Ce tome contient une histoire complète qui nécessite d'avoir une connaissance préalable de la mythologie des valkyries dans l'univers partagé Marvel. Il fait suite à Valkyrie: Jane Foster Vol. 2: At the End of All Things (2020). Ces événements se déroulent concomitamment à King in Black (2020/2021) par
Donny Cates &
Ryan Stegman. Il regroupe les 4 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2021, coécrits par
Jason Aaron & Torunn Grønbekk, dessinés, encrés et mis en couleurs par
Nina Vakueva. Les couvertures originales ont été réalisées par
Mattia de Iulis. Il contient également les couvertures variantes réalisées par Artgerm, Joe Sinnott, Peach Momoko,
Skottie Young,
Phil Noto (*4),
Todd Nauck (*3). Il se termine avec un extrait de 8 pages de New Mutants Special Edition (1985), par
Chris Claremont,
Art Adams,
Terry Austin et Christie Scheele, dans lequel Danielle Moonstar sauve un cheval ailé sur Asgard. Cet épisode a été réédité en entier dans
X-Men: The Asgardian Wars.
Dans une terre désolée, les valkyries volent sur leur cheval ailé vers une silhouette noire, sur laquelle s'abat la pluie de flèches qu'elles ont décochées. À terre, une valkyrie sait que c'est le moment de son échec, la mort de sa compagne. Elle ne peut pas le supporter.
Jane Foster se tient devant le spectre de Sentry (Robert Reynolds), avec Mr. Horse à ses côtés, quelque part en orbite autour de la Terre. L'un des hommes les plus puissants de la Terre est en train de se lamenter sur son coeur brisé. Il s'adresse à la valkyrie en lui demandant de l'excuser, car cet état de mort, c'est quelque chose de nouveau pour lui. Il lui raconte qu'effectivement il a vu des moments de sa vie défiler devant ses yeux alors qu'il allait passer de vie à trépas, mais seulement les bons moments. En particulier, il s'est souvenu de la fois où il a raconté une blague à son épouse Lindy Lee et qu'elle en a tellement ri qu'elle a lâché le plat, et même un peu mouillé sa culotte.
Sentry et Valkyrie se tournent vers la Terre qui est enveloppée d'un voile noir, celui étendu par Knull. Reynolds regrette d'être mort ainsi : c'était sa bataille et il est mort pour rien. Sa mort ne compte pour rien, il a échoué. Jane lui indique qu'l est temps de rejoindre le Valhalla. Elle ne lui confie pas ce qu'elle voit en regardant la Terre : la marque de la mort à grande échelle. Ailleurs dans un bar qui ne se situe pas sur Terre, assise au comptoir, Rūna a commandé un cocktail sophistiqué qui est en train de lui être préparé. La barista s'interrompt dans la préparation de la boisson et tend une batte de baseball à la cliente. Un gugusse se précipite vers elle en s'apprêtant à lui abattre une chaise sur le crâne. Elle lui retourne un coup de batte bien senti qui l'envoie à terre. Elle prend son verre pour savourer son cocktail et découvre un message gravé dans le bois du comptoir : tu n'es pas morte. Piège ! Bas-toi contre. Elle le sait bien, mais elle va commencer par reprendre un verre.
Oui, c'est marqué King in Black sur la couverture et c'est la seule raison du retour de cette série. C'est-à-dire que les ventes de la minisérie précédente ne devaient pas avoir été folichonnes, et que la seule possibilité de revenir était de se raccrocher à cet événement omniprésent dans l'univers partagé Marvel, pour venir gonfler d'autant son ampleur. D'un autre côté, les coscénaristes de la minisérie précédente sont de retour ce qui assure une forme de continuité ou de cohérence. le titre annonce explicitement l'événement majeur de cette histoire : le retour des valkyries. Elles avaient été exterminées au cours de War of the Realms (2019) par
Jason Aaron &
Russell Dauterman. Donc elles vont mieux à la fin de ce recueil, merci pour elles. Les coscénaristes parviennent à se rattacher de manière assez habile au combat contre Knull, le dieu des symbiotes. Alors que le combat sur le plan physique se déroule dans la minisérie correspondante, plusieurs valkyries se battent contre lui sur un plan psychique détruisant une arme dont il dispose sans en avoir conscience. Et hop ! L'intrigue est indissoluble de celle de King in Black, tout en n'y apportant rien, puisque personne n'a conscience de ce qui se joue, hors quelques valkyries, et d'un événement visible le temps d'une poignée de minutes. L'artiste représente la forme de Knull pleine de dents avec une langue extensible à l'infini et un corps très fluide dans ses déformations. le tour est joué pour la participation à King in Black.
