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Cette Jeanne d'Arc n'est pas sans rappeler Antigone... Comme elle: un personnage qui s'accroche à des principes, à une humanité fragile et si facile à écraser... en refusant tout compromis, y compris lorsque sa vie est en jeu, ou lorsqu'en face un ennemi cynique s'applique à détruire ses valeurs. L'homme (ici la femme), confronté à l'humain haïssable, trouve sa force dans le refus de l'acceptation lorsqu'elle est compromission et trahison de soi-même.
L'Alouette est le procès de Jeanne d'Arc, mais le fond du texte n'est pas la religion: simplement la nature humaine, et la foi qu'elle a en elle-même.
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Un décor neutre, des bancs pour le tribunal, un tabouret pour Jeanne, un trône, des fagots. La scène est d'abord vide, puis les personnages entrent par petits groupes...
Anouilh adapte au théâtre le récit du procès de Jeanne d'Arc et crée en 1953 cette pièce avec Suzanne Flon dans le rôle de Jeanne.
Son écriture fine et intelligente fait de cette pièce une des oeuvres majeures du vingtième siècle.
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Attention, cette critique va spoiler, mais ne saurais être sans révéler l'histoire.
L'alouette est un de ces livres dont le titre résume tout le propos : Jeanne veut être cette alouette, libre et impétueuse, guidant les armées françaises... Mais voilà, l'alouette est prise, et on est en train de la juger.
C'est une pièce que j'ai eu à interpréter, et c'est fou à quel point ça nous forge un point de vue que de l'incarner. J'était donc l'évêque Cauchon, sympathique avec la petite Jeanne, qui blasphèmerait en méconnaissance de cause...
Cette pièce est la représentation drôle, élégante, fière même, de ces idées qui ont tout a fait leur place, quitte à se la fabriquer, mais que la société ne tolère pas. L'Alouette, c'est le triomphe du public attendri, c'est charles qui soutient Jeanne, c'est Jeanne qui renie son abjuration pour se faire brûler, qui refuse d'être autre chose que Jeanne d'arc. C'est à travers tous ces personnages caricaturaux que cette alouette s'envole, étant différente, étant Jeanne.
(A ceci s'ajoute la critique acerbe mais ô combien drôle de Anouilh, et un rythme dans la construction qui ne laisse pas le temps d'adopter un autre point de vue que celui de Jeanne, autant dire que je recommande fermement la lecture ou plutôt la vision de cette pièce)
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Cette merveilleuse pièce à 22 personnages, tragique mais drôle, retrace le procès, à Rouen, de Jeanne d'Arc (c1412-1431) suivant les minutes de son procès, et sa condamnation au bûcher par le tribunal ecclésiastique présidé par l'évêque de Beauvais, le lâche Pierre Cauchon, sur pression de Warwick, lieutenant du roi d'Angleterre en France occupée. Jeanne est accusée d'hérésie (notamment de s'habiller en homme, contrairement aux lois de l'Eglise), mais le véritable motif, derrière le prétexte religieux, est politique, c'est celui de Warwick: «Venir nous faire ça à Reims, chez nous ?... Fort heureusement, Dieu est avec le droit anglais... Dieu et notre droit... Alors, dépêchez-vous de lui faire raconter sa petite histoire, et brûlez-la, qu'on en parle plus... Dans dix ans, tout le monde aura oublié cette histoire».
S'inspirant du cinéma, Anouilh entrecoupe le déroulé du procès de retours en arrière, ce qui permet aussi de faire tomber le rideau glorieusement, sur le sacre de Charles VII plutôt que sur le bûcher. La pièce commence avec Warwick: «Nous sommes tous là ? Bon. Alors, le procès, tout de suite. Plus vite elle sera jugée et brûlée, mieux cela sera».
La voix qu'elle entend, le promoteur y voit l'oeuvre du Diable: Jeanne aurait dû lui répondre «Vade retro Satanas». Tantôt naïve, tantôt provocante, mais toujours avec bon sens, elle répond simplement aux questions, et ici qu'elle ne sait pas le latin. Elle déjoue habilement les autres pièges, comme quand l'inquisiteur lui demande si elle est en état de grâce («Si je n'y suis, Dieu veuille m'y mettre; si j'y suis, Dieu veuille m'y tenir») ou quand il lui demande si Ste Marguerite et Ste Catherine, dans sa vision, étaient nues? («Messire, croyez-vous que Notre-Seigneur n'ait pas trouvé les moyens de payer des robes à ses saintes?».
Même le père de Jeanne est contre elle: «Pourquoi te parlerait-il, St Michel? Pauvre idiote. Est-ce qu'il me parle, à moi qui suis ton père? S'il avait quelque chose à nous dire, il me semble que c'est à moi, qui suis le chef de famille, qu'il se serait adressé... C'est aller avec les soldats que tu veux comme la dernière des dernières... Sauver la France? Et qui gardera mes vaches pendant ce temps-là... Je vais te l'apprendre, moi, à sauver la France» (gifles et coups de pied).
Un autre retour en arrière amusant est celui où Charles VII, sans le sou, est harcelé par sa reine et par sa maitresse Agnès Sorel:
«- Mais Charles, c'est inadmissible. Tu ne peux pas me laisser paraitre à ce bal fagotée comme ça,... Ta maitresse avec un hennin de la saison dernière. Tu penses bien que ce serait scandaleux.
– Et ta reine, Charles, la reine de France. Qu'est-ce qu'on dirait?
– On dirait que le roi de France n'a pas un sou, ce qui est exact».
La maitresse du cardinal de Winchester sera au dernier cri. Il faut rendre les Anglaises jalouse avec un nouveau modèle: «Elles ne vont plus en dormir, mon chéri... La mode de Bourges et notre cuisine, c'est avec cela que nous avons encore quelque prestige à l'étranger».
Le partage des rôles entre la reine et la maitresse est bien défini par la reine mère à la reine:
«Faites-lui un dauphin, et pour le reste, déchargez-vous de la besogne. On ne peut pas tout faire. Et puis, ce n'est pas un métier d'honnêtes femmes, l'amour... Regardez comme Charles est plus viril depuis qu'il connait Agnès. N'est-ce pas, Charles, que vous êtes plus viril»?
Le jour où Jeanne doit être reçue pour la première fois par Charles VII, celui-ci, pour s'amuser, installe un page sur le trône et se fond incognito dans la foule, mais à la stupéfaction générale, la Pucelle va à Charles VII dans la foule, et s'incline devant celui qu'elle appellera dauphin tant qu'il n'aura pas été sacré à Reims. Contre toute attente, elle arrive à transfigurer le peureux et faible Charles VII qui lui confiera le commandement de l'armée. Elle devait avoir un sacré charisme sur lui et les soldats.
Après une série de victoires, et le sacre de Charles VII à Reims reconquise, Jeanne est capturée en 1430 par les Bourguignons, et vendue aux Anglais par Jean de Luxembourg pour 10.000 livres. Pendant le procès, le faible Charles VII qui lui doit tant, la laissera tomber: «Mets-toi à ma place, Jeanne... ça, c'est de la politique, c'est sain ! Tu comprends?» - «Oui, je comprends».
Cauchon demande à Jeanne de se soumettre à l'Eglise, qui représente Dieu. Elle se soumet, abjure, revient sur son abjuration en nouvelle Antigone, et on prépare le bûcher, mais comme expliqué plus haut, la pièce se termine par le sacre, au son des grandes orgues, le destin de la France rejetant à l'arrière-plan le martyre de Jeanne qui sera réhabilitée en 1456 dans un nouveau procès qui ne lui rendra pas la vie, ni l'honneur à Cauchon.
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Le procès de Jeanne d'Arc revu avec une note d'humanité.

