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4,3

sur 5716 notes
Formidable succès de la rentrée littéraire de 2023, Veiller sur elle compte à l'heure où j'écris ces quelques lignes 3000 lecteurs sur Babelio. S'il nous faut des points de repère, cela représente plus d'initiés que le rivage des Syrtes de Julien Gracq, ce qui le met à quelques lecteurs de la ferme africaine de Karen Blixen...
Et il ne s'arrêtera pas là, car la liste des lauréats des grands prix de l'automne n'est toujours pas officialisée ; et si par chance, il l'emportait, ce serait le cadeau idéal à placer sous le sapin de fin d'année.

Alors qu'apporterait ma chronique aux 211 critiques déjà postées sur le site?

Une adhésion déjà…car j'avoue m'être fait aussi embarquer par le souffle romanesque du récit relatant la vie de Mimo Vitaliani, petit homme d'1m40, mais grand sculpteur et auteur d'une Piéta scandaleuse, à telle enseigne qu'elle fût coffrée et gardée au secret pendant 40 ans. Que cache cette oeuvre d'art? Pourquoi Mimo l'a veillée aussi longtemps? Oui, j'ai marché...désireux d'avoir la réponse à ces énigmes au fil des pages et de la vie trépidante de Mimo, emporté comme tous par le torrent de la grande Histoire et les soubresauts du XXème siècle.

Mais aussi une réserve…Ce romanesque se fait aussi au prix d'invraisemblances qui apparentent parfois ce roman à un conte pour enfants. A la centième page, en soupesant le livre, je me suis dit “non, je ne le lirai pas en entier”. Il y a aussi cette double narration : enchaînement de la voix de Mimo à la 1ère personne et de celle du gardien à la 3ème personne, censée dynamiser le récit, et qui, à mon sens, ne rend pas toute sa puissance.

Mais malgré cela, cela fonctionne, la magie opère…
Aussi malgré les longueurs.
Alors je me suis dit que peut-être, c'est ce qu'il fallait, de la même manière que Mimo fait oeuvre de patience pour révéler l'intimité d'un instant à partir d'un bloc de marbre brut, Jean-Baptiste Andrea est l'artiste de la révélation. Que c'est la fonction de la littérature de faire émerger de la matière quelques instants, mêmes rares, de l'ordre du divin.

