La partie débutait à dix-huit heures précises, le samedi, au moment ou l'étau de chaleur qui toute le journée pesait sur les respirations commençait à se desserrer.
Je ne vis qu'elle, tante Câline. Serrée dans un pantalon jaune canari comme je n'en avais jamais vu, un chemisier blanc échancré sans manches, elle grimpait les marches du perron de granit, embrassait mes grands-parents venus l'accueillir. La radio était restée allumée, et les Beatles achevaient "She Loves You" dans l'indifférence générale.
En riant, elle commença à raconter son pique-nique sous l'eau, exhibant comme preuve de la débâcle ses longs cheveux blonds et frisés aplatis par l'orage. " Ils sont tout écrasés, je suis affreuse ", minaudait-elle, les joues en feu.
Elle était sublime.
Matthew pensait que pour faire la différence avec nos concurrents, les connaissances artistiques n’étaient pas suffisantes. Il affirmait qu’il y avait des centaines de types sur la planète capables d’acheter et de vendre des tableaux, de reconnaître un vrai d’un faux. En revanche, aucun n’était assez compétent pour prévoir l’évolution du marché. Matthew prétendait toujours que l’économie était tout à fait imprévisible. « N’écoute jamais les conseils de ces crétins de Wall Street, répétait-il souvent. Ils ne racontent que des salades. Ne fais confiance ni aux prix Nobel, ni aux éditorialistes du Wall Street Journal, ni à ces arnaqueurs des banques d’affaires. Il y en aura toujours un pour t’expliquer le contraire de ce que vient d’affirmer l’autre. Et quand ils t’auront bien planté, ils auront toujours l’aplomb de venir t’expliquer que ça n’aurait jamais dû se passer comme ça et pourquoi ça s’est pourtant passé comme ça. Et ensuite, avec la même assurance, ils te proposeront un placement encore plus foireux que le
précédent. » [p.145]
Quand le temps sera venu, je te dirai la vérité –enfin ce que tu dois savoir si tu veux exercer ce métier après moi. Jusqu’ici, je t’ai enseigné a théorie. Maintenant, tu découvres la pratique. Je n’avais pas prévu que tu apprennes aussi vite le vrai visage de notre profession, mais après tout, ce n’est peut-être pas plus mal. Le marchand est comme ‘artiste, il doit se méfier des apparences. Le beau n’est pas la reproduction du vrai. Il n’y a rien de pus ennuyeux qu’une toile qui prétend rendre compte fidèlement d’un paysage. C’est ce que les impressionnistes avaient compris. [p.129]
J'avais une nurse indienne sur la côte Ouest. Quand il y avait un orage, elle venait près de mon lit pour me rassurer. Elle me racontait la légende de l'oiseau-tonnerre.C'est le maître des orages. La plupart du temps il vit, paisible, caché dans son énorme nuage noir au sommet de la plus haute des montagnes. Mais parfois, une faim terrible le saisit. Alors il sort de sa retraite et se précipite vers l'océan pour y dévorer une baleine entière. En survolant la terre, le battement de ses ailes immenses produit le grondement du tonnerre ; la foudre jaillit des éclairs de ses yeux. Et puis quand il est rassasié, oiseau-tonnerre rentre sur son nuage noir et tout se calme à nouveau.
Je l’ai chargée de la série sur les rochers de Bibémus. Elle prépare les notices. Vous savez les Français sont agaçants souvent. Mais quand ils sont bons, ils sont incomparables. [p. 22]
Il avait réalisé que bien s'habiller était une façon de se faire accepter dans le cercle des puissants, un signal de reconnaissance.
Et puis, un jour, je me suis aperçue que je ne l’aimais plus, enfin pas assez… Je ne pouvais plus le supporter, ni sa conversation, ni ses caresses. Je n’avais rien à lui reprocher de particulier, il était toujours gentil et présent, seulement voilà, il m’exaspérait. (pp. 42)
Des files d'attente se formaient devant les banques qui distribuaient la prime de 100 Deutschemark allouée par le gouvernement ouest-allemand à tous les citoyens de l'Est qui la réclamaient, enfants compris (Points - pp.99)
Le problème n'était pas seulement qu'il s'appelât Deniraud. C'était aussi le prénom, Robert.