AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,83

sur 1755 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
L'inconnu de la poste s'est avant tout quelques souvenirs au long des années.
Tout d'abord le souvenir de cet adolescent, Gérald Thomassin, qui reçoit le César du meilleur Espoir pour le film le petit criminel.
Puis le souvenir d'un flash infos indiquant que l'acteur Gérald Thomassin avait été arrêté pour le meurtre d'une postière à Montréal la Cluse dans l'Ain.
Encore un autre flash infos indiquant que Gérald Thomassin ne s'était pas présenté à une confrontation et que depuis il avait disparu.
Enfin, une ligne de journal pour dire qu'une ordonnance de non lieu à été prononcé en faveur de Gérald Thomassin.
Donc, une histoire cinématographique et judiciaire un peu connue mais avec beaucoup de flous.
Et puis le livre de Florence Aubenas pour mettre en place toutes les pièces du puzzle.
Et la magie opère.
Nous sommes chez Chabrol ou Simenon.
D'abord l'atmosphère du territoire. Cet endroit reculé de l'Ain, cette cluse entre Lyon et Genève, au pied des montagnes et des sombres forêts de sapins. Pays rural de fermes, d'élevage qui va se transformer à la fin du vingtième siècle en Plastic Vallée.
Et dans ce territoire un microcosme local.
D'abord Raymond Burgod, le potentat de Montréal la Cluse. Ancien Premier adjoint devenu secrétaire de mairie. Incontournable. Imbu de lui même. Possessif envers sa fille unique Catherine. imposer un mariage lui paraît naturel.
Catherine, donc sa fille, la quarantaine, mariée, deux enfants. Postière de son état.
Mariée mais en instance de divorce.
Toute sa vie est à Montréal la Cluse, dont toutes ses copines qui viennent tous les matins passer un moment dans l'arrière salle de l'agence postale. Catherine est une belle femme, toujours bien habillée, mais dépressive du fait de son divorce. Les copines ont tôt fait de l'emmener en boîte de nuit. Catherine a tôt fait de retrouver un amoureux.
Dans cette ville de Montréal la Cluse, il y a aussi, quelques jeunes désargentés, déjantés, accro à l'alcool et à la drogue . Montréal la Cluse est un point de deal entre Lyon et Genève. Les caïds sont à Lyon ou Genève, les petits dealers à Montréal la Cluse.
Et c'est dans ce microcosme que va venir s'installer l'acteur et comédien Gérald Thomassin. Enfant de la Ddass, lui aussi en proie à la dépression, l'alcool, la drogue et le suicide. Il va s'installer dans un studio en sous sol, en face de l'agence postale. Juste un soupirail pour entrevoir l'agence.
Et dans ce studio vont défiler les déjantés et accros de Montréal la Cluse.


Un matin, quelques jours avant Noel 2008, Catherine Burgod est retrouvé morte dans l'arrière salle de l'agence postale. Elle a reçu 28 coups de couteaux. le contenu du coffre fort s'est envolé mais pas le sac à main de Catherine Burgod.

Florence Aubenas à passé de long mois dans le Haut Bugey pour s'imprégner de l'atmosphère de cette région mais aussi pour rencontrer les protagonistes de cette affaire criminelle. Ce n'est pas un livre sur Gérald Thomassin. C'est un livre dans lequel il est l'un des protagonistes.
Le talent de Florence Aubenas est de nous restituer une chronique judiciaire avec beaucoup d'humanité quelque soit les personnages. Qu'il s'agisse des potentats locaux, des petites frappes ou encore des directeurs de casting ou réalisateurs de cinéma.
Un peu à la fois apparaît en filigrane, cette société a deux vitesses, Paris et la province, mais aussi les laissés pour compte de notre monde libéral.
Florence Aubenas ne prend pas partie. Elle donne à chacun son éclairage, ses vérités, ses blessures.
Elle donne des surnoms : Tintin, Rambouille, le Nain, le Nouveau, le Futur Ex...... Toujours avec humanité.
Comme dans Simenon ou Chabrol, elle ausculte la société et décrit ses travers. C'est souvent noir, caustique.
A chacun de faire son avis .
L'âme humaine est complexe.