Pour cela, merci et longue vie à “Veiller sur elle”!
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Un roman comme je les aime qui m'emporte dès les premières pages.
Je suis partie en Italie, et plus particulièrement dans le Piémont, qui se trouve être le berceau de mon grand-père paternel qui m'a fait rêver, enfant, quand je l'entendais raconter la lumière, les odeurs, les villages.
Je suis partie à la rencontre de deux adolescents qui n'auraient jamais dû se rencontrer et dont l'amitié-amour traverse toutes les vicissitudes de la vie et les transcende. Ils mènent le même combat, celui contre le regard que la société pose sur eux qui sont différents et contre le rôle qu'elle leur assigne : un nain ne peut être que dans un cirque et une femme ne peut qu'être mère et épouse, confinée à l'espace familial.
J'ai rencontré nombre de personnages hauts en couleurs; certains sont attachants, émouvants, d'autres écoeurants mais aucun ne laisse indifférent.
Je suis partie à la rencontre de l'art, personnage principal de ce roman ; l'art qui émeut, l'art qui élève, l'art qui porte en lui l'âme de l'artiste. La sculpture qui arrache la beauté à la gangue, qui révèle l'enfoui nous fait découvrir le travail de la pierre, la vision qui se dégage après quelques coups de burin. Bien sûr, je suis allée voir sur Internet "La Pietà" de Michel-Ange car on ne peut qu'y penser en lisant ce roman et je l'ai regardée différemment, plus intensément, plus profondément.
Je suis partie pour la première moitié du XXème siècle qui sert d'arrière-plan avec la première guerre mondiale et la montée du fascisme en Italie. L'auteur a réussi à mêler avec brio des personnages historiques comme Eugenio Pacelli devenu le pape Pie XII, Brancusi, Bartolomeo Pagano, acteur italien connu sous le nom de Maciste et des personnages de fiction à tel point qu'on finit par se demander si Mimo et Viola n'ont pas réellement existé.
Le souffle épique, mâtiné d'un humour ironique, les personnages éminemment romanesques m'ont fait passer un très agréable moment d'évasion littéraire.
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Ce roman de 581 pages qui a obtenu le Prix Goncourt 2023 a l'avantage de nous plonger dans l'Italie du XIX ° siècle de 1904 à 1946 ! Italie chère à Jean-Baptiste Andrea dont la mère est d'origine italienne, Italie qui va lui servir de toile de fond pour y rencontrer les Arts, la musique et quelques chefs d'oeuvre célèbres !
Mais, nous sommes en 1986 à l'abbaye de la Sacra ou un homme : Michelangelo Vitaliani agonise entouré des moines et en particulier du Padre Vincenzo ! Cela fait 40 ans qu'il s'est réfugié en ces lieux pour fuir sa vie, sa gloire, ses sentiments et le fait qu'étant devenu aveugle, il ne pouvait plus sculpter ! Il se remémore son passé :
Mimo est né en 1904 dans une famille pauvre d'origine italienne et, après la mort de son père, sa mère décide de l'envoyer à Pietra d'Alba chez un oncle : le Zio Alberto qui est sculpteur comme l'était feu son père. Mais, le Zio ne veut pas d'un " nabot" pour apprenti, car Mimo est atteint de nanisme, finalement il prend les économies de la mammina et se sert de lui comme esclave ! Il se lie d'amitié avec Alinéa ( Vittorio ) et profite des absences de son oncle parti chercher des clients, des occasions de boire et de fréquenter les bordels pour sculpter des petites oeuvres. Lors d'une visite du cimetière, il fait la connaissance de Viola Orsini : une aristocrate qui écoute les morts, veut voler comme Icare et surtout s'évader de l'emprise de sa famille ! Ils vont se rencontrer secrètement et s'aimer d'un amour fort et platonique !
Viola veut s'affranchir des conventions imposées par ses parents et ses frères mais un jour, elle fait une grave chute et, guérie : elle s'enferme dans le palais en rejetant tout lien extérieur y compris Mimo, son jumeau cosmique !
Mimo dont le génie commence à être reconnu part à Florence ou travaille avec Bizzaro un juif qui a un cirque, il mène une vie dissolue, fréquente les bouges, boit outre mesure et rencontre le professeur Metti puis le frère de Viola, prêtre ambitieux à Rome le fait revenir dans l'atelier de Pietra pour qu'il exécute la sculpture d'un monument funéraire destiné au Pape, il va lui trouver un logement à cet effet à Rome....Viola s'est mariée avec un avocat arriviste mais elle renoue avec Mimo ! Lui est devenu riche, célèbre surtout grâce à sa fameuse Piétà et, Viola ne peut pas affirmer sa personnalité au sein de sa famille oppressante qui ne pense qu'à ses intérêts financiers et au " standing " des Orsini !
Un roman qui nous fait entrevoir le sort de l'Italie qui va basculer vers le fascisme puis vers la royauté pour arriver à la république ! Une page d'histoire trop vite tracée car pour l'auteur : outre l'histoire d'amour entre deux êtres que tout oppose, c'est la Piétà Vitaliani qui est la plus valorisée !
Le style est agréable mais le roman manque de charisme, de romanesque !
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Qui est cette Elle sur qui il faut veiller ? Elle, a poussé Mimo à se cloîtrer dans un monastère, sans toutefois y prononcer des voeux. Sous la plume de Jean-Baptiste Andréa, il nous conte sa vie ses dernières heures venues. Mimo, c'est Michelangelo Vitaliani. Il a deux handicaps dans la vie. Celui d'être né dans une famille pauvre, mais surtout celui d'être différent. Il est de si petite taille qu'on le traite de nain. Mais il a un atout énorme. Celui de son art. Il est un sculpteur au talent inouï. Au point de rivaliser avec l'autre Michelangelo, le grand, l'auteur de la Pieta qui trône en la basilique Saint-Pierre du Vatican à Rome.

