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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
°°° Rentrée littéraire # 18 °°°

Royaume-Uni. Une jeune femme embauche une détective privée pour retrouver son compagnon qui a disparu après un voyage à Paris. Point de départ qui semble bien paresseux pour un polar. Sauf que Conquest est un roman de haute volée qui propose une expérience ( c'est vraiment le mot juste ) audacieuse, très éloignée du mainstream littéraire, tour à tour ludique, lucide, cérébrale, inquiétante.

L'intrigue centrale est donc une enquête, à la fois catalyseur qui propulse le lecteur dans des directions inattendues, et ossature à un structure fragmentée parsemée de nombreux textes interstitiels ( notamment des essais sur le cinéma ou la musique ), et tout particulièrement une nouvelle de SF ( totalement inventée par l'autrice ) qui aurait été écrite dans les années 1950 et obsède le disparu, Franck. La Tour raconte comment la Terre a vaincu la planète Gliese. Pour célébrer la victoire et commémorer les nombreux soldats morts, une tour résidentielle est construite à partir d'une roche extra-terrestre prélevée sur Gliese, une roche qui semble vivante et menace l'écosystème terrestre.

On découvre la personnalité de Franck à travers le portrait qu'en dresse sa compagne à Robin, la détective : « C'est comme s'il était au bord d'un précipice et qu'il risquait à chaque instant de tomber parce qu'il est trop occupé à contempler le ciel, les étoiles, les montagnes au loin. » Franck est un génie des mathématiques et du codage informatique, sujet à la maladie mentale, obsédé par Bach ; il fréquente un forum complotiste ufologique qui considère La Tour comme une prophétie codée qui est en train de se réaliser, une guerre interstellaire et l'invasion extra-terrestre ayant commencé, évidemment caché par les gouvernements.

Conquest renvoie une image inquiétante de notre monde avec une sous-couche qui presque être lue comme une allégorie de la crise COVID. C'est le grand roman de l'anxiété, ici représenté par l'obsession complotiste

« La réalité fait peur, surtout avec le changement climatique, surtout depuis la pandémie. Croire aux extraterrestres, c'est comme croire en Dieu : soudain il y a une explication pour tout ce qui va mal dans le monde. Soudain il y a une cause en laquelle vous pouvez croire, une famille toute faite (...) le déclin de la spiritualité et l'essor de la société laïque ont conduit à la fragmentation des systèmes de croyance établis en une multitude de micro-religions.(...) Les théories complotistes sont la nouvelle religion : un systèmes de croyance postmodernes fondés sur un mysticisme ésotérique. »

La proposition est complexe, exigeante du point de vue intellectuel mais terriblement stimulante, conservant le lecteur engagé même dans les moments où il n'y voit pas clair. Nina Allan est parvenue à induire une lecture paranoïaque, en tout cas très proche de la vision du monde de Franck et ses amis complotistes. Même la voix rationnelle du récit, celle de l'enquêtrice, est ébranlée par ce qu'elle découvre sur la disparition de Franck et sa propre histoire personnelle. L'incertitude est permanente, jusqu'au dénouement, proposant un double scénario d'élucidation. le lecteur est sur ses gardes, avançant dans le labyrinthe des vérités cachées du complotisme et du récit.

Ce roman est captivant, assurément brillant. Il mériterait une deuxième lecture de ma part car je ne suis pas sûre d'avoir saisi toute sa richesse.



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Frank Landau est là, peut-être le personnage principal. Génie du codage, on le suit dans ses délires paranoïaques, les agents extraterrestres n-men qui le surveillent, sa passion obsessionnelle pour les "Variations Goldberg" de Bach. On le découvre, fragile et anxieux, apeuré par la guerre qui menacerait l'espèce humaine, par l'invasion extra-terrestre qui a sûrement déjà commencé, sur les forums en ligne où il échange avec d'autres "éveillés" comme lui.

Au moins il a Rachel, un ancrage dans le réel, une passion commune pour Bowie et quelques grammes de douceur.

Et puis Frank n'est plus là, il part à Paris retrouver ses complices du forum et il s'évanouit dans la nature.

Alors que Rachel contacte Robin, une ex-flic devenue détéctive privée pour comprendre ce qui est arrivé à son petit ami, on s'engage avec frénésie dans les recherches, les hypothèses et les hasards qui ne cessent de faire écho entre l'histoire de Frank et celle de Robin, entre une novella intitulée "La tour" (très aboutie) et les théories complotistes les plus invraisemblables (vous ne regarderez plus jamais la moisissure sur votre fromage de la même façon👀).

Ce roman de Nina Allan m'a aspirée dans son labyrinthe sophistiqué de manière irrésistible : si on croit d'abord lire un thriller anxiogène carrément addictif, on se retrouve rapidement confronté à une foultitude de théories d'invasions alien, l'autrice britannique s'amusant à nous faire douter de tout, à coup de vraies ou fausses pistes, insèrant des récits dans le récit, nous balladant avec délectation pour mieux nous perdre et c'est parfaitement exquis!

Débordante de références (j'ai dû en rater des tas) et de réflexions sur le complotisme, sur le rapport complexe de notre époque à la vérité, je ne peux que vous encourager à vous engager entièrement dans cette réjouissante expérience de lecture.

