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Patrick Laupin (Préfacier, etc.)
EAN : 9782355770104
344 pages
La rumeur libre Editions (30/06/2009)
4.38/5   4 notes
Résumé :

En 1954, frappé du verdict sans appel d'inaptitude à la vie religieuse par la Société de Marie qui lui interdit de renouveler ses voeux, Marius Alliod perd sa raison d'être en ce monde. À l'âge de 24 ans, il se voit exilé dans une forteresse de silence, bien loin de l'espace enchanté où son coeur s'était enflammé. C'est près de cinquante ans plus tard qu'il entreprend cette correspondance fi... >Voir plus
Que lire après Une Douleur de l'Ame : Trente lettres, Itinéraire d'une vocation religieuse contrariée dans la décennie 1950-1960Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Une douleur de l'âme de Marius Alliod est l'exploration passionnée d'une blessure psychologique traumatique de l'adolescence, qui hante encore l'auteur des années plus tard. C'est aussi le témoignage d'une époque précise, la décennie des années 50-60, de l'immédiat après-guerre jusqu'à mai 68. C'est encore la description d'une société, tant séculière que laïque, restée autoritaire et hiérarchisée jusqu'au mouvement de révolte étudiante de mai 68. Et surtout, c'est l'effort farouche d'un être blessé dans son âme à retrouver le sens de sa vie.
J'ai été ravie de recevoir ce livre. le sujet déjà m'attirait : mon propre souvenir des années 60, mon métier d'accompagnement auprès des étudiants et des adultes en reconversion professionnelle et, dans l'exercice de ce métier, ma rencontre improbable avec un prêtre défroqué qui avait renoncé à ses voeux pour se marier. Il avait un grand besoin d'écoute et de soutien, pour trouver un travail et retrouver ses marques dans la société civile. Il avait été peu aidé dans sa démarche par ses pairs, et en gardait une certaine souffrance.
Une douleur de l'âme s'ouvre sur l'avant-propos écrit par l'auteur, suivi par la préface de Patrick Laupin. Il est intéressant de lire ces deux textes pour mieux prendre en compte le contexte des années d'avant Vatican II, le concile achevé en 1965 qui bouleversera l'Église, sans pour autant avoir pu réaliser son souhait d'ouverture complète au monde moderne. En 1954, Marius Alliod reçoit sans ménagement l'interdiction de renouveler ses voeux et est exclu de la congrégation La Société de Marie où il a passé cinq années d'études et fait ses premiers voeux.
Cinquante ans après, il entreprend d'écrire trente lettres fictives à celui qu'il nomme son père. Des lettres bouleversantes, passionnantes, d'une qualité d'écriture exceptionnelle. Je ne dis pas qu'elles sont faciles à lire : j'ai souvent ouvert le dictionnaire pour préciser un terme, une action, un titre. Mais leur notation permet de garder le fil de l'histoire et si on le perd, il est aisé de le retrouver ! de plus, la table des matières est très bien faite.
Trente lettres pour comprendre un univers inconnu. Trente lettres qui se côtoient, se répondent, sondent les coeurs, disent les actes injustes, bercent les douleurs indicibles. Trente lettres pour accompagner un chagrin immense, trente lettres qui vont et viennent comme le ressac des vagues sur la grève. Trente lettres où peu à peu se dessine un destin plus heureux pour un être qui s'approprie ce qu'il a subi, un être qui comprend et reprend confiance en lui. Un apaisement enfin.
Je remercie Babelio (masse critique privilégiée) pour cette découverte et les éditions La rumeur libre pour l'envoi de ce très beau livre.
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En son sens profond ce livre est une autobiographie, une confession si l'on veut, une expérience intérieure, qui témoignent de l'énergie de la vie nécessaire pour explorer les rapports perdus et renouer les fils fragmentés d'une histoire. L'auteur fut l'objet d'une discrimination, d'un harcèlement moral. Sur le mode épistolaire il relate son éviction de la cléricature, la notification de son renvoi et la brutalité de ce rejet.

Les phrases avancent dans la droiture directe du prisme de cette douleur où la vie recherche l'éclair et la force animée au dedans.
Elles ont le charme et l'exubérance légère des revenants des ténèbres. Elles sont presque guéries, délivrées, sauves et impénétrables. Elles ont l'allégresse et le côté imperturbable de ceux qui reviennent des chocs profonds du langage. de ceux qui reviennent de la détresse folle, surnaturels, insensibles presque, légers, désinvoltes, vêtus de la platitude immense de la terre. C'est au coeur du silence qu'elles nous parlent et témoignent, nous rejoignent.
La nervure musicale, le tact, la tessiture et la syntaxe de la phrase, empruntent aux idées claires et distinctes du grand style des Méditations. Ils en ont le génie tactile de transmission, la pensée de l'autre en acte, l'intuition étonnante de la faille par où on se relève. Patience et amitié du signe annonciateur leur puissance avertie du silence se tient dans le site et l'oracle d'une intuition prêtée à tout le monde.