Elle, ce pourrait être Viola. Elle est la fille de la grande et richissime famille Orsini de laquelle sont issus plusieurs papes. Mais comment un nain, qui plus est de basse extraction, pourrait-il seulement lever les yeux sur pareille descendance. Aussi fantasque fût-elle ? N'a-t-elle pas l'idée de voler avec une aile de sa fabrication.

C'est pourtant ce qui arrive. Parlera-t-on d'idylle entre ces deux personnages ? Pareille union abonderait à l'expression du mariage de la carpe et du lapin. Mais une idylle quand même, oui. En forme d'amitié amoureuse. Parfois orageuse, mais toujours fidèle. Une de celle qui ne trouve d'assouvissement que dans l'espoir. Espoir d'on ne sait quoi. Sans cesse relégué, aussi fuyant que la ligne d'horizon.

A moins que l'assouvissement de cette idylle, ce ne soit cette sculpture, cette caresse au marbre pur qui a façonné un visage si doux. le visage de la Vierge, si parfait qu'il est sacrilège aux yeux de l'Eglise. A la mémoire du grand Michel-Ange. La Pieta de Mimo fait de l'ombre à celle du maître. Aussi a-t-elle a été confinée en un lieu que très peu connaissent.

Mimo, Viola, un amour qui a trouvé son accomplissement, son triomphe dans l'immobilité d'un visage aux traits divins. Un visage de marbre. Un visage à la beauté céleste, inaltérable. Comme l'amour quand il n'a pas été corrompu par les bassesses de la vie terrestre.

Un roman à la puissance romanesque prodigieuse, porté par une écriture aussi fluide que les traits du visage de la Pieta. Celle de Mimo.


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Elle n'est pas désagréable à lire, enfin dans mon cas à écouter, cette histoire de Michelangelo Vitaliani, surnommé Mimo, qui va nous accompagner tout au long, ou presque, d'un XXème siècle italien empli de bouleversements, historiques, politiques, sociétaux, culturels..., de ses débuts d'apprentissage chaotiques dans un atelier de sculpture pendant la Première Guerre Mondiale, jusqu'à la fin de sa vie qui l'a consacré comme l'un des plus grands sculpteurs de son temps, auréolé du mystère entourant sa Pietà réalisé des années plus tôt, et sa propre disparition, en passant par sa rencontre déterminante, durant l'adolescence, d'avec Viola Orsini, jeune fille de l'aristocratie éprise de liberté et d'un avenir éloigné de ce qu'exigent son sexe et sa position.

Mais, alors que les ressorts romanesques sont nombreux et riches, que l'histoire se tient, que les personnages sont plutôt bien campés, Veiller sur elle pèche à mon sens d'un style, d'un vrai souffle romanesque pour les porter. J'ai en effet trouvé que l'ensemble restait assez plat, assez calibré prix littéraire français - disons les choses comme je les ai personnellement ressenties -, et était bien loin de Cent milliards d'années et un jour, seul roman lu jusqu'à présent de l'auteur, mais dans lequel l'on pressentait une patte beaucoup plus personnelle, qui semble s'être un peu perdue en chemin.

J'avoue que le parcours de Jean-Baptiste Andrea me fait penser à un autre Jean-Baptiste, del Amo cette fois, dont j'appréciais l'originalité stylistique jusqu'au Fils de l'homme qui a, justement, remporté le prix du roman Fnac, avec un roman plus policé. Prochaine mission : m'atteler aux romans précédents, pas encore lus, et publiés auparavant, pour confirmer, ou infirmer mon propos.

Je remercie les éditions Lizzie et NetGalley de m'avoir permis la découverte de ce roman en version audio, avec une lecture de Léo Dussollier et Lila Tamazit impeccable, toute en nuances parfaitement adaptées au personnage même de Mimo, plutôt attachant et dans le même temps assez insaisissable.
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Quel bon cru que ce Goncourt 2023 !

Un roman qui donne envie d'en savoir plus. Qui donne envie d'aller se documenter sur la période de l'Italie de l'entre deux guerres (squadristes, Homme nouveau...), qui donne envie d'aller dans les musées contempler les sculptures, plus particulièrement celles en marbre.

