Livre : Nous ne sommes pas des écrits vains

Certains rendez-vous sont inscrits à notre insu, et celui de ce livre avec moi-même devait être, c'était inévitable. Notre rencontre était nécessaire, c'est-à-dire qu'elle ne pouvait pas ne pas se produire, car elle est une révélation.
Ce livre est incomparable et unique car il est atypique, original et doté d'une force qui secoue le lecteur et le mène sur des chemins encore non explorés. Il est presque un personnage à lui seul tant il possède une personnalité franche, directe et tout à la fois tendre, émouvante et poétique. Il crache ses mots sans les embellir et en même temps use de métaphores qui m'ont complètement envoutées. Il est écrit à la manière d'une urgence, il se délivre comme un cri. Ses mots sont comme ceux qui agitent le personnage de l'histoire : étalés, éparpillés, ils sautent, se taisent, rejaillissent, se greffent les uns aux autres, s'envolent, pleuvent et bombardent.
Alors oui, il n'y a pas le livre et le lecteur mais les deux l'un dans l'autre. Parce que si la femme, personnage central du roman, est paralysée par la peur et la panique que « ses cris restent silencieux aux oreilles de tous », elle les éjecte pourtant à sa manière, d'une façon sublime. Et si elle écrit pour être entendue, d'autres diraient « Je crie pour être entendue ». Est-elle donc muette, quelque chose bloque-t-il sa gorge, mais quoi ? Sa maladie- En est-ce vraiment une ?- est une maladie créative et libératrice mais elle ne le sait pas. Et sans elle, elle ne serait plus. Comment la décrit-elle ? Je ne peux que citer les termes qui reviennent au fil de ces pages : mots, folie, blanc, écrire, ordre, désordre, cahiers, mutisme, addiction, larmes, liberté, urgence, étoile, panique, parole. Des symptômes étranges qui ne correspondent à aucune pathologie connue et qui, si on les range dans un certain ordre, disent une chose et son contraire. Pourquoi ? Nous le comprenons avant d'avoir refermé le livre.
En attendant, elle veut s'en débarrasser, cette femme, de cette pulsion, -de cette addiction ?- dans laquelle elle pense être enfermée jusqu'à rêver que ce mal la « laisse sur le bord de la route et oublie son existence». Elle se trompe, elle veut tuer la sève qui la nourrit et construit son avenir. Mais il lui faudra deux coups de pouce, pour le découvrir et le comprendre.
Elodie, vous n'avez pas agressé les pages de vos mots, vous leur avez donné une couleur que je n'oublierai pas. Des mots figés sur du papier qui crient pour toutes les voix réprimées. Et en cela, votre écrit est universel, car il conseille à tous ceux qui se sentent enfermés dans leur silence, de trouver un support pour se libérer, quel qu'il soit.
Ce n'est pas un 5 que mérite ce livre, mais bien plus !

Un gros tourbillon d'émotions encore une fois en lisant de nouveau la plume si entière, subtile, pleine de vie, tranchante, vive, incisive et urgente de l'auteure. Dès les premières pages j'ai été happé comme un poisson attiré par l'hameçon. C'est tout simplement magique, une explosion digne d'un volcan en éruption qui tente d'extérioriser toute sa puissance, sa passion et son addiction à la lave qui le brûle de l'intérieur.

Et c'est justement le point central de ce livre, comment vivre et comment accepter, se rendre à l'évidence que notre âme est faite pour telle ou telle chose ?! Comment faire quand cette peur viscérale de réussir ou d'échouer s'imprègne dans tout notre corps, dans notre esprit ? Je ne veux pas en dire trop, au risque de vous gâcher la surprise.

Nous retrouvons donc Charlotte et Maoko qui correspondent par mail, l'une habitant en France et l'autre au Japon. Elles sont éloignées l'une de l'autre et pourtant si semblables, si vulnérables mais fortes à la fois. Un parfait jeu d'effet miroir qui s'installe au fur et à mesure afin de faire éclater tous les verrous de la réalité.

Il se dégage tellement de poésie et d'évidence de tous les mots. C'est comme des pièces de puzzles qui s'imbriquent entre elles pour ne former qu'une seule et même immense image, un paysage sublimement sidérant de vérité absolue. J'ai été prise d'empathie pour la narratrice Charlotte qui est submergée par tant de sensations, de questions et d'émotions alternées par des réflexions profondes sur sa raison de vivre.

C'est une lecture qui m'a énormément ébranlée d'un point de vue personnel, car ce qui est raconté et dépeint peut parler et raisonner à beaucoup de personne. Parfois on se demande « mais pourquoi je suis ici ? » jusqu'à ce qu'on se rende compte de ce qui nous fait réellement vibrer, ce qui est inscrit dans notre ADN.

L'auteure a fait un travail d'écriture et de construction impressionnant, comme une impression d'assister à la renaissance d'une femme qui se croyait perdue, jusqu'à l'effet boomerang de sa rencontre virtuelle avec une autre, qui lui renvoie en pleine face cette évidence, cette passion qui la fait tenir debout.

