Un très bon polar d'un genre un peu particulier puisqu'il nous emmène dans une zone historiquement sensible, les Balkans. le résumé se suffit à lui même et je ne m'aventurerai donc pas sur un terrain qui ne pourrait que s'avérer redondant et sans grand intérêt. Par contre, j'ai adoré le premier chapitre, émouvant, intriguant, bouleversant. En le lisant, vous savez que vous ne lacherez pas cette histoire avant de savoir, ce qui, bien entendu, ne manquera pas d'arriver. Il y a ensuite le personnage attachant, opiniâtre, courageux de Milena Lukin, une belle femme d'honneur que nous suivrons avec une très grande envie et, je l'avoue, avec beaucoup de sympathie .
Dans ce livre, je me suis promené, transporté dans Belgrade, sans hâte mais avec efficacité. Pas de grandes poursuites, pas de coups de feu redoublés, pas de vilain méchant, non, tout en finesse, un peu en "souterrain", en allusions, c'est très habile, tout est bien amené, tout prend forme alors que l'on vous décrit une situation bien "lisse"....
J'ajouterai que ce roman est bien écrit, bien documenté. L'intrigue, partant d'un fait avéré prend , avec maitrise, un chemin bien balisé jusqu'au dénouement.
Ma seule gêne a été de jongler avec des noms bien éloignés de ceux de "mes voisins", si je puis dire, des noms dont se serait délecté Thierry Roland, notre regretté reporter sportif, un très bon souvenir de ma jeunesse, lorsque l'équipe de foot-ball de Yougoslavie affrontait l'équipe de France. Enfin, une réflexion sur l'utilisation des fonds devant servir aux populations...Mais est-il utile d'en débattre ici?
Un livre qui mérite toute notre attention, à mon humble avis.
Commenter  J’apprécie         632
Sans passeport, il était prisonnier. Il ne pouvait pas réserver une place d’avion, il ne pouvait même pas suivre Pascal, comme n’importe qui de normal. Son bonheur dépendait de quelques employés en gilet qui ne jugeaient pas utile de lui donner les papiers auxquels il avait légalement droit. Il était un Albanais du Kosovo, il passait après les autres. Il donna un coup de torchon sur son plateau et prépara les commandes.
Ljubinka avait le souffle court et son élocution était heurtée. Il voyait ses articulations enflées, il savait qu’elle avait mal aux jambes, au dos aussi, et qu’elle ne se plaindrait jamais de ses douleurs. Il s’en voulait de son impuissance : tout ce qu’il pouvait faire pour elle, c’était de découper tous les jours ce fichu carton en bandes qu’il enroulait autour de la poignée métallique. Les mains de Ljubinka n’étaient pas faites pour aller chercher de l’eau deux fois par jour et trimballer des seaux par monts et par vaux sur trois kilomètres et demi. Il leur restait encore à gravir la colline et traverser la forêt, et le carton était déjà en lambeaux !