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EAN : 9782070363360
188 pages
Gallimard (15/02/1973)
4.04/5   122 notes
Résumé :
JEANNE - Messire saint Michel ! sainte Marguerite ! sainte Catherine ! vous avez beau être muets maintenant, je ne suis née que du jour où vous m'avez parlé. Je n'ai vécu que du jour où j'ai fait ce que vous m'avez dit de faire, à cheval, une épée dans la main ! C'est celle-là, ce n'est que celle-là, Jeanne ! Pas l'autre, qui va bouffir, blêmir et radoter dans son couvent - ou bien trouver son petit confort - délivrée... Pas l'autre qui va s'habituer à vivre...
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Critiques, Analyses et Avis (20) Voir plus Ajouter une critique
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Cette Jeanne d'Arc n'est pas sans rappeler Antigone... Comme elle: un personnage qui s'accroche à des principes, à une humanité fragile et si facile à écraser... en refusant tout compromis, y compris lorsque sa vie est en jeu, ou lorsqu'en face un ennemi cynique s'applique à détruire ses valeurs. L'homme (ici la femme), confronté à l'humain haïssable, trouve sa force dans le refus de l'acceptation lorsqu'elle est compromission et trahison de soi-même.
L'Alouette est le procès de Jeanne d'Arc, mais le fond du texte n'est pas la religion: simplement la nature humaine, et la foi qu'elle a en elle-même.
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Cette merveilleuse pièce à 22 personnages, tragique mais drôle, retrace le procès, à Rouen, de Jeanne d'Arc (c1412-1431) suivant les minutes de son procès, et sa condamnation au bûcher par le tribunal ecclésiastique présidé par l'évêque de Beauvais, le lâche Pierre Cauchon, sur pression de Warwick, lieutenant du roi d'Angleterre en France occupée. Jeanne est accusée d'hérésie (notamment de s'habiller en homme, contrairement aux lois de l'Eglise), mais le véritable motif, derrière le prétexte religieux, est politique, c'est celui de Warwick: «Venir nous faire ça à Reims, chez nous ?... Fort heureusement, Dieu est avec le droit anglais... Dieu et notre droit... Alors, dépêchez-vous de lui faire raconter sa petite histoire, et brûlez-la, qu'on en parle plus... Dans dix ans, tout le monde aura oublié cette histoire».
S'inspirant du cinéma, Anouilh entrecoupe le déroulé du procès de retours en arrière, ce qui permet aussi de faire tomber le rideau glorieusement, sur le sacre de Charles VII plutôt que sur le bûcher. La pièce commence avec Warwick: «Nous sommes tous là ? Bon. Alors, le procès, tout de suite. Plus vite elle sera jugée et brûlée, mieux cela sera».
La voix qu'elle entend, le promoteur y voit l'oeuvre du Diable: Jeanne aurait dû lui répondre «Vade retro Satanas». Tantôt naïve, tantôt provocante, mais toujours avec bon sens, elle répond simplement aux questions, et ici qu'elle ne sait pas le latin. Elle déjoue habilement les autres pièges, comme quand l'inquisiteur lui demande si elle est en état de grâce («Si je n'y suis, Dieu veuille m'y mettre; si j'y suis, Dieu veuille m'y tenir») ou quand il lui demande si Ste Marguerite et Ste Catherine, dans sa vision, étaient nues? («Messire, croyez-vous que Notre-Seigneur n'ait pas trouvé les moyens de payer des robes à ses saintes?».
Même le père de Jeanne est contre elle: «Pourquoi te parlerait-il, St Michel? Pauvre idiote. Est-ce qu'il me parle, à moi qui suis ton père? S'il avait quelque chose à nous dire, il me semble que c'est à moi, qui suis le chef de famille, qu'il se serait adressé... C'est aller avec les soldats que tu veux comme la dernière des dernières... Sauver la France? Et qui gardera mes vaches pendant ce temps-là... Je vais te l'apprendre, moi, à sauver la France» (gifles et coups de pied).