Commenter  J’apprécie          200
Le 19 décembre 2008, dans un petit village du Jura, Catherine Burgot, employée au bureau de poste local, est retrouvée assassinée. Personne n'a rien vu et le peu d'indices ne permettent pas d'identifier le tueur. Les soupçons se portent néanmoins rapidement sur Gérald Thomassin, 33 ans, qui vivait depuis peu dans le village, ancien acteur de petits rôles, vivant du RSA, entouré de deux copains un peu marginaux comme lui, Tintin et Rambouille. Thomassin est incarcéré puis remis en liberté deux ans après mais les journaux ont trouvé en lui le coupable idéal. Un autre individu est arrêté des années après, Nain, accusé de complicité de meurtre, puis en 2016, c'est un ambulancier dont les empreintes correspondent. Fin août 2019, alors qu'une dernière confrontation va avoir lieu entre tous les protagonistes à Lyon, Thomassin disparaît mystérieusement, il ne sera jamais retrouvé.

J'avais déjà lu plusieurs romans de Florence Aubenas que j'avais appréciés pour leur style simple et clair et les enquêtes qu'elle élabore autour d'un fait divers. J'ai apprécié ce dernier roman pour les mêmes raisons, même si malheureusement le fait que l'enquête ne permette pas d'établir la culpabilité ou l'absence de culpabilité du personnage principal m'ait laissée sur ma faim.
On est ici en province, dans un petit village du Jura où tout le monde se connaît, où la vie est calme jusqu'au crime, où on se sent en sécurité et on n'imaginerait pas un meurtre encore plus pour une somme d'argent dérisoire. Cela bouscule les idées préconçues du lecteur qui se rend compte que même à la campagne, on n'est en sécurité nulle part.
Les personnages sont bien représentés, on les imagine facilement, on dirait un feuilleton télévisé. Les 3 personnages masculins font un peu pitié au lecteur, ce sont des quasi marginaux vivant d'oisiveté et d'alcool bon marché mais peuvent-ils basculer dans la plus grande violence pour autant ? On ne le saura jamais puisque le principal suspect disparaît, emportant avec lui ses secrets.
Ce roman se lit vite si on se laisse embarquer par l'intrigue, il est facilement accessible.
Commenter  J’apprécie          180
C'est le hasard qui m'a mis entre les mains ce livre alors que s'est ouvert il y a quelques jours au Tribunal judiciaire de Bourg en Bresse le procès du meurtrier présumé de Catherine BURGOD, postière à Montréal- la-Cluse , petit village de l'Ain. Il aura fallu 13 ans d'enquête et d'instruction, un premier suspect mis hors de cause mais disparu depuis sans laisser de traces, plusieurs morts parmi les « satellites » de cette histoire et même la mort de l'avocat des parties civiles ( d'une crise cardiaque) avant que ne s'ouvre cet épisode du procès tant attendu par la famille de la victime mais dont on se demande s'il fera surgir une vérité satisfaisante, ou si ce crime d'une grande sauvagerie restera pour toujours celui d'un inconnu.
Florence AUBENAS dont on connait le talent fait revivre cette histoire avec ses mots de reporter. Un thriller grandeur nature, avec son lot de délateurs, de rumeurs , de rancoeurs. La victime est une jolie jeune femme de 41 ans, tout juste séparée de son mari, enceinte de 5 mois de son nouveau compagnon, et qui a ses fragilités. Elle est du pays, son père est une figure locale, c'est un choc considérable lorsqu'elle est découverte dans la petite cuisine de la poste, baignant dans son sang, « pantin désarticulé » en présence de son petit chien, par les deux premiers clients du matin. le mobile apparent du meurtre semble le vol, une somme d'environ 2.000 euros a disparue. Vrai ou faux prétexte ? Rien n'explique la violence. Des années de piétinements et de soupçons. Soupçons qui se portent sur les marginaux du village et en particulier sur Gérald Thomassin, acteur à la dérive qui a eu son heure de gloire dans les années 1990 mais n'arrive pas à sortir de ses addictions à l'alcool et à la drogue. Incarcéré sur un simple faisceau de présomptions et parce qu'il tend les bâtons pour se faire battre, Gérald THOMASSIN fera trois années de prison avant d'être libéré parce que la Chambre d'accusation de la Cour D'appel de LYON annule son renvoi aux assises, mettant en avant le manque de preuves matérielles, et réclamant la reprise de l'enquête avec de nouveaux juges. Au bout de 10 ans, la pugnacité et la chance se réunissent enfin puisque les traces ADN trouvées sur la scène de crime peuvent être enfin attribuées. Ce sont celles d'un jeune homme , âgé de 19 ans à l'époque, vivant dans le secteur, d'origine guinéenne, devenu ambulancier depuis, et présenté comme sans histoire, serviable et charmant. Mamadou DIALLO ne peut contester sa présence à la poste ce matin-là, il nie le crime, prétend être arrivé pour constater la mort de la postière, avoir été effrayé par cette vision d'horreur, avoir craint d'être accusé par racisme, mais s'être tout de même emparé de quelques billets qui trainaient là et avoir conservé le silence pendant ces 10 années. C'est lui seul qui s'explique en ce moment devant la Cour D'assises de Bourg en Bresse.
Gérald THOMASSIN a bénéficié d'un non-lieu en 2020. Dans tous les cas, il n'aurait pas pu comparaître puisque ‘il a disparu sans explications en Août 2019, alors qu'il était attendu à LYON pour un ultime acte d'instruction : une confrontation entre lui et Mamadou DIALLO ainsi qu'un 3 ème larron surnommé Nain, soupçonné un temps d'être un de ses complices.
En refermant le livre, il est bien difficile d'imaginer que la lumière puisse se faire sur cette histoire.
j'ai lu cette histoire d'une traite, quasiment en apnée, le faits divers restera toujours une matière romanesque incomparable!