Une chose est certaine, vous ne les regarderez plus d'un même oeil après avoir lu ce roman ! Vous les détaillerez, vous en ferez le tour, vous en observerez les contours, vous ne les négligerez plus en passant votre chemin trop vite pour aller voir les tableaux de maître ! Vous serez en admiration devant certaines d'entre elles et ne manquerez pas de penser au génie de son créateur et à l'incroyable travail qui donne forme à un simple bloc de marbre rectangulaire.

Oui, quelle belle histoire que nous raconte Jean-Baptiste Andréa.

Celle de Viola et de sa famille : les Orsini. Une lignée qui fait référence aux grandes familles romaines. Les Orsini vivent à Pietra d'Alba, en Ligurie, quelque part dans le nord de l'Italie. Belle villa, domestiques, du foncier mais des finances au ras des pâquerettes. Dans l'intérêt de la famille, il est plus que souhaitable que Viola fasse un beau mariage !
Viola Orsini a trois frères. L'un est mort lors de la première guerre mondiale, le second va évoluer dans la mouvance de l'Italie fasciste de l'entre deux guerres et le dernier va servir l'église catholique jusqu'à devenir un haut dignitaire religieux.
Viola est une jeune femme au tempérament affirmé. Elle a soif de connaissance, soif de liberté. Elle n'est pas soumise. C'est une femme debout, comme elle aime à se définir.

Et puis il y a Michelangelo Vitaliani (Mimo). Il est plutôt beau gosse mais sa très petite taille sera son handicap. Son entourage va se rendre compte que c'est un sculpteur de génie. Dès lors, il va connaître une ascension fulgurante. Cependant, il manque de tempérament et peut se vendre au plus offrant, en l'occurrence accepter les grandes oeuvres pour la gloire de l'Italie fasciste. Heureusement il se rachètera en refusant des honneurs et en réalisant une Piéta tellement hors-norme qu'elle peut perturber ceux qui la contemplent ! Dès lors, le Vatican décidera de ne plus l'exposer au commun des mortels. Mimo, désormais reclus dans une abbaye dans cette deuxième partie du vingtième siècle, se contentera de « veiller sur elle » jusqu'à sa mort.

Entre Viola et Mimo existe un lien indéfectible depuis qu'ils se sont connus à l'aube de l'adolescence.

C'est leur histoire que va nous raconter Jean-Baptiste Andréa dans une écriture fluide, savante, poétique, artistique et très bien documentée. Et leur histoire s'insère parfaitement dans l'Histoire de l'Italie : les personnages fictifs sont en contact avec des personnages ayant réellement existé.