Un autre retour en arrière amusant est celui où Charles VII, sans le sou, est harcelé par sa reine et par sa maitresse Agnès Sorel:
«- Mais Charles, c'est inadmissible. Tu ne peux pas me laisser paraitre à ce bal fagotée comme ça,... Ta maitresse avec un hennin de la saison dernière. Tu penses bien que ce serait scandaleux.
– Et ta reine, Charles, la reine de France. Qu'est-ce qu'on dirait?
– On dirait que le roi de France n'a pas un sou, ce qui est exact».
La maitresse du cardinal de Winchester sera au dernier cri. Il faut rendre les Anglaises jalouse avec un nouveau modèle: «Elles ne vont plus en dormir, mon chéri... La mode de Bourges et notre cuisine, c'est avec cela que nous avons encore quelque prestige à l'étranger».
Le partage des rôles entre la reine et la maitresse est bien défini par la reine mère à la reine:
«Faites-lui un dauphin, et pour le reste, déchargez-vous de la besogne. On ne peut pas tout faire. Et puis, ce n'est pas un métier d'honnêtes femmes, l'amour... Regardez comme Charles est plus viril depuis qu'il connait Agnès. N'est-ce pas, Charles, que vous êtes plus viril»?
Le jour où Jeanne doit être reçue pour la première fois par Charles VII, celui-ci, pour s'amuser, installe un page sur le trône et se fond incognito dans la foule, mais à la stupéfaction générale, la Pucelle va à Charles VII dans la foule, et s'incline devant celui qu'elle appellera dauphin tant qu'il n'aura pas été sacré à Reims. Contre toute attente, elle arrive à transfigurer le peureux et faible Charles VII qui lui confiera le commandement de l'armée. Elle devait avoir un sacré charisme sur lui et les soldats.
Après une série de victoires, et le sacre de Charles VII à Reims reconquise, Jeanne est capturée en 1430 par les Bourguignons, et vendue aux Anglais par Jean de Luxembourg pour 10.000 livres. Pendant le procès, le faible Charles VII qui lui doit tant, la laissera tomber: «Mets-toi à ma place, Jeanne... ça, c'est de la politique, c'est sain ! Tu comprends?» - «Oui, je comprends».
Cauchon demande à Jeanne de se soumettre à l'Eglise, qui représente Dieu. Elle se soumet, abjure, revient sur son abjuration en nouvelle Antigone, et on prépare le bûcher, mais comme expliqué plus haut, la pièce se termine par le sacre, au son des grandes orgues, le destin de la France rejetant à l'arrière-plan le martyre de Jeanne qui sera réhabilitée en 1456 dans un nouveau procès qui ne lui rendra pas la vie, ni l'honneur à Cauchon.
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Attention, cette critique va spoiler, mais ne saurais être sans révéler l'histoire.
L'alouette est un de ces livres dont le titre résume tout le propos : Jeanne veut être cette alouette, libre et impétueuse, guidant les armées françaises... Mais voilà, l'alouette est prise, et on est en train de la juger.
C'est une pièce que j'ai eu à interpréter, et c'est fou à quel point ça nous forge un point de vue que de l'incarner. J'était donc l'évêque Cauchon, sympathique avec la petite Jeanne, qui blasphèmerait en méconnaissance de cause...
Cette pièce est la représentation drôle, élégante, fière même, de ces idées qui ont tout a fait leur place, quitte à se la fabriquer, mais que la société ne tolère pas. L'Alouette, c'est le triomphe du public attendri, c'est charles qui soutient Jeanne, c'est Jeanne qui renie son abjuration pour se faire brûler, qui refuse d'être autre chose que Jeanne d'arc. C'est à travers tous ces personnages caricaturaux que cette alouette s'envole, étant différente, étant Jeanne.
