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EAN : 9782843622878
310 pages
Terre de brume (26/01/2006)
3/5   1 notes
Résumé :
Chacun porte en lui une part de secret qu’il garde enfouie… Margot en est intimement persuadée lorsqu’elle se lance dans la quête de ses origines et remonte le fil ténu de la mémoire, au milieu des ruines de la ville où elle a toujours vécu. Mais ce mystère conduit parfois au massacre et au meurtre. Et bien malgré elle, épaulant ses anciens collègues policiers, Margot se retrouvera sur la piste de véritables monstres, fruits de terribles secrets plongeant leurs raci... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« Passé décomposé » est le quatrième roman de Yannick Letty.

Paru en 2006 aux Éditions Terre de Brume (éditeur spécialisé dans la littérature de l'imaginaire, et plus précisément dans ce qui a trait à la Bretagne), dans la collection Granit Noir (collection dédiée à la littérature policière), ce roman policier régionaliste met en scène - sur fond de ville de Brest - deux histoires distinctes : l'histoire personnelle de Margot (de son vrai nom, Marguerite Coadou), une bretonne qui s'interroge sur la malédiction familiale qui frappe de folie sa grand-mère et sa mère, et l'histoire d'un brestois (non, je ne vous donnerai pas son nom) qui séquestre des femmes et les tue, meurtrier que la police brestoise traque sans merci au fil d'une enquête policière dont l'intrigue est complexe à souhait.

Brest est au coeur de ces deux histoires qui mêlent le passé et le présent. Car Brest est la ville natale de Yannick Letty. Une ville meurtrie par les bombardements de 1944, une ville enfouie sous vingt mètres de décombres, une ville enfouie dans les mémoires. Élevé par ses grands-parents qui racontaient sans fin, comme un leitmotiv, ce qui s'était effectivement passé à Brest et dans la région, avant et pendant la Libération, Yannick Letty « vide son sac ». Traumatisé par les horreurs de cette tranche d'histoire qu'il n'a pas réellement vécue, il fait revivre pour nous, avec force et sensibilité, la ville de Brest, ses habitants, ses coutumes, son architecture stalinienne et gigantesque, ses ouvriers, son charbon, sa noirceur, ses grues, ses quartiers mal famés, son port avec les allées et venues des bateaux, les traces de balles et d'obus sur les façades. Par esprit de contradiction, ne cédant pas à la facilité d'écrire un roman policier dont l'action se situerait dans une grande et belle ville du monde, fuyant la littérature policière en vente dans les gares, Yannick Letty recompose pour nous un passé qui nous échappe. Mêlant astucieusement personnages de fiction et célébrités (comme le général Ramke), il nous dresse, dans sa quête des origines, un portrait singulier d'une ville sans panache, d'une ville qu'il aime à un point inimaginable, remontant le fil ténu de la mémoire, progressant de ruines en ruines, de souvenirs en souvenirs.

Yannick Letty prétend écrire des contes pour adultes. Il a toujours écrit, puis il a inventé des textes : « c'était ma récréation, autour du suspense ». Yannick Letty avait déjà écrit un premier roman policier régionaliste avec « Empreinte de sang » : encouragé par son éditeur et par quelques amis, il tente à nouveau l'aventure, partant d'une situation de départ et sachant vaguement où il veut aller. Ce qui intéresse Yannick Letty, « c'est d'errer dans l'imagination, l'écriture servant de fil d'Ariane », portant le lecteur à la découverte de nouvelles situations. Pour Yannick Letty, la culture bretonne n'est pas une sous-culture mais une culture qui nécessite du temps pour être approchée : l'intrigue avance donc lentement, au rythme des marées, des brumes et des souvenirs qui remontent à la surface. Yannick Letty se documente beaucoup avant d'écrire ses romans, car il les souhaite très référencés, livrant ainsi à ses lecteurs une partie de cette mémoire collective qu'il affectionne.

Certains lecteurs ont boudé « Passé décomposé », considérant que l'ouvrage présentait une erreur de conception, reprochant à son auteur d'avoir voulu raconter deux histoires, l'une centrée sur le passé et l'autre centrée sur un présent glauque, peu utile, assez peu crédible (?), voire gênant (?). D'autres ont apprécié cette mosaïque, ce puzzle, ce passé qui se recompose par petites touches, sans prétention, sans relief excessif, en toute simplicité.

« Plus proche des femmes que des hommes (trop forts, moins subtils) », Yannick Letty nous plonge avec ses héroïnes (Margot, un peu idéalisée, et Klervi, son double antagoniste) – des femmes dont il maitrise le caractère (« ce qui est plus commode pour l'écriture ») - dans un retour sur soi, dans un retour sur la mémoire : sans précipitation, tout en contemplation, loin de toute modernité, en « vieux fossile » qu'il est, Yannick Letty nous montre son album de photographies, des photographies en noir et blanc, pas très gaies (jetez un oeil à la page de couverture) et un peu inquiétantes.

« Passé décomposé » est un livre plaisant. Malgré une écriture simple, un rythme lent et une double histoire d'un intérêt qui pourra prêter à discussion, l'ouvrage présente nombre de points forts : un suspense réel, ce qui n'est pas rien pour un roman policier (je vous défie de trouver le meurtrier avant les quarante dernières pages), une originalité indéniable (sauf si vous êtes brestois et féru d'histoire) et des personnages haut en couleurs.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
page 196
[...] Daniellou sortit sur le trottoir.
- Tu viens ?
Margot le rejoignit devant la maison.
- Il y a plus de deux cents ans qu'elle est debout, dit-il en flattant de la main l'entourage de granit doré. Ce n'est pas comme à Brest. Là-bas, tous nos souvenirs sont partis avec les murs. Je ne te parle pas des bibelots ou des photos, mais des images qu'on a dans la tête. C'est terrible, tu sais, de ne plus retrouver le chemin que tu faisais tous les jours pour aller à l'école, de ne plus voir les immeubles où habitaient tes copains ... Non pas parce que tu as oublié, mais parce qu'il n'y a plus rien ! D'un seul coup, tu as l'impression d'avoir perdu la mémoire ... Tu vois, j'ai beaucoup voyagé. Pendant quarante ans j'ai visité tous les ports du monde. Pourtant je ne me suis jamais senti aussi perdu que lorsque, à la fin de la guerre, je suis arrivé à Brest par la rue de Paris ! La ville était là, et je ne reconnaissais plus rien ! Mais le pire, ce n'était pas pour nous les mômes, mais pour les vieux ! T'en voyais qui marchaient dans les rues comme si on les avait débarqués sur la planète Mars ! Tous les souvenirs de leur vie avaient disparu en même temps que les murs de la ville ! Moi, ma grande chance, c'est d'avoir eu cette maison ... [...]
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