«Les Cris nous apprennent comment résonne la chair. Qu'on n'aille pas reprocher au poète la rudesse de son langage: il y a une exaspération implicite dans la recherche de la Vérité. Il y a dans chaque artiste-poète une certaine dose d'impénitence qui nous le rend cher et ennemi à la fois. C'est qu'il a pris sur lui d'incarner toute la tragédie des réprouvés que nous sommes à divers échelons, sans omettre jamais une virgule incriminante du texte. Aussi, son travail nous paraît, par étapes, inhumain! De cet exorcisme auquel le poète s'est livré devant nous est née une poésie qui rejoint le niveau du puissant lyrisme des siècles.» (Gilles Leclerc, Préface de la première édition des Cris, 1957)
«Le poète entreprend à travers toute l'épaisseur des sons, des odeurs, des couleurs, des formes un long et tumultueux voyage vers Dieu, vers l'infini, vers la vie tout court. Cette orgie de sensations minutieusement décrites constitue une des premières et des plus belles fêtes des sens de notre poésie si timide, on le sait, devant la vie. C'est un cri pur et radieusement païen.. Plusieurs passages tremblent et flambent. Cette nouvelle morale qui consiste à exalter la vie, la chair, l'instinct ne cesse d'être révolutionnaire dans ce pays où on a si longtemps assassiné la vie.» (Gatien Lapointe, Le Soleil, 1969)
«La poésie de Pierre Chatillon est une poésie écrite et qui, par sa perfection et son intensité, le demeurera longtemps.» (Roch Carrier, Livres et auteurs québécois, 1969)
«Par la splendeur et la complexité des images et du vocabulaire, Soleil de bivouac est certainement l'un des plus beaux textes de poésie que j'aie lus depuis longtemps.» (Suzanne Paradis, Le Soleil, 1969)
«La lecture de votre recueil Soleil de bivouac m'a franchement ému. C'est de la grande poésie aux images de silex et de feu, aux mots chargés d'un sang exigeant. Votre livre est un des plus beaux et un des plus forts que j'ai lu depuis longtemps.» (Pierre Morency, lettre à l'auteur, 27 janvier 70)
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J'ai tout perdu, mon Dieu, j'ai tout perdu !
Tous mes châteaux sont écroulés. Tous mes échafaudages dans le vent. Toute ma jeunesse que j'aimais malgré l'horreur des liens toujours rompus s'est affaissée comme une immense toile d'araignée sur les réseaux de feuilles, comme l'hécatombe de la neige accablante sur les sapinages languides.
Mes yeux, les queues rouges de comètes folles déchirant les cieux dans une brûlure de silence, dans un fracas de feu, j'ai bondi de planètes en abîmes !J'ai jonglé sur les mondes infinis , des tourbillons, des danses navrantes d'étoiles qui fondent. J'ai parcouru des univers de noirceur, avec toujours cette flamme ironique d'une explosion de météores , toujours plus loin, toujours plus haut !
EPITAPHE
Pas de pays
et pas de ville.
Pas de maison
pas de chapeau
et pas de barbe.
N'avait même pas de télévision.
Il s'appelait,
euh...
n'avait pas de nom.
Ma foi n'avait pas tort
puisqu'il est mort.
Mes yeux, les queues rouges de comètes folles déchirant les cieux dans un fracas de feu, j'ai bondi de planètes en abîmes! J'ai parcouru des univers de noirceur, avec toujours cette flamme ironique d'une explosion de météores, toujours plus loin, toujours plus haut! Sur moi plongeaient des épées d'aérolithes toujours renouvelées. Mes pieds, mes jambes et tout mon corps balafrés, déchiquetés, après la lutte corps à corps contre les araignées pourries de l'Infini.
Je m'accroupis sur le rivage.
Une fumée s'élève d'un pipeau crasseux.
La mer.
Je fume.
Je ne demande rien.
Je fume.
La mer.
Les fosses bout à bout
ci-bas
comme d'énormes pas visqueux
Ce doit être le temps
qui marche.