(A ceci s'ajoute la critique acerbe mais ô combien drôle de Anouilh, et un rythme dans la construction qui ne laisse pas le temps d'adopter un autre point de vue que celui de Jeanne, autant dire que je recommande fermement la lecture ou plutôt la vision de cette pièce)
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Un décor neutre, des bancs pour le tribunal, un tabouret pour Jeanne, un trône, des fagots. La scène est d'abord vide, puis les personnages entrent par petits groupes...
Anouilh adapte au théâtre le récit du procès de Jeanne d'Arc et crée en 1953 cette pièce avec Suzanne Flon dans le rôle de Jeanne.
Son écriture fine et intelligente fait de cette pièce une des oeuvres majeures du vingtième siècle.
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« L'Alouette » (1953) est la première des trois « pièces costumées » qu'écrivit Jean Anouilh, les deux autres étant « Beckett ou l'honneur de Dieu » (1959) et « La Foire d'empoigne » (1962)
« L'Alouette » raconte, stylisée, l'aventure de Jeanne d'Arc.
Nous sommes en 1431, au procès de la Pucelle. Jeanne fait face à ses accusateurs : l'évêque Cauchon, l'Inquisiteur, le Promoteur, le Comte de Warwick. Seulement, Jeanne, comme Antigone, n'est pas une accusée ordinaire, les pressions de l'accusation n'ont aucun effet sur elle. Comme Antigone, c'est une petite fille butée, mais Jeanne est plus naïve, plus naturelle, moins « raisonneuse » qu'Antigone. Mais pas moins futée. Elle ne tombe pas dans les pièges des accusateurs, et sait à l'occasion être agressive ou provocante. A l'occasion, elle peut-même remettre ses détracteurs à leur place. Elle peut même, elle, la petite fille, remettre en ordre de marche un roi de France (Charles VII) complètement dépassé.
Ce qui caractérise le théâtre d'Anouilh, c'est sa diversité : on part ici sur un thème assez voisin d'Antigone : un personnage s'entête dans son obstination, quitte à y laisser sa vie. Mais ce qui a donné lieu chez Antigone à une pièce noire, devient ici une pièce plus enlevée, plus fantaisiste en tous cas. « L'Alouette » n'est pas une tragédie. Ce n'est pas une comédie non plus, n'exagérons rien, mais les moments drôles abondent : la vraie/fausse innocence de Jeanne lui met dans la bouche des paroles souvent piquantes et d'autant plus drôles qu'en face d'elles ça ne rit pas du tout. Ce contraste entre le sérieux des juges et la naïveté de Jeanne est un des ressorts de la pièce.
Anouilh a le don de la parole juste, du ton qu'il faut. Il semble que les acteurs aient juste à dire leur texte pour que de lui-même il trouve la bonne hauteur le bon rythme, la bonne intonation, le langage en quelque sorte décrit le personnage, et c'est particulièrement vrai pour le personnage de Jeanne.
Pour être une pièce costumée, « L'Alouette » n'est pas pour autant une pièce historique : l'auteur préconise « un décor neutre, des bancs pour le tribunal, un tabouret pour Jeanne, un trône, des fagots » Pas mieux pour les costumes. le texte évoque beaucoup la vie de Jeanne mais peu l'Histoire de France, en fait, on est un peu dans la caricature (cf. l'escamotage de la fin).
Ce qui empêche « L'Alouette » d'être une simple figure de style (travers dans lequel tombera Anouilh dans ses dernières pièces), c'est sans doute cette puissance d'évocation à partir du seul langage, et la merveilleuse simplicité/complexité du rôle de Jeanne, à la fois femme et enfant, naïve et futée, qui ne peut que désarçonner ses adversaires.
A la création, Suzanne Flon a servi le texte avec un talent extraordinaire, appuyée par des artistes (excusez du peu) tels que Marcel André (Cauchon), Michel Etcheverry (l'Inquisiteur) et Michel Bouquet (Charles VII).