Commenter  J’apprécie          181
En décembre 2008, Catherine Burgot, postière à Montréal-la-Cluse, est assassinée de 28 coups de couteau. Elle avait quarante ans et était enceinte de cinq mois.
Juste en face la poste vivait dans une sorte de sous-sol appelé "la grotte" Gerald Thomassin, un marginal qui avait connu son heure de gloire en 1991 en obtenant le césar du meilleur espoir masculin pour le film "le petit criminel".
Le comportement étrange de Thomassin, - particulièrement lors de la a discussion avec deux femmes dans le cimetière à côté de la tombe de Catherine Burgot - avait fait de lui un coupable idéal.

Dans "l'inconnu de la poste" Florence Aubenas nous présente l'énorme travail qu'elle a réalisé pour reconstituer l'histoire de ce drame. Avec empathie elle parle de la victime, (sa jeunesse, ses amours, ses angoisses,) de Thomassin (sa jeunesse chaotique, son succès, l'alcool, la drogue..), mais aussi des nombreux autres personnages.

Récit passionnant , immersion dans l'ambiance d'un petit village touché par un horrible drame.

PS : le 19 octobre 2023 Mamadou Dialo (personnage évoqué dans le la quatrième partie du livre, "le choc") a été condamné en appel à seize années de prison pour le meurtre de Catherine Burgot. Gérald Thomassin , disparu en 2019, a bénéficié d'un non lieu.
Commenter  J’apprécie          151
Florence Aubenas, journaliste et grand reporter au Monde, s'est fait aussi une spécialité du livre documentaire. Après « La méprise : l'affaire d'Outreau » en 2005 où elle nous interpellait sur l'erreur judiciaire d'une manière générale, et «Le quai de Ouistream » en 2010 où elle partage son immersion dans le milieu des femmes vivant d'emplois précaires, elle publie en 2021 « L'inconnu de la poste ». 7 de travail, d'enquête, de rencontres, d'entretiens pour étudier un fait divers survenu dans le Bugey en 2008.

C'est par hasard que Florence Aubenas découvre cette histoire. Et parce qu'elle tombe sur l'information dans une période calme, elle décide de partir pour ce village de Montréal-la-Cluse. Ce qui devait être un grand article va se transformer en livre.