Vous ne perdrez pas votre temps en lisant ce roman et je ne doute pas que vous irez voir, entre autre, à quoi ressemble la Piéta de Michel- Ange si vous n'en avez pas idée.
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Un roman, un vrai de vrai, des personnages et une histoire, un lieu et des phrases sur lesquelles on s'arrête, une amitié et des oeuvres d'art. Tout se bouscule ici tant on voudrait y croire à cette histoire. Et même, aller chercher sur internet la photo de la Pieta de Vitaliani. Pour continuer la magie du roman (si si je l'ai fait ! Presque déçu de n'apprécier que celle de Michel Ange du coup). On s'attend à un roman, on a un bout de vie de nous qui s'y agrippe. On s'attend à un grand homme, il n'est pas vraiment un nain. On s'attend à de la simple sculpture, c'est du Grand Art (se définition de "sculpter", superbe). On 's'attend à de l'amour, c'est bien plus intemporel, c'est une amitié sans commune mesure. On s'attend, enfin, à un homme, il s'agit d'une femme (là faut l'avoir lu, mais chuuuut !). D'une certaine façon, on prend chacun(e) le relais pour veiller sur "elle" : la force de ce type de roman qui sort de ses lignes et vient empiéter notre concret, qui s'envole autour de nos têtes et vient poser une main poétique sur nos épaules, qui vient nous dire "je viens de m'ancrer en toi" . Il y a des romans qu'on oublie pas, c'en est un, définitivement sacré Goncourt.
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Voilà ce qu'on attend d'un grand romancier : une histoire bien construite, des rebondissements, des personnages inoubliables, une atmosphère, un souffle, un subtil mélange de lyrisme et d'érudition. Et même si la ficelle narrative est un peu usée (le héros parviendra-t-il à honorer bibliquement l'héroïne ?), Dieu qu'elle est fine et bien tressée !
Mimo Vitaliani a été abandonné à son destin par sa mère. Viola Orsini est la fille unique d'une famille de nobles que ses rêves agacent.
Orphelins, ils décident de veiller l'un sur l'autre. Parce qu'ils se déclarent « jumeaux cosmiques », ils s'interdisent d'assouvir leurs désirs inavoués. Leur amour est d'un ordre supérieur, trop parfait pour devenir charnel, trop enraciné dans le sol de Petra d'Alba pour finir spirituel.
De leurs rendez-vous manqués, de la cruauté des temps, Mimo retiendra la force qui guidera sa main de sculpteur génial (« Il fut dans son domaine ce que Marlon Brando serait aux acteurs, Pavarotti aux chanteurs, Sabicas à la guitare. Un artiste instinctif, doué d'un talent inné, inexplicable – y compris par lui-même »). Jusqu'où ? Jusqu'à la perfection, au divin, à l'éternité d'une oeuvre qui révèle au monde la beauté révolutionnaire de Viola.
Quand un écrivain français s'empare de l'Italie, le résultat est souvent pitoyable : clichés, mépris et fautes d'orthographe. Jean-Baptiste Andrea est l'exception qui confirme la règle. Sans doute parce qu'il vit l'Italie plus qu'il ne s'essaye à la décrire. Merci !
Jean-Baptiste Andrea m'avait enthousiasmée avec « Ma reine », un peu ennuyée avec « Cent millions d'années et un jour ». Il m'a comblée avec son merveilleux « Veiller sur elle ». Et dire que ce magnifique roman a peu de chance de remporter le Goncourt parce que des écrivains de salon, moins talentueux mais mieux introduits, publiés par des maisons connues, ont trouvé place dans la sélection.
À moins que se reproduise le petit miracle de Philippe Rey en 2021. Forza L'Iconoclaste !
Bilan : 🌹🌹🌹
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Énorme coup de coeur, après le Parlement des Instincts de Philippe Cavalier, et encore le mot est faible tant ce livre est une merveille à l'état pur, une pépite à l'état brut.
Une fois n'est pas coutume, je vais me contenter d'un billet qui sera simple, et basé juste sur les émotions provoquées par cette lecture.
Et il y a au moins 3 ans que je n'avais pas lu un ouvrage qui restera marquant et marqué dans mon for intérieur.
En effet déjà 48 critiques au compteur, et je n'ai pas envie de me. Relancer dans un énième résumé de l'histoire.
Mais juste d'extraire passages, qui mettent en lumière le ou les ressentis, de cette lecture, juste en les mettant en abîme avec ma lecture :

- Page 130 "chaque coup de marteau venait de loin et s'entendrait longtemps" / chaque mot posé sur ces pages portaient en eux une beauté qui venait de loin et réssonerait longtemps en moi ;

- Page 221 "Florence, années noires. Une bonne accroche pour mon biographe, même si je ne soupçonnais pas encore qu'on s'intéresserait un jour ma vie. Je soupçonnais encore moins que quand quelqu'un s'intéresserait ma vie, je ferais tout pour lui compliquer la tâche.
Mes frères, lorsque j'aurai poussé ce dernier souffle qui résiste encore, portez-moi au jardin. Enterrez-moi sous une belle pierre blanche, de ce Carrare que j'aimais tant. N'y gravez pas de nom, surtout. Laissez-la douce, lisse à s'y allonger. Je veux que l'on m'oublie. Michelangelo Vitaliani, 1904-1986, a dit tout ce qu'il avait dire." /
Jean Baptiste Andrea se fait le magnifique biographe romanesque de Michelangelo Vitaliani et nul besoin de nom tant ce personnage tant son histoire et sa vie sous la magnifique plume de l'auteur se passe de surenchère. Nul besoin d'épitaphe. Une fois le livre refermé la vie de Michelangelo Vitaliani créé dans le lecteur une rémanence inconsciente comme peu de personnages romanesques sont capable d'en provoquer ;

