes en tombant le long de la haute coque du navire. L’homme puait l’alcool de la tête aux pieds.
Un vapeur laissait surnager un large pan de son ventre rouge rebondi. Un autre, en cours de chargement, était affalé sur le côté, comme si du fond de la mer quelque chose l’avait brusquement agrippé par la manche. Une grosse cheminée jaune. Un phare balise formant un énorme grelot. Des canots à vapeur semblables à de grosses punaises de lit tissaient des fils entre les navires dans un incessant va-et-vient. De la suie figée, des morceaux de pain, des fruits pourris flottaient, couvrant les vagues d’une curieuse étoffe. Au gré du vent, la fumée était rabattue vers la surface de l’eau et renvoyait l’odeur âcre du charbon. De temps à autre, le cliquetis des treuils d'autres bateaux, portés par les vagues, leur semblait tout proche.
Juste devant le Hakkô-maru, le bateau-usine sur lequel ils étaient embarqués, il y avait un voilier à la peinture écaillée. La chaîne de l'ancre était descendue et pendait de la proue, de cet endroit qui ressemble aux naseaux d'un bœuf. Sur le pont, deux étrangers, la pipe au bec, allaient et venaient comme des automates. Un bateau russe, apparemment. Certainement un patrouilleur chargé d'observer les bateaux-usines japonais partant pour la pêche aux crabe.
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Pour leurs employeurs, mettre ensemble ces hommes venus d’horizons si divers était vraiment une bonne aubaine, car cela évitait trop de solidarité dans l’équipage.
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L'entreprise de pêche prenait d'infinies précautions dans le recrutement des hommes. Ils demandaient aux maires des villages et aux chefs locaux de la police de leur recommander des "jeunes gens modèles". Afin que tout soit irréprochable, et que rien ne vienne gripper l'engrenage, ils sélectionnaient des travailleurs dociles qui ne s'intéressaient pas aux syndicats. Mais finalement le "travail" tel qu'il était organisé à bord des bateaux-usines aboutissait au résultat inverse de celui qu'ils recherchaient. Les conditions de travail intolérables poussaient irrémédiablement les travailleurs à se rassembler - à se syndiquer.
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Juste au-dessus de leur tête, le hurlement de la sirène les interrompit. Ils levèrent les yeux vers l’énorme cheminée en surplomb au-dessus d’eux, large comme un baquet à bain, qui par un effet d’optique leur semblait chanceler. La sirène émanait d’un sifflet en forme de casquette allemande, saillant du ventre de la cheminée. Que son cri était funeste au milieu de la furie des bourrasques ! – Les chaloupes sorties au loin pour la pêche devait se fier à son signal ininterrompu pendant qu’elles luttaient contre la tempête pour retrouver le navire.

Chapitre III
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Un étudiant attiré depuis Tôkyô par les recruteurs grommelait que ce n’était pas ce qu’il avait imaginé.
« Rien que des boniments ! Ils avaient dit que je pourrais dormir seul.
- Eh bien tu vois, c’était vrai : on dort ‘seuls’. En bons célibataires ! »
Ils étaient dix-sept ou dix-huit ex-étudiants. On leur avait avancé soixante yens au départ, mais une fois payé le billet de train, les frais de pension, le couchage, et bien sûr la commission du recruteur, ils s’étaient retrouvés endettés (!) de sept ou huit yens chacun avant même d’avoir foulé le pont du bateau.

Chapitre III
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Les bateaux pour la pêche au crabe, tous partis en même temps de Hakodate, s’étaient peu à peu éloignés les uns des autres. Mais lorsque le navire montait brusquement sur une crête, on pouvait apercevoir au loin deux mâts qui se balançaient, semblables aux deux bras levés d’un noyé. […]
Le bateau secouait violemment comme un cheval qui se débat pour se débarrasser d’un taon accroché à son dos.