Le fait divers c'est un crime qui va traumatiser un village et une région. Catherine Burgod, employée de la poste, fille d'un ancien maire du village, est tuée de 28 coups de couteau dans l'arrière-salle de la petite agence qu'elle tenait seule depuis des années. Personnalité solaire, appréciée de tous, son meurtre est un choc. L'hypothèse du crime passionnel perpétué par son ex-mari est vite écartée. Les soupçons se portent alors sur un marginal : ce Thomassin qui vit dans sa grotte (appartement sombre) en face du bureau de poste.

Je ne connaissais pas non plus ce fait divers mais j'ai rapidement été happée par le récit de Florence Aubenas, par son enquête qui se lit comme un roman. L'auteure semble elle aussi être tombée sous le charme de Thomassin. Elle dresse le portrait d'un gamin fragile, qui toute sa vie cherche des preuves d'amour et d'affection que le cinéma et la reconnaissance de la part de la profession (César de l'espoir masculin) n'a jamais réussi à sortir d'une vie de galère. C'est comme s'il avait peur de trahir ses copains de la Ddass et de banlieue en acceptant ce que le cinéma aurait pu faire de lui. Alors il retombe inlassablement dans l'alcool et la drogue, fuyant à chaque fois plus loin un monde dont il ne cesse de parler et qui ne l'a pas oublié. Aucun de ceux qui l'ont côtoyé ne peut croire en sa culpabilité, sauf peut-être certains de ces copains de galère.

La force de ce récit est également dans la qualité de l'écriture. La description de la région, de la ville, de son histoire et de son activité, est fournie, précise. On visualise complètement les lieux. Les personnalités sont également très fouillées, les parcours détaillés avec beaucoup de sensibilité, qu'il s'agisse de la victime Catherine Burgod, solaire et fragile, de son père personnage respecté et brisé qui veut connaître la vérité mais ne veut pas se tromper de coupable, des différents protagonistes plus ou moins importants. Elle nous plonge également au sein d'une communauté qui vit en marge de la société, chacun pour ses raisons propres, des gens qui se craignent et se protègent les uns les autres. On sent également la perception que les habitants ont ces marginaux. Et il n'est pas surprenant que Thomassin, l'étranger au village, soit l'objet de tous les soupçons. Il faut dire que son comportement a de quoi susciter le doute malgré l'absence de preuves matérielles.

« L'inconnu de la poste » c'est aussi le portrait d'une région : le haut-Bugey. Au sein de la vallée du plastique le petit village de Montréal-la-Cluse c'est l'image du mélange de nature et d'industrie. Il reste quelques agriculteurs mais depuis l'après-guerre la plasturgie fait travailler beaucoup de familles. On lit à travers ce récit les bouleversements d'une région qui s'est transformée au fil du temps et qui s'étiole. Proche d'Oyonnax, Montréal-la-Cluse vivait tranquillement loin du monde. Ici tout le monde se connaît sans pour autant se surveiller. Florence Aubenas décrit une certaine tranquillité mais aussi un grand ennui. Dans cet univers le crime fait l'effet d'un tremblement de terre. Dix ans plus tard l'affaire n'est toujours pas résolue, le principal suspect a disparu, mais la douleur est toujours là.
Commenter  J’apprécie          152
N'étant pas un grand cinéphile, je n'avais jamais entendu parler de Gérald Thomassin (bien que le film "le petit criminel" me dise vaguement quelque chose). Quant au fait divers dont il est question ici (l'assassinat en 2008 d'une employée du bureau de poste de Montréal-la-Cluse), et dans lequel Thomassin était impliqué, celui-ci m'était totalement inconnu...

C'est donc avec une certaine curiosité que j'ai débuté "L'inconnu de la poste"... et je dois avouer avoir été vraiment séduit par ce livre. L'enquête menée par Florence Aubenas est approfondie, méticuleuse, passionnante. le récit est empreint de réalisme, mais aussi d'humanité. le lecteur est happé par ces trajectoires tragiques, aussi bien celle de la victime que celle de l'espoir déchu du cinéma français. Happé aussi par toutes ces questions sans réponse...