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critiques presse (1)
Lecturejeune
01 décembre 2007
Lecture jeune, n°124 - Jeanne, enfant, alors que le royaume de France est aux mains des Anglais, reçoit de l’archange saint Michel l'ordre de se présenter devant le Dauphin, de lui demander une armée et d’aller combattre les envahisseurs ! Tâche improbable et hasardeuse, qu'elle va pourtant mener à bien. Elle se fera sacrer à Reims, mais un jour, le vent tourne, saint Michel se tait, et Jeanne est faite prisonnière. Ses ennemis vont la juger, non parce qu'elle a fait la guerre, mais parce qu'elle prétend avoir été guidée par Dieu. Jeanne, face à son auditoire (évêque, inquisiteur et parents, etc.) va revivre les étapes de son épopée, opposant à ses ennemis sa foi, sa simplicité et son sens de la répartie. Tous n’ont qu’un objectif ; lui faire admettre qu’elle n’a pas agi au nom de Dieu mais par orgueil, pour lui éviter le bûcher. Les éditions Gallimard ont fait le choix de rééditer dans la collection « Scripto » l’une des pièces majeures d’Anouilh. L’occasion d’élargir l’accès à cette œuvre et qu’elle entre en résonance avec un public adolescent. Anouilh triomphe par l’ingéniosité de sa mise en scène. Il en résulte un texte vivant et drôle, plus politique que religieux, marqué par un certain pessimisme propre à l’univers de l’auteur où l’idéalisme et la pureté sont annihilés par la réalité et la compromission. Elise Hoël
Lire la critique sur le site : Lecturejeune
Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Commence, Jeanne, Dieu ne te demande pas autre chose, après il pourvoira à tout. Et si tu crois qu'il t'abandonne, s'il laisse un obstacle insurmontable sur ton chemin, c'est pour t'aider encore, c'est parce qu'il te fait confiance. C'est parce.qu'il pense: avec la petite Jeanne, je peux laisser cette montagne-je suis tellement occupé- elle s'écorchera les mains et les genoux jusqu'au sang,mais je la connais, elle passera. Chaque fois qu'il laisse une montagne sur ta route, il faut être très fière, Jeanne. C'est que Dieu se décharge sur toi...
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La propagande est une chose sommaire, Seigneur Evêque, apprenez-le. L'essentiel est de dire quelque chose de très gros et de le répéter souvent, c'est comme cela qu'on fait une vérité. Je vous dis là une idée neuve, mais je suis persuadé qu'elle fera son chemin.
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La propagande est une chose sommaire, Seigneur Evêque, apprenez-le. L'essentiel est de dire quelque chose de très gros et de le répéter souvent, c'est comme cela qu'on fait une vérité. Je vous dis là une idée neuve, mais je suis persuadé qu'elle fera son chemin.
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"Jeanne:
Il me semble seulement que les vrais miracles, ça ne doit pas être des tours de passe-passe ou de physique amusante. Les romanichels sur la place de mon village en faisaient aussi... Les vrais miracles, ceux qui font sourire Dieu de plaisir dans le Ciel, ce doit être ceux que les hommes font tout seul, avec le courage et l'intelligence qu'il leur a donnés."
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L'essentiel, quand on a un commandement, c'est de prendre une décision, quelle qu'elle soit. On s'effraie au début, puis, avec l'expérience, on s'aperçoit que cela revient à peu près au même... quoi qu'on décide.
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Vidéo de Jean Anouilh
Le voici, le deuxième épisode de notre série Dans Les Pages avec le grand romancier et journaliste Sorj Chalandon.
Merci à lui d'être venu nous parler de ses livres préférés, de G. Simenon, de F. Aubenas, De W.B. Yeats, d'Anouilh et de J. Vallès.
Tous les livres sont disponibles à la librairie et "l'enragé", le dernier roman de Sorj Chalandon est édité @editionsgrasset7893!
Bon épisode !
Arthur Scanu à la réalisation au montage et à la prise de son et Antoine Daviaud au mastering
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