C'est apparemment un classique de la bande dessinée coréenne. L'auteur était fasciné par les tigres et il n'a apparemment écrit que sur eux, les a dessiné exclusivement. Rien que ces informations suffisent à s'attacher à son oeuvre.
Je n'ai malheureusement pas eu l'occasion de lire le premier tome mais on peut deviner et suivre l'histoire sans véritable problème : c'est une suite de rencontres avec différents animaux, à travers les montagnes et les forêts orientales.
Un scénario on ne peut plus classique surplombe toutes ces péripéties ; le héros, élevé par ses parents qui étaient le roi et la reine des animaux, devient orphelin après qu'un tigre blanc maléfique ait massacré sa famille. Il s'échappe, sauvé par son père qui lui fait jurer de les venger et de redevenir le roi.
J'adore ce genre d'histoire classique, simple et qui n'est qu'un prétexte pour un auteur à l'expression de ses talents, à la mise en valeur de ce qui lui tient à coeur. Ici c'est typiquement le cas :
Ahn Soo-Gil applique ce schéma narratif à des animaux qui le passionnent, ce qui lui donne l'occasion de les représenter sous toutes les coutures.
Le voyage initiatique du jeune tigre l'amène à rencontrer toutes sortes d'animaux jusqu'à ce qu'il se sente assez fort pour affronter le tigre blanc, qui perturbe l'ordre naturel et la chaîne alimentaire en tuant par pur plaisir, sans explication.
D'un point de vue esthétique, c'est vraiment magnifique, je n'y connais rien en technique de dessin donc je ne vais pas trop m'avancer, ça doit être fait à l'encre de chine (?) - mais les décors sont sublimes, on voit le vent balayer ces paysages désertiques et ces arbres.
Le pelage des animaux, les expressions de leur visage et leurs yeux, tout est fait avec minutie et transpire les heures d'observation aboutissant à la transcendance des connaissances naturalistes par la vision artistique.
Dès qu'arrive une scène d'action, c'est là par contre que le bas blesse : les combats sont illisibles, on ne comprend pas ce qu'il se passe, ce qui n'est pas nécessairement dérangeant quand ce n'est pas trop long mais là, la confrontation finale s'étire sur plusieurs pages et on voit finalement les belles et sveltes silhouettes des félins sauter dans tous les sens sans comprendre ce qu'il se passe ...
Une belle histoire donc, classique au possible mais qui permet à l'auteur de rendre hommage à l'animal qui le passionne à travers ses talents de dessinateur !
Je fais un parallèle avec
Dersou Ouzala de
Vladimir Arseniev, journal d'exploration romancé du début du XXème siècle que je viens de lire, qui se déroule dans les mêmes régions et dans lequel le tigre est un personnage à part entière.