Ce qui fait la différence avec cet ouvrage, qui lui donne une dimension supplémentaire, c'est que nous ne sommes pas dans une fiction, mais bien dans la "vraie vie". Une histoire presque incroyable, avec son crime sordide et son personnage central au destin hallucinant... jusqu'à sa disparition inexpliquée en 2019. Même le cinéma ne pouvait imaginer un tel scénario, je crois ...
Commenter  J’apprécie          150
Je ne connaissais pas Gérald Thomassin, ni le tragique meurtre de Catherine Burgod, postière, alors enceinte. Ce livre a été encensé par la critique et du coup j'ai voulu le découvrir. Voici ce que j'en retiens.

Florence Aubenas a un talent incroyable, plus que la plume de journaliste, on sent la conteuse d'histoires qui a su s'immerger auprès de ce microcosme de Montréal-la-Cluse pour les retranscrire avec une telle fidélité. On est en empathie avec tous les personnages, leur chemin de vie, leur motivation, leurs dérives.

Un crime atroce a été commis. La famille de la victime est anéantie. Gérald Thomassin, après une vie de souffrance entre la DASS et la dépendance, est accusé, à tort, puis disparait sans laisser de traces. Aucun coupable n'est désigné, plus de 14 ans après les faits.

Je ressors de ce livre avec une profonde tristesse pour tous les protagonistes. Voués à l'échec chacun à leur manière, malgré leurs multiples tentatives de changer le cours de leurs vies. Comme si les cartes avaient été distribuées à la naissance. le bonheur est fugace dans ce livre.
Et personne n'en ressort vainqueur.

Cette enquête se lit comme un polar de qualité mais aussi comme une étude détaillée de la condition humaine. Après ma lecture longue, une seule question : comment faire pour que cela ne se reproduise pas ?

Commenter  J’apprécie          140
L'enquête sociale (plus que policière) de Florence Aubenas sur le meurtre sanglant d'une postière dans un petit village de l'est de la France. Pendant longtemps, le soupçon s'est porté sur Gérald Thomassin, acteur français marginal à la dérive.

La journaliste se penche sur le passé douloureux de l'acteur, sa vie en marge de la société, ses nombreuses addictions et leurs conséquences, ainsi que sur les indices qui le désignent comme le coupable idéal. Mais au-delà du crime, Aubenas propose le portrait social des habitants de Montréal-la-Cluse, petite ville de l'Ain.

Etant plus intéressée par l'aspect judiciaire que social de l'affaire, certains passages m'ont paru longs, s'éternisant sur le décor plus que sur l'intrigue.

Le portrait de Thomassin est aussi fascinant que bouleversant. La journaliste retranscrit sa complexité, ses blessures et permet de comprendre ses égarements. On sent son empathie pour cet homme brisé et il est impossible de ne pas en ressentir soi-même.

Un livre étonnant qui se lit comme un roman.
Commenter  J’apprécie          140
Une fois encore, Florence Aubenas, grand reporter au journal le Monde, nous éblouit par son immense talent « d'écrivaine-enquêtrice ». Spécialiste de récits particulièrement bien documentés, sur des affaires « hors norme », elle nous relate l'histoire glaçante de Gérald Thomassin, grand « accidenté de la vie » à la carrière brisée. À l'enfance dramatiquement cabossée … Dont le coup de pouce inespéré de Jacques Doillon aurait pu le propulser au sommet de la gloire cinématographique … Dont le talent naturel d'acteur aurait dû lui ouvrir toutes les portes (si les démons de son passé catastrophique ne lui avaient malheureusement coupé les ailes …) Si les addictions à l'alcool et à la drogue lui avaient laissé la possibilité de faire les bons choix … Maudit, jusqu'à se retrouver accusé d'un meurtre épouvantable (probablement parce que présent au mauvais endroit, au mauvais moment …) Accusé également pour délit de « sale gueule », lui qui avait pourtant un visage encore enfantin (bien que marqué !) à quarante-six ans …

Après un cauchemar de dix ans qui semble enfin arrivé à son épilogue (non lieu), il s'évapore à Nantes, alors qu'il se rendait à Lyon pour y témoigner une dernière fois, en aout 2019. Pour ne jamais ré-apparaître … C'est fort, c'est touchant, c'est terriblement mystérieux et troublant ! Même si, à 99%, Gérald Thomassin n'est certainement plus de ce monde (assassinat ? Suicide ? Accident ? Overdose ?) – il restera toujours un doute – tant que son corps n'aura pas été retrouvé … Une recherche journalistique très bien menée, qui ne laissera personne insensible, devant cette (courte ???) existence aussi malchanceuse que douloureuse …
Commenter  J’apprécie          140
Un fait divers meurtrier dont on a beaucoup parlé parcequ'un des principaux suspects avait une petite réputation dans le milieu cinématographique, récipiendaire d'un César du meilleur espoir masculin.