Bien que ça fasse un bout de temps que je l'aie lu, il me laisse une bonne impression... Ce livre nous permet de sortir un peu de la version de nos livres d'histoire...
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Jeanne d'Arc, l'Alouette, capturée et vendue aux Anglais se trouve à Rouen, face à ses juges. Sur un ton tragi-comique, cette pièce de théâtre présente les scènes d'accusation de l'évêque Cauchon assez compréhensif, de l'Inquisiteur borné, du promoteur sévère, du comte de Warwick, se voulant juste et fair-play, et les flash back qui retracent toute l'épopée de la Pucelle. Tour à tour naïve et insolente, Jeanne, toujours pleine de bon sens, leur tient tête crânement. Pourtant, devant les assauts répétés de ses contradicteurs, elle consent à renier ses actes et ses certitudes passées pour échapper au bûcher. Mais au dernier moment, dans un élan d'héroïsme, elle revient sur son abjuration et décide de devenir pour toujours l'héroïne qu'au fond d'elle, elle souhaite être, rejetant un destin médiocre de condamnée à perpétuité ou d'icône oubliée. Scène oubliée, le sacre de Charles VII à Reims termine la pièce en apothéose sur une Jeanne d'Arc triomphante pour l'éternité.
Pour Anouilh, Jeanne d'Arc n'est pas morte brûlée sur le bûcher, elle est la femme éternelle plus que la sainte de l'Histoire de France. Elle est immortelle car elle repréente un concept : celui de la Liberté, de l'intelligence, du bon sens, de la sagesse du peuple, de l'indépendance face à la sottise bornée des puissants et des institutions établies dans leurs certitudes souvent creuses. Une pièce magnifique, pleine d'humour et de philosophie.
Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
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Cette pièce, comme probablement tout ce qu'a écrit Anouilh, est d'une redoutable modernité. Je l'avais lue il y a quelques années, et lorsque j'ai décidé de la chroniquer, il m'a semblé utile et logique de la relire. Et j'y trouve des réflexions qui m'avaient échappé alors mais qui sont confondantes d'actualité. Mais également d'une immense drôlerie – à la limite de la farce, si j'ose. Ainsi, au tout démarrage de la pièce, avant que le procès débute, Warwick est pressé de pouvoir brûler « sa » Pucelle. le décorum l'ennuie, devoir subir le retour sur l'ensemble de l'histoire lui semble superflu, et il l'explique en des termes qui conviendraient parfaitement aux plus récents tenants de la Realpolitik :

