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Citations de Tom Wolfe (267)


Le meilleur roman de Wolfe
"Un Homme, Un Vrai" est un roman qui peut rebuter par sa longueur (comme les deux autres romans de Wolfe, à savoir "Le Bûcher des vanités" et "Moi, Charlotte Simmons", il fait 1000 pages), mais c'est indéniablement le meilleur roman de l'auteur, une satire féroce...ment drôle du monde des affaires, du Sud des USA (le Sud bien profond, avec racisme et machisme sous-jacents), des magouilles politiques et juridiques. Personnages attachants ou pas, mais toujours remarquables. Un chef d'oeuvre !
Les deux autres romans de Wolfe (et ses documents, ses livres-reportages) sont également parfaits.
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D'une voix parfaitement "normale", le coach a déclaré : "Echangez vos maillots, vous deux." Toutes les implications de cet ordre apparemment anodin sont apparues à Jojo en un éclair destructeur, paralysant : il était rétrogradé dans la seconde équipe ! Six jours avant le premier match de la saison, qui aurait lieu à Dupont, en plus ! Certes contre un faire-valoir, Cincinnati, mais ce serait la rencontre d'ouverture, il y aurait tout le monde ! Etudiants, anciens élèves, bienfaiteurs, la presse, les dénicheurs de talents envoyés par la Ligue ! Ils allaient tous voir Jojo relégué sur le banc ! Quelle équipe professionnelle pourrait s'intéresser à une star déchue ? Ceux-là mêmes qui l'avaient tenu pour un dieu, étudiants, fans, accros aux chaînes sportives, tous ces lèche-culs qui avaient voulu un petit bout de "Go, go, Jojo", un sourire, un geste de la main, un autographe ou simplement la chance de respirer le même air que lui, tous allaient détourner leur regard de lui ! Jojo Johanssen allait devenir un objet de pitié, à condition que quiconque s'intéresse encore à lui...
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L'une des rares libertés que nous avons en tant qu'êtres humains, la liberté qu'on ne peut pas nous ôter, est celle de consentir à ce qui est vrai et de dénier ce qui est faux. Rien de ce que vous pouvez me donner ne vaut d'abandonner cette liberté.
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Devant le tout Miami se dressait un gigantesque rectangle de calcaire gravé d'immenses lettres majuscules indiquant THE KOROLIOV MUSEUM OF ART. Le tout Miami se leva comme un seul homme dans un assourdissant paroxysme d'applaudissements. Le conseil d'administration avait rebaptisé le musée en son honneur. (..)
Ed ne s'était jamais remis de la vision délirante de ces lettres géantes gravées si profondément - pour l'éternité ! - dans une tablette de pierre de dix tonnes. Explicitement, elles rendaient hommage à Koroliov, ces lettres qui traverseraient les siècles, mais implicitement, elles rendaient hommage au grand héraut et défenseur de Koroliov - nul autre que Moi, Edward T. Topping IV.
:::::: Et ce gamin monté en graine, là, juste devant moi, vient me dire qu'en réalité, je me suis laissé abuser, duper, rouler dans la farine, entuber de la manière la plus humiliante, comme le premier débile venu :::::: Cette idée le rendait fou de rage.
John Smith se demanda sans doute pourquoi la voix d'Ed était aussi fumasse quand il fit la grimace, lui jeta un regard noir et lança : "Très bien, la plaisanterie a assez duré. N'importe qui peut accuser n'importe qui de n'importe quoi. Un peu de sérieux, je vous prie..."