Ce livre bouleverse parce qu'il explore les recoins où on se perd faute du signe qu'on attend en espérance de l'autre. Il tient à ce fait élémentaire dont les légendes hantent la communauté des souffrants. Appeler quelqu'un au moment où on en a un besoin vital et qu'il défaille à notre appel. Alors pour se protéger du danger on devient soi-même présence diaphane qui s'éloigne quand on recherche éperdument l'assiduité de notre âme et l'épaisseur de son sens. On se fait corps vivant de la blessure et on côtoie la tentation du nihilisme extrême qui consiste à s'oublier soi-même pour se dédouaner du démonisme de l'autre.

Ces pages nous rappellent ce fait élémentaire qui unit la chair et le verbe en une pente naturelle de toutes nos pensées. Quiconque écoute tient en vie son prochain. Mais ce gravir est comme précédé d'un ciel de toutes les douleurs à l'envers.
Ce livre a nom sans bruit, il a pitié du très seul, il se tient dans la droiture de son évènement, son silence contient autant de vertige qu'un brin d'herbe au matin.

préface de Patrick Laupin
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"Une douleur de l'âme" de Marius Alliod est une oeuvre autobiographique basé sur une correspondance de 30 lettres fictives entre l'auteur et celui qu'il nomme son père.

Dans ce récit d'une époque révolue, l'auteur y parle de ses blessures psychologiques en témoignant de son vécu et de sa vocation contrariée au travers d'une société hiérarchisée et d'un cadre vie autoritaire des années 50-60 à celle de l'après-guerre en allant jusqu'à mai 68.

Ce livre en forme de psychanalyse lui a d'une certaine manière permis de panser un peu ses blessures car comme il lui ai rappelé dans une de ses lettre :
les faits sont les faits, il est inutile de revenir dessus et que au contraire, il faut agir pour prouver que les décideurs ont eu tort.

Merci à Babelio et à la maison d'édition "La rumeur libre" de m'avoir fait découvrir cette ouvre poignante grâce au concours masse critique.
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50 ans après avoir été renvoyé de la congrégation religieuse Sainte Marie qui lui a refusé de renouveler ses voeux, Marius Alliod, à 86 ans, écrit 30 lettres fictives à son père spirituel car, profondément blessé il n'a toujours pas accepté cela. Ce qui est absolument touchant et dramatique, c'est de voir à quel point les décisions arbitraires ou du moins sans explications peuvent ruiner une vie. Marius Alliod n'a jamais pu tourner la page et a trainé ce fardeau toute sa vie simplement parce qu'il n'a pas compris pourquoi la congrégation, après 5 années d'études, n'a pas voulu qu'il poursuive dans la voie de la prêtrise. Ces lettres sont magnifiques, le riche vocabulaire est finement choisi, on comprend le carcan de l'église catholique avant Vatican II, les contraintes sociales qui pèsent sur un novice qui n'a pas pu aller au bout de sa vocation mais jamais Marius Alliod ne se présente réellement. D'ailleurs, une lettre de son père spirituel datée d'octobre 2007 lui rappelle que les faits sont les faits, qu'il est inutile de revenir dessus et que au contraire, il faut agir pour prouver que les décideurs ont eu tort. Marius Alliod a manqué de soutien pour justement aller de l'avant et guérir de cette blessure. Il s'agit ici d'une vocation contrariée, mais combien de personnes âgées ne ressassent elles pas des injustices subies au cours de leur vie?
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
En tout cela, le processus salutaire de deuil qu'il eût été raisonnable d'ouvrir pour reconstituer les capacités qu'on a dans la jeunesse d'affronter l'avenir et de laisser advenir librement les possibles dont il est riche, n'a jamais pu se réaliser. Pour qu'une anticipation de cette nature à la fois généreuse et réaliste du futur puisse se produire et concourir à me faire dépasser les ornières d'un itinéraire aussi contrarié, les supérieurs n'auraient pas dû se contenter de clôturer mon avenir par une orientation diagnostique mais m'inviter à repenser mon parcours et à en sonder les promesses au cours d'un vrai travail en commun sur mon "Histoire de vie" au sens de Desroches et à entrer pour finir dans l'intelligence de cette aphorisme parfaitement limpide que j'emprunte à P. Meirieu et Granger. Paravy : "il y a bien une efficacité du regard et tout peu changer quand un sujet s'adresse à un autre avec une espérance d'humanité, une confiance et une ouverture qui n'ont pas besoin de discours pour être compris, un accueil qui sait se réjouir à l'avance de l'inattendu". Le contraire, en un mot, de l'attitude des supérieurs.
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L'adresse déployée dans la manipulation des écarts de sens qui ponctuaient son discours, pouvait-elle couvrir la violence des assignations dont j'étais l'objet de la part du Conseil Provincial ? Fallait-il oublier qu'en plus de toutes ces blessures narcissiques que je ne pouvais mettre à distance faute de posséder le code approprié, une sanction lourde, aux allures totalitaires, avait été arrêtée contre moi, devant laquelle il m'eût été difficile de faire valoir mon droit à la défense, puisqu'en dehors du résultat final d'exclusion pure et simple dont j'avais eu à supporter les conséquences, aucun débat contradictoire n'avait eu lieu, aucune enquête ne s'était déroulée, ni aucune confrontation amiable n'avait été autorisée.
A l'heure ou de tels excès sont en voie de disparition, on peut seulement se demander comment ils avaient pu s'installer dans les modes d'administration de la vie religieuse, sans provoquer l'indignation salutaire qu'ont suscitée dans l'opinion d'autres systèmes totalitaires de gouvernances.
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