L'âme creusoise vue par des écrivains
Il faut beaucoup d'air dans les poumons ce matin là. Souffler sur un bonheur qui ne veut pas s'éteindre. En éparpiller les braises. Ce n'est pas si facile, le mal.
La lecture est ma planche de salut. S'abîmer dans une tâche, aussi modeste soit-elle, lorsqu'on est en plein orage, est une manière non seulement de tenir la peur à distance mais aussi de conserver sa dignité. Ce pourrait être éplucher des légumes, ravauder, réparer une serrure, confectionner une caisse en bois. Il se trouve que pour moi, c'est lire.
"Quand nous nous manquons à nous-mêmes, tout nous manque". Goethe
Être une cible change profondément sa manière de voir les choses. Ramener son espérance de vie au temps qu'un obus met à venir vers soi rend attentif. Intuitif.
C'est cela, la vie de Grace et de tous ses semblables. Elle ne sait pas perdre son temps à tisser des riens avec des mots. C'est un art ancien et désuet qui n'a plus court et qui s'est probablement perdu. Elle n'a peut-être jamais su. C'est si dur de vivre là d'où elle vient, si fort aussi.
On a tous une vie rêvée, autre que celle que l'on a menée. Une vie imaginaire qui n'a pas été la nôtre parce qu'au moment des choix nous ne nous sommes pas hissés assez haut, nous n'avons pas été assez téméraires, assez exigeants, ou parce que nous n'avons pas eu de chance, tout simplement. Personne n'échappe à ce regret, Marcel, pas même les gens heureux.
Je commence à déchirer les pages, verso tourné vers moi. En morceaux de plus en plus petits jusqu'à atteindre la taille de grands confettis sur lesquels les phrases brouillées n'ont plus de sens. La question se pose alors de savoir si le texte ainsi haché reste un texte. Je veux dire dans ses intentions, ses interprétations. Ses pouvoirs.
l'essentiel du travail de désinformation, ce sont ses propres victimes qui le réalisent.
« Jamais la biche en rut n’a pour fait d’impuissance
Traîné du fond des bois un cerf à l’audience ;
Et jamais juge, entre ´eux ordonnant le Congrès,
De ce burlesque mot n’a sali ses arrêts » ....
BOILEAU SATIRE VIII.
« La lumière, brisée sur la pierre des croisées et le chêne gris des appuis , pailletée d’une fine poussière tombée du solivage, est d’une texture qui contraint à des efforts d’invention.
Les yeux de Ben scrutent les particules de blé en suspension .
Une pluie d’or invisible recouvrira bientôt tout ce fatras .
Sa VIE.
Il aime cette idée d’un ensevelissement.
Sa fascination pour les ruines et les résurrections est l’un des axes de son OEUVRE .! »