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Le grand-père de Nestor ne se voyait pas passer toute sa vie à couper la canne, à nettoyer les étables et à pousser la charrue. Il avait d'autres ambitions. Il voulait Vivre à la Ville. Il alla donc s'installer avec fils et épouse à La Havane. Plus question d'être guajiro ! Prolétaire à part entière ! Enfin libre, le nouveau prole trouva un emploi d'inspecteur dans le service de filtrage des eaux usées de la station hydraulique de Malecon. "Inspecteur" voulait dire qu'il devait enfiler des bottes en caoutchouc, se munir d'une lampe torche, se plier en deux comme un gnome et se promener dans le noir, au fond des égouts, tandis que des fleuves de merde et autres excroissances immondes coulaient et occasionnellement se répandaient au-dessus de ses bottes. Le parfum n'était pas délicieux non plus. Ce n'était pas la Vie à la Ville dont il avait rêvé.
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La foule se pressait...avant même qu'elle l'ait vu venir, un homme très grand se retrouva à quelques centimètres d'elle, s'adressant à un autre homme qui tournait le dos à Martha. Pourtant elle n'eut aucun mal à le reconnaître (...)ce ne pouvait être qu'Arthur Lomprey, le président de Plannersbanq. Il avait été son invité d'honneur à trois dîners au moins, à l'époque où Charlie essayait d'obtenir le financement de Crocker Concourse. Après tout, c'était son retour ... en société. Elle avait payé 20 000$ pour une table et invité neuf personnes. Elle avait acheté cette robe 3 500$, elle était fière de ses larges épaules et de ses mollets bien tournés. Elle avait oint ses épaules de lait pour bébé afin de les satiner. Elle avait dépensé 4 200$ pour ce collier (une chaîne de montre en or avec de petits rubis), 225$ pour sa coloration (blond ananas) et sa coupe chez Philippe Brudnoy, 150$ de maquillage chez LaCrosse, 850$ pour ces escarpins noirs, lézard et cuir, sans compter les cours de Mustafa Gunt chez DefinitionAmerica dans l'espoir de ressembler un tant soit peu à ces garçons-avec-des-seins.
En plus de tout ça, elle venait de descendre une autre coupe de champagne. Elle s'approcha donc, comme elle put, de la grande silhouette voûtée et lança :
_ Arthur !
Arthur Lomprey se retourna, la regarda, et son sourire s'élargit tellement qu'elle aurait pu compter ses dents. Mais ses yeux reflétaient la panique pure. Ils disaient : Mayday ! S.O.S ! J'ai rencontré cette femme un jour, mais qui est-ce, bon Dieu ?
_ Héééé ! Comment ça va ? s'exclama-t-il tout en continuant à sourire bêtement, alors que ses yeux cherchaient frénétiquement un indice. Ils couraient de ses boucles teintes, son visage maquillé, son collier, sa robe, ses épaules satinées, à tout son corps si studieusement travaillé.
_ Comment vont les enfants ? demanda-t-il finalement, tentant le tout pour le tout.
_ Comment vont les enfants ? Rien n'aurait pu la blesser davantage. L'homme venait de passer au scanner ce qu'elle pouvait offrir de mieux au monde après une dépense de 8 925$ ainsi que d'innombrables heures d'agonie cardio-vasculaire entre les mains d'un bourreau turc, et son cerveau, cet ordinateur entièrement analogique, chimiquement activé, était arrivé en quelques millisecondes à cette conclusion : une matrone. Donc... Comment vont les enfants ?
Martha avait envie de hurler, mais, dans son état de stupeur, le mieux était encore de répondre d'un ton morne et mécanique :
_ Bien.
_ C'est merveilleux ! s'exclama Arthur Lomprey, qui ne l'avait probablement même pas entendue. C'est vraiment bien ! Il continuait à secouer la tête avec enthousiasme, mais il fuyait son regard, essayant de trouver un moyen de la planter là avant d'être contraint de la présenter aux gens qui l'accompagnaient. Qui était cette femme superflue ? Qui était cette invisible ex-femme ? Qui était ce fantôme social (sans un mari à son côté pour lui donner une identité) ?... Elle n'attendit pas que la situation empire (et) tourna les talons.