- Page 291 "Son directeur de thèse, autrefois, avait eu cette phrase surprenante, en lui remettant son doctorat cum laude : Vous avez étudié de longues années pour rien, Williams. Rien de ce qui fait l'art, le vrai, n'est explicable ici, puisque l'artiste lui-même ne sait pas ce qu 'il fait. / Je ne sais si Jean Baptiste Andrea savait ce qu' il faisait en écrivant cet ouvrage. Une chose est certaine, et subjective, c'est du grand art que ce livre. Un de ces ouvrages qui instille en vous, pour y déposer une marque indélébile, comme une parenthèse, une persistence qui s'installe et qui fait que le simple fait de poser un regard sur cette couverture fait remonter des sensations de lecture à nulles autres pareilles. La première étant de vouloir le relire....

- Page 307 "partout où j'ai vécu l'exception du monastère où je m'éteins, et de Pietra d'Alba bien sûr —, j'ai éprouvé le besoin de repousser l'aube." / J'ai éprouvé chaque jour de lecture, chaque jour les pages défilaient, chaque jour je savais qu'il faudrait en arriver au terme du livre, chaque jour je sentait que ce mot, terrible, fin approchait. Et bien j'ai éprouvé le besoin de repousser le temps, de prendre mon temps, de perdre mon temps dans cette lecture....

Alors a ceux qui l'ont lu je dirais que tramontane, sirocco, libeccio, ponant et mistral,  l'on emporté sur toutes mes résistances...
Et pour ceux qui ne l'ont pas encore lu laissez-vous emporter par la tramontane, le sirocco, le libeccio, le ponant et le mistral et vous comprendrez...

Deux remarques pour terminer
Comme je l'avais écrit pour le Parlement des Instincts, ce livre qui mérite non pas 5 ou 6 étoiles, mais bien plus que cela...
Je rejoins l'avis le l'auteur ou de Mimo concernant l'une des plus belles statues de tous les temps – la plus belle, diront certains – sourit à tous ses visiteurs, sans exception. [...] Difficile d'imaginer qu'elle fut, un jour, une simple montagne. La montagne devint carrière à Polvaccio. On en tira un bloc de marbre, qu'on livra à un homme au visage fruste, marqué par une bagarre avec un confrère jaloux. L'homme, fidèle à sa philosophie, attaqua la pierre pour libérer la forme qui s'y trouvait déjà. Et la femme parut, d'une beauté insensée, penchée sur son fils abandonné dans un sommeil de mort sur ses genoux. Un homme, un burin, un marteau, de la pierre ponce. Si peu de choses pour donner naissance au plus grand chef-d'oeuvre de la Renaissance italienne. La plus belle statue de tous les temps, et elle s'était simplement cachée au fond d'une pierre. Michelangelo Buonarroti eut beau chercher, hurler, il n'en découvrit plus de pareille dans le moindre bloc de marbre.

Jean Baptiste Andrea démontre, à l'instar du sculpteur, qu'un homme, un burin semblable à une plume, un stylo, un simple crayon à papier. Si peu de choses peuvent donner naissance à un livre remarquable... Et pour ces heures de bonheurs de lecture soyez-en remercié
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Jean-Baptiste ANDREA. Veiller sur elle.

550 critiques pour cette pépite. Une récompense a enfin été décernée à son auteur. Il aurait, à mon humble avis, dû recevoir un prix lors de la parution de son précédent roman ; « Des Diables et des Saints». Mais je n'appartiens pas à l'aréopage des votants pour l'attribution des grands prix littéraires ! ! !

