Il y a très peu de temps, j'ai lu
le Coran dans la traduction de
Régis Blachère, ou plutôt j'en ai lu des extraits répartis sur l'ensemble du Livre. J'en ai fait un commentaire sur Babelio, exprimant mon désarroi devant cette succession désordonnée et lancinante de diatribes contre les "Kafirs" et les Juifs, d'admonestations aux croyants, de prescriptions religieuses et juridiques, de récits (rabâchés) de l'Ancien Testament et, naturellement, de louanges à Allah. Non seulement je n'en ai pas vu la logique et la cohérence, mais je n'ai pas découvert de poésie et beauté littéraire. J'ai été frustré et j'ai voulu découvrir un point de vue différent.
En réalité, cette "Introduction" de
Régis Blachère, érudite mais accessible, n'est absolument pas une étude sur le fond du texte; mais elle m'a permis d'apprendre beaucoup de choses sur la genèse de la version canonique du Coran (appelé par l'auteur "la Vulgate"). On sait que le contenu de la Révélation a été d'abord appris par coeur, récité et accessoirement noté dans le désordre sur des matériaux de fortune. Son écriture systématique a été entreprise après la mort du Prophète (et donc sans sa caution). Point essentiel: l'existence, au VIIème siècle, de diverses recensions des révélations divines - distinctes et concurrentes - est avérée. Finalement, le pouvoir califal a fait établir un texte "définitif" et volontairement détruit tous les fragments qui n'y avaient pas été intégrés. Bien d'autres considérations m'ont intéressé, par exemple les différentes « lectures » du Coran (car la graphie archaïque introduisait de nombreuses ambiguïtés). Et puis il y a aussi cette question fondamentale: dans quelle langue Mahomet a-t-il reçu la Révélation, en dialecte de la Mecque, dans une autre variante locale, ou dans une langue poétique alors en usage (que Blachère désigne sous le nom de « koiné ») ? Cette dernière question est loin d'être subalterne, car le dogme islamique mentionne simplement le "pur arabe" - ce qui (en fait) ne veut rien dire, à l'époque.
On sait que la plupart des théologiens musulmans affirment avec force que le texte de la Vulgate est "incréé", c'est-à-dire qu'il a toujours existé auprès d'Allah sous la forme que nous le connaissons. Ils s'accrochent à cette conception rigide et "extrémiste" avec d'autant plus de force qu'une analyse critique du Coran démontre sans difficulté qu'il s'agit au contraire d'une recension humaine laborieuse et très discutable. C'est du moins mon avis personnel.