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Le crotale s'était changé en un monstre de colère sinueuse. Son énorme gueule grande ouverte mordait le vide de ses deux crocs, semblables à des seringues hypodermiques. Crachant autour de lui de grosses gouttes de venin jaune, sa langue fourchue noire s'agitait dans tous les sens, un sifflement glacial jaillissant de sa gorge. La bête, deux mètres de muscles, de vertèbres et des centaines de côtes, fouettait l'air avec une telle force que Charlie se demanda s'il pourrait maintenir sa prise plus longtemps. Une puanteur lourde, terrible, comme celle d'un sconse, émanait du serpent et empoisonnait l'atmosphère, mais pour Charlie, à cet instant, elle évoquait une fragrance riche comme l'encens ou la myrrhe. Et surtout, dominant tout le reste, on entendait le cliquetis des sonnettes...
Frappé par le son ! Des chevaux d'une tonne vous faisaient vider les étriers et vous piétinaient quand ils entendaient la terrifiante castagnette d'un serpent à sonnettes. Ce sifflement, c'était la gâchette de la terreur pour tout système nerveux disposant de l'ouïe, y compris et en premier lieu celui de l'homme.
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C'est juste à ce moment qu'une sorte de chant s'éleva dans la salle d'audience.
_ Yo-ohhhhhh...cela venait de là-bas.
_ Yo-ohhhhhhhhhhhhhhh...cela venait d'ici...
Kaminsky, le gros officier avait commencé. Puis Bruzielli, le greffier reprit, et même Sullivan, le rapporteur y joignit sa version discrète : "Yo-ohhh". Sans un cillement de paupière, Kovitsky frappa de son maillet et suspendit la séance pour trente minutes. C'était l'heure de mettre les chariots en cercle autour de la forteresse, rien de plus. Les chariots en cercle étaient une pratique standard. Si un procès risquait de durer après la tombée de la nuit, alors il fallait faire le cercle. Pendant une suspension d'audience pour faire le cercle, tous les employés qui étaient venus travailler en voiture et qui devaient rester après la tombée de la nuit à cause du procès se levaient, sortaient et se dirigeaient vers leurs voitures dans les parkings extérieurs. Le parking favori des habitués du tribunal était juste de l'autre côté du sommet du Grand Concourse, dans une énorme excavation de boue. Ce trou avait été creusé pour les fondations d'un building qui n'avait jamais vu le jour. Le groupe s'assembla. Les officiers portaient leur 38 bien visible sur leurs hanches. Le petit contingent s'avança bravement en territoire indien...Très vite, la première voiture arriva. Yo-ohhh, voilà Kovitsky... puis vint Bruzielli, puis Mel Herskowitz et Sullivan le rapporteur. La dernière voiture à se garer (devant le tribunal) fut celle de Kaminsky. Il avait ramené avec lui l'autre officier. Ils sortirent tous deux et aperçurent Kramer :
_Yo-ohhhhhhhhhhhhhhh!
_ Yo ho ho, fit Kramer.
La caravane. Yo-ohhhhhh était le cri de John Wayne, héros et éclaireur en chef, signalant aux pionniers qu'ils devaient avancer les chariots. C'était un territoire indien, infesté de bandits, et il était l'heure de faire le cercle avec les chariots pour la nuit. Quiconque s'imaginait qu'il était capable de monter deux blocs jusqu'au parking après la tombée de la nuit pour prendre sa bagnole et rentrer tranquille chez papa maman, jouait sa vie sur une moitié de table de casino.