Malgré tout, Aaron & Grønbekk ne plaquent pas artificiellement leur intrigue sur le crossover : elle est bien indissoluble de Knull. Deux fils narratifs s'entrecroisent : en tant que valkyrie,
Jane Foster doit accompagner l'âme de Robert Reynolds vers son dernier repos, au Valhalla, et ailleurs une des neuf valkyries originelles se rend compte qu'elle vit dans une réalité truquée. Les pensées de l'une comme l'autre sont colorées par leur charge : escorter l'âme des défunts, considérer la vie d'un individu à l'aune de ce qu'il a vécu. Cela n'empêche pas l'histoire de se présenter d'abord sous la forme d'une aventure dans l'univers partagé Marvel. Il y a donc Sentry, mais aussi le cadavre sans tête d'un Céleste dont la tête à une fonction connue dans l'univers Marvel, en tant que base spatiale, et la mythologie associée aux 10 royaumes dont Asgard et Midgard. Les scénaristes font voyager le lecteur de la Terre au Valhalla, en passant par le vide de l'espace interstellaire, Vanaheim, et un court passage en Asgard. La narration visuelle est assurée par une jeune artiste moscovite. Elle réalise le détourage des formes avec un trait fin, parfois un peu cassant, parfois un peu repassé par endroit ce qui donne une apparence irrégulière, moins propre sur elle, correspondant bien aux batailles violentes. Elle exagère moins les musculatures que dans un comics de superhéros traditionnel, Robert Reynolds étant un homme sans surpoids, mais qui ne fait pas de culture physique, Jane conservant un corps plutôt fluet. Ce choix donne une saveur particulière, différente des comics de superhéros.
Avec la première page, le lecteur n'est qu'à moitié confiant dans la qualité de la narration visuelle : une imprécision dans les formes détourées, un décor tellement suggéré qu'il en devient presque inexistant. Cela s'améliore dès la deuxième page, avec des silhouettes plus soignées et plus détaillées, celles de
Jane Foster, de Sentry et de Mr. Horse, et un infini étoilé en arrière-plan. La mise en couleurs n'est pas flamboyante, mais elle fait bien contraster les formes contigües et leur apporte de la consistance. Elle est précise sans être clinquante, une approche adulte qui ne privilégie pas le spectaculaire. La dessinatrice s'accommode fort bien des séquences qui se déroulent dans le vide spatial ou sur un fond blanc dans une dimension psychique, mais elle investit aussi du temps pour représenter les environnements quand la séquence s'y prête : le bar où Rūna prend un verre, le château servant de foyer aux valkyries, la forêt à Vanaheim, l'extérieur du château de Vanlandi, la salle du trésor de ce dernier. le lecteur n'éprouve donc pas l'impression que les décors sont sous-entendus pour gagner du temps en réalisant les pages plus vite, mais que les personnages évoluent souvent dans le vide spatial ou psychique. La dessinatrice sait transmettre l'état émotionnel des personnages, par leur visage et par leur posture, allant de la gentillesse attentionnée de Jane au refus buté d'Ivanir, en passant par la détermination farouche de Hildegarde au combat. La mise en scène de ces derniers s'avère inventive : la texture de l'entité qui a élu domicile dans le cadavre du Céleste sans tête, les mouvements bondissants de Mirage face à Knull, le massacre des trolls débités en cailloux, l'étonnante opération de couture entre le plan psychique et le plan physique.
Les coscénaristes mettent donc deux valkyries dans des situations bien différentes face à l'inéluctabilité de la mort et son caractère irréversible. Enfin, sur ce dernier point, comme le récit se déroule dans l'univers partagé Marvel et que les valkyries elles-mêmes reviennent aux affaires, tout est relatif. À chacune des deux, il est offert la possibilité de vivre une vie de contentement en leur offrant de rester au stade du déni. Cela donne un goût particulier au récit : l'intrigue reste prépondérante avec sa forme d'aventure et de pouvoirs extraordinaires, mais le comportement de Rūna est en décalage avec celui d'une héroïne bon teint, et celui de
Jane Foster s'en éloigne dans le dernier épisode. Cela ne devient pas une réflexion métaphysique superficielle sur la mort, mais il y a bien une mise en scène touchante de cette tentation du déni pour pouvoir supporter un traumatisme émotionnel.
Le tome se termine avec un extrait d'une aventure des New Mutants en Asgard : la rencontre de Danielle Moonstar avec un cheval ailé, puis avec des valkyries, ce qui la mènera à sa prise de conscience d'un pouvoir qu'elle ne se connaissait. Les dessins d'
Art Adams sont d'une méticulosité telle que la coloriste n'arrive pas à être assez précise avec les moyens techniques de l'époque. Claremont ouvre le futur de ce personnage d'une manière des plus inattendues, et très intrigante.
Troisième tome pour
Jane Foster, cette fois-ci plus axé sur un groupe de valkyries, et une des neuf originelles. La dessinatrice trouve un bon équilibre entre une narration visuelle rationnalisée quant au temps passé pour réaliser ses planches, et une personnalité assez forte pour éviter l'insipidité industrielle. Les auteurs parviennent à justifier la mention de King in Black dans le titre, sans déranger l'événement principal, à rester dans la mythologie de la série Thor, et à évoquer une des phases du deuil.