Deux courtes nouvelles.
Je les ai lues avant
Americanah.
Et maintenant je les relis.
J'ai beaucoup aimé la première nouvelle : Lundi de la semaine dernière, qui m'a laissé une amertume dans la bouche. Trahison pensai-je. C'est une histoire à trois, même à quatre je dirais, car il y a le gosse, le père, la mère absente et elle. Entre nous, il y a une critique féroce du bobo bio américain. Mais là n'est pas la question. C'est surtout un état des lieux du melting pot en Amérique. L'enfant est de « race mixte », la mère est afro américaine, le père est blanc juif et elle est noire du Nigeria. Il ne faut pas prononcer le mot métis.
Que s'est-il passé le « lundi de la semaine dernière » ? La mère, Tracy est apparue dans la cuisine « toute en rondeurs dans ses leggins et son pull moulant ». « Leurs regards se croisèrent » et « Kamara eut envie de maigrir et de se maquiller de nouveau »
Voilà comment on tombe amoureuse. « Ce qui c'était passé à la cuisine cet après-midi là, c'était une éclosion de fol espoir »
Le désir se nourrit de la moindre petite avancée et va crescendo. Jusqu'à la chute (de la nouvelle veuille-je dire). C'est vraiment une belle chute.
La deuxième nouvelle «
le tremblement » qui a donné son nom au livre est (à la deuxième lecture) aussi forte. le récit débute le jour où un avion s'écrasa au Nigeria et où la première dame rendit l'âme. On est à Princeton. le voisin, nigérian aussi et pentecôtiste vient frapper à sa porte pour qu'ils puissent prier ensemble. Il lui tient la main longuement et elle ressentit un bref mais intense tremblement. Pourtant, elle ne se sent pas du tout pentecôtiste, Satan n'est pas son cousin. Mais le voisin, qui devient un bon copain et supporte les affres de son chagrin d'amour, garde son mystère.
Là aussi, la chute de la nouvelle est sans appel.
(Entre parenthèses, il y est aussi question de
Thomas Sankara…)
Après
Americanah, ces deux courtes nouvelles questionnent toujours la place des Africains dans l'autre monde. Chimamanda Ngozi a l'art de nous donner le coup de massue à la fin et là, c'est du grand art.