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Cette maison a été construite en 1906 par un nommé Stanley Lightfoot Bowman. Il a dépensé presque un demi-million de dollars pour cette maison en 1906. C'était l'endroit rêvé où habiter en 1906. Ils ont construit toutes ces grosses maisons tout au long du West Side, en commençant à la 72ème Rue, et en montant jusqu'ici...Ouais, et j'ai acheté cette maison en 1978 pour 62 000$ et le type était content de récupérer au moins ça. Il se léchait les babines en se disant : "J'ai réussi à en trouver un - un crétin capable de me filer 62 000$ pour cette maison." Eh bien, qu'est-il arrivé à tous ces Stanley Lightfoot Bowman ? Ont-ils perdu leur argent ? Non. Ils ont perdu le contrôle...Vous voyez...ils ont perdu le contrôle au nord de la 96ème Rue, et quand ils ont perdu le contrôle, ils ont perdu le capital. Vous comprenez ? Tout ce capital s'est évaporé de la surface de la terre. La maison était toujours là, mais le capital...évanoui!...Vous voyez...Donc ce que je vous dis, c'est que vous feriez bien de vous réveiller. Vous pratiquez le capitalisme du futur et vous ne le savez même pas. Quand vous montez jusqu'ici et que vous parlez "d'entreprises de la minorité" et de centres de soin pour les gens de la rue, vous chantonnez la bonne chanson, mais vous ne voulez pas chanter les bonnes paroles. Vous ne voulez pas y aller directement et dire : "S'il te plait, Seigneur, Dieu Tout-Puissant, laisse-les faire ce qu'ils veulent avec l'argent, tant que cela contrôle la pression...Avant qu'il soit trop tard"...Harlem, le Bronx et Brooklyn...tout ça va exploser, mon ami, et ce jour-là, vous serez extrêmement reconnaissant envers votre prudent courtier...qui peut contrôler la pression.
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L'horreur de tout ceci, c'était que pratiquement tous les hommes de ce côté de la Barre de la Justice avaient une chance. Non, pas Herbert, mais son minuscule bout d'avocat, Teskowitz, si. Même ce gros tas de garde, ce Kaminsky. Le nombre de gardes, d'avocats de la défense, de greffiers, de substituts du procureur (oh oui!) et même de juges (ne pas les oublier!) qui avaient tringlé (c'est le mot!) de mignonnes petites jurées d'affaires criminelles - Dieu! si jamais la presse s'emparait de cette histoire - mais la presse ne se montrait jamais dans les salles d'audience du Bronx.
Les nouveaux jurés d'un Tribunal Criminel avaient une manière de s'enivrer à la haute tension de ce monde infernal qu'ils dominaient de leur box, et c'étaient les jeunes femmes qui avaient l'ivresse la plus rapide. Pour elles les accusés n'étaient pas de la "bouffe", tout sauf ça. C'étaient des desperados. Et ces affaires n'étaient pas des tas de merde. C'étaient les misérables drames de cette ville aux millions d'âmes. Et ceux qui avaient le courage de traiter avec les desperados, de les combattre, de les dompter...étaient...de vrais hommes...même un gardien avec un rouleau de dix centimètres de graisse débordant au-dessus de son ceinturon. Mais qui était le plus viril, sinon un jeune procureur, lui qui se tenait à quelques mètres de l'accusé, séparé de lui seulement par une mince couche d'air, et qui assénait les accusations de la justice ? Maintenant elle était en face de Kramer. Elle lui rendait son regard.
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Sherman contempla à nouveau la cheminée... les punaises... Lopwitz avait utilisé la cheminée pendant environ deux mois, puis plus jamais. Un jour, assis à son bureau il avait souffert d'un démangeaison intense. Sur le côté de sa fesse gauche. Il avait des fiers petits points rouges... Des morsures de punaise... La seule déduction plausible était que des punaises s'étaient débrouillées pour grimper jusqu'au cinquantième étage, jusqu'à l'étage suprême des obligations de Pierce & Pierce, dans un chargement de bois pour la cheminée et avait piqué le baron au derrière. Sur le chenets de cuivre, désormais, était posée une sélection soigneusement étudiée de bûches de bois dur du Hampshire, sculpturalement parfaites, parfaitement propres, complètement aseptisées, enduites de suffisamment d'insecticide pour vider une bananeraie de tout ce qui bouge, installées pour une éternité, destinées à ne jamais être allumées.