Les mots ne sont pas assez forts pour décrire toute la puissance littéraire de cet ouvrage artistique et émotionnel. J'y ai décelé quelque chose d'addictif, je n'ai pas réussi à m'arrêter avant d'arriver à la fin. Chacun de nous est doté d'un don inné qu'il suffit d'accepter et d'immortaliser.

Si on se prive de ce qui fait de nous une personne unique, on aura juste cette impression d'être amputé d'un de ses membres. Et que serait une vie avec une partie manquante de l'oeuvre que nous sommes ?! Je vous laisse répondre à cette question dans votre esprit, mais surtout je vous invite de tout mon coeur à découvrir cette pépite dès que possible. On ne peut pas passer à côté, c'est impossible.

Bien que courte, cette oeuvre est dense en émotions et en réflexions.

L'auteure possède un style bien à elle ; lyrique, métaphorique et hyperbolique. La plume use d'un langage visuel pour retranscrire ses pensées et émotions. Les comparaisons permettent de mieux saisir les émotions et les hyperboles et d'en ressentir toute l'intensité.

Concernant le fond, j'ai apprécié la manière d'aborder l'écriture, dans ce qu'elle a de plus beau mais aussi de plus douloureux. Si l'auteure, Charlotte, se croit atteinte d'une maladie, d'une addiction, c'est parce que l'écriture est toujours là, une soif qui ne s'arrête jamais, et on peut le ressentir autant comme un cadeau qu'un fardeau.

Le parcours de Charlotte sera un parcours de guérison, ou du moins d'acceptation de cette addiction qui en fin de compte n'en est pas réellement une.

Cette oeuvre fait écho à un texte que j'avais écrit il y a quelques années dans lequel j'écrivais que la vocation d'écrire était à mes yeux à la fois un don et une malédiction, car elle prend tellement de place dans nos vies, vide notre énergie à chaque séance d'écriture, met notre corps à rude épreuve avec tout ce temps passé assis devant l'ordinateur, avec souvent cette impression que l'on écrit pour rien, du moins pour pas grand-chose. Quand je pense à toutes les heures que j'ai passé dans ma vie à raconter des histoires, pour des romans que je n'ai pas réussi à terminer, j'en ai le vertige, et parfois l'impression que l'écriture m'a volé une partie de ma vie. Mais il faut accepter que l'écriture fasse partie de notre identité, pour le meilleur et pour le pire.

Voilà pourquoi les mots d'Élodie ont autant raisonné en moi, j'y retrouve de mon expérience par un effet miroir. C'est un cri du coeur et un message d'espoir pour les écrivains.

J'ai connu Élodie Laurin au travers de son retour sur mon roman Vie Rêvée. Des échanges et une chronique qui me sont restés en mémoire tant l'émotion était palpable à chaque mot choisi avec soin et précision. En lisant Élodie, j'ai ainsi retrouvé toutes ces belles émotions, sa voix enjouée et torturee, dans cette courte histoire, témoin de son amour pour les mots certes mais surtout pour la belle littérature française . Merci Élodie pour ta générosité et ce texte qui donne ainsi espoir à tous les « jeunes » auteurs que les écrits ne restent jamais vains !

Qu'est ce qu'un livre, sinon une suite de mots? Celui-ci est assez court mais il y a tant à en dire! Je viens à peine de le refermer que je ressens l'envie d'en parler !

Pourtant, j'aurais pu passer à côté, il était dans ma liste. Mais tout m'attirait, la couverture, le résumé, ces mots, je les voulais. Puis, vinrent des mots durs que je me pris dans la figure... Qu'à cela ne tienne, je le lirai, je m'en délecterai.

Des mots, rien que des mots, encore des mots, des mots durs, des mots doux, j'en ai vu défiler de toutes les sortes, j'en ai lu beaucoup, j'en ai tout autant couché sur papier et sur écran, en faisant même mon métier. Écrire pour les autres, pour moi, pour qui, pourquoi? Quand vient la nuit, les mots veillent, valeur refuge, fidèles au poste, les un(e)s les écrivent, d'autres les lisent. Comme Charlotte, j'y ai moi aussi souvent trouvé du réconfort. J'essaie maintenant de les partager, de les faire découvrir, de les honorer, compagnons de toute une vie.

Ce "message de femme" est-il autobiographique ? Et cette chronique l'est elle aussi ?

Conclusion :

Cet ouvrage se vit tel une course effrénée, à en perdre le souffle !

Si vous aussi, il vous tend la main, n'hésitez pas, découvrez l'histoire peu banale de Charlotte et de son alter ego Maoko. Suivez les mots, les mots touchants, les mots durs, les mots en vrac, on se retrouve par moments dans une symphonie de mots digne d'Amélie Nothomb.

Qu'est-ce qu'un lecteur sans aucun mot à lire? Qu'est-ce qu'un auteur sans aucun mot à écrire ?

Comme je regrette l'époque des relations épistolaires...

Merci à Élodie Laurin de m'avoir accordé sa confiance. J'ai une chose à te dire :"crois en toi, les mots tu sais les manier!"