Un fait divers relaté dans un style 'journalisme d'investigation' par une auteure qui à fait la une de notre information quotidienne il y a quelques années pour avoir été prise en otage en Irak pendant 5 mois.

Un fait divers que l'on déroule comme on respire, sans y réfléchir, instinctivement, comme un besoin vital tant on veut tout en connaître dès que l'on s'y est intéressé, mais emprunt de romanesque cependant, les protagonistes nous étant présentés comme le seraient des personnages de fiction que l'auteur aurait ancrés dans une réalité argumentée afin de nous transporter autant dans un roman que dans une étude sociologique.

Il y a:
Le compte à rebours de la vie de la belle postière qu'elle va perdre sauvagement dans sa petite agence postale qui sert aussi de cadre à une espèce de club féminin ou viennent s'épancher les habituées,
Son mari, 'le futur-ex', qu'elle va quitter juste avant le meurtre et qui sera forcément le suspect numéro 1 ideal, dans un premier temps,
Son taciturne nouveau compagnon, 'le nouveau', tellement différent des hommes auxquels elle aurait pu prétendre,
Son père, une sommité locale incontournable et reconnue voire crainte,
Et tous ces petites gens installés voire échoués dans cette bourgade montagnarde (située sur les bords du lac de Nantua, réputée pour son industrie dans le domaine du plastique) parceque c'est là qu'il y a du travail.

Il y a surtout Gérald Thomassin, 'l'acteur', lauréat d'un César donc pour son rôle titre du 'petit criminel' dans le film de Jacques Doillon, Thomassin découvert lors du casting 'vérité' organisé par le réalisateur soucieux de réalisme et du réalisme il y en a dans la vie de ce jeune garçon d'alors déjà cabossé par une vie chaotique !

Est-ce une chance ou une tragédie que d'avoir été choisi pour ce rôle ?
Est-ce dans la lumière (artificielle) qu'il entre ou dans un sombre avenir improbable ?
Saura-t-il intégrer ce milieu particulier, ce miroir aux alouettes, lui qui jusqu'à présent cumulait foyers et 'familles d'accueil' ?

Ce fait divers qui nous est restitué, ce sont ces destins enchevêtrés qui vont nous être contés, destins qui s'embrouillent quand l'ennui l'emporte sur les espoirs déçus, quand la débrouille devient le mode de vie de l'espoir déchu, quand la vie vous emporte et vous broie dans un parcours impitoyable,
un tourbillon,
un toboggan,
une spirale.

Bon moment de lecture pour ma part que cet 'inconnu de la Poste' de Florence Aubenas ou le destin hors normes de Gérald Thomassin prend finalement le dessus sur le fait divers (dont la fin n'est toujours pas ecrite), non pas à la façon d'une biographie de célébrité, mais plutôt comme ces documents d'Arte ou de la 5 qui s'intéressent à ces gosses de la Dass, avec pudeur et sans complaisance, avec une redoutable descente sur le terrain pour bien montrer que le travail d'investigation a été réalisé avec sérieux et rigueur et que OUI, cela existe et que c'est très proche de chez nous.

Il y a du traffic, de la violence, de l'alcool, de la drogue, du sang et des larmes mais aussi de l'amour et de l'amitié même si leur expression n'est pas celle attendue.

Il y a surtout ici, un jeune homme broyé, pas armé pour affronter un destin impitoyable, une espèce d'animal sauvage tétanisé dans de trop puissants projecteurs, pas forcément ceux du cinéma.
Commenter  J’apprécie          140




Lecteurs (3235) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

seul
profond
terrible
intense

20 questions
2901 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

{* *}