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Ô Amérique, contrée bénie dont un chant qui est presque un deuxième hymne national exalte les vastes horizons et les vagues d'ambre des champs de blé, a-t-on jamais vu au monde tant d'hommes riches et puissants payer et tolérer tant d'édifices parfaitement détestables à leurs yeux?
Franchement, j'en doute. Tous nos enfant vont en classe dans des bâtiments semblables à des entrepôts de pièces détachées pour machines à polycopier. Personne jusqu'aux membres des commissions scolaires qui ont commandité le bâtiment et approuvé les plans, ne saurait dire comment on en est arrivé là. L'essentiel est d'éviter d'avoir à fournir des explications aux parents.
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En bref, il apprenait par lui-même la vérité du dicton: un démocrate, c'est un conservateur qui a été arrêté. (p. 701)
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Et toujours aussi furtivement il traversa les toilettes pour hommes, tandis que son coeur courait en avant de lui. (p. 385)
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Il y avait un orage, des éclairs ont jailli, et, brusquement, ça m'a fait comme une autre peau, une peau d'éclairs, d'électricité, un costume d'électricité, et j'ai compris que nous pouvions être des super-héros, et que nous devions devenir des super-héros, ou rien.
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Tu veux qu'on se rappelle de toi pour quoi? Parce que tu avais un putain de manoir à Riverdales ou à Greenwich ou dans la vallée des Sauterelles? Ou parce que tu as créé une "différence"?
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Est-ce que Hoyt allait l'appeler ? Elle savait que non. Elle était certaine qu'il ne lui adresserait plus jamais la parole. Il avait définitivement jeté la serviette souillée avec le reste. Elle ne remettrait plus jamais les pieds à la résidence Saint Ray, plus jamais... Qu'est-ce que Bettina allait en penser, Bettina qui l'avait entraînée là-bas la toute première fois, il y avait si longtemps ?...
Charlotte Simmons ne serait plus invitée nulle part. Elle avait joué, et perdu. Elle avait négligé ses cours, négligé Adam, les Mutants et leurs rêves de cénacle intellectuel, négligé la seule promesse que Miss Pennington avait attendue d'elle, celle que l'irréversible ascension de Charlotte Simmons se poursuivrait, la conduirait d'un obscur lycée public des Montagnes Bleues à la crème de l'élite universitaire de Dupont... Quels buts égoïstement étriqués, quelles préoccupations dérisoires et dégradantes, quelles fausses priorités avait-elle fait siens !
Mais... Hoyt ! Ô Hoyt ! Elle voulait encore ce sourire dévastateur, elle voulait encore se sentir pressée entre lui et la paroi d'un ascenseur ! Elle voulait qu'il la désire, qu'il la convoite, et s'il téléphonait maintenant elle... Cette idée lui a fait prendre la mesure de la folie dans laquelle elle avait basculé. Il n'appellerait jamais. Plus jamais. La seule perspective de lui parler le ferait frémir... Non, pas même frémir, car c'était encore une émotion et Hoyt Thorpe n'en ressentait plus aucune envers Charlotte Simmons, aucune.
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Passé à une imitation de Bob Marley, le chanteur avait rejeté la tête en arrière et semblait prêt à engloutir son micro tel un avaleur de sabre. Une demi-douzaine de couples se frottaient sur la piste. Des spécimen de laboratoire, voilà ce qu'ils étaient. Placés dans un environnement propice à certains stimuli qui les poussaient à imprégner leurs muqueuses d'alcool et de nicotine, leur inspiraient ce besoin frénétique d'appartenir au "groupe"...