Chapitre II
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" Là-bas, on surnommait "pieuvre" les travailleurs. Les pieuvres, c'est bien connu, sont capable de manger un de leurs propre tentacules pour survivre. Comment trouver une image plus exacte ! Dans ces contrées, chacun pouvait sans vergogne se livrer à l'exploitation la plus "primitive", et s'en mettre ainsi plein les poches." p.77
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Le navire avait maintenant le nez poudré, étincelant de cristaux de givre. p39
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Les vagues se dressaient en milliers de petits triangles, tirées vers le haut par des foulards d'écume. p 35
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La « tanière » des pêcheurs était éclairée de lampes en forme d'églantines. À cause du tabac et de la promiscuité, l'air était trouble et empestait ; le dortoir tout entier était un immense « merdier ». Dans les couchettes, des êtres humains fourmillaient comme des asticots. — L’intendant des pêches descendit par l’écoutille, suivi par le capitaine, le chef d’usine et le contremaître.
Le sol était jonché d’immondices : épluchures de pommes et de bananes, souliers de toile, biscuits avec des grains de riz collés dessus. C'était comme si un égout s’était déversé là. Avec un coup d’œil méprisant, l'intendant cracha par terre.
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Afin que tout soit irréprochable et que rien ne vienne gripper l’engrenage, ils sélectionnaient des travailleurs dociles qui ne s’intéressaient pas aux syndicats. Mais finalement le « travail » tel qu’il était organisé à bord des bateaux-usines aboutissait au résultat inverse de celui qu’ils recherchaient. Les conditions de travail intolérables poussaient irrémédiablement les travailleurs à se rassembler, à se syndiquer. Les capitalistes tout « irréprochables » qu’ils fussent, n’avaient malheureusement pour eux pas assez de discernement pour comprendre ce paradoxe. C’est presque comique, envisagé de ce point de vue. S’ils avaient voulu faire exprès de mettre ensemble des travailleurs non encore syndiqués et les pires soûlards pour leur donner le mode d’emploi du rassemblement, ils ne s’y seraient pas pris autrement.
(p. 98-99, Chapitre 8).
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Le plus gros de la tempête était passé.
Cependant, quand le navire plongeait la proue dans une grosse vague, celle-ci courait sur le pont avant comme en territoire conquis. Après un jour et une nuit de combats, le navire, tel un grand blessé, poursuivait sa route en traînant la jambe. Le mât tranchait dans une fumée de nuages si bas qu’on aurait pu les toucher de la main. La pluie glacée ne cessait pas. Quand les vagues gonflaient de toutes parts, on pouvait très distinctement voir la pluie en longs faisceaux frapper la mer. Plus désagréable qu’une averse imprévue en pleine forêt vierge.
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« Que valent un ou deux gars de votre espèce ? Mais vous avisez pas de perdre ne serait-ce qu’une chaloupe ! Hors de question ! » Les propos de l’intendant avaient le mérite d’être sans ambiguïté...
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Comme quand on met des fèves à griller dans une casserole : ceux qui étaient de trop étaient projetés dans tous les sens, bien obligés de quitter leur terre pour échouer en ville.
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C'étaient des hommes qui autrefois avaient travaillé dans les champs avant le lever du jour, mais comme leur labeur ne suffisait pas à nourrir tout le monde, ils avaient été forcés de s'en aller. Au pays, seul restait le fils aîné - et même comme ça, il n'avait pas de quoi manger; on envoyait les filles à l'usine, le deuxième et le troisième fils travailler un peu n'importe où. Comme quand on met des fèves à griller dans une casserole: ceux qui étaient de trop étaient projetés dans tous les sens, bien obligés de quitter leur terre pour échouer en ville.
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C’est pas dans leur intérêt de nous tuer. Leur but, leur vrai but, c’est de nous faire turbiner, de nous pomper la sueur, de nous pressurer, mais alors jusqu’à la moelle, pour obtenir des profits faramineux.
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Même le dernier “imbécile”, même le dernier des “poivrots” avait encore assez de jugement pour voir que ce n’était plus une vie, qu’on était en train de les faire crever à petit feu (et d’ailleurs la mort de l’un d’entre eux en était la preuve éclatante).
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Que tous ceux qui ne veulent pas se faire crever nous rejoignent !
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Même morts, on est pas bien lotis, nous autres…
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