#thetruthisoutthere

Un roman qui sort brillamment des sentiers battus et qui m'a complètement conquise.
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Conquest est un roman tout à fait stupéfiant. Une exploration autour de la façon dont naissent les théories les plus folles, à partir de l'extrapolation de faits et d'une volonté affirmée de les relier entre eux pour leur donner un sens. Ce qui permet autant de construire que de déconstruire. Prenez par exemple Frank, le petit ami de Rachel. Il a toujours été différent des autres, a subi des épisodes dépressifs mais son intelligence hors du commun lui permet d'être un codeur très demandé. Un beau jour, Frank disparaît et Rachel fait appel à Robin, une détective privée pour tenter de le retrouver. Pour cela, Robin va devoir se couler dans l'univers de Frank, ses groupes de discussion, ses centres d'intérêt. Si leurs goûts partagés pour la musique classique semblent naturels à Robin, plus curieuses sont les théories qui émergent des échanges de Frank sur certains forums : il y est question d'une guerre prochaine, de matériau extra-terrestre, et surtout d'un roman de science-fiction paru dans les années 1950, La Tour. Frank et son intelligence ont-ils sombré dans un délire complotiste ou mis à jour des vérités ignorées ?

Si l'enquête menée par Robin permet de révéler des personnalités singulières et de fouiller le passé familial enfoui de certains protagonistes, c'est surtout l'emboîtement des faits et des sources qui impressionne. La manière dont l'autrice interroge la façon dont naissent les idées, se forgent les influences et finalement se racontent les histoires. Elle plonge littéralement le lecteur au coeur de la fabrique qui s'inspire de théories très argumentées autant que de fictions pour finalement ne plus savoir - comme de la poule et de l'oeuf - qui est à l'origine de l'origine. En multipliant les formes, faux rapports et vrais romans à moins que ce ne soit l'inverse, elle parvient à instiller le doute aussi bien dans l'esprit de ses personnages que dans celui du lecteur. C'est assez vertigineux. Néanmoins, je dois avouer que certaines notions me sont passées au-dessus de la tête, que mon inculture sur Bach et mon inappétence pour la musique classique ont rendu certains passages totalement transparents. Si je reconnais et admire volontiers le savant exercice de construction, j'ai déploré tout au long de ma lecture que l'intellect domine le récit et que la démonstration prenne finalement le pas sur tout le reste.

Résultat : un roman que j'ai trouvé brillant, stimulant, très en prise avec des enjeux majeurs de notre actualité mais dont la froideur a empêché un véritable plaisir de lecture faute de proximité, de sensations, d'empathie.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Dans un avenir lointain, la Terre a triomphé d'une guerre acharnée contre une civilisation extraterrestre. En tant que monument à la résilience humaine et à sa propre grandeur, un milliardaire mégalo projette de construire une immense tour résidentielle en utilisant une roche unique extraite de la planète natale des extraterrestres. Cette roche est d'un noir profond et dégage une chaleur intrigante. Cependant, que se passerait-il si elle était également douée de vie ?

Ainsi se déroule l'histoire de "La Tour", la nouvelle centrale du roman brillamment ludique de Nina Allan, présenté sous forme d'extrait du livre du même nom, écrit par un romancier fictif presque oublié du milieu du XXe siècle.

Cependant, la trame principale de Conquest se déroule à notre époque, où un groupe de théoriciens du complot en ligne considère "La Tour" comme une prophétie exacte d'une future guerre universelle. Cela est bien entendu connu des gouvernements terrestres, qui ont un programme secret de super-soldats et qui sont peut-être en train d'éliminer ceux qui en savent trop.

Robin, ancienne policière devenue détective privée, est entraînée dans cette atmosphère fragile lorsqu'elle est chargée d'une affaire de personne disparue. Un homme nommé Frank, génie des mathématiques et du codage sujet à des troubles mentaux, a été invité par des inconnus mystérieux sur un forum de conspirateurs à le rencontrer en personne à Paris, et il n'est jamais revenu.

Sa petite amie, Rachel, embauche Robin pour le retrouver. Cela implique de se rendre dans un hôtel morne à Scarborough, lieu de la récente disparition suspecte d'un journaliste, et dans une petite ville d'Écosse où quelque chose d'étrange aurait pu atterrir dans les bois.

Aussi cérébral soit-il, Conquest est également poétique, célébrant "la lumière safranée du fin d'après-midi" dans la banlieue londonienne, tout en étant ludique et souvent humoristique.

Allan semble clairement prendre plaisir à inventer des critiques hostiles pour son propre roman fictif. Elle se montre perspicace et amusante sur la psychologie des théories du complot.

Allan parvient habilement à maintenir ouvertes toutes les interprétations possibles des événements comme plausibles - jusqu'à la toute fin.

Dans ses thèmes de désinformation, de possibles chevaux de Troie microbiologiques et de conspiration, Conquest peut également être lu dans son ensemble comme une allégorie joyeusement fantastique et élaborée de la Covid-19 ; si tel est le cas, c'est certainement le meilleur livre à émerger de la pandémie jusqu'à présent.
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