Charlotte s'est sentie comme avant, indépendante, critique, hautaine, regardant de haut ces coutumes barbares auxquelles les nouveaux étudiants se soumettaient sans broncher. Pourquoi ces fils et filles de riches, dotés d'assez de jugeote pour obtenir une moyenne de mille quatre cent quatre-vingt dix aux TAS, étaient-ils prêts à se laisser à ce point abuser par toute cette primitive grossièreté ? A préférer un tel bouge à quelque chose de raffiné, ou au moins de propre et d'épuré ?... Ils n'étaient rien d'autre que des spécimen qu'elle étudiait, voilà pourquoi elle était là, et l'IM une cage en verre où se pressaient sous son regard analytique de jeunes privilégiés en haillons, mâles et femelles frottant leurs parties génitales, le pieu sous le pantalon en coton cherchant la crevasse sous le short en coton... le bouddha fouettant tout ce qui se trouvait à portée de bras... le chanteur caramel mangeant son micro... et là, une anomalie ! Un garçon seul sur la piste de danse. Non, il ne faisait que la traverser. Cheveux en bataille, chemise ouverte, hors du pantalon, manches retroussées, il boitait mais n'avançait pas moins d'une démarche arrogante au milieu des bêtes à deux dos surchauffées. Il a tourné la tête ; un bandage lui couvrait la mâchoire de l'oreille au menton, presque... Hoyt.
Il venait à elle. le coeur de Charlotte s'est mis à battre, battre...
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Philippe, un adolescent long et maigre comme une asperge, entra dans le salon avec la démarche lente et chaloupée que Nestor identifia instantanément comme le Dandinement du P'tit Mac. L'entrejambe de son jean pendait presque jusqu'à ses genoux... la taille lui ceignait les hanches... révélant une vingtaine de centimètres de caleçon à motifs criards. Au-dessus, un T-shirt noir portant une inscription en jaune fluo, UZ MUVVUZ, un soi-disant groupe de rasta-rap Neg dont Nestor avait vaguement entendu parler. Sous le UZ MUVVUZ, un dessin style BD vous attirait dans la gueule béante d'un alligator, toutes dents dehors, et jusqu'au fond du gosier ténébreux de la bête. Le garçon, Philippe, avait complété sa tenue par un bandana noué autour du front dans des teintes tapageuses de vert, de jaune et de rouge, striées de blanc... toute cette panoplie un peu datée de vrai petit Black des rues parant un corps couleur café au lait... et un bandana de gang couronnant une tête d'ado enfantine ! Ce gosse avait des traits délicats, délicats pour un Haïtien, en tout cas, aux yeux de Nestor... des lèvres presque anglos... mais un nez légèrement trop large... C'était un joli visage... même en cet instant où il inspectait la pièce, les sourcils froncés jusqu'aux yeux et les maxillaires légèrement décentrés dans une tentative de grimace allez-vous-faire-foutre... c'était tout de même un joli visage.
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L'objectif de ce briefing, avaient-ils cherché à faire comprendre subtilement à Ed, n'était pas d'identifier toutes ces tensions et frictions comme des sources potentielles d'informations dans Immigration City. Non, pas du tout ! Il s'agissait d'encourager Ed et ses collaborateurs à "relativiser les difficultés" et à insister sur la Diversité, une excellente chose, qui ne manquait pas de noblesse même, et non sur les dissensions, dont tout le monde pouvait très bien se passer. Il s'agissait de conseiller à Ed d'éviter de se mettre à dos l'une ou l'autre de ces factions... Il devrait "préserver un juste équilibre" tout le temps qu'il faudrait au Syndicat pour "adapter" le Herald et le El Nuevo Herald à la technologie numérique... Autrement dit : dans l'intervalle, si les clebs se mettent à grogner, à montrer les dents et à s'étriper - célébrez la Diversité de tout cela et veillez à leur blanchir les crocs.
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Tout au début du roman, la scène d'ouverture :

Maria fait du shopping
Sherman sort promener son chien
Sherman et Maria rentrent de l'aéroport en voiture

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