« La belle armure blanche, l'étendard, la tendre et dure vierge guerrière, c'est comme cela qu'on lui fera ses statues, plus tard, pour les nécessités d'une autre politique. Il n'est même pas exclu que nous lui en élevions une à Londres. J'ai l'air de plaisanter, Monseigneur, mais les intérêts profonds du Gouvernement de Sa Majesté peuvent être tels, dans quelques siècles… »

Mais l'abbé Cauchon ne lui laisse pas le choix. Il va devoir subir toute l'histoire, y compris l'ensemble des batailles dans lesquelles Jeanne a ridiculisé les anglais :

« Vous n'allez pas vous amuser à refaire toutes les batailles tout de même ? Orléans, Patay, Beaugency… ce serait extrêmement désagréable pour moi. »

Elles seront racontées, mais non rejouées, dit Cauchon, car « ils ne sont pas assez nombreux »…

Jeanne est alors invitée à raconter sa version de l'histoire, dans laquelle on retrouve son père, persuadé qu'elle ment sur ses « voix », parce qu'elle dissimule un amoureux ; Baudricourt, qu'elle convainc le premier de la suivre – au départ, il est surtout présenté comme un homme de pouvoir qui profite de sa position pour assouvir ses désirs avec de jolies jeunes filles. Jeanne lui retourne littéralement le cerveau.

Mais si cette pièce m'a autant marquée, c'est à cause de la discussion entre Jeanne et Charles. Celui-ci a peur de tout. Et Jeanne lui donne alors un remarquable conseil. Ne pas avoir peur, c'est être un imbécile – Jeanne donne à Charles l'exemple de M. de la Trémouille. Mais ce qui compte, c'est de ne pas montrer que l'on a peur. Et, sa cerise sur le gâteau, à Jeanne, c'est qu'elle fait en sorte d'avoir peur avant, ce qui lui permet de ne plus avoir peur pendant l'action.