Nous sommes en 1986. Michelangelico Vitaliani, dit Mimo, un ancien sculpteur vit depuis plus de quarante années au sein d'une congrégation religieuse. Il n'a pas prononcer ses voeux. Il est âgé de plus de quatre vingts ans. Pourquoi a-t-il cesser de sculpter et de produire toutes es commandes émanant de nombreuses familles riches ? Il s'est retiré dans ce couvent suite à la cécité qui l'a atteint. Il est en fin de vie, veiller par les religieux. Au cours de cette veillée funèbre, il se remémore son existence et nous la transmet. A l'âge de treize ans, sa mère, veuve, l'a confié à un oncle sculpteur et envoyé en Italie, en Ligurie. Ce jeune adolescent est atteint de nanisme. Son oncle va profiter de cette main d'oeuvre bon marché. Au village la famille Orsini règne sur la région. Cette riche famille possède une somptueuse villa nantie de statues, d'ornements et fait réaliser les réparations par l'oncle de Mimo. Mais l'oncle alcoolique ne travaille pas : c'est Mimo qui effectue les réparations et qui sculpte les divers ornements.

Lors de leurs interventions dans cette superbe résidence, Mimo va rencontrer Viola la fille de cette famille. Bien que tout les opposant, une riche, un pauvre, une jeune femme belle, une enfant très douée intellectuellement et un jeune garçon ignorant mais avide de savoir. Ces deux êtres vont vivre une belle mais tragique histoire d'amour platonique, s'épaulant l'un l'autre tout au long de leur vingt années de fréquentation. Ces deux êtres se cherchent, se retrouvent, se séparent, se déchirent. Ce sont deux aimants qui ne seront jamais amants malgré tout l'amour qu'ils se portent mutuellement… Viola , jeune femme téméraire se prend même pour Icare. Son rêve : voler comme les oiseaux, libres. Malgré toute son ingéniosité ce rêve se brisera comme le verre et les statuettes fragiles. Mimo, ignoré par son amie, sombrera et succombera à de nombreuses tentations, multipliant les soûleries, la jouissance sous toutes ses formes goûtant aux plaisirs de la chair. Il mènera une vie une vie dissolue et son art attestera de ces abus. Heureusement, dans son atelier,il possède de bons ouvriers et ces derniers sont sa fierté.

Au cours de son récit, jean-Baptiste ANDREA, nous glisse dans cette grande fresque, la montée du fascisme en Italie et de ses tentacules qui s'étendent sur toute l'Europe. le récit débute vers 1917, Mimo a treize ans. Nous traversons la seconde guerre mondiale. Mimo est un véritable artiste et ses statues sont très recherchées. Il sait mettre en valeur les personnages sculptés dans le marbre et tient compte des volumes, des perspectives et de l'implantation de son oeuvre. Il sera même très riche, rachetant, l'atelier de son oncle. « Veiller sur elle », est-ce sur Viola qu'il faut veiller, cette jeune fille aux multiples connaissances et qui partage son savoir avec son compagnon, Mimo ? Est-ce sur la statue, sa dernière oeuvre connue, son chef d'oeuvre, sa Piéta qu'il a fallu dissimuler au public et ensevelir dans un tombeau de pierre où les visites sont même interdites. Seuls quelques privilégiés ont pu admirer cette sculpture. Cette piéta représente la beauté parfaite : est-ce Viola qui se dissimule dans ce monument. Mimo rend un bel hommage à celle qu'il a aimé. Pourquoi, Mimo, a-t-il mis fin à ses commandes émanant même des autorités, tant religieuses qu'administratives. le gouvernement italien lui passera plusieurs commandes et il en exécutera un certain nombre, apparaissant ainsi comme un suppôt du fascisme.

Un récit haletant. Nous sommes suspendus au déroulement de ces longues années de vie de nos deux héros. Une narration poétique. Une intrigue bien ficelée et des personnages fort attachants. Jean-Baptiste nous ensorcelle avec ses rédactions. Chaque livre est une pépite. Quatrième ouvrage de cet auteur et je ne peux vous dire lequel de ses livres je préfère. « Ma reine, », « Des millions d'années et un jour », « Des Diables et des Saints ». Je recommande fortement la lecture de cette narration. Jean-Baptiste ANDREA nous raconte toujours de belles histoires tragiques. Ces personnages fictifs éprouvent de beaux sentiments, nobles. Dans ses récits il y a toujours beaucoup d'humilité, d'humanité, de fraternité et d'amour… Bonne journée et belles lectures.
( 06/02/2024).
Lien : https://lucette.dutour@orang..
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