À la fin du procès, Jeanne commence par céder aux pressions. Pour éviter le bûcher, elle se renie, mais revient finalement à sa version. Plutôt mourir que renoncer à ses valeurs !

Modernité, humour, intelligence et finesse. Voilà ce qu'il faut retenir de cette pièce, où l'on voit une innocente futée en remontrer à ceux qui incarnent un pouvoir brutal et insensible. Il serait évidemment absurde de vouloir faire des parallèles hasardeux, mais comment ne pas se dire que c'est finalement cela qui permet de garder l'espoir, dans notre société d'aujourd'hui ?
Lien : https://ogrimoire.wordpress...
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Une magnifique oeuvre littéraire!
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« L'Alouette » (1953) est la première des trois « pièces costumées » qu'écrivit Jean Anouilh, les deux autres étant « Beckett ou l'honneur de Dieu » (1959) et « La Foire d'empoigne » (1962)
« L'Alouette » raconte, stylisée, l'aventure de Jeanne d'Arc.
Nous sommes en 1431, au procès de la Pucelle. Jeanne fait face à ses accusateurs : l'évêque Cauchon, l'Inquisiteur, le Promoteur, le Comte de Warwick. Seulement, Jeanne, comme Antigone, n'est pas une accusée ordinaire, les pressions de l'accusation n'ont aucun effet sur elle. Comme Antigone, c'est une petite fille butée, mais Jeanne est plus naïve, plus naturelle, moins « raisonneuse » qu'Antigone. Mais pas moins futée. Elle ne tombe pas dans les pièges des accusateurs, et sait à l'occasion être agressive ou provocante. A l'occasion, elle peut-même remettre ses détracteurs à leur place. Elle peut même, elle, la petite fille, remettre en ordre de marche un roi de France (Charles VII) complètement dépassé.
Ce qui caractérise le théâtre d'Anouilh, c'est sa diversité : on part ici sur un thème assez voisin d'Antigone : un personnage s'entête dans son obstination, quitte à y laisser sa vie. Mais ce qui a donné lieu chez Antigone à une pièce noire, devient ici une pièce plus enlevée, plus fantaisiste en tous cas. « L'Alouette » n'est pas une tragédie. Ce n'est pas une comédie non plus, n'exagérons rien, mais les moments drôles abondent : la vraie/fausse innocence de Jeanne lui met dans la bouche des paroles souvent piquantes et d'autant plus drôles qu'en face d'elles ça ne rit pas du tout. Ce contraste entre le sérieux des juges et la naïveté de Jeanne est un des ressorts de la pièce.
Anouilh a le don de la parole juste, du ton qu'il faut. Il semble que les acteurs aient juste à dire leur texte pour que de lui-même il trouve la bonne hauteur le bon rythme, la bonne intonation, le langage en quelque sorte décrit le personnage, et c'est particulièrement vrai pour le personnage de Jeanne.
Pour être une pièce costumée, « L'Alouette » n'est pas pour autant une pièce historique : l'auteur préconise « un décor neutre, des bancs pour le tribunal, un tabouret pour Jeanne, un trône, des fagots » Pas mieux pour les costumes. le texte évoque beaucoup la vie de Jeanne mais peu l'Histoire de France, en fait, on est un peu dans la caricature (cf. l'escamotage de la fin).
Ce qui empêche « L'Alouette » d'être une simple figure de style (travers dans lequel tombera Anouilh dans ses dernières pièces), c'est sans doute cette puissance d'évocation à partir du seul langage, et la merveilleuse simplicité/complexité du rôle de Jeanne, à la fois femme et enfant, naïve et futée, qui ne peut que désarçonner ses adversaires.
A la création, Suzanne Flon a servi le texte avec un talent extraordinaire, appuyée par des artistes (excusez du peu) tels que Marcel André (Cauchon), Michel Etcheverry (l'Inquisiteur) et Michel Bouquet (Charles VII).
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Jeanne est une jeune bergère.
Un jour elle entend des voix qui lui demandent d'aller lever une armée, faire sacrer le roi à Reims et libérer le pays des anglais...
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